ARRÊT No
BP/MD
COUR D'APPEL DE BESANÇON
- 172 501 116 00013 -
ARRÊT DU 12 MARS 2008
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
SECTION A
Réputé contradictoire
Audience publique
du 06 février 2008
No de rôle : 06/01348
S/appel d'une décision
du tribunal d'instance de BELFORT
en date du 16 décembre 2005 RG No 11-05-791
Code affaire : 30B
Demande en paiement des loyers et charges et/ou tendant à la résiliation du bail et/ou à l'expulsion
Lucie X..., veuve Y... C/ TRESORERIE DE DELLE, COMMUNE DE DELLE
PARTIES EN CAUSE :
Madame Lucie X..., veuve Y...
née le 21 juillet 1947 à VESCEMONT (90200)
demeurant ...
APPELANTE
Ayant la SCP DUMONT - PAUTHIER pour Avoué
et Me Joël LETONDEL pour Avocat
ET :
COMMUNE DE DELLE
Mairie de DELLE - place François Mitterand - 90100 DELLE
INTIMÉE
Ayant la SCP LEROUX pour Avoué
et Me Emile GEHANT pour Avocat
TRESORERIE DE DELLE
28, rue Scherrer - 90100 DELLE
INTIMÉE
n'ayant pas constitué avoué
COMPOSITION DE LA COUR :
lors des débats :
PRÉSIDENT : Monsieur B. GAUTHIER, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre.
ASSESSEURS : Madame M. LEVY et Monsieur B. POLLET, Conseillers.
GREFFIER : Madame M. DEVILLARD, Greffier.
lors du délibéré :
PRÉSIDENT : Monsieur B. GAUTHIER, Conseiller, faisant fonction de Président de chambre.
ASSESSEURS : Madame M. LEVY et Monsieur B. POLLET, Conseillers.
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FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par ordonnance de référé en date du 13 novembre 2003, la résiliation du bail commercial consenti par la commune de DELLE à Lucie X..., veuve Y..., a été constatée, et la locataire a été condamnée à payer à la bailleresse la somme de 18 920,88 €, à titre de provision sur loyers et charges échus, ainsi qu'une indemnité d'occupation d'un montant égal à celui des loyers et charges qu'elle aurait payés en l'absence de résiliation du bail.
Le 26 mai 2005, la commune de DELLE a émis un titre exécutoire à l'encontre de Lucie X..., veuve Y..., pour un montant de 25 872,95 €.
Invoquant une transaction qui serait intervenue entre les parties le 24 septembre 2002 et selon laquelle elle aurait été déchargée de tout paiement de loyers et charges, Lucie X..., veuve Y..., a saisi le tribunal d'instance de BELFORT, statuant en qualité de juge de l'exécution, lequel, par jugement en date du 16 décembre 2005, a rejeté l'intégralité de ses prétentions.
Lucie X..., veuve Y..., ayant interjeté appel de ce jugement, la Cour, par arrêt en date du 12 avril 2006, a infirmé le jugement déféré et, statuant à nouveau, a :
- déclaré le juge de l'exécution incompétent,
- vu l'article 79 du code de procédure civile, ordonné la réouverture des débats et invité les parties à conclure sur l'annulation du titre exécutoire et sur la recevabilité du recours.
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L'appelante sollicite, à titre principal, l'annulation du titre exécutoire émis le 26 mai 2005, au motif que ce titre est contraire à l'autorité de chose jugée attachée à la transaction en vertu de laquelle la commune de DELLE l'a libérée de toute somme due au titre du bail.
Subsidiairement, l'appelante demande à la Cour de surseoir à statuer dans l'attente d'une décision du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de BELFORT sur la communication des correspondances entre avocats ayant scellé l'accord intervenu entre les parties.
Elle sollicite enfin une somme de 2 000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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La commune de DELLE conclut à la confirmation du jugement déféré et réclame à l'appelante une somme de 1 500 €, au titre de ses frais irrépétibles.
Elle fait valoir, pour l'essentiel :
- que le recours de Lucie X..., veuve Y..., contre le titre exécutoire du 26 mai 2005 est irrecevable faute d'avoir été exercé dans le délai imparti,
- que l'appelante ne lui a pas communiqué les courriers entre avocats ayant abouti à la prétendue transaction,
- qu'au surplus, ces courriers ont un caractère confidentiel et ne peuvent en conséquence être produits aux débats,
- qu'en toute hypothèse, il n'y a pas eu de transaction, puisque, postérieurement aux échanges de courriers invoqués, est intervenue l'ordonnance du 13 novembre 2003, rendue contradictoirement à l'égard de l'appelante, et l'ayant condamnée à payer une provision au titre des loyers et charges dus.
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La Trésorerie de DELLE, assignée devant la Cour par acte d'huissier en date du 15 février 2006 signifié à personne, n'a pas constitué avoué. En application de l'article 474, alinéa premier, du code de procédure civile, le présent arrêt sera réputé contradictoire.
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L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 janvier 2008.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité du recours formé contre le titre exécutoire émis par la commune de DELLE
Attendu que Lucie X..., veuve Y..., a introduit son recours devant le juge de l'exécution par assignation en date du 3 novembre 2005, postérieurement à l'expiration du délai de deux mois qui lui était imparti pour contester le titre exécutoire émis le 26 mai 2005 par la commune de DELLE, et dont le point de départ était la date de notification du titre exécutoire ; qu'en effet, cette notification était intervenue au plus tard le 26 juillet 2005, date de la lettre de rappel adressée à l'appelante par la Trésorerie de Delle ;
Mais attendu que les mentions du titre exécutoire quant à la voie de recours dont il pouvait faire l'objet étaient particulièrement imprécises et ambiguës ; qu'en effet, la juridiction compétente y était désignée comme étant, soit le "tribunal judiciaire", soit le "tribunal administratif", selon la nature de la créance ; que, dans ces conditions, la débitrice n'ayant pas été clairement informée de la juridiction devant laquelle elle pouvait exercer un recours, le délai de recours n'a pu courir à son égard;
Attendu qu'il s'ensuit que le recours de l'appelante doit être déclaré recevable ;
Sur le bien fondé du recours
Attendu que, contrairement à ce qui est allégué par l'intimée, celle-ci a bien reçu communication, par l'intermédiaire de son avoué, des courriers entre avocats invoqués par l'appelante pour établir l'existence d'une transaction entre les parties ; qu'en effet, cette communication résulte des bordereaux de pièces de l'appelante en date des 10 mars 2006 et 8 décembre 2006, signés par l'avoué de l'intimée ;
Attendu toutefois que, si ces pièces ont été régulièrement communiquées, elles doivent être écartées des débats comme ne constituant pas des moyens de preuve légalement admissibles ;
Attendu que l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, dans sa rédaction issue de la loi du 11 février 2004, dispose :
En toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères, à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention"officielle", les notes d'entretien, et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel.
Attendu que ces dispositions s'appliquent aux correspondances échangées avant l'entrée en vigueur de la loi du 11 février 2004, dès lors qu'elles n'ont pas fait l'objet, à cette date, d'un litige, quant à leur communication, définitivement tranché ;
Attendu qu'en l'espèce, parmi les courriers entre avocats produits par l'appelante, un seul, en date du 13 mai 2003, émanant de son propre avocat et adressé à celui à celui de l'intimée, porte la mention "lettre officielle" ; que, toutefois, cette lettre fait référence, en ce qui concerne l'accord qui aurait été conclu entre les parties, à de précédents courriers qui, eux, sont couverts par le secret professionnel ; que, par conséquent, ce courrier, pas plus que les autres, ne peut être produit comme moyen de preuve ;
Attendu au surplus, qu'à supposer applicable le règlement intérieur de 1994 du barreau de BELFORT, invoqué par l'appelante, celui-ci prévoyait, en son article 79, que, si les lettres consacrant un accord perdaient leur caractère confidentiel, elles ne pouvaient être produites sans l'agrément du confrère, ou, à défaut, sans l'autorisation du Bâtonnier ; qu'en l'espèce, ces lettres ont été produites sans un tel accord ou une telle autorisation ;
Attendu qu'il sera enfin observé qu'il est pour le moins étonnant que, si une transaction avait été conclue dès octobre 2002 déchargeant l'appelante de tout paiement au titre des loyers et charges, celle-ci ne se soit pas opposée à ce que soit rendue à son encontre le 13 novembre 2003, contradictoirement, une ordonnance de référé la condamnant au paiement d'une provision ;
Attendu que l'existence de la transaction alléguée par l'appelante n'étant pas établie, il convient de rejeter le recours formé par Lucie X..., veuve Y... ;
Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens
Attendu que Lucie X..., veuve Y..., qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'au paiement d'une somme de 1 000 €, au titre des frais exposés par l'intimée en cause d'appel et non compris dans les dépens, ces condamnations emportant nécessairement rejet de la propre demande de l'appelante tendant à ce qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile en sa faveur ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique, par arrêt réputé contradictoire, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
Vu l'arrêt du 12 avril 2006,
DÉCLARE l'appel de Lucie X..., veuve Y..., non fondé ;
DÉBOUTE Lucie X..., veuve Y..., de l'intégralité de ses demandes principale et subsidiaire ;
CONDAMNE Lucie X..., veuve Y..., à payer à la commune de DELLE la somme de 1 000 € (MILLE EUROS), au titre des frais exposés par l'intimée en cause d'appel et non compris dans les dépens ;
REJETTE la demande de Lucie X..., veuve Y..., fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Lucie X..., veuve Y..., aux dépens de première instance et d'appel, avec droit, en ce qui concerne ces derniers, pour la SCP LEROUX, avoué, de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LEDIT ARRÊT a été prononcé en audience publique et signé par Monsieur B. GAUTHIER, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre, Magistrat ayant participé au délibéré, et Madame M. DEVILLARD, Greffier.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE.