Ch. civile A
ARRET No
du 28 MARS 2012
R. G : 10/ 00520 R-JG
Décision déférée à la Cour : jugement du 10 juin 2010 Tribunal de Grande Instance de BASTIA R. G : 08/ 1163
CONSORTS X...
C/
CONSORTS A... Y...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT HUIT MARS DEUX MILLE DOUZE
APPELANTS :
Monsieur Jean Claude X... né le 15 Novembre 1951 à BASTIA (20200)... 20600 BASTIA
assisté de la SCP RIBAUT BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Gisèle FILIPPI-TAFANELLI, avocat au barreau de BASTIA
Madame Maryse X... née le 10 Juillet 1948 à BASTIA (20200)... 20600 BASTIA
assistée de la SCP RIBAUT BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Gisèle FILIPPI-TAFANELLI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMES :
Madame Monique A... veuve X...... 20600 BASTIA
assistée de Me Marie odile SOMMELLA, avocat au barreau de BASTIA, et de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2010/ 2241 du 29/ 07/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)
Monsieur Alexandre Y...... 20600 BASTIA
assigné en intervention forcée
défaillant
Madame Liliane Y...... 20600 BASTIA
assignée en intervention forcée
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 30 janvier 2012, devant Madame Julie GAY, Président de chambre, et Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller, l'un de ces magistrats ayant été chargé du rapport, sans opposition des avocats.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Julie GAY, Président de chambre Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller Madame Marie-Noëlle ABBA, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 28 mars 2012
ARRET :
Réputé contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Julie GAY, Président de chambre, et par Madame Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* * Par jugement du 10 juin 2010, le Tribunal de grande instance de BASTIA statuant sur la demande en démolition de la terrasse empiétant sur leurs fonds, formée par Monsieur et Madame Jean-Claude X... à l'encontre de Madame A... veuve René X..., après avoir commis en qualité d'expert Monsieur G...et réalisé un transport sur les lieux, a :
- dit n'y avoir lieu à ordonner la démolition intégrale de la terrasse litigieuse,
- ordonné la suppression de la saillie de soubassement de ladite terrasse (angle rentrant ouest) qui empiète de 16 centimètres de son point le plus avancé sur la propriété des époux X... Jean-Claude et Maryse, au besoin en cassant tout ou partie de l'ouvrage constitué du soubassement, de la balustrade et de l'auvent avant une reprise de l'ensemble respectant la ligne divisoire,
- dit que Madame A... veuve X... devra faire procéder à ces travaux dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement,
- débouté les parties de toutes les autres demandes,
- condamné Madame A... veuve X... aux dépens.
Monsieur et Madame X... ont relevé appel de ce jugement le 2 juillet 2010.
En leurs écritures déposées le 12 octobre 2010, auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus complet de leurs moyens et conclusions, Monsieur et Madame X... exposent que la terrasse litigieuse édifiée sans permis constitue un inconvénient considérable pour eux puisqu'elle a été construite non en façade aveugle sans ouverture mais en vue plongeante sur leurs fonds, alors qu'ils sont confrontés à la vente de sa maison par Madame A... et donc à une nouvelle situation tenant au fait que des personnes qu'ils ne connaissent pas voient tout ce qui se passe chez eux.
Ils ajoutent qu'ils subissent un autre inconvénient les jours de pluie puisque l'eau se déverse sur leur propriété, le toit érigé au dessous de la terrasse empiétant également sur leur propriété.
Ils concluent en conséquence à l'infirmation du jugement du Tribunal de grande instance de BASTIA et demandent à la cour d'ordonner la démolition intégrale de la terrasse qui empiète sur leurpropriété sous astreinte de 80 euros par jour de retard.
Ils demandent qu'il soit ordonné à Madame A... de produire le permis de construire de la terrasse et sollicitent la condamnation de l'intimée à leur payer une somme de 3. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
En ses conclusions déposées le 3 février 2011 auxquelles il sera référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, Madame A... veuve X... fait valoir que lorsque son mari René X... a construit sa maison à usage d'habitation en février 1980 puis vendu une partie de sa propriété sise à BASTIA au lieu dit ...à son frère Jean-Claude le 12 février 1988, il existait déjà implantée en contre-haut un surplus bétonné (à l'angle de la terrasse existante) ainsi qu'une terrasse fermée par une rampe qui a été modifiée en 1996 par la pose d'une balustrade.
Elle précise que ces travaux exécutés sur une construction existante étaient dispensés selon les règles de l'urbanisme de toutes formalités.
Elle conclut en conséquence au déboutement des appelants de leur appel et à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement déféré.
Elle demande à la cour à titre subsidiaire de dire et juger que l'action en démolition de la partie du mur de la terrasse n'a réellement été intentée par les époux Jean-Claude X... qu'en mai 2008 dans une instance devant le Tribunal de grande instance et donc plus de 10 ans après les faits et qu'elle est en droit de se prévaloir pour la partie du mur de la terrasse aménagée de la prescription abrégée acquisitive conformément à l'article 2265 ancien et aux articles 2261 et 2272 du code civil modifié par la loi du 17 juin 2008.
Elle sollicite enfin la condamnation des appelants à lui payer une somme de 3. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens distraits au profit de Maître ALBERTINI.
Madame A... veuve X... qui a procédé à la vente de sa propriété aux consorts Y...Alexandre et Liliane a assigné ces derniers en intervention forcée par acte du 28 avril 2011.
Les consorts Y...assignés à personne n'ont pas constitué avoué.
Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du magistrat chargé de la mise en état le 12 mai 2011.
La demande de nouvelle expertise formée par les appelants a été rejetée par ordonnance de ce même magistrat du 5 août 2011.
La procédure a été clôturée le 10 novembre 2011.
Les époux Y...intervenants forcés n'ayant pas constitué avoué, il sera statué par arrêt réputé contradictoire.
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* *
SUR CE :
Attendu que René X... propriétaire au lieu dit ...d'un terrain cadastré BN no325 pour une contenance de 7 ares 35 centiares a fait réhabiliter en 1980 après avoir déposé un permis de construire la maison qui y était édifiée ;
Que des attestations de Roger H...et de François I...produites par Madame veuve René X..., il ressort que cette maison, baptisée ..., possédait dès l'année 1980 en son entrée principale une terrasse fermée par une rampe métallique blanche ;
Que selon les photographies versées aux débats confirmant ces attestations, cette terrasse a été bâtie sur un surplomb bétonné ;
Qu'ainsi, si elle a été réaménagée en 1996 et dotée alors d'une balustrade plus importante, elle existait lors de l'acquisition par les appelants d'une partie de la propriété de René X... en 1988 ;
Que dès lors ces derniers qui ont acquis ce bien " dans son état actuel " ne peuvent se plaindre de la servitude de vue découlant du surplomb existant lors de cet achat résultant de la situation des lieux ;
Qu'ils ne sont dès lors nullement fondés ainsi que l'a relevé à juste raison le premier juge à invoquer tardivement la création d'une vue plongeante sur leur propriété alors que celle-ci préexistait à leur acquisition et qu'il n'est pas démontré qu'elle ait été aggravée par le réaménagement de la balustrade ;
Que le jugement déféré qui a rejeté la demande de démolition de l'intégralité de la terrasse ne peut dès lors qu'être confirmé ;
Qu'en revanche, il est constant que le mur de soubassement supportant la balustrade empiète depuis le réaménagement de la terrasse litigieuse de 16 centimètres sur le fonds des appelants ;
Attendu que la prescription trentenaire n'étant pas acquise et l'intimée n'étant pas fondée à se prévaloir d'une prescription abrégée alors qu'elle ne dispose sur la terrasse d'aucun juste titre quant à l'empiétement litigieux, il a lieu en application de l'article 545 du code civil d'en ordonner la suppression par la démolition de l'ouvrage dépassant des limites de la propriété de Madame A...- X..., actuellement cédée aux consorts Y...et le rétablissement de la terrasse dans ces mêmes limites ;
Attendu que certes, ainsi que l'a relevé Monsieur G...désigné en qualité d'expert, le soubassement est surmonté d'un garde-corps en balustres qui borde la terrasse d'accès depuis l'entrée de la villa à l'escalier extérieur desservant le jardin et un poteau de section circulaire qui supporte la toiture de l'auvent protégeant la galerie d'entrée de la villa prend appui sur ce soubassement ;
Attendu que si la démolition de la saillie de soubassement va entraîner la démolition du garde-corps et si le poteau de support de l'auvent va être fragilisé puisque plus du tiers de sa section va être entamée, le premier juge a toutefois observé à juste titre qu'aucun obstacle n'existe à cette remise en état ;
Que d'ailleurs Madame A... qui conclut à la confirmation du jugement déféré produit à cet effet le devis d'un artisan qu'elle a contacté ;
Que le jugement entrepris sera dès lors confirmé d'autant que les appelants ne démontrent pas plus en appel qu'ils ne l'ont fait devant les premiers juges en quoi ils subissent une aggravation de la servitude des eaux en provenance du fonds voisin alors que le toit de l'auvent érigé au dessous de la terrasse n'est pas orienté en direction de leur propriété ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu d'assortir la suppression ordonnée d'une astreinte et la demande formée de ce chef par les appelants sera rejetée ;
Attendu que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que les entiers dépens seront supportés par Madame A... veuve X... ;
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PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Laisse les entiers dépens à la charge de Madame Monique A... veuve X....
LE GREFFIER LE PRESIDENT