Chambre civile
Section 2
ARRÊT N°
du 8 FÉVRIER 2023
N° RG 22/00006
N° Portalis DBVE-V-B7G-CCYJ SM - C
Décision déférée à la Cour :
Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BASTIA, décision attaquée en date du
7 Décembre 2021, enregistrée sous le n° 21/00050
S.A. CNP ASSURANCES
C/
[P]
Copies exécutoires délivrées aux avocats le
COUR D'APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU
HUIT FÉVRIER DEUX-MILLE-VINGT-TROIS
APPELANTE :
S.A. CNP ASSURANCES
venant aux droits de la SA ECUREUIL VIE dont le siège social est sis [Adresse 2], et agissant aux diligences de son président directeur général domicilié ès qualités au siège social
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Lyria OTTAVIANI, avocate au barreau de BASTIA
INTIMÉE :
Mme [A] [P]
née le 5 Septembre 1969 à [Localité 1]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Christelle ELGART, avocate au barreau de BASTIA
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/102 du 17/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASTIA)
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 novembre 2022, devant Stéphanie MOLIES, conseillère, chargée du rapport, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Jean-Jacques GILLAND, président de chambre
Judith DELTOUR, conseillère
Stéphanie MOLIES, conseillère
GREFFIER LORS DES DÉBATS :
Cécile BORCKHOLZ.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 8 février 2023.
ARRÊT :
Contradictoire,
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Jean-Jacques GILLAND, président de chambre, et par Cécile BORCKHOLZ, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :
Par acte sous seing privé du 5 janvier 1998, [J] [P] a souscrit auprès de la S.A. Ecureuil vie un contrat d'assurance-vie 'Initiatives transmission' distribué par la S.A. Caisse d'épargne Provence-Alpes-Corse en procédant à un versement initial de 100 000 euros et en désignant en qualité de bénéficiaire son conjoint, à défaut ses enfants nés ou à naître, à défaut ses héritiers.
Suivant demande d'avenant du 25 mai 2014 au contrat 'Initiatives transmission', [J] [P] a modifié la clause bénéficiaire afin de désigner Mme [A] [P], à défaut ses descendants, à défaut les héritiers de Mme [A] [P].
Suivant demande d'avenant du 27 janvier 2015 au même contrat 'Initiatives transmission', [J] [P] a modifié la clause bénéficiaire dans les termes suivants :
'50 pour cent à [P] [O] né 09 Juil 1957 Cinquante pour cent par parts égales à [P] [C] né 28 Juil 1955 [P] [U] né 22 Mars 1959 [P] [E] né 13 août 1960 [P] [I] née 13 Déc 1961 [P] [X] née 21 Déc 1962 [P] [H] [Y] né 02 Avril 1964 [P] [Y] 7 Juin 1966 [P] [S] né 07 Sept 1965 [P] [A] 05 Sept 1969, à défaut mes héritiers'.
Par acte sous seing privé du 6 décembre 2004, [J] [P] a souscrit auprès de la S.A. Ecureuil vie un contrat d'assurance-vie 'Initiatives plus' distribué par la S.A. Caisse d'épargne Provence-Alpes-Corse en procédant à un versement initial de 88 900 euros et en désignant en qualité de bénéficiaire son conjoint non séparé de corps, à défaut ses enfants par parts égales, nés ou à naître, à défaut de l'un de ses descendants, à défaut ses héritiers.
Suivant demande d'avenant du 25 mai 2014 au contrat 'Initiatives plus', [J] [P] a modifié la clause bénéficiaire afin de désigner Mme [A] [P], à défaut ses descendants, à défaut les héritiers de Mme [A] [P].
Suivant demande d'avenant du 27 janvier 2015 au même contrat 'Initiatives plus', [J] [P] a modifié la clause bénéficiaire dans les termes suivants :
'50 pour cent à [P] [O] né 09 Juil 1957 Cinquante pour cent par parts égales à [P] [C] né 28 Juil 1955 [P] [U] né 22 Mars 1959 [P] [E] né 13 août 1960 [P] [I] née 13 Déc 1961 [P] [X] née 21 Déc 1962 [P] [H] [Y] né 02 Avril 1964 [P] [Y] 7 Juin 1966 [P] [S] né 07 Sept 1965 [P] [A] 05 Sept 1969, à défaut mes héritiers'.
[J] [P] est décédé le 24 avril 2019.
Par traité de fusion des 9 et 16 juillet 2007 prenant effet au 1er janvier 2007, la S.A. Ecureuil vie a été absorbée par la S.A. CNP Assurances.
Le 22 août 2019, la S.A. Caceis bank, teneur de compte, a versé à Mme [A] [P] la somme de 222 080,10 euros pour le compte de la S.A. CNP Assurances.
Suivant acte d'huissier du 7 janvier 2021, la S.A. CNP Assurances a fait citer Mme [A] [P] devant le tribunal judiciaire de Bastia aux fins de voir :
- condamner Mme [A] [P] à paiement à la CNP Assurances de la somme de 213 120,74 euros,
- condamner Mme [A] [P] aux dépens, sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile, et à paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par décision du 7 décembre 2021, le tribunal judiciaire de Bastia a :
- débouté la CNP Assurances de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la CNP Assurances à payer à Mme [P] [A] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la CNP Assurances à payer les entiers dépens.
Suivant déclaration enregistrée le 5 janvier 2022, la S.A. CNP Assurances, représentée, a interjeté appel de la décision susvisée en ces termes :
'Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués, la réformation du jugement étant demandée en ce qu'il a : - débouté la SA CNP Assurances de l'ensemble de ses demandes - condamné la SA CNP Assurances à payer à Madame [P] [A] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile - condamné la SA CNP Assurances à payer les entiers dépens En conséquence, la SA CNP Assurances demandera à la Cour : - de condamner Madame [A] [P] à lui payer la somme de 213.120,72 €uros - de condamner Madame [A] [P] aux dépens de première instance et d'appel et à lui payer la somme de 4.000,00 €uros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.'
Par dernières conclusions régulièrement notifiées le 3 septembre 2022, la S.A. CNP assurances venant aux droits de la SA Ecureuil vie, représentée, a demandé à la cour de :
- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SA CNP Assurances de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à paiement des dépens ainsi que de la somme de 2.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- Condamner Madame [A] [P] à paiement à la SA CNP Assurances de la somme de 213.120,72 euros ;
- Débouter Madame [P] de ses demandes, fins et conclusions ;
- Condamner Madame [A] [P] aux dépens de première instance et d'appel, sur le fondement de l'article 696 du Code de procédure civile, et à paiement de la somme de 4.000,00 €uros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par dernières conclusions régulièrement notifiées le 28 avril 2022, Mme [A] [P] a demandé à la juridiction d'appel de :
À titre principal, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé les avenants du 27 janvier 2015 inopposables à madame [A] [P] et a débouté la SA ASSURANCES de l'ensemble de ses demandes,
À titre subsidiaire,
Juger que la SA CNP ASSURANCES a commis une faute,
En conséquence retenir sa responsabilité délictuelle et la voir condamner à réparer le préjudice subi par madame [P],
La condamner à verser à Madame [P] [E] [R] les sommes suivantes :
- 46378,72 € au titre du préjudice financier (somme à parfaire)
- 50,000 € au titre du préjudice moral
Juger que la créance de la CNP ASSURANCS s'élève à la somme de 203397,38 €
Voir condamner la SA CNP ASSURANCES à verser à madame [P] la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du CPC, ainsi que les entiers dépens d'instance et d'appel.
Par ordonnance du 8 septembre 2022, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de la procédure au 2 novembre 2022 et fixé l'affaire à plaider devant le conseiller rapporteur au 21 novembre 2022 à 8 heures 30.
Le 21 novembre 2022, la présente procédure a été mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe le 8 février 2023.
La cour, pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, fait expressément référence à la décision entreprise ainsi qu'aux dernières conclusions notifiées par les parties.
SUR CE
La société appelante se prévaut des dispositions de l'article L132-8 alinéa 6 du code des assurances pour affirmer qu'à la seule condition d'une non-acceptation par le bénéficiaire initialement désigné, le souscripteur d'une assurance peut procéder à un changement de bénéficiaire, cette modification étant opposable à l'assureur dès le moment où elle est portée à sa connaissance.
Elle explique qu'en l'espèce, alors que le changement de bénéficiaire a été porté à sa connaissance, elle a commis une erreur en réglant le capital entre les mains de Mme [A] [P] précédemment désignée en cette qualité.
Elle souligne que le changement de bénéficiaire a été régulièrement opéré puisque Mme [A] [P] n'avait pas accepté la clause bénéficiaire antérieure. Elle précise à ce titre que le fait de solliciter le règlement du capital à son profit après le décès du souscripteur ne vaut pas acceptation. Elle observe que les avenants litigieux ont été régularisés par l'assuré souscripteur en présence de l'assureur, et en déduit que la modification avait nécessairement été portée à sa connaissance. Elle reproche au premier juge d'avoir énoncé que les avenants ne comportaient aucun tampon de réception ou de traitement alors qu'ils ont été reçus et traités par la société Ecureuil vie caisse d'épargne le 27 janvier 2015, jour de leur signature.
La société appelante précise que la Caisse d'épargne est le distributeur des contrats d'assurance sur la vie, gérés par la S.A. CNP par suite de sa fusion avec la S.A. Écureuil vie ayant pris effet le 1er janvier 2008.
Elle relève qu'il ressort notamment des annexes au traité de fusion que la S.A. Écureuil vie a notamment transmis à la S.A. CNP assurances les marques 'Initiatives transmission' et 'Initiatives plus', et souligne que les avenants en cause mentionnent, en bas de page, les coordonnées de la S.A. CNP assurances et en entête, la dénomination 'Ecureuil vie'.
Elle ajoute que la circonstance du remplacement de la S.A. CNP assurances par la S.A. Natixis Assurances comme l'opérateur unique des Caisses d'épargne pour les nouveaux contrats d'assurance vie au 1er janvier 2016 est inopérante dans le présent litige.
De même, elle soutient que le fait qu'elle ait égaré les avenants en cause et, dès lors, payé par erreur le capital de chacun des contrats entre les mains de Mme [P] avant d'être alertée par M. [N] [P] est dépourvu d'incidence sur la validité des avenants en litige et sur leur opposabilité à Mme [P].
Elle explique que si les avenants n'avaient pas été portés à sa connaissance, elle aurait pu inviter les bénéficiaires nouvellement désignés à agir en justice à l'encontre de Mme [A] [P] sur le fondement de l'article L132-25 du code des assurances.
Elle indique enfin qu'il n'y a pas lieu de déduire la somme de 9 723,34 euros saisie à titre conservatoire dont elle n'aura pas la disposition jusqu'au prononcé de l'arrêt à intervenir.
En réponse, Mme [P] fait valoir qu'il ressort très clairement d'un écrit même de la CNP Assurances du 31 juillet 2020 que cette dernière a pris connaissance du second avenant après le versement des fonds à Mme [A] [P] et donc après le décès de [J] [P].
Elle relève, par ailleurs, que les demandes des avenants du 26 mai 2014 portent un tampon de réception et un tampon de traitement, alors que les demandes d'avenants du 27 janvier 2015 sont dépourvues de tampon.
Elle en déduit que ces avenants n'ont été ni portés à la connaissance de l'appelante, ni traités par elle et que les changements de bénéficiaires ainsi opérés doivent être privés d'effet pour avoir été envoyés à l'assureur après le décès du souscripteur.
En tout état de cause, elle soutient avoir accepté le bénéfice des deux assurances-vie avant que les avenants de 2015 ne soient traités.
Elle attire l'attention de la cour sur le fait que la Caisse d'épargne n'est pas Ecureuil vie donc la CNP assurances : il s'agirait de deux entités différentes. Seule la société Ecureuil vie aurait été absorbée par la CNP assurances et disparu.
Elle observe que l'avenant a été souscrit au sein de la Caisse d'épargne et non Ecureuil vie qui n'existait plus juridiquement au moment de la signature des avenants.
Elle soutient que lorsqu'une personne souscrit un contrat auprès de son établissement bancaire, il n'est valide qu'après avoir été traité par l'assureur lui-même, et souligne que le document versé au débat n'est pas un avenant mais une 'demande d'avenant'.
La partie intimée affirme que la Caisse d'épargne ne joue qu'un rôle d'intermédiaire : elle n'est pas l'assureur et ne fait pas partie de la CNP assurances. Or pour recevoir effet, l'avenant devrait être reçu et traité par l'assureur.
L'article L132-8 du code des assurances prévoit en son 6ème alinéa qu'en l'absence de désignation d'un bénéficiaire dans la police ou à défaut d'acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre. Cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu'avec l'accord de l'assuré, lorsque celui-ci n'est pas le contractant. Cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d'avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l'article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire.
En application de cette disposition, est privée d'effet la substitution du bénéficiaire, dans un écrit du souscripteur envoyé après son décès à l'assureur, qui n'en a donc pas eu connaissance du vivant de l'assuré, et alors que cet écrit n'est pas qualifié de testament olographe.
D'autre part, il résulte de l'article L132-9-II du code des assurances que tant que l'assuré et le stipulant sont en vie, l'acceptation est faite par un avenant signé de l'entreprise d'assurance, du stipulant et du bénéficiaire. Elle peut également être faite par un acte authentique ou sous seing privé, signé du stipulant et du bénéficiaire, et n'a alors d'effet à l'égard de l'entreprise d'assurance que lorsqu'elle lui est notifiée par écrit.
Lorsque la désignation du bénéficiaire est faite à titre gratuit, l'acceptation ne peut intervenir que trente jours au moins à compter du moment où le stipulant est informé que le contrat d'assurance est conclu.
Après le décès de l'assuré ou du stipulant, l'acceptation est libre.
En l'espèce, si Mme [P] se prévaut d'une acceptation du bénéfice des deux assurances-vie avant que l'avenant de 2015 ne soit traité, elle ne justifie d'aucun acte d'acceptation dans les formes édictées par l'article susvisé antérieurement à la signature de la demande d'avenant du 27 janvier 2015.
Il convient dès lors, en premier lieu, d'examiner la question de la notification des demandes d'avenants de 2015 à l'assureur.
Il appartient à ce titre à la CNP assurances, qui fonde sa demande sur la substitution de bénéficiaires, de rapporter la preuve de sa connaissance des demandes d'avenant en cause avant le décès de [J] [P].
Il sera observé à ce propos qu'il résulte très clairement des demandes d'avenant versées au débat que celles-ci ont été régularisées par [J] [P] au sein de l'agence bastiaise de la Caisse d'épargne de Provence Alpes Corse, et non dans les locaux de la S.A. CNP assurances, même si le nom de l'assureur figure en bas de page.
Les documents visent en effet, sous l'entête Ecureuil vie -Caisse d'épargne, les éléments suivants :
'Caisse d'Epargne de Provence Alpes Corse
Votre agence : [Localité 1]
Votre conseiller : [D] [L]'.
Le tampon apposé sur la signature du chargé de clientèle porte par ailleurs la mention 'Caisse d'épargne Provence Alpes Corse', ce qui démontre que la signature de [J] [P] a été a reçue par un employé de l'établissement bancaire et non par un employé de la société d'assurance.
Il n'est pas contesté que la S.A. Ecureuil vie n'existait plus juridiquement le 27 janvier 2015, de sorte que la mention 'Ecureuil vie' en entête du document ne pouvait faire référence à cette société.
En outre, la référence à la S.A. CNP assurances figurant en bas de page vise uniquement à informer le souscripteur du nom de l'assureur, la Caisse d'épargne de Provence Alpes Corse étant un intermédiaire entre les parties, assurant la distribution des contrats d'assurance.
Seul le siège social de la CNP Assurances à [Localité 5] est d'ailleurs indiqué en bas de page et le document ne vise aucune agence locale en Corse au sein de laquelle [J] [P] aurait pu déposer sa demande.
A l'instar de la partie intimée, il sera relevé à ce titre que l'ensemble des documents versés au débat au titre des modifications des clauses bénéficiaires s'intitulent 'Demande d'avenant' et non 'avenant', ce qui conforte l'analyse selon laquelle la S.A. Caisse d'épargne de Provence Alpes Corse, établissement bancaire, a reçu la demande de [J] [P], à charge pour une partie de l'adresser ensuite à l'assureur pour traitement de la demande et régularisation d'un avenant.
Or force est de constater que si les demandes d'avenant signées le 25 mai 2014 font apparaître deux tampons 'reçu le' et 'traité le', aucun tampon de cette nature ne figure sur les deux demandes d'avenant signées le 27 janvier 2015, alors que la S.A. CNP assurances ne produit aucun autre justificatif permettant d'établir qu'elle a eu connaissance des deux demandes avant le décès de [J] [P].
Les éléments factuels et les pièces figurant aux dossiers plaident au contraire pour une absence de notification des demandes d'avenant à l'assureur avant le décès de [J] [P].
Le défaut de connaissance des demandes d'avenant de [J] [P] par la S.A. CNP assurances explique, en effet, que l'assureur ait libéré les fonds entre les mains de Mme [A] [P], précédemment désignée bénéficiaire au terme des deux demandes d'avenant signées le 25 mai 2014 et traitées le 5 juin 2014.
En outre, la S.A. CNP assurances n'a fait état d'une erreur de sa part que le 31 juillet 2020 pour la première fois, soit postérieurement au courrier du 3 juin 2020 de M. [N] [P] se prévalant des deux documents du 27 janvier 2015.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la S.A. CNP assurances ne démontre pas que les demandes d'avenant signées le 27 janvier 2015 par [J] [P] lui ont été adressées avant le décès de ce dernier.
En application de l'article L132-8 du code des assurances susvisé, les demandes d'avenant litigieuses doivent donc être privées d'effet.
Par suite, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la S.A. CNP assurances de sa demande en paiement à l'égard de Mme [P].
Sur les autres demandes
La S.A. CNP assurances, qui succombe, sera condamnée au paiement des dépens.
D'autre part, il n'est pas équitable de laisser à Mme [P] les frais irrépétibles non compris dans les dépens ; la S.A. CNP assurances sera dès lors condamnée à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En revanche, la S.A. CNP assurances sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement entrepris en toutes les dispositions qui lui sont dévolues,
Y ajoutant,
Condamne la S.A. CNP assurances au paiement des dépens,
Condamne la S.A. CNP assurances à payer à Mme [A] [P] la somme de
3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute la S.A. CNP assurances de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT