Ch. civile A
ARRET No
du 07 OCTOBRE 2015
R. G : 14/ 00430 R
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Commerce d'AJACCIO, décision attaquée en date du 07 Avril 2014, enregistrée sous le no 2011002175
X... Y...
C/
Société CAISSE DE CREDIT MUTUEL D'AJACCIO
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
SEPT OCTOBRE DEUX MILLE QUINZE
APPELANTE :
Mme Marie Thérèse X... Y... ... 20166 PORTICCIO (CORSE)
ayant pour avocat Me Marc MONDOLONI, avocat au barreau d'AJACCIO
INTIMEE :
Société CAISSE DE CREDIT MUTUEL D'AJACCIO prise en la personne de son représentant légal demeurant et domicilié au siège social 2 Place de Gaulle Diamant II 20000 AJACCIO
ayant pour avocat Me Stéphane RECCHI de la SCP MORELLI MAUREL ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AJACCIO
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 26 juin 2015, devant Mme Marie-Laure PIAZZA, Président de chambre, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie-Laure PIAZZA, Président de chambre Mme Françoise LUCIANI, Conseiller Mme Laetitia PASCAL, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 07 octobre 2015
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Marie-Laure PIAZZA, Président de chambre, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
La Caisse de Crédit Mutuel d'Ajaccio a consenti à la SA Rostico divers concours financiers et notamment un découvert en compte courant d'un montant de 53 952, 53 euros au 10 avril 2000. Mme X... Y... Marie Thérèse s'est constituée caution solidaire et indivisible au terme de deux engagements d'un montant respectif de 15 244, 90 euros le 8 avril 1993, et de 22 867, 35 euros le 24 septembre 1993.
La SA Rostico a été placée en redressement judiciaire le 10 avril 2000. Un plan de continuation a été adopté le 12 février 2001.
La Caisse de Crédit Mutuel d'Ajaccio a déclaré sa créance de 53 952 euros au passif de la procédure. Elle a été admise au passif par ordonnance du juge commissaire du 23 décembre 2002, confirmée par un arrêt du 25 novembre 2003 de cette cour.
Parallèlement, elle a, par acte du 7 novembre 2001 assigné Mme X... Y... Marie Thérèse en paiement de cette créance en sa qualité de caution. Le tribunal de commerce d'Ajaccio a fait droit sa demande dans un jugement du 7 avril 2003, portant condamnation de Mme X...Y...au paiement de la somme de 38 112, 25 euros, confirmé par un arrêt de cette cour du 27 janvier 2005, à hauteur de la seule somme de 29 715, 79 euros.
Cet arrêt a été cassé par la cour de cassation dans un arrêt du 3 mai 2006.
Dans son arrêt du 24 mai 2007, la cour d'appel d'Aix, saisie sur renvoi après cassation, a débouté la Caisse de Crédit Mutuel d'Ajaccio de son action en paiement contre la caution.
Considérant que le placement en liquidation judiciaire de la SA Rotisco lui ouvre droit à une nouvelle action en paiement envers la caution, la Caisse de Crédit Mutuel d'Ajaccio, par acte du 13 juillet 2011, a fait assigner à cette fin Mme X... Y... Marie Thérèse.
Par jugement en date du 7 avril 2014, le tribunal de commerce d'Ajaccio a condamné Mme X... Y... Marie Thérèse à payer à la Caisse de Crédit Mutuel d'Ajaccio la somme de 42 632, 19 euros euros augmentée des intérêts à compter du 21 mars 2011, outre une indemnité de procédure de 500 euros.
Mme X... Y... Marie Thérèse a relevé appel de cette décision par déclaration du 16 mai 2014.
Dans ses écritures du 13 août 2014, elle sollicite l'infirmation du jugement.
A titre principal elle demande à la cour de déclarer la banque irrecevable en son action et de rejeter ses demandes, et, de manière extraordinaire, de dire que sa dette en sa qualité de caution est apurée. Reconventionnellement, elle demande la condamnation de la banque à lui payer 10 000 euros pour procédure abusive, outre 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de condamner l'intimée aux dépens distraits au bénéfice de Marc Mondoloni en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle soutient principalement que l'action de la Caisse de Crédit Mutuel d'Ajaccio est irrecevable, puisqu'elle se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt susdit de la cour d'appel d'Aix en Provence, et qu'en tout état de cause, la dette de la caution est apurée par les remises en comptes faites par a SA Rostico postérieurement au jugement d'ouverture du compte de la procédure collective, pour un montant bien supérieur à celui de l'engagement de caution. Elle invoque, enfin, à l'appui de sa demande reconventionnelle, le caractère abusif de cette procédure engagée.
Dans ses écritures du 12 septembre 2014, la Caisse de Crédit Mutuel d'Ajaccio demande la confirmation du jugement.
Elle soutient qu'il n'y a pas d'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt susdit de la cour d'appel d'Aix en Provence, puisque la présente demande est différente de celle qu'elle a tranchée et qui visait à faire déclarer exigible la dette de la caution. Elle invoque le caractère débiteur du compte courant déclaré au passif de la liquidation, dont le paiement a été cautionné par l'appelante, nonobstant le caractère régulier du compte bis ouvert après l'ouverture de la procédure collective et régulièrement alimenté par la SA Rostico.
L'instruction a été clôturée par une ordonnance du 20 mai 2015, fixant l'audience de plaidoiries au 26 juin 2015. A cette date, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 7 octobre 2015.
SUR CE
Dans son arrêt du 24 mai 2007, la cour d'appel d'Aix en Provence a jugé comme suit :
« MOTIFS
Sur la créance envers la société Rostico :
Attendu que celle ci, au titre du compte courant de la société ouvert dans les livres du Crédit Mutuel a été définitivement admise pour un montant de 53. 377, 18 ¿ majoré des intérêts légaux à compter du 10 avril 2000 par arrêt du 25 novembre 2003 et le jugement sera confirmé sur ce point ;
Sur la créance envers la caution :
Attendu que l'ouverture de la procédure collective n'emporte pas clôture du compte courant du débiteur ; Qu'en application de l'article L 621-49 du Code de Commerce le jugement d'ouverture du redressement judiciaire en rend pas exigible les créances non échues à la date de son prononcé ;
Attendu qu'en l'espèce, suite au redressement judiciaire du 10 avril 2000, le compte de la société Rostico s'est poursuivi par l'ouverture d'un compte « bis » no18464840 le 10 avril 2000 intitulé formule clé ne remettant pas en cause l'unicité du compte courant de la société débitrice ; Attendu que le tableau récapitulatif des versements de l'année 2000 versé aux débats ainsi que les relevés dudit compte entre le mois d'avril 2000 et le mois de décembre 2000 fait apparaître des remises sur ce compte pour la somme de 2. 908. 587, 44 Frs ; Attendu que de la sorte, du fait de la continuité du fonctionnement du compte de la société, le solde débiteur existant au jour de l'ouverture de la procédure collective a été ultérieurement apuré par l'ensemble de ces remises pour ce qui a trait aux rapports entre le créancier et la caution ; Attendu que la caution ne peut donc être condamnée au paiement du solde débiteur provisoire au jour du redressement judiciaire de la société en l'état de cet apurement ;
(...)
PAR CES MOTIFS
(...)
Confirme le jugement du tribunal de commerce d'Ajaccio du 7 avril 2003,
en ses dispositions non contraires à celles du présent arrêt,
Infirme pour le surplus et statuant à nouveau,
Déboute le Crédit Mutuel de ses demandes envers Mme X...Y...,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile (...) ».
Il est constant que la demande du Crédit Mutuel envers Mme X...Y...était donc une demande en paiement du solde débiteur du compte courant de la SA Rostico ouvert en ses livres fondée sur ses engagements de caution.
La cour a jugé que le solde débiteur du compte courant cautionné par l'appelante avait été apuré entre avril et décembre 2000, et a débouté l'intimée de sa demande en paiement envers elle.
En l'espèce, le Crédit Mutuel sollicite à nouveau la condamnation de Mme X...Y...au paiement de son engagement de caution relativement au solde du même compte courant débiteur définitivement jugé apuré par la décision susdite.
Il y a donc identité de parties, d'objet et de cause entre les deux actions, peu important à cet égard que la société dont les dettes ont été cautionnées, ait finalement été placée en liquidation judiciaire. Que la demande en paiement soit, en effet, présentée avant la liquidation ou après, elle a nécessairement le même fondement juridique contractuel, le caractère prétendument « indemnitaire » de la présente action étant inutilement invoqué par l'intimée.
Il sera donc fait droit à la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée soulevée par Mme X...Y....
Le caractère abusif de la procédure ne saurait se déduire de sa seule irrecevabilité. La demande reconventionnelle en paiement de dommages intérêts pour procédure abusive présentée par l'appelante n'est pas suffisamment justifiée. Elle sera rejetée.
L'équité commande de condamner la Caisse de Crédit Mutuel d'Ajaccio à payer à Mme X... Y... Marie Thérèse la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Les dépens d'appel distraits au bénéfice de Me Marc Mondoloni en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure
civile, seront supportés par la Caisse de Crédit Mutuel d'Ajaccio qui succombe.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Infirme le jugement,
Déclare la Caisse de Crédit Mutuel d'Ajaccio irrecevable en son action,
Déboute Mme X... Y... Marie Thérèse de sa demande reconventionnelle,
Condamne la Caisse de Crédit Mutuel d'Ajaccio à payer à Mme X... Y... Marie Thérèse la somme de MILLE EUROS (1 000 euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la Caisse de Crédit Mutuel d'Ajaccio aux dépens d'appel distraits au bénéfice de Me Marc Mondoloni en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT