Ch. civile A
ARRET No
du 11 JUILLET 2012
R. G : 11/ 00391 R-RMS
Décision déférée à la Cour : jugement du 14 avril 2011 Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO R. G : 11/ 64
SA MEDICALE DE FRANCE X...
C/
CONSORTS F...Y...G...Z...A...H...CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE CORSE DU SUD
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
ONZE JUILLET DEUX MILLE DOUZE
APPELANTES :
SA MEDICALE DE FRANCE Prise en la personne de son représentant légal en exercice 50-56 Rue de la Procession 75015 PARIS
assistée de la SCP JOBIN, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Michel TOLOSANA, avocat au barreau de NICE
Madame Jeanne Berthe X...née le 21 Février 1951 à METZ (57000) C/ M. Claude C......57000 METZ
assistée de la SCP JOBIN, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Michel TOLOSANA, avocat au barreau de NICE
INTIMES :
Monsieur Jean Luc Pierre Georges Y...né le 25 Janvier 1961 à CALVI (20260) ...20000 AJACCIO
assisté de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
Madame Marie Paule F... divorcée Y...née le 08 Décembre 1960 à AJACCIO (20000) ...20090 AJACCIO
assistée de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
Mademoiselle Véronique Y...née le 10 Juillet 1980 à AJACCIO (20000) ...20090 AJACCIO
assistée de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
Monsieur Jérôme Y...né le 15 Avril 1977 à AJACCIO (20000) ...20090 AJACCIO
assisté de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
Monsieur Jean Y...né le 16 Août 1932 à ST PIERRE SUR DIVES (14170) ...20000 AJACCIO
assisté de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
Madame Anne Marie G... épouse Y...née le 17 Mars 1931 à CREVECOEUR EN AUGE (14340) ...20000 AJACCIO
assistée de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
Madame Marie Ange Y...épouse Z...née le 06 Septembre 1955 à LISIEUX (14100) ...20167 BALEONE
assistée de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
Monsieur Jean Z...né le 19 Mars 1949 à TEXAT SENAT ...20167 BALEONE
assisté de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
Madame Marie Noëlle Y...épouse A...née le 20 Décembre 1956 à CALVI (20260) ... 20000 AJACCIO
assistée de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
Monsieur Michel A...né le 25 Janvier 1952 à TRIPOLI ... 20000 AJACCIO
assisté de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
Madame Chantal Y...née le 31 Octobre 1953 à LA FLECHE (72200) ...20000 AJACCIO
assistée de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
Madame Marie Antoinette H... épouse F... née le 13 Mai 1940 à BASTIA (20200) ...20200 BASTIA
assistée de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Louis BUJOLI, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE CORSE DU SUD Prise en la personne de son représentant légal en exercice Boulevard Abbé Recco Les Padules-BP 910 20702 AJACCIO CEDEX
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 mai 2012, devant Madame Julie GAY, Président de chambre, chargé du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Julie GAY, Président de chambre Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller Monsieur Pierre Yves CUZIN, Vice-Président placé près Monsieur le Premier Président
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2012
ARRET :
Réputé contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Julie GAY, Président de chambre, et par Madame Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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* *
Vu le jugement rendu le 14 avril 2011 par le tribunal de grande instance d'AJACCIO :
- disant, au vu des circonstances indéterminées de l'accident du 3 janvier 1999, y avoir lieu à indemnisation intégrale des parties,
- condamnant solidairement Madame Jeanne X...et son assureur la SA MEDICALE DE FRANCE au paiement des sommes suivantes :
2. 391, 93 euros au titre du préjudice matériel à Monsieur Jean Luc Y..., Madame Marie Paule F..., Mademoiselle Véronique F... et Monsieur Jérôme F... en leur qualités d'héritiers de la victime,
3. 875, 25 euros au titre des frais funéraires à Monsieur Jean Y...,
au titre du préjudice moral :
à Monsieur Jean Luc Y...(père de la victime) : 35. 000 euros,
à Madame Marie Paule F... divorcée Y...(mère de la victime) : 35. 000 euros,
à Mademoiselle Véronique Y...(soeur de la victime) 31. 000 euros,
à Monsieur Jérôme Y...(frère de la victime) 31. 000 euros,
à Monsieur Jean Y...(grand père paternel) 15. 000 euros,
à Madame Anne Marie G... épouse Y...(grand mère paternelle) 15. 000 euros,
à Madame Marie Antoinette H... épouse F... (grand mère maternelle) : 15. 000 euros,
à Madame Marie Ange Y...épouse Z..., Monsieur Jean L..., Madame Marie Noëlle Y...épouse A..., Monsieur Michel A...et Madame Chantal Y...la somme de 10. 000 euros chacun,
- condamnant solidairement Monsieur Jean Luc Y..., Madame Marie Paule F..., Mademoiselle Véronique Y...et Monsieur Jérôme Y...en leur qualités d'héritiers de la victime à payer à Madame Jeanne X...et à la SA MEDICALE DE FRANCE la somme de 4. 065, 87 euros au titre du préjudice matériel,
- disant n'y avoir lieu à exécution provisoire, ni à application de l'article 700 du code de procédure civile,
laissant les dépens à la charge de chaque partie.
Vu les déclarations d'appel de Madame Jeanne X...et de la SA MEDICALE DE FRANCE déposées au greffe les 16 et 27 mai 2011.
Vu la jonction des procédures sous le seul numéro 11/ 391.
Vu les écritures de Madame X...et de la SA MEDICALE DE FRANCE déposées au greffe le 5 août 2011.
Vu les écritures des consorts Y..., Z...et M...déposées au greffe le 4 octobre 2011.
Vu l'ordonnance de clôture du 25 janvier 2012 et le renvoi à l'audience de plaidoiries du 14 mai 2012.
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MOTIFS :
Le 3 octobre 1999, Stéphane Y...âgé de quinze ans qui circulait à bord d'un cyclomoteur sur la RN 193 en venant de BALEONE a été mortellement blessé dans un accident impliquant le véhicule conduit par Madame Jeanne X..., assuré par LA MEDICALE DE FRANCE lequel venait en sens inverse.
Selon jugement rendu le 17 février 2006, le tribunal correctionnel d'AJACCIO a déclaré coupable Madame Jeanne X...du délit d'homicide involontaire et alloué aux parties civiles des dommages et intérêts.
La chambre correctionnelle de la cour de ce siège a cependant infirmé cette décision suivant arrêt du 5 juillet 2006, relaxé Madame X...des fins de la poursuite et déclaré irrecevables les constitutions des parties civiles.
Ainsi, par acte du 24 septembre 2009, les consorts Y...ont fait assigner devant le tribunal de grande instance d'AJACCIO Madame Jeanne X...et son assureur en indemnisation de leur préjudice moral et matériel lesquels ont sollicité à titre reconventionnel l'indemnisation de leur préjudice matériel.
Le 14 avril 2011, le tribunal de grande instance d'AJACCIO a rendu le jugement visé.
Sur le droit à indemnisation des consorts Y...:
En application de l'article 4 de la loi du 5 juillet 2005, la faute commise par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis.
Force est de rappeler que l'action en indemnisation poursuivie sur la base de la loi du 5 juillet 1985 a un caractère autonome, fondé sur la notion d'implication du véhicule et par conséquent distinct de la réparation d'une faute pénale.
La décision de la juridiction pénale n'a donc pas autorité de la chose jugée quant à l'application de la loi du 5 juillet 1985 aux faits de la cause.
Ainsi, même en l'absence de faute pénale du conducteur impliqué, celui-ci peut être tenu à indemnisation de la victime, conducteur d'un véhicule, seule la faute de celle-ci étant de nature à réduire ou à exclure son droit à indemnisation.
Si effectivement, en l'espèce, la chambre correctionnelle de la cour de ce siège a relaxé Madame X..., la cour n'a pas statué toutefois sur les conséquences civiles de l'accident en application des dispositions de l'article 470-1 du code de procédure pénale.
Par ailleurs, contrairement à ce que prétendent les parties appelantes, la cour n'a pas jugé que le jeune Stéphane Y...avait commis une faute, n'étant pas saisie de cet aspect.
Bien au contraire, la cour a motivé son arrêt de relaxe, de la façon suivante : " de ce qui précède, la cour conclut, en l'absence de témoin, qu'il existe une part d'incertitude quant aux circonstances exactes de cet accident et que la collision a pu se produire au début de la trace de pneus de la VOLVO, c'est à dire à l'intérieur du couloir de circulation de Madame X...".
En d'autres termes, la cour a estimé que les circonstances de l'accident étaient indéterminées.
Certes, elle a poursuivi : " dés lors, ce doute interdit de retenir comme suffisamment certaine la responsabilité pénale de Madame X..., étant relevé que de toute façon, la moto avant l'accident circulait très près de la ligne séparant les deux voies de circulation, ce qui caractérise une faute de conduite de l'adolescent, qui en plus devait conduire trop vite puisque quand il a vu la VOLVO, il n'a pas été en mesure de se déplacer vers le bord droit de la circulation, ce qui lui aurait permis pourtant d'éviter la collision ".
Force est de constater que la juridiction pénale n'a pas d'une part usé d'un ton affirmatif mais hypothétique (devait, aurait), et n'a pas d'autre part statué sur la faute de la victime.
En tout état de cause enfin, il est constant que l'autorité de la chose jugée attachée à la décision pénale est circonscrite au fondement des poursuites.
L'analyse de la cour est d'ailleurs l'exact reflet des conclusions de l'information effectuée dans le cadre de cette affaire à la suite de la constitution de partie civile des parents de Stéphane Y....
Celle-ci en effet a mis en évidence la contradiction existant entre les constatations des enquêteurs et le résultat de l'expertise automobile qui a été diligentée.
Le rapport de l'expert en automobile commis par le magistrat instructeur a conclu quant à lui en effet que le choc est survenu à l'intérieur de la voie de circulation du motocycliste, a confirmé que la vitesse maximale de la motocyclette était de 45 km/ h et que compte tenu de la très grande visibilité à l'endroit de l'accident, la conductrice ne pouvait pas ne pas voir le cyclomotoriste.
Ainsi, la faute de la victime n'est pas établie et les appelantes ne peuvent pas soutenir que la motocyclette " a envahi le couloir de circulation " de Madame X...ni que celle-ci roulait à une vitesse excessive dés lors que la documentation relative au modèle du cyclomoteur en cause produit par l'expert N...démontre que celui-ci ne pouvait pas rouler au delà de 45 km/ h.
En conséquence, le premier juge a justement considéré que les circonstances de la collision sont indéterminées (comme l'a d'ailleurs jugé aussi la chambre correctionnelle) et que les consorts Y...comme Madame X...sont dés lors fondés à solliciter l'indemnisation totale de leur préjudice.
De ce chef, le jugement déféré doit être confirmé.
Sur l'indemnisation des préjudices :
Sur le préjudice moral des consorts Y...:
Le principe du préjudice moral des parents, frère et soeur, grands-parents, oncles et tantes de la victime à peine âgée de quinze ans au moment des faits n'est pas contesté, les appelants sollicitant seulement la réduction des indemnités allouées à de plus justes proportions.
Si le préjudice moral des père et mère de la victime a été justement apprécié à la somme de 31. 000 euros pour chacun des parents, les indemnités allouées aux autres victimes par ricochet doivent être réduites dés lors que la preuve n'est pas rapportée de relations particulièrement étroites et privilégiées de nature à justifier une indemnisation au delà des sommes habituellement fixées.
Ainsi, il convient de dire qu'il revient au titre du préjudice moral :
- à Véronique et Jérôme Y..., soeur et frère de la victime, la somme de 15. 000 euros chacun,
- à Jean Y..., Anne Marie G... épouse Y..., Marie Antoinette H... épouse F..., grand-père et grands-mères de la victime la somme de 10. 000 euros chacun,
- à Jean Z..., Marie Ange Y...épouse Z..., Michel A..., Marie Noëlle Y...épouse A...et Chantal Y..., oncles et tantes de la victime, la somme de 5. 000 euros chacun.
Sur le préjudice matériel :
Les sommes allouées aux consorts Y...au titre du préjudice matériel et des frais funéraires ainsi que celle fixée au titre du préjudice matériel subi par Madame X...ne sont pas dans leur quantum contestées en cause d'appel.
De ces chefs en conséquence, le jugement doit être confirmé.
L'équité enfin justifie d'allouer aux consorts Y...la somme de 2. 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
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PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf à réduire les indemnités allouées au titre du préjudice moral, aux frère et soeur, grands-parents, oncles et tantes de la victime,
Statuant à nouveau,
Condamne in solidum Madame Jeanne X...et la MEDICALE DE FRANCE à payer à Véronique et Jérôme Y...la somme de QUINZE MILLE EUROS (15. 000 euros) chacun, à Jean Y..., Anne Marie G...épouse Y..., Marie Antoinette H... épouse F... la somme de DIX MILLE EUROS (10. 000 euros) chacun, à Marie Ange Y...épouse Z..., Jean Z..., Marie Noëlle Y...épouse A..., Michel A...et Chantal Y...la somme de CINQ MILLE EUROS (5. 000 euros) chacun,
Y ajoutant,
Condamne in solidum Madame Jeanne X...et la MEDICALE DE FRANCE à payer aux consorts Y...la somme de DEUX MILLE CINQ CENTS (2. 500 euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT