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23/03/2023 | FRANCE | N°22/00967

France | France, Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 23 mars 2023, 22/00967


ARRÊT N°



CS/FA





COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -



ARRÊT DU 23 MARS 2023



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE







Contradictoire

Audience publique du 19 Janvier 2023

N° RG 22/00967 - N° Portalis DBVG-V-B7G-EQVL



S/appel d'une décision du Juge de la mise en état de VESOUL en date du 07 juin 2022 [RG N° 21/01080]

Code affaire : 54G

Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le const

ructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction



S.A.S. MAISONS PLAISANCIA C/ [E] [K]





PARTIES EN CAUSE :





S.A.S. MAISONS PLAISANCIA

Sise [Adre...

ARRÊT N°

CS/FA

COUR D'APPEL DE BESANÇON

- 172 501 116 00013 -

ARRÊT DU 23 MARS 2023

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Contradictoire

Audience publique du 19 Janvier 2023

N° RG 22/00967 - N° Portalis DBVG-V-B7G-EQVL

S/appel d'une décision du Juge de la mise en état de VESOUL en date du 07 juin 2022 [RG N° 21/01080]

Code affaire : 54G

Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction

S.A.S. MAISONS PLAISANCIA C/ [E] [K]

PARTIES EN CAUSE :

S.A.S. MAISONS PLAISANCIA

Sise [Adresse 2], inscrite au RCS de Besançon sous le numéro 398 312 686

Représentée par Me Benoît MAURIN de la SELARL MAURIN-PILATI ASSOCIES, avocat au barreau de BESANCON

APPELANTE

ET :

Monsieur [E] [K]

né le 06 Novembre 1980 à [Localité 3], de nationalité française,

demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Vincent BRAILLARD de la SELARL JURIDIL, avocat au barreau de BESANCON

INTIMÉ

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

MAGISTRAT RAPPORTEUR : Monsieur Cédric SAUNIER, conseiller, conformément aux dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, avec l'accord des conseils des parties.

GREFFIER : Madame Cécile MARTIN, Greffier.

Lors du délibéré :

Monsieur Cédric SAUNIER, conseiller, a rendu compte conformément à l'article 786 du Code de Procédure Civile aux autres magistrats :

Monsieur M. WACHTER, Président et Monsieur Jean-François LEVEQUE, Conseiller.

L'affaire, plaidée à l'audience du 19 janvier 2023 a été mise en délibéré au 23 mars 2023. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

Faits, procédure et prétentions des parties

Monsieur [E] [K] a, le 18 juillet 2018, conclu avec la SAS Maisons Plaisancia un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans au [Adresse 1], pour un prix forfaitaire et définitif de 340 500 euros TTC.

Ce contrat a été suivi de dix avenants portant le prix de vente à la somme totale de 372 692,72 euros.

La réception est intervenue le 30 juin 2020 avec douze réserves, puis un procès-verbal de levée des finitions a été établi le 2 février 2021.

Par acte signifié le 22 juillet 2021, la société Maisons Plaisancia a assigné M. [K] devant le tribunal judiciaire de Vesoul en paiement du solde du marché, soit la somme de 18 634,64 euros correspondant au montant de la facture n° 20/97 au visa de la situation n° 6 du 29 juin 2020.

Saisi d'une demande d'expertise formée par M. [K] et d'une demande provisionnelle correspondant au montant susvisé ainsi qu'aux pénalités de retard formée par la société Maisons Plaisancia, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Vesoul a, par ordonnance rendue le 7 juin 2022, ordonné une mesure d'expertise aux frais avancés de M. [K], rejeté la demande de provision, réservé les frais et dépens et renvoyé l'affaire à la mise en état.

Pour parvenir à cette décision, le juge de première instance a considéré :

- que M. [K] produit un procès-verbal de constat d'huissier de justice du 2 avril 2021 faisant état de traces de moisissures et d'humidité, de microfissures, d'eau stagnante dans le vide sanitaire et du désagrègement du crépi des façades, de sorte qu'il convient d'ordonner l'expertise sur le fondement de l'article 789 5° du code de procédure civile ;

- que la demande de provision formée par la société Maisons Plaisancia au titre du solde du marché et des pénalités de retard correspond à ses demandes au fond et revêt un caractère prématuré compte tenu de son caractère contestable lié aux éléments susvisés.

Par déclaration du 14 juin 2022, la société Maisons Plaisancia a interjeté appel de cette ordonnance en sollicitant son annulation ou son infirmation en ce qu'elle a rejeté sa demande de provision.

Selon ses dernières conclusions transmises le 7 septembre 2022, elle conclut à son infirmation du chef susvisé et demande à la cour de condamner M. [K] à lui payer la somme provisionnelle de 18 634,64 euros au titre du solde du marché, la somme provisionnelle de 4 888,93 euros au titre des pénalités contractuelles de retard de paiement et la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens distraits au profit de son conseil.

Elle fait valoir :

- que les réserves ayant été levées, M. [K] lui doit le solde du marché en application de l'article R. 231-7 du code de la construction, alors même que la consignation du dépôt de garantie prend fin à l'expiration du délai d'un an à compter de la date de réception ;

- que les désordres apparus, dont certains étaient visibles à réception, relèvent de la garantie légale et peuvent être pris en charge par l'assureur du constructeur ;

- que la garantie de parfait achèvement est forclose, tandis que la garantie de droit commun 'a cessé' ;

- qu'il résulte de l'article 3-5 des conditions générales et particulières du contrat de construction que les sommes non réglées dans le délai de quinze jours à date de présentation de l'appel de fonds poduiront intérêt au taux de 1 % par mois.

M. [K] a répliqué en premier et dernier lieu par conclusions transmises le 26 août 2022 pour demander à la cour de confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, de débouter l'appelante de ses demandes et de la condamner à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Il expose que le juge de la mise en état, qui dispose d'un pouvoir souverain, a relevé que la demande provisionnelle formée par la société Maisons Plaisancia correspond à sa demande au fond et qu'elle revêt un caractère prématuré en considération des multiples désordres relevés par M. [O] [U], huissier de justice, dans son procès-verbal de constat établi les 8 février et 2 avril 2021.

Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 janvier 2023 et l'affaire a été appelée à l'audience du 19 janvier suivant et mise en délibéré au 23 mars 2023.

En application de l'article 467 du code de procédure civile, le présent arrêt est contradictoire.

Motifs de la décision

A titre liminaire, la cour constate que la demande aux fins d'annulation de l'ordonnance critiquée formée par la société Maisons Plaisancia dans sa déclaration d'appel n'est suivie d'aucun moyen ni demande dans ses conclusions ultérieures, de sorte qu'elle n'est pas soutenue.

En application de l'article 789 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour accorder notamment une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Le juge de la mise en état peut subordonner l'exécution de sa décision à la constitution d'une garantie dans les conditions prévues aux articles 514-5,517 et 518 à 522.

L'article R. 231-7 du code de la construction prévoit que le solde du prix du marché de construction d'une maison individuelle avec fourniture de plans est payable dans les conditions suivantes :

- lorsque le maître de l'ouvrage se fait assister, lors de la réception, par un professionnel mentionné à l'article L. 231-8, à la levée des réserves qui ont été formulées à la réception ou, si aucune réserve n'a été formulée, à l'issue de la réception ;

- lorsque le maître de l'ouvrage ne se fait pas assister par un professionnel pour la réception, dans les huit jours qui suivent la remise des clés consécutive à la réception, si aucune réserve n'a été formulée, ou, si des réserves ont été formulées, à la levée de celles-ci.

Dans le cas où des réserves sont formulées, une somme au plus égale à 5 % du prix convenu est, jusqu'à la levée des réserves, consignée entre les mains d'un consignataire accepté par les deux parties ou, à défaut, désigné par le président du tribunal judiciaire.

Enfin, il résulte des articles 1 et 2 de la loi n° 71-584 du 16 juillet 1971 tendant à réglementer les retenues de garantie en matière de marchés de travaux définis par l'article 1779-3° du code civil que la retenue de garantie de bonne exécution des travaux d'une valeur égale au plus à 5 % de leur montant doit être libérée et versée à l'entrepreneur à l'expiration du délai d'une année à compter de la date de réception, faite avec ou sans réserve, même en l'absence de mainlevée, si le maître de l'ouvrage n'a pas notifié à la caution ou au consignataire, par lettre recommandée, son opposition motivée par l'inexécution des obligations de l'entrepreneur. L'opposition abusive entraîne la condamnation de l'opposant à des dommages-intérêts.

En l'espèce, il est constant que la réception des travaux litigieux est intervenue le 30 juin 2020 avec réserves, avant qu'un procès-verbal de 'levée des finitions' soit établi le 2 février 2021.

La cour relève que M. [K] ne conteste ni le principe ni le montant de son défaut de règlement du solde du marché et n'invoque aucune opposition au versement de la retenue de garantie qui aurait été notifiée dans les conditions des dispositions susvisées.

Il se limite en effet à invoquer d'une part que le montant de la demande provisionnelle formée par la société Maisons Plaisancia correspond à sa demande au fond et d'autre part que la somme réclamée est inférieure au coût des travaux qui seraient nécessaires pour remédier aux désordres constatés par huissier de justice, non visibles à réception et relevant de la garantie décennale, à savoir selon lui :

- dans l'atelier, une tache de moisissure et d'humidité et une humidité du crépi extérieur ;

- dans la cuisine et le séjour, une microfissure cheminant depuis l'angle saillant à droite en direction de la cuisine ;

- dans la salle de bain, une microfissure cheminant au plafond entre le pan de mur extérieur et le mur séparatif avec le séjour ;

- dans le bureau, une microfissure sur le placoplâtre dans les angles de la fenêtre et des écailles sur la peinture le long du bâti ;

- dans le salon, une microfissure sur le plafond dans l'angle saillant avec le séjour ;

- l'eau stagnante située dans le vide-sanitaire ;

- l'humidité du bas des façades, sous forme de bandes en pied de mur ;

- le décollement des habillages des portes du dégagement, des wc, du bureau et de la salle de sport ;

- le désagrègement du crépi des façades sous les couvertines des acrotères.

Cependant, étant rappelé que la demande provisionnelle porte nécessairement sur les prétentions constituant le fond du litige, le fait que le montant de la provision sollicitée devant le magistrat chargé de la mise en état soit égal au montant de la demande en paiement formée au fond ne constitue pas en soi un motif de rejet de la demande, dans la mesure où l'allocation d'une provision, soumise à des conditions légales spécifiques ci-avant rappelées, ne revêt qu'un caractère provisoire et n'a pas autorité de chose jugée au principal.

En outre, M. [K], qui ne conteste ni le principe ni le montant de son obligation en paiement du solde du marché soit la somme de 18 634,64 euros correspondant au montant de la facture n° 20/97 sollicitée à titre provisionnel par la société Maisons Plaisancia, se borne à évoquer un mécanisme de compensation avec la créance détenue sur cette dernière liée à des malfaçons.

Néanmoins, le principe même d'une telle créance est conditionné tant par la qualification des désordres allégués que par la réunion des conditions légales permettant d'en imputer tout ou partie au constructeur, conformément au fondement juridique applicable, tandis que M. [K] ne produit aucun élément de nature à en évaluer le montant.

Dès lors, aucune contestation sérieuse n'est opposée par M. [K] à la demande provisionnelle formée par la société Maisons Plaisancia au titre du solde du marché.

Concernant la demande provisionnelle formée par cette dernière au titre des pénalités de retard, la cour observe qu'aucune pièce de nature à établir les retards qu'elle invoque au sens de l'article 3-5 du contrat n'est produite, de sorte qu'il existe une contestation sérieuse sur ce point.

En conséquence, l'ordonnance dont appel sera infirmée en ce qu'elle a rejeté l'intégralité de la demande provisionnelle formée par la société Maisons Plaisancia et M. [K] sera condamné à lui verser une provision d'un montant de 18 634,64 euros au titre du solde du marché tandis que la société Maisons Plaisancia sera déboutée du surplus de sa demande.

Par ces motifs,

La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi :

Constate que la demande d'annulation de l'ordonnance rendue entre les parties le 7 juin 2022 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Vesoul formée par la SAS Maisons Plaisancia n'est pas soutenue ;

Infirme ladite ordonnance en ce qu'elle a rejeté la demande de provision formée par la SAS Maisons Plaisancia ;

La confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau du chef infirmé :

Condamne M. [E] [K] à payer à la SAS Maisons Plaisancia une provision d'un montant de 18 634,64 euros au titre du solde du marché de construction ;

Déboute la SAS Maisons Plaisancia pour le surplus ;

Condamne M. [E] [K] aux dépens d'appel ;

Accorde aux avocats de la cause qui l'ont sollicité, le droit de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Et, vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute les parties de leurs demandes.

Ledit arrêt a été signé par M. Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Fabienne Arnoux, greffier.

Le greffier, Le président de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/00967
Date de la décision : 23/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;22.00967 ?
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