Ch. civile A
ARRET No
du 29 JANVIER 2014
R. G : 13/ 00037 R-MB
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 03 Décembre 2012, enregistrée sous le no 09/ 01003
X...
C/
Y... Z...A...Y...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
VINGT NEUF JANVIER DEUX MILLE QUATORZE
APPELANT :
M. Antoine Louis X...né le 19 Mars 1951 à Ajaccio (20000) ...20118 SAGONE
assisté de Me Frédérique GENISSIEUX de la SCP RETALI GENISSIEUX, avocat au barreau de BASTIA
INTIMES :
Mlle Françoise Anne-Marie Y... née le 27 Avril 1956 à Ajaccio (20000) ...20000 AJACCIO
ayant pour avocat Me Jean Pierre MAUREL de la SCP MORELLI MAUREL ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AJACCIO
M. Frédéric Z...né le 13 Juillet 1966 à Hyeres (83400) ...20167 MEZZAVIA
ayant pour avocat Me Philippe ARMANI, avocat au barreau d'AJACCIO
Mme Félicia A...épouse Z...née le 07 Septembre 1969 à Bastia (20200) ...20167 MEZZAVIA
ayant pour avocat Me Philippe ARMANI, avocat au barreau d'AJACCIO
Mme Marie Blanche Y... divorcée D...née le 31 Juillet 1952 à Ajaccio (20000) ...78150 LE CHESNAY
ayant pour avocat Me Jean pierre MAUREL de la SCP MORELLI MAUREL ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AJACCIO
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 novembre 2013, devant Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Julie GAY, Président de chambre Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller Mme Marie BART, Vice-président placé près Monsieur le premier président
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 29 janvier 2014
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Julie GAY, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
En vertu d'un jugement rendu le 24 juin 1993 par le tribunal de grande instance d'Ajaccio et d'un arrêt de la Cour d'Appel de Bastia en date du 08 novembre 1994, Mme Angèle Paulette X...veuve Y... a délivré un commandement à M. Antoine X..., de payer la somme de 801. 017, 81 francs (122. 114, 27 euros) et aux fins de saisie immobilière portant sur les biens et droits immobiliers formant le lot 14 (un appartement) d'un ensemble immobilier situé rue Fesch no 80 (ex no 76) à Ajaccio.
A la suite de ce commandement, le tribunal de grande instance d'Ajaccio a rendu un jugement d'adjudication le 21 octobre 1999, qui a été publié à la conservation des hypothèques d'Ajaccio le 30 octobre 2009.
Par acte d'huissier du 20 octobre 2009, M. Antoine Louis X...a, sur le fondement de l'article 694 paragraphe 3 de l'ancien code de procédure civile, assigné, Mesdames Françoise et Marie-Blanche Y... ainsi que M. Frédéric Z...et son épouse, née Félicia A..., devant le tribunal de grande instance d'Ajaccio, en vue de faire constater la péremption du commandement valant saisie immobilière du 19 mai 1999 sus-visé, laquelle emporte la caducité automatique de la saisie immobilière et la nullité du jugement d'adjudication du 21 octobre 1999, ainsi que d'obtenir le paiement de frais irrépétibles.
Par jugement contradictoire du 03 décembre 2012, le tribunal de grande instance d'Ajaccio, a :
- rejeté la demande,
- déclaré Mesdames Françoise et Marie-Blanche Y... hors de cause,
- condamné M. Antoine X...à purger le bien immobilier, l'appartement situé 76 rue Fesch à Ajaccio, des hypothèques dont il est le débiteur, au plus tard dans le mois suivant la signification du jugement et a dit que passé ce délai, il y sera contraint sous astreinte de 200 euros par jour de retard,
- condamné M. X...à payer à Mesdames Y... la somme de 1. 500 euros pour frais non taxables,
- condamné M. X...à payer à M. Frédéric Z..., Mme Félicia Z..., née A..., la somme de 1 500 euros pour frais non taxables,
- ordonné l'exécution provisoire,
- laissé les dépens à la charge de M. X....
Par déclaration reçue le 17 janvier 2013, M. X...a interjeté appel de cette décision à l'encontre de Mlle Françoise Y..., M. Frédéric Z..., Mme Félicia A...épouse Z...et Mme Marie-Banche Y... divorcée D....
Par ses dernières conclusions reçues le 03 mai 2013, l'appelant demande à la cour de constater et au besoin, dire et juger :
- que le jugement d'adjudication intervenu le 21 octobre 1999 au profit de M. Z...sur la poursuite de saisie immobilière engagée par Mme Angèle Y... n'a été publié que le 30 octobre 2009, postérieurement à l'assignation délivrée par lui aux fins de caducité de la procédure,
- qu'il n'a pas été procédé à sa publication dans le délai de trois ans de la publication du commandement valant saisie immobilière, intervenue le 10 juin 1999,
- qu'il résulte des dispositions de l'article 694, alinéa 3 du code de procédure civile, ancien, que le commandement cesse de produire effet trois ans après sa publication si le jugement d'adjudication n'a pas été mentionné en marge de cette publication dans le même délai,
- qu'à défaut par l'adjudicataire d'avoir procédé à cette mention du jugement d'adjudication en marge de la publication du commandement dans le délai de trois ans ci-dessus, le commandement a cessé de produire ses effets et entraîné par voie de conséquence, la caducité de l'ensemble de la procédure de saisie immobilière,
- que le délai prévu à l'article 694 est prescrit à peine de déchéance et que celle-ci est encourue même en l'absence de préjudice,
- qu'en le déboutant de sa demande de caducité au motif que la publication du jugement d'adjudication intervenue le 30 novembre 2009 lui interdisait de développer sa contestation, sauf à établir l'existence d'une fraude, le tribunal a méconnu les textes sus-visés,
- que la publication du jugement d'adjudication purge les hypothèques grevant le bien, y compris celles inscrites postérieurement à la délivrance des états d'inscription,
- que c'est l'adjudicataire qui est tenu de faire publier le jugement d'adjudication qui lui sert de titre pour permettre notamment l'ouverture de la procédure de purge,
- que l'effet de purge attaché à la publication faite par l'adjudicataire se produit moyennant le paiement du prix de son adjudication,
- qu'il est tenu aux formalités et obligations ci-dessus à peine de revente sur folle enchère,
- qu'en le condamnant à purger le bien immobilier des hypothèques grevant le bien, sous astreinte et sans constater que le prix de l'adjudication a été payé, le tribunal a mis à sa charge les obligations incombant à l'adjudicataire et autorisé ce dernier à se prévaloir de sa négligence à son encontre au mépris des dispositions des articles 716 et 717 du code procédure ancien,
Il sollicite, en conséquence, la réformation de la décision entreprise dans toutes ses dispositions et la condamnation des intimés à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par leurs conclusions reçues le 17 mai 2013, M. Frédéric Z...et Mme Félicia Z...née A...demandent à la cour de :
- constater l'absence de caducité de la procédure de saisie immobilière querellée,
Sur la purge des hypothèques,
- à titre principal, condamner M. X...à purger le bien immobilier des hypothèques dont il est débiteur, ce sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
- à titre subsidiaire, vu l'article 717 alinéa 3 du code de procédure ancien, dire et juger que la publication du jugement d'adjudication du 21 octobre 1999, le 30 octobre 2009 au bureau des hypothèques d'Ajaccio, a pour effet de purger le bien immobilier en cause de toute hypothèque.
Les intimés sollicitent la condamnation de l'appelant au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Les consorts Y... ont constitué avocat, mais n'ont pas signifié d'écritures.
Pour un exposé plus complet des faits, de la procédure et des prétentions respectives des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions sus-visées et au jugement déféré.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 juin 2013.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la péremption du commandement valant saisie immobilière
Le tribunal a, au visa de l'article 715 de l'ancien code de procédure civile, retenu que la publication du jugement par adjudication emportait
purge de tous les vices de la procédure antérieure, sauf en cas de fraude prouvée.
Il a estimé, qu'en l'espèce, au vu des éléments et pièces soumis à son appréciation, le jugement d'adjudication du 21 octobre 1999, publiée le 30 octobre 2009, n'a pas été pris en fraude des droits de M. X...qui connaissait la procédure de saisie diligentée de la façon la plus régulière par feu Angèle Paulette X....
L'appelant conteste cette décision et soutient que les premiers juges ont totalement méconnu les dispositions de l'article 694 alinéa 3 de l'ancien code de procédure civile, en vertu desquelles la péremption produit ses effets de plein droit à l'expiration du délai prévu par ce texte.
De leur côté, les intimés font valoir qu'en application de l'article 715 de l'ancien code de procédure civile, la publicité foncière du jugement d'adjudication du 21 octobre 1999 conduit à l'absence de nullité du commandement et du jugement querellé.
L'article 694 alinéa 3 de l'ancien code de procédure civile dispose " Toutefois, le commandement publié cesse de produire effet si, dans les trois ans de sa publication, il n'est pas intervenu une adjudication mentionnée en marge de cette publication, conformément à l'article 716, paragraphe 2 ou un jugement prorogeant le délai de l'adjudication et mentionné comme il vient d'être dit ".
Il résulte de l'article 715 de l'ancien code de procédure civile que le délai prévu notamment à l'ancien article 694 alinéa 3 précité, est prescrit à peine de déchéance et que les formalités prescrites par ce texte ne seront sanctionnées par la nullité que si l'irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice aux intérêts des parties en cause.
Par ailleurs, il est de jurisprudence ancienne et constante que la publication du jugement d'adjudication emporte purge de tous les vices de la procédure antérieure, même postérieurement au délai de trois ans, sauf cas de fraude prouvée, mais avant toute action en contestation.
Or, en l'espèce, il est constaté et non contesté, d'une part, que le commandement valant saisie du 19 mai 1999 a été publié le 10 juin 1999 et, d'autre part, que le jugement d'adjudication intervenu le 21 octobre 1999 a été publié le 30 octobre 2009, soit postérieurement à l'assignation délivrée par l'appelant, par acte d'huissier du 20 octobre 2009 à l'encontre des intimés, aux fins de caducité de la procédure de saisie.
Dans ces conditions, les intimés ne peuvent valablement opposer à l'appelant les dispositions de l'article 715 de l'ancien code de procédure civile, et c'est à juste titre que ce dernier se prévaut des dispositions de l'ancien article 694 alinéa 3 du même code, le jugement d'adjudication sus-visé n'ayant pas été publié dans les trois ans de la publication du commandement litigieux dont les effets n'ont pas été prorogés.
En outre, la péremption instituée par le texte précité produit ses effets de plein droit à l'expiration du délai prévu audit article 694 alinéa 3 (ancien) et il appartient à tout intéressé d'en tirer les conséquences.
Cependant, la cour est tenue, conformément aux dispositions de l'article 5 du code de procédure civile, de se prononcer seulement sur ce qui est demandé ; or, elle observe que dans le dispositif de ses dernières écritures, l'appelant n'a pas sollicité la nullité du jugement d'adjudication du 21 octobre 1999.
Au vu des prétentions formulées par l'appelant, il convient de constater la péremption du commandement aux fins de saisie sus-visé, et, par voie de conséquence, de dire que l'ensemble de la procédure de saisie immobilière, notamment le jugement d'adjudication du 21 octobre 1999, est rétroactivement privé de tout effet.
Compte-tenu de l'anéantissement des effets du jugement d'adjudication sus-visée, la question de la purge des hypothèques est devenue sans objet.
Il y a lieu, en conséquence, d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré Mesdames Françoise et Marie-Blanche Y... hors de cause.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
L'équité commande de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. X...à payer à Mesdames Y... la somme de 1 500 euros pour frais non taxables et de l'infirmer en ce qu'il a condamné M. X...à payer à M. Frédéric Z..., Mme Félicia Z..., née A..., la somme de 1 500 euros pour frais non taxables.
En outre, la cour déboutera M. X..., d'une part, et M. Frédéric Z..., Mme Félicia Z..., née A..., d'autre part, de leurs demandes respectives, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, tant pour la procédure de première instance que pour la procédure d'appel.
M. Frédéric Z..., Mme Félicia Z..., née A..., partie succombante, supporteront les dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré Mesdames Françoise et Marie-Blanche Y... hors de cause et en ce qu'il a condamné M. X...à payer à Mesdames Françoise et Marie-Blanche Y... la somme de 1 500 euros pour frais non taxables ;
Statuant à nouveau,
Constate que le jugement d'adjudication intervenu le 21 octobre 1999 a été publié à la conservation des hypothèques d'Ajaccio le 30 octobre 2009, soit postérieurement à l'assignation délivrée par M. Antoine X..., par acte d'huissier du 20 octobre 2009 à l'encontre de Mesdames Françoise et Marie-Blanche Y... ainsi que de M. Frédéric Z...et son épouse, née Félicia A..., aux fins de caducité de la procédure de saisie.
En conséquence,
Dit que le commandement valant saisie immobilière du 19 mai 1999, publié le 10 juin 1999 a cessé de produire ses effets ;
Dit qu'en l'état de la péremption des effets du commandement valant saisie, la procédure de saisie immobilière et notamment le jugement d'adjudication du 21 octobre 1999, sont rétroactivement privés de tout effet ;
Dit, en conséquence, la question de la purge des hypothèques sans objet ;
Déboute M. X..., d'une part, et M. Frédéric Z..., Mme Félicia Z..., née A..., d'autre part, de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile, tant pour la procédure de première instance que pour la procédure d'appel.
Déboute les parties de toutes autres demandes ;
Condamne M. Frédéric Z..., Mme Félicia Z..., née A..., partie succombante, aux entiers dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT