J. F. P. / D. M. 2007 / 00368
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16 JANVIER 2008
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Demande d'extradition par les autorités turques
X...
Ordonne un supplément d'information
La CHAMBRE de L'INSTRUCTION de la COUR d'APPEL de BESANCON réunie en audience publique de ce jour SEIZE JANVIER DEUX MILLE HUIT au Palais de Justice de ladite Ville,
En présence de :
X... né le 1er Avril 1974 à ELBISTAN (TURQUIE) de Y... et de Z...
Actuellement détenu à la Maison d'Arrêt de BESANCON
Placé sous écrou extraditionnel le 8 novembre 2007
Objet d'une procédure diligentée à la demande des autorités turques pour des faits de viol commis sur mineur de quinze ans
En présence de Madame Nevin DURSUN, interprète en langue turque, expert près la Cour d'Appel de Besançon,
Ayant pour avocat Maître QUENOT au barreau de BELFORT
Vu les avis régulièrement notifiés à X... et à son avocat le 13 décembre 2007 conformément à l'article 197 du Code de procédure pénale pour l'audience du 19 décembre 2007
Monsieur le PROCUREUR GENERAL comme il est représenté ayant déposé son réquisitoire écrit, signé et daté du 17 décembre 2007
Vu le mémoire déposé le 18 décembre 2007 par Maître QUENOT pour X...
Après avoir entendu :
Monsieur le Président PONTONNIER en son rapport,
X... en ses observations,
Maître QUENOT, en ses observations présentées pour X...,
Monsieur BONIN, Substitut Général, en ses réquisitions,
X... ayant eu la parole en dernier,
La Chambre de l'Instruction met l'affaire en délibéré et renvoie le prononcé de l'arrêt à l'audience du SEIZE JANVIER DEUX MILLE HUIT, Et ledit jour, après en avoir délibéré conformément à la loi, hors la présence du Ministère public et du greffier, la Chambre de l'instruction composée des mêmes magistrats qu'à l'audience du 19 décembre 2007, a statué en ces termes :
Rappel de la procédure
Le 27 septembre 2007, une demande d'arrestation provisoire était délivrée par les autorités turques et transmise par INTERPOL FRANCE à l'encontre de M. X..., susceptible de résider en ALLEMAGNE ou ....
Le 8 novembre 2007, cette fiche de recherche était notifiée à l'intéressé qui était placé en rétention pour une durée de 24 heures en attente de sa présentation devant le Procureur de la République de BELFORT. Il était présenté le 8 novembre 2007 à 16 heures à ce magistrat qui procédait à son interrogatoire d'identité et lui notifiait une demande d'extradition et ordonnait son placement sous écrou extraditionnel.
Les autorités turques demandaient aux autorités françaises par message du 9 novembre 2007 la durée de l'état d'arrestation provisoire et la date buttoir pour envoyer les documents extraditionnels par la voie diplomatique.
Le 23 novembre 2007, ces documents étaient adressés aux autorités françaises par la voie diplomatique et notifiés à l'intéressé par le représentant de Monsieur le Procureur Général le 12 décembre 2007 qui dressait procès-verbal.
Le 19 décembre 2007, la chambre de l'Instruction procédait à l'examen de la demande d'extradition.
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Dans ses réquisitions écrites, Monsieur le Procureur Général rappelle que :-l'extradition a été demandée afin de permettre l'exécution d'une peine de 5 ans 23 mois et 10 jours d'emprisonnement prononcée par la Cour d'assises d'ELBISTAN le 22 octobre 1998 avec mandat d'arrêt du parquet général le 6 janvier 2006 pour des faits de viol sur mineure de 15 ans,-la condamnation prononcée est supérieure à quatre mois comme l'exige les dispositions de l'article 2 de la Convention d'extradition du 13 décembre 1957,-les faits commis sont punis par les lois de la partie requérante et la partie requise d'une peine privative de liberté ou d'une mesure de sûreté privative de liberté au maximum d'au moins un an ou d'une peine plus sévère.
Les faits fondant la condamnation pouvant être qualifiés de viol et séquestration au regard de la législation française, le parquet général émet un avis favorable à la demande d'extradition.
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M. X.... a régulièrement déposé un mémoire auquel la Cour entend se référer pour l'exposé détaillé des moyens, mémoire dans lequel il fait valoir que :
1o) il s'est vu notifié par le Parquet de BELFORT une procédure d'extradition et non d'arrestation provisoire, que par conséquent il y avait lieu d'appliquer les dispositions de l'article 696-10 du Code de procédure pénale et non celles des articles 696-23 et 24 du même code.
Le défaut de respect des délais légaux entraîne ainsi la nullité de la procédure.
2o) l'arrestation provisoire n'est possible qu'en cas d'urgence. Or en l'espèce, la situation d'urgence n'est caractérisée puisque la condamnation remonte à 1998, a été passée en force de chose jugée en 1999, puis mise à exécution en 2000 et enfin un mandat d'arrêt a été délivré en 2006. Il s'est donc écoulé huit années entre le jugement et la délivrance du mandat d'arrêt.
Ce défaut d'urgence entraîne également la nullité de la procédure.
3o) il ressort de la procédure que la fiche de recherche fait état d'un jugement en date du 6 juin 2005 selon laquelle la Cour d'assises d'ELBISTAN aurait, suite aux dispositions du nouveau code pénal entré en vigueur le 1er juin 2005, jugé d'appliquer la peine de 5 ans,23 mois et 10 jours à l'encontre de M. X.... Or cette décision ne figure pas à la procédure. Celle-ci étant donc incomplète, il y a lieu de rendre un avis défavorable à la demande d'extradition.
Discussion
1o) Sur la notification d'une demande d'extradition.
Il résulte de l'examen de la procédure que le Procureur de la République de BELFORT a dressé le 8 novembre 2007 un procès-verbal de notification d'une demande d'extradition au lieu de dresser un procès-verbal de notification d'une demande d'arrestation provisoire en vue d'une extradition puisqu'il n'était pas en possession de l'un des documents mentionnés à l'article 696-8 du Code de procédure pénale. A supposer qu'une telle situation ait fait grief à M. X..., celui-ci, selon une jurisprudence constante (notamment Cass Crim 14 / 11 / 96,24 / 10 / 07), est irrecevable à critiquer les conditions de son arrestation provisoire, celles-ci étant sans incidence sur la validité de la procédure d'extradition dont est saisie la Chambre de l'Instruction.
2o) Sur le défaut d'urgence.
La Chambre de l'instruction n'a pas à se prononcer sur l'urgence en vertu de laquelle les autorités turques ont demandé l'arrestation provisoire de M. X... (Cass Crim 26 / 0 / 06).
3o) Sur l'absence à la procédure de la décision du 6 juin 2005.
La demande d'arrestation provisoire fait état d'une condamnation en date du 6 juin 2005 résultant du réexamen de la peine prononcée le 22 octobre 1998 suite à la modification du code pénal turc. Or ne figure à la procédure que le seul arrêt du 22 octobre 1998.
Contrairement à ce qui est soutenu dans le mémoire, il n'y a pas lieu de donner un avis défavorable au prétexte que les pièces sont insuffisantes mais d'ordonner un supplément d'information afin d'inviter les autorités turques à produire l'arrêt additionnel prononcé par la cour d'assises d'ELBISTAN le 6 juin 2005 inscrit sous le numéro d'arrêt additionnel 1998 / 72.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Rejette les exceptions de nullité présentées par M. X...,
Constatant que la procédure est incomplète, avant dire droit :
-Ordonne un complément d'information afin d'obtenir des autorités judiciaires turques l'arrêt additionnel de la Cour d'assises d'ELBISTAN daté du 6 juin 2005, inscrit sous le numéro d'arrêt additionnel 1998 / 72, dans un délai de un mois à compter du prononcé du présent arrêt,
-Dit que M. le Procureur général de BESANÇON sera chargé de solliciter les renseignements demandés aux autorités de l'Etat turc.
Ainsi jugé et prononcé en audience publique le SEIZE JANVIER DEUX MILLE HUIT par la Chambre de l'Instruction de la Cour d'Appel de BESANCON, où siégeaient M. PONTONNIER, Président de Chambre, Président titulaire, M. VIGNES et Mme CARTIER, Conseillers, régulièrement désignés conformément aux dispositions de l'article 191 du Code de procédure pénale, assistés de Mme MORINI, Greffier présent lors du prononcé.
Présent : Monsieur RICHARTE, Avocat Général, présent lors du prononcé
Le Greffier, Le Président,