Ch. civile A
ARRET No
du 14 DECEMBRE 2016
R. G : 14/ 00683 MB-C
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Tribunal d'Instance d'AJACCIO, décision attaquée en date du 27 Mars 2014, enregistrée sous le no 1112000563
X...
C/
Y... X... Z...
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU
QUATORZE DECEMBRE DEUX MILLE SEIZE
APPELANT :
M. Antoine X... né le 23 Juillet 1939 à PORTO-VECCHIO (20137)... 20137 PORTO-VECCHIO
ayant pour avocat Me Marie Line ORSETTI, avocat au barreau d'AJACCIO
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/ 2549 du 08/ 10/ 2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)
INTIMES :
Mme Monique Y... épouse Z... née le 23 Mai 1948 à DIJON (21000)... 20137 PORTO-VECCHIO
ayant pour avocat Me Marie Laure BATTESTI, avocat au barreau d'AJACCIO
M. Noël Z... né le 16 Mars 1938 à SAN GAVINO DI CARBINI... 20137 PORTO-VECCHIO
ayant pour avocat Me Marie Laure BATTESTI, avocat au barreau d'AJACCIO
Mme Paule X... épouse B... née le 17 Juillet 1943 à PORTO-VECCHIO (20137)... 20137 PORTO-VECCHIO
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 10 octobre 2016, devant M. François RACHOU, Premier président, et Micheline BENJAMIN, Conseiller, l'un de ces magistrats ayant été chargé du rapport, sans opposition des avocats.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. François RACHOU, Premier président Mme Micheline BENJAMIN, Conseiller Mme Emmanuelle BESSONE, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Cécile BORCKHOLZ.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2016.
ARRET :
Réputé contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. François RACHOU, Premier président, et par Mme Cécile BORCKHOLZ, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
M. Noël Z... et Mme Monique Y..., épouse Z..., sont propriétaires d'une parcelle de terre située à Porto-Vecchio, au Hameau de..., cadastrée section B no1386.
M. Antoine X... et Mme Paule X... épouse B... sont propriétaires indivis d'une parcelle voisine, cadastrée section B no 905.
Par acte d'huissier du 5 novembre 2010, les époux Z... ont assigné M. Antoine X... en bornage devant le tribunal d'instance d'Ajaccio.
Par jugement contradictoire du 16 novembre 2011, le tribunal a fait droit à cette demande et a ordonné une mesure d'expertise préalable, confiée à M. D....
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 17 octobre 2012.
Par acte d'huissier en date du 21 mai 2013, les époux Z... ont appelé en intervention forcée Mme Paule X... épouse B..., propriétaire indivis avec son frère, M. Antoine X..., de la parcelle B no905.
Les deux instances ont été jointes par ordonnance du 4 juin 2013.
Par jugement contradictoire du 27 mars 2014, le tribunal a :
- constaté les limites séparatives des fonds ci-dessus désignés, cadastrés section B 1386 et B 905, et le bornage conformément plan d'état des lieux et de délimitation établi par la SCP J...- ..., annexé au rapport d'expertise de M. D...,
- débouté les consorts X... de l'ensemble de leurs demandes,
- condamné M. Antoine X... à payer aux époux Z..., la somme de 1 000 euros sur le fondement de 700,
- rejeté toute autre demande,
- condamné M. Antoine X... aux entiers dépens, en ceux compris les frais de l'expertise judiciaire.
Par déclaration reçue le 04 août 2014, M. Antoine X... a interjeté appel de ce jugement.
Par ses conclusions reçues le 09 février 2016, l'appelant demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant de nouveau, de :
- débouter les époux Z... de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- dire et juger que l'action intentée par les époux Z... est abusive,
En conséquence,
- condamner les époux Z... à une amende civile laissée à l'appréciation de la juridiction de céans,
- les condamner à lui payer la somme de 1 500 euros, au titre des dommages et intérêts,
- les condamner à lui payer la somme de 1 794 euros, au titre des frais irrépétibles, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise et du constat d'huissier en date du 13 octobre 2010 d'un montant de 423, 78 euros,
A titre subsidiaire,
- ordonner le partage des frais d'expertise.
Par leurs conclusions reçues le 09 février 2016, les époux Z... demandent à la cour de :
- débouter M. X... de l'ensemble de ses demandes,
- confirmer en tous points les dispositions du jugement entrepris
Y ajoutant,
- constater l'attitude dilatoire de M. X..., que ces manœuvres dilatoires leur portent directement préjudice,
En conséquence :
- condamner M. X... à leur payer la somme de 3 000 euros, au titre de l'article 1382 du code civil,
En tout état de cause :
- condamner solidairement M. Antoine X... et Mme Paule X... épouse B... à leur payer la somme de 3 500 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.
Mme Paule X... épouse B..., assignée à personne, n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 février 2016.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions sus-visées et au jugement déféré.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le bornage
M. X... sollicite la réformation du jugement querellé et le rejet des demandes des époux Z... en soutenant à nouveau qu'un bornage avait été effectué antérieurement et donc qu'il n'y avait pas lieu d'accueillir l'action de ces derniers contre lui.
Il ajoute que les époux Z... savaient pertinemment qu'il était question d'une servitude de passage.
L'appelant reprend ses moyens et arguments de première instance, en se fondant sur les dispositions de l'article 646 du code civil et en s'appuyant sur les mêmes pièces, à savoir le procès-verbal de constat d'huissier dressé le 13 octobre 2010, par Me E..., et un plan des lieux établi, le 15 février 1995, par la SCP J...- ..., géomètres-experts.
Il invoque aussi les observations de Me E... dans le procès-verbal sus-visé, attestant qu'il existe d'ores et déjà des bornes, ainsi que les déclarations de Me F..., constatant qu'il existe des bornes qui indiquent la limite entre les deux parcelles.
Il fait valoir que les époux Z..., en dépit de l'état d'enclavement, tentent de détourner la procédure de bornage et de tromper la juridiction, ces derniers ayant parfaitement reconnu dès que l'expert s'est présenté, qu'il s'agissait d'une question de servitude de passage en non d'un bornage.
De leur côté, les époux Z... concluent que l'appelant n'a jamais invoqué lors de la tentative de bornage amiable de 2010, l'existence d'un bornage contradictoire entre les parties, celui-ci s'étant contenté de refuser la limite divisoire proposée par le géomètre-expert, M. G....
Ils exposent que les parties avaient été convoquées par ce géomètre, à une réunion de bornage en date du 7 mai 2010 et que lors de cette réunion, M. X... a refusé la limite divisoire proposée par celui-ci, de sorte qu'il a établi un constat de carence, le 10 juin 2010, précisant « La réunion de bornage amiable a été fixée pour le vendredi 7 mai 2010 sur place à 10H. Ce dernier (M. X...) n'ayant pas accepté la limite que nous proposions, suite à nos travaux, la dite limite ne peut être validée car le caractère contradictoire du bornage amiable fait défaut › ›.
Ils ajoutent que M. X... ne verse pas aux débats de procès-verbal de bornage amiable signé par les parties et se contente de produire le procès-verbal du 13 octobre 2010 établi par Me E..., qui ne fait que reprendre les affirmations unilatérales de celui-ci et ne tient nullement lieu de constatations des deux parties.
Les intimés soulignent que le plan de la SCP J... n'est pas signé par les parties et affirment qu'il ne saurait donc avoir la valeur d'un plan de bornage amiable.
Ils soulignent que si une demande de bornage peut être refusée en cas de délimitation antérieure ou en présence d'éléments permettant de délimiter les propriétés sans recourir à un bornage, il faut que les limites de propriété aient été légalement constatées et que les signes matériels qui les prévoient aient été placés d'un commun accord entre les propriétaires ou à la suite d'une instance judiciaire, ce qui n'est nullement le cas en l'espèce.
Ils précisent que les murs, haies et autres clôtures ne sont pas des bornes selon les usages et que la simple délimitation ne peut se confondre avec le bornage qui a pour objet de constater de manière immuable cette délimitation.
A défaut d'éléments nouveaux, la cour estime que le premier, juge a pour de justes motifs, qu'elle approuve, retenu, d'une part, que le tribunal avait, dans son jugement du 16 novembre 2011, fait droit à la demande en bornage judiciaire et, d'autre part, que nonobstant les conclusions de l'expert judiciaire indiquant que les parties ne sont en réalité pas en désaccord quant aux limites séparatives de leurs fonds respectifs, un bornage judiciaire était absolument nécessaire.
En effet, il convient de constater que le tribunal dans son jugement du 16 novembre 2011, ordonnant l'expertise judiciaire, a considéré que les documents produits par M. X... pour s'opposer à la demande en bornage, à savoir le plan d'état des lieux établi par la SCP J...-... et le procès-verbal de constat d'huissier, sus-visés, " ne sauraient être considérés comme démontrant l'existence d'un bornage antérieur amiable pouvant faire obstacle à la demande ".
Dans le jugement entrepris, le premier juge se fonde sur les dispositions de l'article 646 du code civil et se réfère à cette motivation. En outre, aucune des pièces produites par l'appelant ne démontre l'existence d'un bornage contradictoirement établi entre les parties antérieurement à la présente procédure de bornage judiciaire.
Il résulte des documents émanant du géomètre M. G..., produits par les intimés, (copie de la lettre de convocation adressée à M. X... et procès-verbal de carence dressé le 10 juin 2010) que, contrairement aux allégations de l'appelant, ce géomètre était chargé de procéder à un bornage amiable entre la parcelle des époux Z... et la parcelle No 905, lui appartenant, de sorte que celui-ci était bien concerné et, au vu de ces pièces, que ce géomètre n'intervenait pas pour l'établissement d'une servitude de passage.
Par ailleurs, s'il est effectivement constaté que les parties se sont accordées sur les limites séparatives de leurs propriétés respectives résultant de la délimitation objet du plan d'état des lieux établi par la SCP J...- ..., cette position commune des parties, ne s'est dégagée que dans le cadre de l'expertise judiciaire.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions sur ce point.
Sur les demandes de l'appelant de dommages et intérêts et d'amende civile
Le premier juge a, à juste titre, considéré que l'action en bornage des époux Z... n'était pas abusive et a, en conséquence, débouté les consorts X... de leur demande de dommages et intérêts fondée sur ce moyen.
Pour la même raison et rappelant les dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile, il a aussi estimé qu'il n'y avait pas lieu à amende civile.
L'appelant sollicite à nouveau des dommages et intérêts pour procédure abusive et dilatoire, ainsi que la condamnation des intimés à une amende civile, en application des dispositions de l'article 582 du code procédure civile.
En l'espèce, en l'absence d'éléments nouveaux, nonobstant la constatation par les époux Z... des limites séparatives telles que déjà existantes, le caractère abusif et dilatoire de l'action en bornage judiciaire de ces derniers n'est pas établi.
En conséquence, le jugement querellé sera confirmé en ce qu'il a débouté les consorts X... de leur demande de dommages et intérêts et de condamnation des époux Z... à une amende civile.
Sur la demande des intimés de dommages et intérêts
Devant la cour, les intimés sollicitent des dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil.
Ils invoquent l'attitude et les manoeuvres dilatoires de l'appelant leur portant directement un préjudice.
Ils font état, notamment, de plusieurs demandes de renvois et d'incidents multipliés par M. X... de manière systématique la veille de chaque audience, parfaitement injustifiées.
L'appelant ne conclut pas sur cette demande de dommages et intérêts formulée pour la première fois par les époux Z....
Au regard des dispositions de l'article 1382 du code civil, sur lequel se fondent les intimés, et au vu des moyens et arguments présentés par ces derniers, en l'espèce, la responsabilité délictuelle de M. X..., n'est pas établie.
En outre, il est observé que, comme le relève à juste titre, le premier juge, les demandes des époux Z... sont ambiguës, ces derniers sollicitant la constatation des limites séparatives et le bornage conformément au plan d'état des lieux matérialisant, notamment, une éventuelle servitude de passage sur la parcelle B 905 ce plan ne constituant pas en outre, un procès-verbal de délimitation.
Au vu de ces éléments, les intimés seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Il n'est pas inéquitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions à ce titre et les parties seront déboutées de leurs demandes respectives sur ce même fondement.
L'appelant, succombant en son recours, supportera les entiers dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déboute M. Noël Z... et Mme Monique Y... épouse Z... de leur demande nouvelle de dommages et intérêts ;
Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;
Déboute les parties de tous autres chefs de demandes ;
Condamne M. Antoine X... aux entiers dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT