Ch. civile A
ARRET No
du 09 MARS 2016
R. G : 14/ 00159 MBE-R
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 03 Février 2014, enregistrée sous le no 12/ 00894
CONSORTS X...
C/
Y...Z...A...E...B...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
NEUF MARS DEUX MILLE SEIZE
APPELANTES :
Mme Marie-Josiane X...née le 19 Mai 1947 à Propriano (20110) ...75001 PARIS
assistée de Me Marc MAROSELLI de la SCP ROMANI CLADA MAROSELLI ARMANI, avocat au barreau D'AJACCIO
Mme Marie-Jeanne X...épouse C...née le 02 Septembre 1942 à Propriano (20110) ...06340 CANTARON
assistée de Me Marc MAROSELLI de la SCP ROMANI CLADA MAROSELLI ARMANI, avocat au barreau D'AJACCIO
INTIMES :
M. Dominique Otto Y...né le 18 Mars 1955 à Casablanca (20110) ...20110 PROPRIANO
assisté de Me Anne Marie LEANDRI de la SCP LEANDRI LEANDRI, avocat au barreau D'AJACCIO
Mme Marie Jeanne Z...A...épouse E...née le 11 Janvier 1942 à Bordeaux (33077) ...20110 PROPRIANO
assistée de Me Anne Marie LEANDRI de la SCP LEANDRI LEANDRI, avocat au barreau D'AJACCIO
Mme Isabelle Suzie E... épouse F...née le 06 Octobre 1966 à Ajaccio ...20113 OLMETO Intervenante volontaire
assistée de Me Anne Marie LEANDRI de la SCP LEANDRI LEANDRI, avocat au barreau D'AJACCIO
M. Pierre Yves Raymond B...né le 02 Novembre 1959 à Neuilly Sur Seine (92000) ...20110 PROPRIANO Assigné en intervention forcée
assisté de Me Anne Marie LEANDRI de la SCP LEANDRI LEANDRI, avocat au barreau D'AJACCIO
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 janvier 2016, devant la Cour composée de :
M. François RACHOU, Premier président Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller Mme Marie BART, vice-président placé près M. le premier président
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Martine COMBET.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 09 mars 2016
ARRET :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. François RACHOU, Premier président, et par Mme Martine COMBET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Mmes Marie-Josiane X...et Marie-Jeanne X...épouse C...sont propriétaires d'un local commercial situé à Propriano, rue du 9 septembre. Elles contestent la validité d'un bail écrit en date du 28 novembre signé par leur mère, Mme Pauline I...veuve X..., au profit de M. Joseph E... et son épouse, Marie-Jeanne Z...A..., portant sur ce local.
Par jugement du 13 juillet 2000, le tribunal d'instance de Sartene a, notamment, débouté les époux E... de leur demande tendant à faire constater l'existence d'un bail commercial entre les parties, a ordonné leur expulsion du local ci-dessus désigné et les a condamnés au paiement de diverses sommes.
Par arrêt contradictoire du 18 juin 2002, la cour d'appel de Bastia a, notamment :
- réformé le jugement sus-visé dans l'intégralité de ses dispositions,
statuant à nouveau,
- constaté l'existence d'un bail commercial en date du 28 novembre 1998 bénéficiant à M. E...,
- dit ce bail opposable tant à l'usufruitière qu'aux nus-propriétaires.
La Cour de Cassation, par arrêt du 11 février 2004, a rejeté le pourvoi formé par les consorts X...contre cette décision, et les a condamnés aux dépens.
Le 16 juin 2005, Mmes Marie-Josiane X...et Marie-Jeannette X...épouse C...ont porté plainte avec constitution de partie civile contre les époux Joseph et Marie-Jeanne E..., pour faux et usage de faux et escroquerie au jugement.
Par jugement du 06 février 2009, le tribunal correctionnel d'Ajaccio a renvoyé Mme E... née Z...A...des fins de la poursuite et, en l'état de la relaxe de cette dernière, a débouté les consorts X..., partie civile, de leur demande de renvoie sur les intérêts civils.
Par arrêt du 28 octobre 2009, la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Bastia a :
- déclaré les appels des consorts X...recevables, réformé le jugement sus-visé,
statuant à nouveau,
- rejeté les exceptions d'irrecevabilité et d'autorité de la chose jugée soulevées par l'avocate de Mme E... née Z...A...,
- déclaré l'action publique pour les délits de faux et d'usage de faux éteinte par l'effet de la prescription,
- débouté Mmes Marie-Josiane X...et Marie-Jeannette X...épouse C...de leur constitution de partie civile.
Par acte d'huissier du 07 septembre 2012, Mmes Marie-Josiane X...et Marie Jeanne C...née X..., ont assigné M. Dominique Otto Y...et Mme Caujolle A...épouse E..., devant le tribunal de grande instance d'Ajaccio, aux fins d'expulsion de cette dernière et de tous occupants de son chef, du local ci-dessus désigné, ainsi qu'au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de la somme de 1 000 euros, pour la période non prescrite (5 ans) à compter de la délivrance de l'assignation, et de celle 5 000, 00 euros, au titre de l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement réputé contradictoire du 03 février 2014, le tribunal de grande instance d'Ajaccio a, au visa de l'arrêt de la cour d'appel de Bastia en date du 18 juin 2002 :
- rejeté l'ensemble des demandes de Mmes Marie-Josiane X..., et Marie Jeanne C...née X...,
- condamné in solidum Mmes Marie-Josiane X..., et Marie Jeanne C...née X...à payer à Mme Marie Jeanne Z...A...épouse E..., la somme de 1 000 euros pour frais non taxables,
- ordonné l'exécution provisoire,
- laissé les dépens in solidum à la charge de Mmes Marie-Josiane X...et Marie Jeanne C...née X....
Par déclaration reçue le 20 février 2014, Mmes Marie-Josiane X..., et Marie Jeanne C...née X...ont interjeté appel de ce jugement à l'encontre de M. Dominique Y...et de Mme Marie Jeanne Z...A...épouse E....
Par conclusions reçues le 09 septembre 2014, Mme Isabelle E... épouse F..., est intervenue volontairement à la procédure.
Par acte d'huissier du 17 décembre 2014, les appelantes ont assigné M. Pierre B...en intervention forcée devant la cour avec signification de la déclaration d'appel.
Par ordonnance du 09 janvier 2015, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction de ces deux procédures.
Par leurs dernières conclusions reçues le 30 septembre 2014, les appelantes demandent à la cour de :
in limine litis, sur les conclusions prises dans les intérêts de M. Otto Y..., au visa des articles 112 et 114 du code de procédure civile,
- dire et juger lesdites conclusions nulles et de nul effet,
- dire et juger que M. Y...supportera ses propres dépens.
sur le fond,
- dire leur appel recevable et bien fondé,
en conséquence,
- réformer le jugement entrepris,
- débouter Mme E... née Z...A...de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
- constater que faute de détenir un bail commercial, Mme E... née Z...A...occupe le bien des concluantes sans droit ni titre-prononcer l'expulsion de Mme E... née Z...A...et de tous occupants de son chef (dont notamment M. Dominique Y...) des locaux leur appartenant sis ...à Propriano, avec au besoin le concours de la force publique,
- déclarer irrecevable l'intervention volontaire de Mme Isabelle E... épouse F...,
- débouter M. Y...de toutes ses demandes fins et conclusions dans l'hypothèse où la nullité de ses conclusions ne serait pas ordonnée,
- condamner Mme E... née Z...A...à une indemnité d'occupation mensuelle de 1 000 euros pour la période non prescrite (5 ans) à compter de la délivrance de l'acte introductif d'instance soit le 7 septembre 2012,
- condamner Mme E... née Z...A...au paiement d'une somme de 5 000, 00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance d'appel et de la première instance.
Par ses conclusions reçues le 18 juin 2014, M. Y...demande à la cour de :
- confirmer le jugement querellé,
- de condamner in solidum les appelantes au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, et à celle de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par ses dernières conclusions reçues le 02 décembre 2014, Mme Isabelle E... épouse F..., intervenante volontaire, demande à la cour de :
- déclarer recevable et bien fondée son intervention à titre principal, ès qualités de nue propriétaire du fonds de commerce,
- dire que la demande des appelantes se heurte à l'autorité de la chose jugée par la cour d'appel de Bastia le 18 juin 2002,
- confirmer la décision appelée en ce qu'elle a débouté les dames X...de leur demande,
- débouter Mmes X...de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions,
- condamner in solidum Mmes X...au paiement de la somme de 2 000 euros, au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par ses conclusions reçues le 07 décembre 2015, M. B..., intervenant forcé, demande à la cour de :
- dire que la demande de Mmes X...se heurte à l'autorité de la chose jugée,
- confirmer la décision appelée,
- condamner in solidum les appelantes au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil et 3 000 euros, au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens.
Par ordonnance du 02 juin 2015, le conseiller de la mise en état statuant sur incident, a, notamment :
- constaté l'irrecevabilité des conclusions de Mme Z...
A...épouse E..., notifiées le 07 février 2015, car hors du délai fixé par l'article 909 du code de procédure civile,
- dit que les pièces communiquées simultanément sont irrecevables.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 01 juillet 2015.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions sus-visées et au jugement entrepris.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de nullité des conclusions de M. Y...
Les appelantes soutiennent que Mme E... plaide par l'entremise de M. Y..., alors que celle-ci n'était plus recevable à conclure depuis le 16 juin 2014, en vertu de l'article 909 du code de procédure civile, et donc à intervenir à l'instance.
Les consorts X...relèvent que M. Y...n'avait pas constitué avocat en première instance et font valoir que ce dernier reprend rigoureusement la même argumentation que celle soutenue par Mme E... devant le premier juge.
Elles précisent que l'entreprise commerciale de Mme E... a été radiée du R. C. S d'Ajaccio dans le courant du mois de mai 2014 et que M. Y...n'apparaît ni comme locataire-gérant de cette entreprise, ni même comme exploitant à un autre titre, ce dernier résidant, en outre, à Limoges.
Elles affirment que M. Y...n'a aucun intérêt particulier à solliciter la confirmation du jugement querellé, une demande d'expulsion dirigée contre lui étant sans objet et une expulsion du ou des exploitants actuels de l'établissement étant sans conséquence à son égard.
M. Y...ne réplique pas expressément sur ce point mais précise toutefois qu'il dispose d'un titre régulier et qu'il n'y a donc pas lieu de prononcer son expulsion.
Il fait valoir que l'appel interjeté par les consorts X...lui occasionne un préjudice et qu'il a du constituer avocat.
Les parties intervenantes ne concluent pas sur ce point.
Les appelantes sollicitent la nullité des conclusions de M. Y..., sur le fondement, d'une part, des articles 112 et 114 du code de procédure civile et, d'autre part, du principe selon lequel " nul ne doit plaider par procureur ".
La cour relève que les articles 112 et 114 du code de procédure civile s'appliquent aux actes de procédures, or les conclusions d'avocat ne constituent pas un acte de procédure.
Par ailleurs, la règle " nul ne plaide par procureur " trouve à s'appliquer dans le cas où une partie soumettrait au juge une demande qui n'a pas vocation à satisfaire un droit qui lui est propre, le droit invoqué étant celui d'un tiers qui recevra le bénéfice exclusif de la réussite de l'action.
Le non-respect de ce principe par une partie, constitue un défaut d'intérêt et est une cause d'irrecevabilité des prétentions de celle-ci et non une cause de nullité de ses conclusions.
En outre, au vu de leurs conclusions sus-visées, les appelantes formulent des prétentions à l'encontre de M. Y..., ce dernier étant expressément nommé, dans le dispositif de leurs écritures aux termes duquel elles sollicitent son expulsion.
Au vu de ces éléments, il y a lieu de rejeter la demande des appelantes tendant à la nullité des conclusions de M. Y..., comme étant non valablement fondée.
Sur l'intervention volontaire de Mme E... épouse F...
Les appelantes soutiennent que Mme Isabelle E... épouse F..., n'a pas qualité pour agir, en invoquant l'absence d'immatriculation de cette dernière au Registre du Commerce et des Sociétés et donc le défaut de mention de son nom comme commerçante ou propriétaire non-exploitante du fonds de commerce de restaurant " Chez JoJo et Nadine ", exploité dans le local objet du bail litigieux.
Mme Isabelle E... épouse F...réplique qu'elle est la fille de M. Joseph E... et à ce titre usufruitière des biens de son père, ainsi qu'il résulte de l'acte de notoriété du 06 octobre 2008 de Me D..., notaire.
Elle soutient qu'en cette qualité son intervention volontaire est recevable dans la procédure diligentée par les consorts X...contre Mme Caujolle A...veuve E... usufruitière.
Aux termes de l'article 554 du code de procédure civile, les personnes qui n'ont pas été parties en première instance, peuvent intervenir en cause d'appel, dès lors qu'elles y ont intérêt.
Il n'est pas contesté, d'une part, que Mme E... épouse F...est l'enfant de M. Joseph E... et donc en cette qualité son héritière, en l'espèce, en nue-propriété (et non en usufruit) du fait de l'option successorale de Mme Caujolle A...veuve E..., et, d'autre part, que l'objet du litige porte sur des droits dépendant de la succession de M. Joseph E..., titulaire avec son épouse, du bail litigieux.
Au regard des dispositions de l'article 554 précité et au vu de ces éléments, la cour estime que Mme Isabelle E... épouse F...présente un intérêt à agir dans cette procédure.
Les appelantes seront donc déboutées de leur demande tendant à l'irrecevabilité de l'intervention volontaire de Mme Isabelle E... épouse F....
Sur le bail du 28 novembre 1998
En première instance, les consorts X...ont sollicité l'expulsion de Mme Caujolle A...épouse E... ainsi que de tous occupants de son chef, en soutenant que le bail du 28 novembre 1998 dont se prévaut Mme Marie-Jeanne E... née Z...A..., était un faux.
Le tribunal a considéré que le bail litigieux devait être considéré comme valable et que Mme Caujolle A...épouse E... était autorisée à donner son fonds en location-gérance, cette dernière ayant opté pour l'usufruit sur la totalité des biens dépendant de la succession de son époux, lequel était titulaire du bail.
Il a retenu que la seule décision qui fasse autorité était l'arrêt de la cour d'appel de Bastia en date du 18 juin 2002, passé en force de chose jugée et qu'aucune décision de nature pénale, n'était venue contredire cette décision.
Il a relevé, d'une part, que le tribunal correctionnel d'Ajaccio avait rendu un jugement de relaxe et, d'autre part, que l'arrêt de la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Bastia avait constaté la prescription de l'action publique.
Le tribunal a estimé qu'il ne saurait être fait état d'une escroquerie au " jugement " pour remettre en cause l'autorité de la chose jugée de l'arrêt sus-visé du 18 juin 2002, aucun recours en révision n'ayant été introduit pour faire rétracter cet arrêt passé en force de chose jugée pour qu'il soit de nouveau statuer en fait et en droit.
En cause d'appel, les consorts X..., reprennent leur moyen présenté en première instance, tiré de la fausseté du bail litigieux du 28 novembre 1998 et, devant la cour, soulèvent la nullité de ce bail.
Sur la fausseté du bail
Les appelantes reprennent leurs moyens et arguments de première instance et soutiennent que le tribunal n'a pas répondu à leurs moyens et notamment à celui selon lequel l'arrêt de la cour d'appel de Bastia du 8 juin 2002 " ne confère pas au principe de la véracité du prétendu bail du 28 novembre 1998, l'autorité de la chose jugée ".
Elles invoquent l'existence d'un fait nouveau, les investigations menées dans le cadre de la procédure pénale qui selon celles-ci mettent en exergue de façon quasi-scientifique, la fausseté du bail litigieux plainte, à savoir les rapports d'expertises du 11 août 2006 de M. Dominique J...et du 27 juin 2006 de M. Stéphane K..., outre l'examen technique de M. Jean-Louis L...du 30 janvier 2003.
Les consorts X...font valoir que l'arrêt du 28 octobre 2009 de la chambre correctionnelle de la cour d'appel, d'une part, a considéré que l'action publique était uniquement prescrite pour des faits situés dans la période de la prévention et ne sait donc pas pencher sur un usage de faux ultérieur au 31 décembre 2004, d'autre part, a reconnu de manière expresse, dans sa motivation, que le bail litigieux avait été falsifié.
Elles se prévalent de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, ainsi que de l'opposabilité de l'arrêt de la chambre criminelle à l'encontre de Mme E....
De leur côté, MM. B...et Y..., ainsi que Mme F...née E..., répliquent respectivement dans leurs écritures, que l'arrêt du 18 juin 2002 a conclu à la validité du bail du 28 novembre 1998 et a autorité de la chose jugée.
Ils relèvent que la juridiction pénale n'a pas eu à se prononcer sur l'existence éventuelle du délit de faux et d'usage de faux, que l'autorité de la chose jugée au civil peut être invoquée devant une juridiction civile.
A défaut d'élément nouveau, la cour estime que les premiers juges ont fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties et ont, pour de justes motifs qu'elle approuve, retenu que l'arrêt du 18 juin 2002 aux termes duquel le bail litigieux a été considéré comme valable, était passé en force de jugée.
En effet, l'autorité de la chose jugé en civil s'applique devant une juridiction civile et, en l'espèce, l'arrêt du 18 juin 2002 a statué au fond sur la question de la validité ou non du bail litigieux. Cette décision est définitive, dès los elle a autorité de la chose jugée.
En outre, il résulte clairement de l'arrêt du 28 octobre 2009, sus-visé, que la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Bastia qui a statué in limine litis sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action publique, n'a pas statué au fond sur le faux, de sorte que les appelants ne peuvent valablement se prévaloir de cette décision, dont, au demeurant, seul le dispositif, qui ne souffre d'aucune ambiguïté, doit être pris en compte.
Par ailleurs, la portée de l'autorité de chose jugée d'une décision de justice n'étant pas limitée dans le temps, il n'y a donc pas lieu de statuer à nouveau sur la question du faux, pour une période postérieure au 31 décembre 2004, comme l'allèguent à tort, les appelantes.
Il convient, en conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
Sur la nullité du bail
Les appelantes, invoquent les dispositions de l'article 565 du code de procédure civile et font valoir que leur demande de nullité du bail litigieux n'est en aucun cas une prétention nouvelle, celle-ci tendant à la même fin que ce qui a été sollicité du premier juge, à savoir reconnaître la nullité du bail, l'occupation sans droit ni titre de Mme Marie Jeanne Z...A...épouse E... et l'expulsion de cette dernière.
Sur le fond, elles soutiennent qu'aucun des enfants héritiers réservataires de M. Joseph E... (qu'il soit usufruitier du bien ou nu propriétaire) n'est inscrit au R. C. S et ne peut donc valablement prétendre à la propriété commerciale.
Elles affirment que Mme Marie-Jeanne E..., ne peut bénéficier du statut des baux commerciaux, ni prétendre être titulaire d'un bail (qui de surcroît, est un faux), lequel n'a donc aucune existence.
Les autres parties ne concluent pas sur cette demande de nullité.
Au regard des dispositions de l'article 565 du code de procédure civil, les demandes de nullité et de fausseté du bail litigieux, tendent aux mêmes fins, à savoir l'expulsion de Mme Marie Jeanne Z...A...épouse E... et de tous occupants de son chef.
Dès lors, la demande de nullité du bail dont s'agit ne constitue pas une demande nouvelle, comme l'allèguent, à juste titre, les consorts X....
S'agissant du fond, la cour relève qu'en application des dispositions des articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile, il y a autorité de la chose jugée lorsque la demande n'est pas nouvelle, le demandeur étant tenu de présenter dès l'instance relativement à la première demande, l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci.
Or, en l'espèce, le moyen de la nullité du bail litigieux n'ayant pas été invoqué devant le tribunal et ne constituant pas une demande nouvelle, se heurte à l'autorité de chose jugée.
La demande des appelantes est, en conséquence, irrecevable à ce titre.
Au surplus, au vu des éléments et pièces versés aux débats, la demande de nullité du bail litigieux présentée par les appelantes est mal fondée.
En effet, les éléments invoqués par les appelantes n'établissent en rien la nullité du contrat de location litigieux.
Il convient donc de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Sur les demandes de dommages et intérêts de MM. Y...et B...
M. Y...sollicite des dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil.
Il fait valoir qu'il a du constituer avocat et que l'appel interjeté par les consorts X...lui occasionne un préjudice.
Cependant, en l'espèce, le caractère fautif du recours exercé par les consorts X...à l'encontre de M. Y...n'est pas établi.
Au regard des dispositions de l'article 1382 précité, la demande de dommages et intérêts formulés par ce dernier n'est pas justifiée.
Il y a donc lieu de rejeter cette demande.
M. B...fonde sa demande de dommages et intérêts sur l'article 1382 sus-visé, sans toutefois, motiver et donc justifier celle-ci.
Dans ces conditions, il y a lieu de débouter ce dernier de sa demande à ce titre.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de Mmes X..., parties perdantes.
Le jugement entrepris sera confirmé, en ses dispositions à ce titre et les appelantes seront condamnées in solidum à payer la somme de 1. 500 euros, respectivement à, M. B..., Mme F...épouse E... et M. Y....
Les appelantes, succombant en leur recours, supporteront les entiers dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Déboute Mmes Marie-Josiane X...et Marie-Jeanne X...épouse C...de leur demande de nullité des conclusions de M. Dominique Y...,
Déboute Mmes Marie-Josiane X...et Marie-Jeanne X...épouse C...de leur demande d'irrecevabilité de l'intervention volontaire de Mme Isabelle E... épouse F...
Constate que la demande de nullité du bail litigieux, formulée en cause d'appel par Mmes Marie-Josiane X...et Marie Jeanne X...épouse C...ne constitue pas une demande nouvelle,
Déclare irrecevable la demande de nullité du bail litigieux, formulée en cause d'appel par Mmes Marie-Josiane X...et Marie-Jeanne X...épouse C..., au titre de l'autorité de la chose jugée,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute M. Dominique Y...de sa demande de dommages et intérêts,
Déboute M. Pierre B...de sa demande de dommages et intérêts,
Condamne in solidum, Mmes Marie-Josiane X...et Marie-Jeanne X...épouse C...à payer à M. Pierre B..., Mme Isabelle E... épouse F...et M. Dominique Y..., à chacun la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1 500 euros), au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de tous autres chefs de demandes,
Condamne in solidum, Mmes Marie-Josiane X...et Marie-Jeanne X...épouse C...aux entiers dépens d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT