Ch. civile A
ARRET No
du 09 JANVIER 2013
R. G : 10/ 00736 C-JG
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 02 Août 2010, enregistrée sous le no 08/ 821
X...
C/
C... C... Y...SCP A...NOTAIRES ASSOCIES
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
NEUF JANVIER DEUX MILLE TREIZE
APPELANT :
Monsieur Pierre Alain X...né le 01 Novembre 1953 ...1205 GENEVE-SUISSE
assisté de Me Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA, Me Lucien FELLI, avocat au barreau de PARIS
INTIMES :
Madame Simone Josette C... veuve D... née le 22 Mai 1929 à ALGER (ALGERIE) ...69004 LYON 04
assistée de la SCP JOBIN, avocats au barreau de BASTIA, Me Jean COMITI, avocat au barreau d'AJACCIO
Mademoiselle Huguette Geneviève C... née le 10 Novembre 1930 à ALGER (ALGERIE) ...38200 VIENNE
assistée de la SCP JOBIN, avocats au barreau de BASTIA, Me Jean COMITI, avocat au barreau d'AJACCIO
Maître Pierre Paul Y......20137 PORTO VECCHIO
assisté de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, la SCP RETALI GENISSIEUX, avocats au barreau de BASTIA
SCP A...NOTAIRES ASSOCIES Prise en la personne de son représentant légal en exercice ......20137 PORTO VECCHIO
assistée de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, la SCP RETALI GENISSIEUX, avocats au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 29 octobre 2012, devant la Cour composée de :
Madame Julie GAY, Président de chambre Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller Monsieur Pierre Yves CUZIN, Vice-Président placé près Monsieur le Premier Président
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 09 janvier 2013.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée le 28 juin 2012 et qui a fait connaître son avis, dont les parties ont pu prendre connaissance.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Julie GAY, Président de chambre, et par Madame Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *
Monsieur Pierre X...a acquis d'Ambroise Xavier H...par acte du 6 février 1961 passé en l'étude de Maître DE I..., notaire à PORTO-VECCHIO le 6 février 1961 des parcelles situées sur la commune de ZONZA, anciennement cadastrées sous les numéros 991 à 995 de la section G.
Suite au décès de Pierre X..., son fils Pierre Alain X..., héritier de ces biens, a attrait devant le Tribunal de grande instance d'AJACCIO Simone C... épouse D... et Huguette C... qui bénéficient d'attestations immobilières établies le 7 octobre 1985 par Maître Y..., notaire à PORTO-VECCHIO, successeur de Maître DE I..., mentionnant la transmission à leur profit de ces mêmes parcelles sous leur nouvelle numérotation cadastrale, soit G 929 à G 932, suite au décès d'Antoine-Jacques C... et de Catherine C..., aux fins notamment de voir constater l'absence de force probante de leur titre, la pleine force probante du sien, voir dire qu'il est seul propriétaire de ces parcelles, ordonner l'expulsion immédiate des consorts C... et subsidiairement limiter le bénéfice de la prescription trentenaire invoquée à la seule parcelle G 932.
Madame Simone C... épouse D... qui a procédé en 1988 à l'édification d'une maison sur cette dernière parcelle et sa soeur Madame Huguette C... ont fait assigner en intervention forcée Maître Y...rédacteur des attestations immobilières des 10 août 1978 et 7 octobre 1985 établissant leurs droits sur les parcelles litigieuses, ainsi que la SCI A..., office notarial successeur de l'office de Maître Y....
Par jugement du 2 août 2010, le Tribunal de grande instance d'AJACCIO a :
- dit que l'action de Monsieur Pierre Alain X...est recevable,
- rejeté les demandes de Monsieur Pierre Alain X...visant à le déclarer seul propriétaire des parcelles cadastrées G 929 à G 932 sur la commune de ZONZA et subsidiairement de la seule parcelle G 932, à ordonner l'expulsion des occupants de ses parcelles et la publication du jugement à la conservation des hypothèques, et au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que Madame Simone Josette C... veuve D... et Madame Huguette Geneviève C... sont propriétaires des parcelles cadastrées G 929 à G 932 sur la commune de ZONZA par l'effet de la prescription acquisitive trentenaire,
- rejeté la demande de dommages-intérêts de Madame Simone Josette C... veuve D... et Madame Huguette Geneviève C... pour procédure abusive,
- dit que l'action en responsabilité à l'encontre de la SCP A...n'a pas d'objet eu égard à la solution donnée au présent litige,
- rejeté la demande de mise hors de cause de la SCP A...,
- condamné Monsieur Pierre Alain X...à payer à Madame Simone Josette C... veuve D... et Madame Huguette Geneviève C... la somme de 2. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté la demande de la SCP A...au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Monsieur Pierre Alain X...aux dépens.
Monsieur X...a relevé appel de cette décision par déclaration du 1er octobre 2010.
En ses dernières écritures déposées le 20 mars 2012 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, Pierre Alain X...rappelle que son père aujourd'hui décédé s'est porté acquéreur de la propriété litigieuse sise à ZONZA (Corse du Sud) au lieudit... ...d'une contenance de 2 ha 87 a 47 ca et que les parcelles cédées ont été régulièrement inscrites sous son nom au cadastre, enregistrées sous le même nom à la conservation des hypothèques d'AJACCIO et rayées du compte de L...Jules Antoine auprès du service du cadastre, l'acte de vente du 6 février 1961 étant porté sur la fiche d'immeuble du vendeur H...Ambroise.
Il précise qu'en 1967 suite à la rénovation cadastrale, la numérotation des parcelles a été modifiée, les parcelles G 991 à G 995 sont devenues les parcelles G 929 à G 932 mais Monsieur X...n'ayant procédé à aucun acte de disposition sur ces terrains, il est toujours resté sur les documents de la conservation des hypothèques propriétaire des parcelles G 991 à G 995 selon l'ancienne désignation cadastrale.
Il indique que lorsqu'il a voulu prendre possession des terrains dont il avait hérité au décès de son père, il s'est aperçu que l'une des parcelles, la G 932 était occupée par les intimées et il a en conséquence introduit à leur encontre une action en revendication.
Il soutient que son père s'était régulièrement présenté sur sa propriété par voie de mer le 22 août 1972, le 9 juillet 1984, le 7 août 1987 et les 15, 18 et 28 août 1988, époque où il n'y avait aucune construction sur la propriété et que contrairement aux consorts C..., il dispose d'un titre authentique de propriété qui a été publié et n'a fait l'objet d'aucune contestation de la part de tiers depuis plus de trente ans.
Il fait valoir que les intimés qui prétendent que leur vendeur n'était pas le propriétaire exclusif des parcelles litigieuses à l'origine propriété d'Antoine Jules L...n'ont jamais agi en annulation de la vente et qu'ainsi, son père ayant acquis de bonne foi, son titre est parfaitement valable et opposable, eu égard à la théorie de l'acte apparent.
Il souligne que son vendeur Monsieur H...était bien l'arrière-arrière petit-fils du propriétaire d'origine Monsieur L...alors que parallèlement il est impossible de connaître l'origine de propriété des C... qui à l'occasion d'une révision cadastrale, ont été enregistrés sur la fiche des terrains renumérotés en raison de l'absence de vigilance de la conservation des hypothèques.
Il fait valoir que si le 7 octobre 1985 par plusieurs attestations rédigées par Maître Y...successeur de Maître DE I..., les parcelles G 929 à 932 et donc les mêmes que les parcelles G 991 à G 995 ont été attribuées par voie de succession aux consorts C..., ces actes ne comportent aucune origine translative et curieusement aucun intervenant officiel n'a cherché à savoir quel était l'ancien numéro de ces parcelles, car dans le cas contraire, la propriété de Pierre X...serait nécessairement apparue.
Il ajoute que ces actes n'étant pas constitutifs de droits, force est de constater que les intimées ne disposent d'aucun titre de propriété.
Il fait grief au tribunal de s'être affranchi du débat sur la valeur probatoire du droit de propriété et d'avoir dit que Simone C... veuve D... et Huguette C... étaient propriétaires des parcelles litigieuses par l'effet de la prescription trentenaire et cela sans qu'aucune preuve n'ait été rapportée par les intimées.
Il ajoute que les premiers juges n'ont pas davantage répondu à la demande subsidiaire de Monsieur X...qui soutenait que dans l'hypothèse où les consorts C... pouvaient bénéficier de la prescription trentenaire sur la parcelle G 932, assiette de la construction de la villa, il était prouvé qu'ils n'avaient jamais occupé les parcelles G 929, 930 et 931 et que par conséquent la prescription trentenaire ne pouvait pas être retenue.
Il conteste l'analyse opérée par les premiers juges quant à la prescription trentenaire en faisant valoir que les intimées n'ont pu légitimement penser être héritières qu'à compter de 1985 et que les attestations produites faisant état d'une occupation des parcelles G 929 à 932 antérieurement sont sujettes à caution et de pure complaisance puisque seule la parcelle G 932 a été occupée par la famille C..., les autres parcelles constituées de maquis n'ayant jamais fait l'objet de la moindre exploitation.
Il conclut en conséquence au rejet des débats des attestations de Mesdames N...et D'O..., cousines de Madame C..., de Monsieur P..., ancien maire de ZONZA qui est dictée dans un intérêt électoraliste, de Monsieur Q...qui démontre seulement la création d'une dalle et non son occupation.
Il ajoute que le fait d'occuper épisodiquement une caravane sur l'une des parcelles revendiquée ne caractérise pas un acte matériel de possession, qu'il en est de même de la communication des matrices cadastrales et qu'à l'exception du permis de construire aucun des indices invoqués qui ne sont confortés par aucun élément de preuve (factures, devis ou photographies) ne caractérisent la possession des intimées.
Il s'oppose en outre à la demande de remboursement de la villa implantée sur la parcelle G 932 que sollicitent les intimées à titre très subsidiaire.
Il demande en conséquence à la cour de :
- dire et juger qu'il est recevable et bien fondé en son appel,
En conséquence,
- infirmer le jugement entrepris,
En conséquence,
- débouter les consorts C... de leurs demandes, fins et conclusions,
- rejeter des débats les pièces 9 à 17,
- constater l'absence de force probante du titre de propriété des consorts C... pour les seules dispositions concernant les parcelles cadastrées G 929 à G 932 de la commune de ZONZA en ce qu'aucune origine de propriété valable n'est établie pour ces parcelles et qu'en tout état de cause lesdites parcelles ne pouvaient relever de la succession C...,
- constater l'absence d'acquisition des parcelles G 929 à G 932 par les consorts C... par prescription trentenaire,
- constater la pleine force probante de son titre de propriété,
- dire qu'il est le seul propriétaire des parcelles cadastrées G 929 à G 932 sur la commune de ZONZA,
En conséquence,
- ordonner la restitution des parcelles cadastrées section G no 929 à 932 sises sur la commune de ZONZA,
- ordonner la remise en état des parcelles en leur état d'origine aux frais des consorts C... sous astreinte de 200 euros par jour à compter de trois mois après signification de la décision à intervenir,
- ordonner l'expulsion immédiate de tout occupant des parcelles cadastrées G 929 à G 932 sur la commune de ZONZA si besoin, avec le concours de la force publique,
- ordonner la publication du présent jugement à la conservation des hypothèques d'AJACCIO,
A titre subsidiaire,
- dire qu'il y a lieu de limiter le bénéfice de la prescription trentenaire au profit des consorts C... à la seule parcelle cadastrée G 932 sur la commune de ZONZA,
En conséquence,
- dire qu'il est le seul propriétaire des parcelles cadastrées G 929 à G 931 sur la commune de ZONZA,
- ordonner l'expulsion immédiate de tout occupant des parcelles cadastrées G 929 à G 931 sur la commune de ZONZA si besoin, avec le concours de la force publique,
- ordonner la publication du présent jugement à la conservation des hypothèques d'AJACCIO,
Avant dire droit,
- ordonner une expertise afin de déterminer la réalité de l'occupation des parcelles G 929 à 932 par les consorts C...,
- désigner un expert géomètre avec mission de :
. se rendre sur place,. se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission,. visiter les lieux,. déterminer les limites des parcelles G 929 à G 932,. déterminer sur un plan les zones d'occupation de ces parcelles par les consorts C...,
- dire que cette expertise sera ordonnée aux frais partagés des parties,
- condamner les consorts C... au paiement d'une somme de 5. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les consorts C... aux entiers dépens.
En leurs écritures déposées le 18 janvier 2012, auxquelles il y a lieu de renvoyer pour un exposé plus complet de leurs moyens et prétentions, Madame Simone C... veuve D... et Madame Huguette C... contestent le bien fondé de l'action en revendication de Monsieur X...qui en sa qualité de demandeur, doit démontrer son droit de propriété et elles invoquent en leur qualité de possesseurs du bien, la prescription acquisitive.
Elles indiquent qu'en matière de revendication, le demandeur doit administrer la preuve que son vendeur était propriétaire du bien et qu'il tenait ses droits du légitime propriétaire et ce jusqu'au propriétaire initial.
Elles précisent qu'en l'espèce, le propriétaire initial était Jules Antoine L...qui a eu plusieurs enfants :
- Angeline L...(grand-mère du vendeur) qui avait épousé Xavier H...,- Françoise L...qui avait épousé Simon C...,
leur auteur, et qu'en l'absence d'acte de partage, il n'est nullement établi qu'Angeline L...ait été propriétaire exclusive des biens litigieux, d'autant que ces derniers étaient restés portés au compte de Jules Antoine L..., que les fiches d'immeuble établies à leur nom font apparaître les mêmes parcelles sous leur nouvelle numérotation depuis 1978 et qu'ainsi Monsieur X...ne démontre pas que son vendeur était le légitime propriétaire des biens litigieux.
Elles ajoutent que leur possession est démontrée par les attestations qu'elles versent aux débats ainsi que par les matrices cadastrales et le paiement des impôts, qu'elle est ininterrompue depuis 1954, puisqu'elles peuvent joindre leur possession à celle de leurs auteurs, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire et qu'elle constitue un obstacle à l'action en revendication de l'appelant, quelle que soit la date de son titre et peu important que possesseur et revendiquant aient acquis leurs droits du même auteur.
A titre subsidiaire, Simone C... possesseur de bonne foi pour avoir pris possession de l'immeuble par un acte de notoriété publié à la conservation des hypothèques d'AJACCIO ayant édifié avec l'accord de sa soeur une villa estimée à 580. 000 euros donnant une plus value au terrain, elles sollicitent une indemnisation en application des dispositions de l'article 555 du code civil.
Les intimées ont appelé en cause Maître Pierre Paul Y..., rédacteur des actes de 1978 et 1985 leur attribuant la propriété des parcelles litigieuses et la SCP A..., successeur de l'étude de Maître Y..., estimant sa responsabilité engagée sur le fondement de l'article 1382 du code civil pour ne pas avoir assuré la sécurité, la validité, l'utilité et l'efficacité des actes qu'il a dressés sans effectuer de recherches particulières sur la situation des biens et ce dans l'intérêt de ses clients, d'autant que Maître Y...a succédé à Maître DE I..., chez qui avait été passé l'acte de vente de 1961.
Elles font valoir qu'en établissant les actes de 1985, il devait effectuer ses vérifications jusqu'en 1955, sachant qu'en 1967 une rénovation du cadastre était intervenue modifiant la numérotation des parcelles et qu'il se serait aperçu que les parcelles section G no 929 à 932 du cadastre rénové correspondant aux parcelles G no 991 à 995 de l'ancien cadastre, figuraient au fichier immobilier au nom de Pierre X....
Elles ajoutent que sa responsabilité est également engagée pour un manquement à son obligation de conseil puisqu'il a omis de les éclairer sur les effets de l'acte passé en 1985 puisqu'en le chargeant d'instrumenter pour régler une succession, elles le chargeaient de les
conseiller sur la portée de l'acte, de les avertir de son caractère imparfait et des risques que comportait un tel acte non translatif de propriété alors que si l'action en revendication dont elles sont l'objet prospérait, elles subiraient un préjudice considérable, puisque Madame D... serait obligée d'abandonner la villa qu'elle a fait édifier et dans laquelle elle vit.
Elles ont donc formé appel incident pour demander la condamnation solidaire de Maître Y...et de la SCP A...à réparer ce préjudice.
Elles demandent en conséquence à la cour :
Vu les articles 2219 et suivants, 2255 et suivants du code civil :
A titre principal, de :
- confirmer purement et simplement le jugement de première instance qui a dit que Madame Simone C... veuve D... et Madame Huguette C... sont propriétaires des parcelles cadastrées section G 929 à G 932 sur la commune de ZONZA (Corse du Sud) par l'effet de la prescription acquisitive trentenaire depuis au moins le 13 juillet 1973,
A titre subsidiaire, de :
- dire recevable et bien fondé leur appel incident,
- constater que Madame Simone C... veuve D... a édifié sa maison d'habitation sur la parcelle section G no 932,
- dire que cette construction édifiée de bonne foi procure à la parcelle une plus value très importante,
- dire que dans l'hypothèse où le revendiquant serait déclaré propriétaire du bien, il devra l'indemniser en application des dispositions de l'article 555 du code civil,
- dire que cette indemnisation intégrera la valeur de la construction de la villa augmentée de la plus value apportée aux autres parcelles, soit 1. 081. 800 euros,
A titre très subsidiaire, de :
- dire que dans l'hypothèse où la responsabilité de Maître Y...et de la SCP A..., notaires à AJACCIO, est retenue et que l'action de Monsieur X...prospère, il convient de les condamner solidairement au paiement des sommes suivantes, correspondant au préjudice des consorts C...- D...:
. 1. 081. 800 euros correspondant à la valeur des parcelles litigieuses,. 100. 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral,. 10. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code deprocédure civile,
En tout état de cause, de :
- condamner l'appelant au paiement de la somme de 10. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux entiers dépens d'instance et d'appel.
En leurs dernières écritures auxquelles il convient de se reporter pour un exposé plus exhaustif de leurs moyens et présentions, la SCP A...et Maître Y...rappellent qu'il est impossible de rapporter la preuve parfaite de la propriété immobilière par la reconstitution de l'enchaînement des mutations, élément sur lequel se fonde pourtant et en grande partie l'appelant, et qu'en matière immobilière, la propriété sera seulement rendue probable par un certain nombre de faits qui doivent être prouvés, un droit probable étant induit des éléments établis.
Ils précisent que la preuve des faits donnant vraisemblablement la propriété est libre et peut être apportée par tous moyens, conformément au droit commun et que le juge doit veiller au respect de la charge de la preuve laquelle pèse selon le principe posé par l'article 1315 du code civil sur la partie demanderesse en revendication.
Ils soulignent qu'en l'espèce Monsieur X...qui est demandeur à l'action en revendication qu'il a engagée ne peut fonder celle-ci sur le seul motif que le titre dont dispose le défendeur est contestable sans établir lui-même son droit de propriété et qu'il doit établir son droit par la production d'indices qu'il appartiendra à la cour d'apprécier souverainement pour dire s'ils constituent des faits matériels d'occupation présentant les qualités exigées par l'ancien article 2229 devenu 2261 du code civil.
Ils font observer que Monsieur X...ne peut en aucun cas se suffire de son titre sans justifier d'une possession utile et en se limitant à des considérations tirées de simples et discutables indications cadastrales et qu'il ne peut, comme il le prétend, se voir déclarer propriétaire au seul motif que les actes des consorts C... seraient inopérants et contestables, ce qui reviendrait à renverser la charge de la preuve.
Ils font valoir que l'appelant doit établir son droit, en sachant que s'il peut invoquer son titre translatif de propriété, c'est seulement à titre de présomption et que celui-ci ne permet pas de prouver son droit si la possession utile elle-même n'est pas démontrée.
Ils ajoutent qu'en l'espèce ce sont les consorts C... qui sont en possession, qu'une maison a même été construite sur les lieux litigieux et que dès lors le débat ne peut se limiter à la seule question des titres sauf à en dénaturer le sens et la portée et qu'ainsi la décision déférée ne comportant aucune erreur de droit, les griefs formulés par l'appelant ne peuvent qu'être écartés comme constituant une vaine tentative de contester l'analyse faite par le tribunal de la portée et de la valeur des éléments de preuve qui ont été fournis.
Ils précisent qu'il est de jurisprudence constante que les actes portant dévolution et attestant de la propriété immobilière n'ont qu'un caractère déclaratif, qu'ils ne sont en aucune façon un titre constitutif de droits opérant transfert de propriété, qu'ils constituent un simple élément concourant à faire connaître la propriété dans un domaine où la preuve est libre en l'absence de tout autre document et que dès lors il ne peut être prétendu que par l'établissement de ces actes, le notaire se trouve impliqué dans le litige opposant les parties.
Ils indiquent que les consorts C... ne sont pas fondés à soutenir même à titre subsidiaire et pour les besoins de leur appel incident, que c'est par l'effet de ces actes qu'ils ont pu prendre possession de la propriété revendiquée et à l'inverse Monsieur X...ne peut prétendre que c'est à cause de ces mêmes actes qu'il se trouve privé de la jouissance des biens, puisque ces actes qui ne sont pas constitutifs de droit ne permettent pas davantage d'en établir s'ils se heurtent à des faits matériels d'occupation présentant les qualités exigées par l'article 2261 du code civil.
Ils soutiennent que les consorts C... ne peuvent en aucune façon prétendre à la responsabilité et à la condamnation du notaire dans l'hypothèse où Monsieur X...serait reçu en son appel, puisque le notaire n'a pas établi par l'attestation immobilière de 1985 critiquée un acte constitutif de droits, transmettant un droit mais un simple acte déclaratif de droits présumés préexister, issus d'une occupation continue confortée par des indications cadastrales réputées légales et qu'à ce titre le notaire n'a pas à vérifier, rappelant ainsi la possession trentenaire au sens de l'article 2261 du code civil dont les intimées se prévalaient.
Ils demandent en conséquence à la cour de :
- constater et au besoin dire et juger que le litige porte sur la propriété des parcelles litigieuses G 929 à G 932 sur la commune de ZONZA,
- dire et juger que la preuve des faits donnant comme vraisemblable la dite propriété est libre et peut être apportée par tous moyens conformément au droit commun
-dire et juger cependant que la charge de la preuve pèse selon le principe de droit commun posé par l'article 1315 du code civil sur la partie demanderesse à la revendication,
- dire et juger en conséquence que Monsieur X...ne peut fonder sa revendication sur la seule contestation du titre dont disposent les consorts C... mais qu'il doit établir son droit de propriété,
- dire et juger que le titre de propriété qu'il invoque n'établit pas avec certitude la propriété et qu'il a seulement, en l'absence d'usucapion la valeur d'indice et de présomption,
- constater et au besoin dire et juger que les consorts C... ont justifié de présomptions de propriété meilleures et plus caractérisées établissant la preuve d'éléments d'occupation présentant les qualités exigées par l'article 2261 du code civil,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a en conséquence retenu que ces derniers établissent de manière utile la prescription acquisitive de leurs droits de propriété depuis plus de trente ans et que les demandes de Monsieur X...devaient être, par là-même, rejetées,
Subsidiairement et dans le seul cas où la cour estimerait devoir recevoir Monsieur X...en son appel et le dire fondé :
- constater et au besoin dire et juger que les actes critiqués dressés par le notaire les 10 août 1978 et 07 octobre 1985 ne sont pas constitutifs de droits mais tout simplement déclaratifs et insusceptibles de rapporter la preuve parfaite de la propriété immobilière,
- dire et juger qu'ils constituent une simple présomption concourant à faire connaître la propriété dans un domaine où la preuve est libre et qu'en tant que tels ils restent soumis à l'appréciation souveraine des juges quant à leur valeur et leur portée probatoire,
- dire et juger en conséquence que les dits actes n'ont pas permis d'établir par eux-mêmes un quelconque droit au profit des consorts C... en l'absence d'une possession utile elle-même établie par eux par la preuve, qui leur incombe, de faits matériels d'occupation présentant les qualités exigées par l'article 2261 du code civil,
- constater et au besoin dire et juger que le notaire n'a commis aucune faute et qu'il ne peut être tenu pour responsable de l'appréciation qui aura été souverainement faite par la cour de la valeur probante des présomptions du droit de propriété que les parties lui ont soumises,
- dire et juger en tous cas que ne peut lui être imputée à faute et comme étant en relation causale la situation préjudiciable invoquée que seule en toute hypothèse une expertise contradictoire permettrait de définir et d'évaluer,
- débouter les consorts C... de la demande formée par eux à son encontre,
- les condamner à leur payer la somme de 3. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner qui mieux des parties aux dépens.
L'instruction de la procédure a été déclarée close par ordonnance du 4 juillet 2012.
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* *
SUR CE :
Attendu qu'en application des articles 711 et 712 du code civil, la propriété des biens s'acquiert et se transmet par succession, donation entre vifs ou testamentaires, par l'effet des obligations de même que par accession, incorporation ou prescription ;
Qu'en l'espèce s'opposent Pierre Alain X...qui revendique les parcelles figurant au cadastre de la commune de ZONZA sous les numéros G 929 à 932 que son père a acquises de Monsieur Ambroise H...le 6 février 1961 aux termes d'un acte authentique et les consorts C... qui se prévalent de la prescription plus que trentenaire, les biens litigieux étant dans leur patrimoine et exploités par leur famille depuis 1954 ;
Attendu que les modes de la propriété immobilière étant libres, il appartient au juge de rechercher le droit applicable au regard des faits et des éléments produits et d'apprécier la portée des preuves qui lui sont soumises lorsqu'elles entrent en contradiction ;
Que notamment la preuve de la propriété est étrangère à la question sur l'opposabilité aux tiers d'un acte translatif de propriété dûment publié ;
Attendu que des éléments de la cause, il ressort que le père de Monsieur Pierre X...a acquis les biens litigieux de Monsieur H...qui tenait ces biens de son père, lequel les avait recueillis dans la succession de sa mère qui en avait elle-même hérité de son père Jules Antoine L...;
Que l'acte de vente de 1961 a été régulièrement publié et les parcelles litigieuses figurent sous leur ancienne numérotation cadastrale sur la fiche immobilière au nom de Pierre X...;
Attendu que si la qualité d'acquéreur de bonne foi de ce dernier est incontestable, il n'en demeure pas moins que son titre de propriété vient en concurrence pour les mêmes parcelles avec les attestations immobilières établies le 10 août 1978 et le 7 octobre 1985 au bénéfice des intimées, dont l'aïeul était aussi Jules Antoine L..., attestations selon lesquelles elles ont reçu les parcelles litigieuses dans la succession de leur tante Marie S...C... puis de leur tante Antoinette C..., attestations concordant avec la matrice cadastrale où les parcelles litigieuses figurent sous leur nouvelle numérotation au compte des consorts C... ;
Que ces actes corroborent la possession plus que trentenaire que Simone C... épouse D... et Huguette C... allèguent en l'espèce en joignant leur possession à celle de leurs auteurs ainsi que l'autorise l'article 2265 du code civil pour se prévaloir de l'usucapion des parcelles litigieuses ;
Attendu que les premiers juges ont relevé à bon droit et avec pertinence que le débat opposant les parties quant à la valeur de leur titre de propriété respectif, qu'ils soit translatif ou déclaratif dont chacun ne vaut qu'à titre de simple présomption s'avère vain si les consorts C... peuvent démontrer utilement l'acquisition de la propriété litigieuse par prescription trentenaire, laquelle constitue alors une présomption légale du droit de propriété qu'un acte translatif antérieur ne peut suffire à anéantir ;
Attendu que l'article 2261 du code civil dispose que pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire ;
Que l'article 2265 ajoute que pour compléter la prescription on peut joindre à sa possession celle de son auteur, de quelque manière qu'on lui ait succédé, soit à titre universel ou particulier soit à titre lucratif ou onéreux ;
Attendu que des documents produits par les intimées qui émanent de personnes qui sont intervenues sur les lieux ou les ont fréquentés, qui ne nullement contredit par l'appelant et sont de ce fait de nature à entraîner la conviction de la cour, il résulte que leur famille a toujours occupé les terrains du lieudit ..., cadastrés section G 929 à 932 ainsi que le relate dans son attestation du 2 octobre 2008 Monsieur Joachim T..., né en 1926 qui précise qu'à partir de 1976, il y a rencontré la famille C...- D...qui séjournait dans sa caravane sur cette propriété puis à partir de 1988 dans sa maison, ce que confirment Madame U...et Madame H...;
Que cette dernière explique que depuis 1976 jusqu'à la construction de leur maison en 1987, ses cousins Simone C... et son époux Albert D... avaient aménagé leur propriété de ..., l'avait démaquisée, y avait planté des arbres, l'entretenaient et y séjournaient en précisant que l'occupation du terrain par la famille C... ininterrompue depuis plus de trente ans était de notoriété publique, ce qu'indiquent aussi Madame D'O..., Madame W...et Monsieur Marius P...qui possède la propriété limitrophe et précise quant à lui que la famille C... lui avait accordé un droit de passage pour rejoindre son bien, droit de passage de Madame D...a confirmé en 1976 ;
Attendu que Monsieur Sébastien P..., né en 1932, atteste qu'entre l'année 1954 et l'année 2008 la propriété des C... sur les parcelles figurant au cadastre ancien sous les numéros G 992, 994, 993, 992 et 991 n'a jamais été contestée ; Que depuis son installation définitive en CORSE en 1964, il a toujours vu la famille C... y exploiter le liège, y construire un sentier pédestre d'accès à la mer, y installer des tentes, puis une caravane dans les années 1975-1971 avant d'y construire une maison ;
Attendu que Monsieur Q..., maçon, affirme pour sa part avoir coulé une dalle sur la propriété en 1976 à la demande de Madame D... ;
Que Monsieur ZZ..., architecte, précise que lorsqu'il a visité le terrain en 1987, celui-ci était aménagé, et que la dalle de 15 m ² qui y avait été construite depuis plusieurs années a été démolie lors de la construction de la maison ;
Qu'il résulte de l'attestation de Monsieur AA...du 27 septembre 2011 que celui-ci entretient l'intégralité des parcelles composant la propriété de Madame D..., le chemin conduisant du haut des terrains jusqu'à la mer et traversant toute la propriété, la démaquise en raison des risques d'incendie, la nettoie et soigne les arbres ;
Attendu que par ces multiples attestations qui établissent tant l'occupation de la parcelle G 932 où après avoir fait couler une dalle pour y installer une caravane afin d'y séjourner à l'occasion de vacances, Madame D... a fait édifier une maison après avoir obtenu un permis de construire, que celle de l'ensemble de la propriété, et ce de manière, paisible et non équivoque, Monsieur X...n'ayant alors qu'il serait venu visiter sa propriété en 1984, en 1987 et en 1988 émis d'observation ou élevé de protestation alors qu'une dalle y était construite, qu'un chemin donnant accès à la mer y était tracé et qu'en 1988 la maison était sinon achevée du moins en cours de construction ;
Attendu que la possession publique et continue sur les parcelles litigieuses est confortée par les relevés cadastraux et les fiches immobilières établies au nom des intimées et avant elles de leurs auteurs ;
Attendu que des prérogatives de propriétaire ayant été exercées sur l'ensemble des parcelles litigieuses par les consorts C... depuis plus de trente ans et leur possession répondant à tous les critères énumérés par l'article 2261 du code civil, c'est à bon droit que les premiers juges après avoir rappelé que les actes matériels de possession réalisés par Madame D... seule en sa qualité d'indivisaire ne privait aucunement cette possession d'animus domini, ont estimé établie leur prescription acquisitive sur l'ensemble de la propriété et rejeté les demandes de Monsieur X...;
Que le jugement entrepris sera confirmé de ce chef sans qu'il soit nécessaire, eu égard aux documents produits par les intimées, de procéder à la mesure d'instruction sollicitée à titre subsidiaire par Monsieur X...;
Que la décision déférée sera encore confirmée en ce qu'elle a considéré comme sans objet l'action engagée à titre subsidiaire par les intimées contre les notaires ;
Que l'appel incident relevé par ces dernières à titre subsidiaire, sera lui-même déclaré sans objet ;
Attendu que les consorts C...- D...ont engagé des frais non taxables à l'occasion de la présente instance ;
Que la somme qui leur a été allouée par la décision déférée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sera confirmée ;
Qu'il leur sera en outre alloué au titre de ces mêmes frais exposés en cause d'appel, une somme supplémentaire de 2. 500 euros ;
Attendu que les premiers juges ont considéré à juste titre que l'équité ne commandait pas de faire application de ce même article au bénéfice de la SCP A...;
Que le jugement sera confirmé à cet égard et la demande formulée de ce même chef en cause d'appel sera rejetée.
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PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Dit sans objet l'appel incident formé à titre subsidiaire par les consorts C...- D...à l'encontre de Maître Y...et de la SCP A...,
Condamne Pierre X...à payer à Madame Simone C... veuve D... et à Madame Huguette C... ensemble la somme de DEUX MILLE CINQ CENTS EUROS (2. 500 €) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande,
Condamne Monsieur Pierre X...aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT