Ch. civile B
ARRET No
du 06 JUIN 2012
R. G : 11/ 00184 C-PL
Décision déférée à la Cour : jugement du 11 février 2011 Tribunal de Commerce de BASTIA R. G : 10/ 844
X... X...
C/
SA SOCIETE GENERALE
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
SIX JUIN DEUX MILLE DOUZE
APPELANTS :
Monsieur Jean-Baptiste X... ...20200 BASTIA
ayant pour avocat Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA, Me Albert PELLEGRI, avocat au barreau de BASTIA
Monsieur Richard X... ... 20253 BARBAGGIO
ayant pour avocat Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA, Me Albert PELLEGRI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEE :
SA SOCIETE GENERALE Prise en la personne de son représentant légal Immeuble Le Forum du Fango-Bât. D Boulevard du Fango-BP 330 20297 BASTIA CEDEX
ayant pour avocat Me Jean Jacques CANARELLI, avocat au barreau de BASTIA, la SCP RETALI GENISSIEUX, avocats au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 avril 2012, devant Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre Monsieur Philippe HOAREAU, Conseiller Madame Marie-Paule ALZEARI, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 06 juin 2012.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, et par Madame Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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* * Vu le jugement rendu le 11 février 2011 par le tribunal de commerce de BASTIA qui, statuant au contradictoire des parties, a condamné Monsieur Richard X... à payer à la Société Générale, en sa qualité de caution, la somme de 13 000 euros avec intérêts de droit à compter du 3 septembre 2009 ; a condamné Monsieur Jean-Baptiste X... à payer à la Société Générale, en sa qualité de caution, les sommes de 20 044, 05 euros et 12 08, 21 euros avec intérêts de droit à compter du 7 août 2009 ; a condamné solidairement Monsieur Richard X... et Monsieur Jean-Baptiste X... à payer à la Société Générale la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement des dépens.
Vu l'appel formé contre cette décision par Monsieur Richard X... et Monsieur Jean-Baptiste X..., suivant déclaration remise au greffe le 8 mars 2011.
Vu les conclusions récapitulatives déposées le 18 octobre 2011 et régulièrement signifiées par les appelants qui demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, principalement dire et juger que la Société Générale a manqué à son devoir de mise en garde vis-à-vis des cautions, condamner la Société Générale à payer à chaque appelant des dommages et intérêts à
hauteur des sommes auxquelles il serait tenu en sa qualité de caution de la SARL ALVA CONSTRUCTION, opérer la compensation entre ces dommages et intérêts et les sommes auxquelles chaque appelant serait tenu en sa qualité de caution de la SARL ALVA CONSTRUCTION ; subsidiairement, dire et juger que les cautionnements conclus par les appelants sont manifestement disproportionnés à leurs biens et revenus et qu'en conséquence les appelants sont totalement déchargés de leurs engagements en leur qualité de caution de la SARL ALVA CONSTRUCTION ; en tout état de cause, condamner la Société Générale à payer à chaque appelant la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions déposées le 30 novembre 2011 et régulièrement signifiées par la Société Générale qui demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, y ajoutant, de condamner solidairement les appelants au paiement de la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 8 février 2012 fixant l'audience de plaidoiries au 6 avril 2012.
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SUR QUOI, LA COUR
Il ressort de la procédure que le 3 juillet 2007, la SARL ALVA CONSTRUCTION (la société) a conclu avec la Société Générale (la banque) une convention de trésorerie courante à hauteur de 10 000 euros garanti par un cautionnement souscrit par Monsieur Richard X..., associé de la société, à concurrence de 13 000 euros ; que le 8 août 2007, la banque a consenti à la société un prêt pour l'acquisition de matériel d'un montant de 30 000 euros garanti à hauteur de 39 000 euros par un cautionnement souscrit par Monsieur Jean-Baptiste X..., gérant de la société ; que suite à la liquidation judiciaire de la société, la banque poursuit les cautions en remboursement des créances qu'elle détient au titre des deux concours précités.
Pour obtenir l'infirmation du jugement déféré qui a accueilli les demandes de la banque, les appelants, dans un premier moyen, soutiennent que la banque a manqué au devoir de mise en garde vis-à-vis de la caution qu'elle tient des dispositions de l'article 1147 du code civil. Dans un second moyen, ils invoquent l'application des dispositions de l'article L 341-4 du code de la consommation en reprochant à la banque de ne pas avoir respecté le principe de proportionnalité entre l'engagement de la caution et ses biens et revenus prévu par ce texte.
Sur le premier moyen, s'il est exact que le banquier est tenu à l'égard de ses clients d'un devoir de mise en garde l'obligeant, avant d'apporter son concours, à vérifier leurs capacités financières et à les
alerter des risques encourus, toutefois, comme le soutient à bon droit l'intimée, ce devoir est plus limité à l'égard des clients avertis ainsi que pour des opérations ne présentant pas un risque élevé.
Il est établi qu'au moment de la conclusion de leurs engagements respectifs, Richard X... et Jean-Baptiste X... étaient associés depuis environ trois ans dans la société dont Jean-Baptiste X... était en outre le gérant. Aussi, comme la banque le fait valoir, ils avaient l'un comme l'autre une connaissance approfondie de la situation financière de la société débitrice et il convient aussi de tenir compte de leur expérience de la vie des affaires acquises ne serait-ce qu'à travers l'exercice de leurs fonctions au sein de la société.
La cour estime par suite que les intéressés doivent être regardés comme des clients avertis dès lors à même d'apprécier la portée de leurs engagements d'autant plus que ceux-ci portaient sur deux opérations courantes constituées par une convention de trésorerie et un emprunt destiné à financer l'acquisition d'un camion et d'une pelle mécanique.
De plus, c'est avec exactitude que la banque soutient que les opérations cautionnées ne présentaient pas de risque particulier. En effet, il est établi qu'au moment de la conclusion des engagements litigieux, l'endettement de la société était maîtrisé et que les perspectives d'évolution étaient favorables. Ainsi, il ressort du rapport de gestion sur l'exercice 2006 dont les deux associés ont eu nécessairement connaissance que le bénéfice réalisé s'élevait à 59 890, 26 euros et qu'il était en hausse par rapport à l'exercice précédent, le document indiquant que l'année 2007 devrait être marquée par un résultat bénéficiaire sensiblement équivalent.
Au regard de ces éléments d'appréciation, la cour estime, à l'instar du tribunal, que le moyen pris du non respect par la banque de son devoir de mise en garde n'est pas fondé.
Sur le second moyen tiré de l'application des dispositions de l'article L 341-4 du code de la consommation selon lesquelles " un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus à moins que la patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ", c'est à bon droit que les appelants font valoir qu'en tant que caution personne physique, ce texte est applicable à leur engagement même s'ils avaient, lors de sa souscription, la qualité d'associé de la société cautionnée.
La disproportion requise doit s'apprécier à la date de la signature des actes de cautionnements respectifs soit au 3 juillet 2007 pour Richard X... et au 8 août 2007 pour Jean-Baptiste X....
Il ressort des éléments d'appréciation produits par les appelants, tenus de rapporter la preuve de la disproportion invoquée, que s'agissant de Jean-Baptiste X... il était alors propriétaire de sa résidence
principale à PIETRABUGNO et déclarait un revenu imposable de 27 190 euros. En l'absence de charges particulières, un engagement limité à 39 000 euros n'apparaît pas manifestement disproportionné aux ressources et au patrimoine de l'intéressé.
S'agissant de Richard X..., il était alors titulaire de 90 parts sociales qui lui ont permis de percevoir 9 000 euros de dividendes au cours de la période de référence et selon l'avis d'imposition correspondant, les revenus imposables de son foyer s'élevaient à 36 257 euros. En l'absence de charges personnelles particulières ou se rapportant à cette période, il ne peut être soutenu que les ressources de l'intéressé ne l'autorisaient pas manifestement à honorer un engagement limité à 13 000 euros.
La cour estime en conséquence, toujours à l'instar du premier juge, que les appelants ne sont pas mieux fondés dans leur second moyen d'appel.
En l'absence d'autres contestations portant notamment sur le montant des sommes fixées par le tribunal, le jugement déféré doit être confirmé dans ses dispositions prononçant des condamnations contre les appelants en exécution de leur engagement de caution.
Les dispositions du jugement déféré portant attribution à la banque de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et relatives aux dépens de première instance seront également confirmées.
Les consorts X..., qui succombent dans leur appel, doivent supporter les dépens générés par cette instance. Il convient de les condamner en outre au paiement d'une nouvelle indemnité de 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. *
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PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne solidairement Monsieur Richard X... et Monsieur Jean-Baptiste X... à payer à la Société Générale la somme de HUIT CENTS EUROS (800 euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Les condamne, sous la même solidarité, aux dépens de l'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT