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03/01/2023 | FRANCE | N°21/00575

France | France, Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 03 janvier 2023, 21/00575


ARRÊT N°



JFL/LZ



COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -



ARRÊT DU 03 JANVIER 2023



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE









Contradictoire

Audience publique du 18 octobre 2022

N° de rôle : N° RG 21/00575 - N° Portalis DBVG-V-B7F-ELM3



S/appel d'une décision du JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE DOLE en date du 04 février 2021 [RG N° 20/000127]

Code affaire : 51B Demande tendant à l'exécution des autres obligations du locataire e

t/ou tendant à faire prononcer la résiliation pour inexécution de ces obligations et ordonner l'expulsion





[F] [N] C/ S.C.I. DE LA BLAINE





PARTIES EN CAUSE :





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ARRÊT N°

JFL/LZ

COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

ARRÊT DU 03 JANVIER 2023

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

Contradictoire

Audience publique du 18 octobre 2022

N° de rôle : N° RG 21/00575 - N° Portalis DBVG-V-B7F-ELM3

S/appel d'une décision du JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE DOLE en date du 04 février 2021 [RG N° 20/000127]

Code affaire : 51B Demande tendant à l'exécution des autres obligations du locataire et/ou tendant à faire prononcer la résiliation pour inexécution de ces obligations et ordonner l'expulsion

[F] [N] C/ S.C.I. DE LA BLAINE

PARTIES EN CAUSE :

Madame [F] [N]

née le 20 Juin 1986 à [Localité 3]

demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Stéphane BILLAUDEL de la SELARL FAVOULET - BILLAUDEL - DODANE, avocat au barreau de JURA

APPELANT E

ET :

S.C.I. DE LA BLAINE

RCS n°343 062 862

Sise [Adresse 2]

Représentée par Me Yannick GAY, avocat au barreau de JURA

INTIMÉE

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre.

ASSESSEURS : Messieurs Jean-François LEVEQUE et Cédric SAUNIER, Conseillers.

GREFFIER : Madame Leila Zait, Greffier.

Lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre

ASSESSEURS : Messieurs Jean-François LEVEQUE et Cédric SAUNIER, conseillers.

L'affaire, plaidée à l'audience du 18 octobre 2022 a été mise en délibéré au 03 janvier 2023. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

Exposé du litige

Sur assignation délivrée le 13 mai 2020 par Mme [F] [N] à la SCI de la Blaine, bailleur de son habitation depuis le 13 décembre 2020, aux fins de réparations de préjudices de surconsommation d'énergie, de jouissance et moral causés par l'indécence du logement, et sur demande reconventionnelle du bailleur en paiement d'un arriéré de loyers, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Dole, par jugement du 4 février 2021, a :

- rejeté la demande indemnitaire pour surconsommation d'énergie ;

- condamné le bailleur à payer 3 000 euros de dommages et intérêts pour trouble de jouissance ;

- rejeté la demande indemnitaire pour préjudice moral ;

- rejeté la demande pour procédure abusive présentée par le bailleur ;

- condamné la locataire à payer au bailleur la somme de 4 164 euros au titre des loyers et charges échus du 16 novembre 2017 au 15 décembre 2018 ;

- ordonné la compensation entre les deux précédentes condamnations ;

- sursis à l'exécution des poursuites et accordé un délai d e paiement sous forme de 24 mensualités de 48,50 euros ;

- rejeté les demandes pour frais irrépétibles ;

- rejeté les demandes plus amples ;

- dit que chaque partie gardera la charge de ses dépens.

Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu, au visa de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 précitée, et des articles 1719 et 1240 du code civil, ainsi que du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 définissant les critères d'un logement décent, que la combinaison des précédents textes permet au locataire de solliciter réparation du préjudice résultant du trouble de jouissance lorsque le logement ne répond pas aux critères de décence ; que la surconsommation énergétique n'était pas démontrée par les factures d'électricités produites ; que le préjudice de jouissance résultait des défauts relevés par un constat d'huissier et par un diagnostic de décence ; que le bailleur avait ainsi manqué à son obligation de fournir un logement décent ; que le préjudice moral de la locataire n'était pas établi ; que son action n'était pour autant pas abusive ; que la locataire restait toutefois redevable des loyers et charges impayés échus après l'effacement de ses dettes intervenu le 16 novembre 2017 au titre d'une procédure de surendettement ; et que des délais de paiement étaient justifiés au regard de la recevabilité d'une nouvelle procédure de surendettement.

Mme [N] a interjeté appel de cette décision par déclaration parvenue au greffe le 1er avril 2021. L'appel critique expressément tous les chefs de jugement, sauf la condamnation du bailleur pour trouble de jouissance et son débouté au titre de la procédure abusive.

Par conclusions transmises le 22 mai 2021, l'appelante, au visa des articles 1217 du code civil et 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré ;

- condamner le bailleur à lui payer 14 300 euros de dommages intérêts en réparation de :

* son préjudice de surconsommation énergétique pour 7 500 euros,

* son préjudice de jouissance pour 4 800 euros,

* son préjudice moral pour 2 000 euros ;

- débouter le bailleur de ses demandes reconventionnelles ;

- subsidiairement limiter la condamnation pour loyers impayés à 4 046 euros et les compenser avec les dommages et intérêts ;

- plus subsidiairement lui accorder un délai de paiement de 36 mois ;

- condamner le bailleur à lui payer 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer les dépens.

L'appelante soutient que son préjudice de surconsommation énergétique est établi dès lors que ses factures d'électricité, qui atteignaient 243,32 euros par mois avant le remplacement du chauffe-eau en mars 2017, étaient tombées ensuite à 118 euros par mois, montant normal pour un appartement de 60 m² ; que le préjudice de jouissance et le préjudice moral résultent de ce qu'elle a vécu pendant sept ans dans un logement vétuste, humide et mal isolé sans que son bailleur prenne en considération ses demandes répétées de mise en conformité, ce qui l'aurait plongée dans une précarité financière et sociale pendant plusieurs années ; que le bailleur doit être débouté de toute demande pour l'arriéré antérieur au 16 novembre 2017 ; et que pour la période postérieure, l'indécence du logement justifie le rejet de ses demandes, ou à défaut la réduction de la dette dont le solde après déduction des sommes versées par la caisse d'allocations familiales se limite à 4 406 euros.

La SCI de la Blaine, par conclusions transmises le 23 juin 2021 portant appel incident, demande à la cour de :

- réformer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer la somme de 3 000 euros et en ce qu'il a sursis à l'exécution et accordé un échéancier de 24 mois ;

- débouter l'appelante de toute demande ;

- confirmer sa condamnation à l'arriéré de loyers et charges ;

- la débouter de toute demande d'atermoiements ou de paiements échelonnés ;

- confirmer le surplus ;

- condamner l'appelante lui payer 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer les dépens.

L'intimée soutient que l'appelante ne justifie de son préjudice énergétique que par des factures d'électricité qu'elle ne démontre pas avoir payées et qui sont susceptibles de correspondre à une dette effacée par son redressement personnel ; que l'entreprise Re Bat, chargée d'aller procéder à des réparations, n'a pu accéder aux lieux ; que l'appelante ne justifie pas avoir subi un préjudice de jouissance pendant sept ans alors que le logement n'est pas insalubre, qu'elle n'a formulé aucune protestation de 2010 à 2017 et qu'elle n'a commencé à le faire qu'au moment où son bailleur lui a réclamé des loyers impayés ; qu'elle ne justifie pas d'un préjudice de jouissance, ayant loué le bien en sachant qu'il était chauffé électriquement et qu'il était peu ensoleillé ; que l'arriéré de loyer postérieur au rétablissement personnel est dû nonobstant la recevabilité d'une nouvelle demande de surendettement, prononcée le 23 septembre 2020 mais dont les suites ne sont pas indiquées ; et qu'aucun délai de paiement ne doit être accordé, alors que la situation économique de Mme [N] ne le justifie pas et alors que l'échéancier fixé par le premier juge n'a pas été respecté.

Il est renvoyé aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs moyens de fait et de droit, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'instruction a été clôturée le 27 septembre 2022. L'affaire a été appelée à l'audience du 18 octobre 2022 et mise en délibéré au 3 janvier 2023.

Motifs de la décision

Si la responsabilité du bailleur d'habitation envers le locataire en raison de l'exécution défaillante du contrat doit être appréciée au regard des obligations spéciales résultant de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent, le fondement de cette responsabilité reste la responsabilité contractuelle prévue aux articles 1231 et suivants du code civil et non, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, la responsabilité délictuelle prévue à l'article 1240 du code civil.

Sur le préjudice énergétique

Si l'appelante a corrigé devant la cour l'erreur de calcul qui affectait devant le premier juge sa demande en réparation d'un préjudice de surconsommation énergétique, et si les factures d'électricités produites montrent effectivement une baisse de moitié de la consommation électrique après le changement du chauffe-eau intervenu au mois de mars 2017, la preuve du préjudice invoqué n'est pas rapportée dès lors que Mme [N] n'établit pas avoir payé les factures trop élevées et dès lors, de plus, que celles-ci sont antérieures au rétablissement personnel avec effacement des dettes antérieures au 16 novembre 2017 dont elle a bénéficié par ordonnance rendue le même jour par le juge d'instance de Dole, et correspondent par conséquent à des dettes effacées.

Le rejet de la demande indemnitaire pour surconsommation d'énergie sera donc confirmé, par substitution de motifs.

Sur le préjudice de jouissance et sur le préjudice moral

Adoptant les motifs par lesquels le premier juge a exactement caractérisé le préjudice de jouissance résultant du manquement du bailleur à son obligation de fournir un logement décent, mais aussi les motifs par lesquels il a retenu que la preuve n'était pas apportée d'un préjudice moral distinct du préjudice de jouissance, la cour confirmera le jugement en ce qu'il a condamné la SCI à payer 3 000 euros de dommages et intérêts pour trouble de jouissance et en ce qu'il a débouté Mme [N] de sa demande indemnitaire pour préjudice moral.

Sur l'arriéré de loyers et charges

Le premier juge a exactement retenu que les dettes locatives échues avant le 16 novembre 2017 étaient effacées et que la locataire restait en revanche redevable des échéances locatives postérieures, c'est à dire les treize mensualités de 400 euros échues de décembre 2017 à décembre 2018 pour un total de 5 200 euros. Ce montant est à diminuer des prestations versées au bailleur par la caisse d'allocation familiale au titre de la même période, pour le solde de 4 164 euros admis par le bailleur et retenu par le premier juge, la locataire n'ayant pas apporté la preuve, qui lui incombait, que le solde se limitait à 4 046 euros.

La condamnation de Mme [N] au titre de l'arriéré locatif sera donc confirmée, de même que la compensation de cette condamnation avec celle du bailleur à lui payer des dommages et intérêts.

Sur les délais de paiement

En revanche, en l'absence de toute information sur les suites de la seconde procédure de surendettement engagée par Mme [N] au cours de l'année 2020, sur sa situation économique actuelle et sur le respect de l'échéancier accordé par le premier juge, les délais de paiement qu'il a accordés seront infirmés et la demande présentée à la cour du même chef sera rejetée.

Par ces motifs

La cour, statuant publiquement et contradictoirement ;

Confirme le jugement rendu entre les parties le 4 février 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Dole, sauf en ce qu'il a sursis à l'exécution des poursuites et accordé des délais de paiement à Mme [F] [N] ;

statuant du chef ainsi infirmé et y ajoutant,

Déboute Mme [N] de sa demande en délais de paiement ;

La déboute de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

La condamne sur le même fondement à payer la somme de 2 500 euros à la SCI de la Blaine ;

La condamne aux dépens d'appel.

Ledit arrêt a été signé par M. Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Leila Zait, greffier.

La greffière Le président de chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/00575
Date de la décision : 03/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-03;21.00575 ?
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