Ch. civile A
ARRET No
du 29 MAI 2013
R. G : 11/ 00791 R-JG
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de BASTIA, décision attaquée en date du 20 Septembre 2011, enregistrée sous le no 10/ 00584
X...
C/
CONSORTS Y...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT NEUF MAI DEUX MILLE TREIZE
APPELANT :
M. Michel X... né le 20 Juin 1966 à AJACCIO (20000) ......20243 PRUNELLI DI FIUMORBU
assisté de la SCP RIBAUT-BATTAGLINI, avocats au barreau de BASTIA, et de Me Claude THIBAUDEAU, avocat au barreau de BASTIA
INTIMES :
M. Jean-François Y......78290 CROISSY SUR SEINE
assisté de la SCP PANTANACCE-FILIPPINI, avocats au barreau de BASTIA, et de la SCP JOBIN, avocats au barreau de BASTIA
Mme Jocelyne Y......78290 CROISSY SUR SEINE
assistée de la SCP PANTANACCE-FILIPPINI, avocats au barreau de BASTIA, et de la SCP JOBIN, avocats au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 mars 2013, devant la Cour composée de :
Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Rose-May SPAZZOLA, Conseiller Mme Marie BART, Vice-président placé près M. le premier président
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 29 mai 2013
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Jean-François et Jocelyne Y..., propriétaires de la parcelle de terre sise sur le territoire de la commune de Prunelli di Fiumorbo à ..., cadastrée sous le numéro E 234 qu'ils ont reçue de Mme Angèle C... veuve Y..., aux termes d'un acte de donation-partage en date des 16 et 20 novembre 1999, ont introduit à l'encontre de M. Michel X... qui a installé sur ladite parcelle des piquets métalliques et y fait stationner des véhicules une action en délaissement de ce bien devant le tribunal de grande instance de Bastia.
Par jugement du 20 septembre 2011, cette juridiction a :
- ordonné à M. Michel X... de délaisser la bande de terre qu'il a matérialisée sur la parcelle E 234 au lieu dit ...à ...sur le territoire de la commune de Prunelli di Fiumorbo et d'y retirer les piquets métalliques ainsi que les véhicules stationnés,
- dit que faute par M. Michel X... de déférer à cette injonction dans le délai de quinze jours à compter de la signification de la présente décision, il devra payer une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard pendant un délai maximum de 6 mois, à charge pour M. Jean François Y...et Mme Jocelyne Y..., à défaut d'exécution à l'expiration de ce délai, de solliciter du juge de l'exécution la liquidation de l'astreinte provisoire et le prononcé d'une astreinte définitive,
- condamné M. Michel X... à verser à M. Jean-François Y...et Mme Jocelyne Y...la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- débouté M. Michel X... de l'ensemble de ses demandes,
- dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire,
- condamné M. Michel X... à verser à M. Jean-François Y...et Mme Jocelyne Y...la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. Don Nicolas Y...aux entiers dépens.
M. Michel X... a relevé appel de ce jugement par déclaration du 4 octobre 2011.
En ses dernières écritures déposées par voie électronique le 24 septembre 2012, auxquelles il sera référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, l'appelant soutient que la parcelle E 234 dont les intimés se disent propriétaires au lieu dit " ...", tel que cela est porté sur l'acte de donation-partage de novembre 1999, est issue d'une parcelle de plus grande contenance, anciennement cadastrée E 284 dénommée " Ghiesale ", la matrice et les plans cadastraux comme le POS attestant de cette dénomination qui figure aussi dans l'acte de donation du 5 novembre 1965 de Marie Colombe C... épouse X... E...au profit de sa fille Nathalie X... épouse Jean-Dominique G...d'une parcelle de 1430 mètres carrés prise sur la parcelle E 284 sur laquelle est édifiée la maison de la famille X...Jean-Dominique contiguë de la parcelle E 234.
Il précise que cette dernière parcelle est restée à l'abandon depuis le partage de la succession de M. Roch Mathieu C... en date du 23 août 1955 entre ses cinq héritiers au nombre desquels figuraient les auteurs communs des parties : Angèle C... épouse Jean I...Y...et Marie Colombe C... épouse X... E..., jusqu'à récemment puisqu'après la donation qui lui a été consentie, Jean-François Y...a entrepris l'édification d'un mur d'enceinte et d'un portail.
Il souligne que l'acte de partage de 1955 stipule que chaque indivisaire recevra le 1/ 5ème de la terre de Ghiesale, le lot no1 étant attribué à Jean Baptiste C... " sous réserve de retrait par Jean I...de 4 mètres pris sur la hauteur du Nord et sur une profondeur d'environ 135 mètres de ladite propriété " et les autres indivisaires dont les auteurs des actuelles parties se voyant attribuer également le 1/ 5ème de cette même terre " en tenant compte de ce qui est prescrit dans le 1er lot.
Il fait valoir qu'il est manifeste que l'auteur commun des parties a entendu qu'une bande de terre de 4 mètres de large sur toute la longueur du lot attribué à Angèle C... épouse Jean I...Y...demeure indivise à tous les lots attribués et que le Tribunal a commis une erreur manifeste en estimant que la parcelle en litige E 234 n'a pas pour origine la parcelle 284 mais la parcelle 285.
Il fait observer que la superposition des plans cadastraux anciens et actuels démontrent que les limites de l'ancienne parcelle 284 recoupent bien les cinqs lots dévolus par l'acte de partage du 23 août 1955.
Il ajoute que les auteurs initiaux ont vendu aux consorts J...tous leurs lots situés au lieu dit ...et que sans l'erreur du notaire et celle du cadastre qui a reporté à la matrice la dénomination d'un lieu dit situé plus à l'Ouest, la parcelle E 234 devrait porter la dénomination de " Ghiesale ".
Il soutient que cette parcelle étant demeurée dans l'indivision, sa famille a légitimement refusé le bornage que les intimés tentaient de faire avaliser et qu'ayant sur le bien indivis un droit concurrent avec les intimés, il peut légalement faire stationner ses véhicules sur cette bande de terre et ne commet aucune voie de fait, ou trouble illicite, occupation irrégulière ou atteinte à un droit de propriété justifiant une mesure de retrait de l'usage de ce bien.
Son argumentation étant confortée par les attestations qu'il produit, M. X... demande à la cour :
- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 20 septembre 2011,
- de débouter les consorts Y...de leurs demandes,
- de condamner solidairement les consorts Y...à lui payer 3 000 euros à titre de dommages et intérêts, et 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
En leurs conclusions déposées le 18 octobre 2012 auxquelles il y a lieu de renvoyer pour un exposé plus complet de leurs moyens et prétentions, les consorts Y...concluent à la confirmation de la décision entreprise.
Ils rappellent être propriétaires du bien litigieux au lieu dit ...d'une superficie de 72 ares et 88 centiares en vertu d'une donation partage de leur grand-mère paternelle Mme C... veuve Y...des 16 et 20 novembre 1999 et être entrés en possession de ce bien depuis plus de 10 ans.
Ils soulignent que la famille X... et particulièrement l'appelant a refusé de signer la limite Ouest de la propriété proposée par le géomètre expert correspondant à la limite cadastrale et même à la clôture de leur propriété et qu'en 2009 ils ont constaté que Michel X... avait pénétré sur leur propriété pour y installer des piquets métalliques matérialisant une bande de terre de quatre mètres de largeur sur la longueur de la parcelle E 234, côté Est et y avait stationné des véhicules.
Ils font valoir que la difficulté posée par l'appelant tient à l'interprétation erronée qu'il fait de la convention de partage des biens de Roch Mathieu C... signée par ses cinq enfants le 23 août 1955, dont Me K..., notaire, indique avoir fait application pour établir la donation-partage de 1999.
Ils précisent que la composition des lots démontre que les propriétés de ...et de Ghiesale sont distinctes et ne peuvent être confondues, que la propriété ...a pour limite au Nord la route départementale et que les deux propriétés issues du partage familial de 1955 dont les lots 2 et 3 sont mitoyennes avec la même limite au nord et qu'ainsi la parcelle 234 qui est échue dans ce partage à Angèle C... a fait l'objet de la donation-partage consentie à leur profit par cette dernière est bien la propriété ...anciennement cadastrée sous le No 285 et qu'aucune partie indivise n'y a été créée, chacun des biens ayant un accès à la voie publique.
Ils ajoutent que Michel X... a entendu séparer de manière très marquée la parcelle qu'il occupe et la parcelle 234 mais a utilisé avec l'accord des intimés et de leur mère une partie de ce terrain pour y faire stationner les véhicules de son entreprise, cette occupation temporaire et précaire résultant d'un simple service rendu en famille mais sans reconnaissance de droits.
Ils concluent en conséquence à la confirmation de la décision déférée en toutes ses dispositions excepté en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts qu'ils demandent à la cour de majorer et de fixer à la somme de 5 000 euros à titre d'indemnisation de la gêne que leur est occasionné par le trouble causé à la jouissance de leur bien et l'atteinte à leur droit de propriété.
Ils sollicitent enfin la condamnation de Michel X... à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'appel.
Par ordonnance du 30 mai 2012, la requête des consorts Y...tendant à la production par Michel X... de son acte de propriété a été rejeté, l'acte de partage du 23 août 1955 étant d'ores et déjà versé aux débats.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 12 décembre 2012.
SUR CE :
Attendu qu'aux termes d'un acte établi les 16 et 20 novembre 1999
par Me K..., notaire à Corte, Mme Angèle C... a donné à titre de partage anticipé à M. Jean-François Y...et à Jocelyne Y...ses petits enfants une parcelle de terre d'une contenance de 7288 mètres carrés figurant au cadastre de la commune de Prunelli di Fiumorbo sous le No E 234 au lieu dit ...dont la propriété lui avait été attribuée par acte sous signature privée en date du 23 août 1955 contenant partage des biens et droits immobiliers dépendant de la succession de Roch Mathieu C..., son père ;
Qu'il résulte des éléments du dossier que ce bien a été porté sous cette même numérotation et dénomination au compte cadastral de Jean Y..., époux de la donatrice et grand-mère des intimés et que le plan d'état des lieux dressé par la SCP A...Géomètre-expert indique qu'il longe au Nord la route départementale No 244 ;
Attendu que si l'acte de partage du 23 août 1955 fait état de deux propriétés distinctes, l'une située au lieu dit ...qui a été partagée entre quatre cohéritiers et l'autre sise à Ghiesale dont chacun des cinq héritiers a reçu le cinquième, M. X... soutient que le terrain litigieux fait partie de la propriété de Ghiesale qui a été partagée en cinq et où sur la part de Mme C... épouse Jean I...Y...devait être observé un retrait de 4 mètres sur la hauteur au Nord et sur une profondeur d'environ 135 mètres de ladite propriété ;
Que cette dénomination résulte d'ailleurs du plan d'état des lieux de la propriété Y...établi par la SCP A...qui mentionne le lieu dit de Ghiesale ;
Attendu de surcroît, si les frères et soeurs de Michel G...se contentent dans leurs attestations de faire cause commune avec lui sans donner d'élément particulier, Mme Joséphine X... épouse L...précise dans son attestation du 3 juin 2012 que la parcelle E 234 fait partie de la parcelle dite Ghiesale mentionnée à " l'acte de partage de 1955 comprenant cinq lots, signé par les cinq frères et soeurs dont sa mère Colombe C... épouse X... ", ce que confirment Mme Jacqueline M..., fille de Noël C..., et Joséphine C..., fille de Félix C..., eux-mêmes signataires de l'acte de partage de 1955 ;
Attendu que de leur côté les consorts Pietri ne produisent aucun document de nature à démontrer que leur parcelle provient de la propriété qui a au contraire été partagée entre quatre des cinq cohéritiers ;
Que la cour ne peut qu'en déduire que le terrain litigieux se situe bien comme le soutient l'appelant au lieu dit Ghiesale ;
Attendu que la propriété de Ghiesale dépendant de la succession de Roch Mathieu C... a bien été partagée en cinq parts, revenant chacune à ses cinq enfants, avec sur la part d'Angèle C... épouse Jean I...Y...la réserve d'un " retrait de 4 mètres pris sur la hauteur au Nord et sur une profondeur environ de 135 mètres de ladite propriété " ;
Que cette réserve qui est mentionnée dans l'acte de partage pour le premier lot mais est rappelée pour chacun des autres lots puisqu'il y est précisé " la cinquième partie de la terre dite Ghiesale tenant compte de ce qui est présent dans le premier lot " s'impose aux parties et a pour conséquence de laisser sur la parcelle E 234 échue aux intimés du fait de la donation-partage dont ils sont bénéficiaires une bande de terre de quatre mètres de large sur 135 mètres de profondeur à la disposition de tous les héritiers ;
Que le jugement déféré sera dès lors réformé en toutes ses dispositions et les intimés déboutés de leurs demandes, fins et conclusions ;
Sur les demandes de dommages et intérêts et pour frais irrépétibles :
Attendu que M. X... qui sollicite des dommages et intérêts pour action téméraire et injustifiée ne rapporte nullement la preuve d'un préjudice distinct de celui que lui a occasionné l'obligation d'exposer des frais non taxables pour assurer la défense de ses droits ;
Que sa demande de dommages et intérêts sera rejetée ;
Qu'il lui sera en revanche allouée la somme de 2 500 euros qu'il réclame sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que les consorts Y...qui succombent supporteront les entiers dépens de première instance et d'appel ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Dit que la parcelle E 234 appartenant à M. Jean-François Y...et à Mme Jocelyne Y...provient de la propriété dépendant de la succession de feu Roch Mathieu C..., située au lieu dit Ghiesale, sur la commune de Prunelli di Fiumorbo, qui a été partagée en cinq parts lors du partage intervenu entre ses cinq héritiers le 23 mai 1955,
Constate qu'aux termes de ce partage la part d'Angèle C... épouse Jean I...Y...et donc la parcelle E 234 est grevée d'une réserve savoir un " retrait de 4 mètres pris sur la hauteur au Nord et sur une profondeur environ de 135 mètres de la dite propriété ",
Déboute en conséquence M. Jean-François Y...et Mme Jocelyne Y...de leurs demandes, fins et conclusions,
Rejette la demande de dommages et intérêts formée par Michel X...,
Condamne M. Jean-François Y...et Mme Jocelyne Y...à payer à Michel X... la somme de DEUX MILLE CINQ CENTS EUROS (2 500 euros) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Les condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT