COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
QUINZE AVRIL DEUX MILLE QUINZE
Ch. civile B
ARRET No
du 15 AVRIL 2015
R. G : 13/ 00893 R
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Commerce d'AJACCIO, décision attaquée en date du 28 Octobre 2013, enregistrée sous le no 712/ 2013PC
EURL NAK
C/
X...
APPELANTE :
EURL NAK prise en la personne de son représentant légal, Mme Nicolle Y... Parc San Lazaro Immeuble Le Touraine Avenue Napoléon III 20000 AJACCIO
assistée de Me Robert DUCOS de la SCP LENTALI PIETRI DUCOS, avocat au barreau d'AJACCIO, plaidant en visioconférence,
INTIME :
Me Jean Pierre X... pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de l'EURL NAK ... 20000 AJACCIO
assisté de Me Stéphane RECCHI de la SCP MORELLI MAUREL ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AJACCIO
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience du 13 février 2015, devant Mme Marie-Laure PIAZZA, Président de chambre, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie-Laure PIAZZA, Président de chambre Mme Françoise LUCIANI, Conseiller Mme Judith DELTOUR, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 15 avril 2015
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée le 03 décembre 2014 et qui a fait connaître son avis, dont les parties ont pu prendre connaissance.
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Marie-Laure PIAZZA, Président de chambre, et par Mme Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
La SARL NAK a relevé appel, dans les formes et délais légaux, d'un jugement rendu le 28 octobre 2013 par le tribunal de commerce d'Ajaccio qui a prononcé sa liquidation judiciaire.
Par arrêt de cette Cour, en date du 10 décembre 2013, le premier président a ordonné la suspension de l'exécution provisoire attachée à ce jugement.
Dans ses dernières écritures du 9 septembre 2014, au soutien de sa demande d'infirmation du jugement, elle fait valoir qu'elle s'est intégralement acquittée du passif. Elle considère que la demande de l'intimé visant à lui demander de justifier du paiement des loyers échus depuis le jugement d'ouverture, est irrecevable comme nouvelle au sens des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions du 15 avril 2014, Me Jean-Pierre X... ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL NAK ne s'oppose pas à l'infirmation du jugement « à la condition toutefois de justifier du paiement des loyers commerciaux qui seraient impayés ».
Le ministère public s'en rapporte dans un avis du 4 décembre 2014.
L'instruction a été clôturée par une ordonnance en date du 8 décembre 2014, fixant l'audience de plaidoiries au 6 février 2015, renvoyée à l'audience des débats du 13 février 2015. A cette date, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 avril 2015.
LES FAITS
L'EURL NAK exploite deux fonds de commerce de vente de vêtements, prêt-à-porter et accessoires aux numéros 19 et 42 du cours napoléon à Ajaccio.
Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à son égard par jugement du tribunal de commerce d'Ajaccio du 9 juillet 2012.
La période d'observation prenait donc fin le 9 juillet 2013.
A cette date le passif s'élevait à 113 547, 92 euros, dont 76 471, 53 euros contestés.
A la demande de la SARL NAK qui s'engageait à provisionner le montant de sa dette finalement retenue et évaluée à la somme de 58 238, 78 euros, le ministère public demandait et obtenait la prolongation exceptionnelle de la période d'observation pour trois mois supplémentaires du tribunal de commerce d'Ajaccio dans un jugement du 8 juillet 2013.
A l'audience des débats du 30 septembre 2013, la SARL NAK justifiait du règlement de 48 000 euros, elle restait redevable d'un reliquat de dette fiscale, dont elle ne justifiait du dégrèvement que dans le cadre de son recours (avis de dégrèvement du 2 décembre 2013).
C'est dans ces conditions que le tribunal de commerce d'Ajaccio a, dans le jugement déféré, motif pris du non règlement du passif et de l'absence de présentation de plan de redressement, prononcé la liquidation judiciaire de la société.
SUR CE
Aux termes des dispositions de l'article L 661-9 du code de commerce, « En cas d'infirmation du jugement imposant de renvoyer l'affaire devant le Tribunal, la Cour d'Appel peut ouvrir une nouvelle période d'observation. Cette période est d'une durée maximale de trois mois réduite à un mois quand il a été fait application de la procédure simplifiée prévue à la section V du chapitre 1 ».
« En cas d'appel du jugement statuant sur la liquidation judiciaire au cours de la période d'observation (...) et lorsque l'exécution provisoire est arrêtée, la période d'observation est prolongée jusqu'à l'arrêt de la cour d'appel ».
A défaut de présentation d'un plan de redressement, l'infirmation de jugement de liquidation, sollicitée par l'appelante, suppose que soit rapportée la preuve du désintéressement de tous les créanciers dont la créance est exigible au jour où la Cour statue, sans qu'il y ait lieu de distinguer les créanciers antérieurs à la procédure collective de ceux nés après le jugement d'ouverture au sens de l'article L 622-17 I.
Il en résulte que la société appelante ne peut utilement soutenir que la demande en paiement des loyers et charges courantes, auquel l'intimé conditionne son accord pour la poursuite de la procédure, constituerait un moyen nouveau irrecevable.
En l'espèce, il est établi et non contesté que les loyers courants d'un montant mensuel de 820, 66 euros hors charges relatifs au local sis au 19 cours Napoléon ne sont plus payés depuis juillet 2013 (pièce 1 de l'intimé). La Cour relève d'ailleurs que non seulement l'appelante ne justifie pas de leur paiement, mais encore qu'elle n'offre pas de s'en acquitter.
Il sera toutefois relevé qu'en l'absence d'élément plus récent permettant à la Cour d'actualiser les éléments d'appréciation de la capacité de redressement de la société appelante, celle-ci a pu mobiliser des moyens nouveaux pour s'acquitter de 82 % du passif déclaré devant le premier juge, et obtenir un dégrèvement de la dette fiscale.
Il est par ailleurs justifié par la production de l'ordonnance de référé du 16 avril 2013, rendue par le président du tribunal de grande instance d'Ajaccio, et par le rapport remis le 29 novembre 2013 par l'expert Z..., de désordres ayant affecté l'un des deux fonds de commerce, susceptibles d'ouvrir un droit à réparation.
Nonobstant l'absence de toute communication de la comptabilité de la société, du chiffre d'affaires qu'elle génère et du résultat qu'elle dégage, depuis l'ouverture de la procédure collective, il est impossible d'affirmer qu'au jour où la Cour statue, la situation de la société est irrémédiablement compromise et qu'elle est dénuée de toute capacité de redressement.
Le jugement entrepris sera donc infirmé, une nouvelle et ultime période d'observation de trois mois étant ouverte, conformément aux dispositions de l'article L 661-9 alinéa 1 du code de commerce, et l'affaire renvoyée à cette fin devant le tribunal de commerce d'Ajaccio.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après communication au ministère public,
Infirme le jugement entrepris,
Et, statuant à nouveau,
Ouvre une nouvelle période d'observation de trois mois,
Renvoie l'affaire devant le tribunal de commerce d'Ajaccio en vue de l'arrêté d'un plan de redressement ou du désintéressement des créanciers,
Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective.
LE GREFFIER LE PRESIDENT