COUR D'APPEL DE BORDEAUX
SIXIÈME CHAMBRE CIVILE
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CL
ARRÊT DU : 03 AVRIL 2008
(Rédacteur : Philippe GUENARD, Conseiller)
No de rôle : 07/02941
Pierre X...
c/
Corinne Y... épouse X...
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2007/010664 du 22/08/2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avoués :Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 mars 2007 (RG no 05/01336) par le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 13 juin 2007
APPELANT :
Pierre X...,
né le 23 Mai 1948 à HURE (33190),
de nationalité Française,
demeurant ...,
33520 BRUGES,
représenté par la SCP ANNIE TAILLARD et VALERIE JANOUEIX, avoués à la Cour,
assisté de la SCP MAXWELL-MAXWELL-BERTIN, avocats au barreau de BORDEAUX,
INTIMÉE :
Corinne Y... épouse X...,
née le 12 Octobre 1953 à LA RÉOLE (33190),
de nationalité Française,
demeurant ...,
représentée par la SCP ARSENE-HENRY ET LANCON, avoués à la Cour,
assistée de Maître Jean-Luc POINSOT, avocat au barreau de BORDEAUX,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du Nouveau Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 19 février 2008 hors la présence du public, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Philippe GUENARD, Conseiller chargée du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Marie-Paule LAFON, Président,
Philippe GUENARD, Conseiller,
Bruno CHOLLET, Conseiller,
Greffier lors des débats : Josette DELLA GIUSTINA
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 al. 2 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Monsieur X... a relevé appel le 13 juin 2007 d'un jugement du Juge aux Affaires Familiales de BORDEAUX en date du 5 mars 2007, qui a notamment :
- prononcé le divorce sur le fondement de l'article 238 du Code Civil ;
- prévu diverses mesures afférentes à l'enfant, dont une résidence habituelle chez le père, et pas de pension alimentaire due par la mère ;
- dit qu'à titre de prestation compensatoire Monsieur X... devra à la fois céder sa part dans l'immeuble de communauté du PIAN-MEDOC, immeuble évalué à 310.000 euros environ en sa totalité, et verser un capital de 13.860 euros mensuels payable en 36 mensualités de 385 euros.
Vu les dernières écritures de l'appelant en date du 16 août 2007, et de l'intimée en date du 29 novembre 2007.
DISCUSSION
Dès son acte d'appel, Monsieur X... a exclu expressément la critique du prononcé du divorce, et a proposé dans ses écritures de verser un capital de 33.600 euros (96 x 350 euros par mois) à titre de prestation compensatoire. De son côté Madame LAROCHE sollicite, à titre de prestation compensatoire, la cession forcée de la part du mari dans l'immeuble du PIAN-MEDOC, immeuble évalué à 232.500 euros environ, ainsi qu'une rente mensuelle viagère de 750 euros en application de l'article 276 du Code Civil. Il conviendra donc de se situer au principal au moment du jugement attaqué.
En ce qui concerne le seul sujet litigieux, à savoir la prestation compensatoire, l'article 270 du code civil prévoit que "l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation compensatoire destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives".
L'article 271 du même code ajoute que "la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible".
En application de l'article 272 du code civil énumérant de manière non exhaustive les éléments à prendre en considération dans la détermination des besoins et des ressources, il convient de retenir les points suivants :
- mari âgé de 58 ans, et femme de 53 ans ;
- durée du mariage : 32 ans (et 31 ans jusqu'à l'ordonnance de non conciliation) ;
- trois enfants dont Caroline née le 29 août 1991, encore mineure ;
- mari ayant travaillé comme ingénieur dans l'industrie automobile, puis au chômage, en percevant des indemnités ASSEDIC de 2.149 euros environ par mois ; ses droits à la retraite s'élèveront en 2012 à 1.762 euros brut par mois. Chacun des deux époux a perçu environ 15.000 euros lors de leur séparation de fait intervenue en 1998. Monsieur X..., en partie grâce à un héritage reçu de son père, a acheté un immeuble à BRUGES pour environ 300.000 euros, en empruntant 100.000 euros, qu'il rembourse à raison de 1.002 euros par mois pendant 10 ans. Enfin il a assumé la charge totale des trois enfants, tout en précisant que seule Caroline se trouve à sa charge en se plaçant début 2007 ;
- femme n'ayant jamais travaillé (sauf un an en comptabilité au début du mariage ; elle a élevé au principal les trois enfants, et affirme souffrir d'une santé fragile, sans toutefois établir souffrir d'une sclérose en plaques depuis 1980, car elle n'allègue ni ne prouve les troubles graves qu'elle subirait depuis longtemps, si elle avait réellement été affectée d'une sclérose en 1980. En revanche il n'est jamais facile de trouver un emploi passé cinquante ans, surtout quand l'on n'a quasiment jamais travaillé. Le mari ne saurait en faire grief à son épouse d'autant qu'il est au chômage depuis longtemps. Monsieur X... affirme que lorsqu'elle sera en âge de retraite, son ex-femme ayant élevé trois enfants pourra prétendre à un minimum vieillesse d'au moins 600 euros par mois ;
- existence d'un immeuble de communauté sis ... au PIAN-MEDOC, évalué par deux agences immobilières questionnées par l'appelant à environ 310.000 euros.
Ainsi il ressort de cet examen la preuve d'une nette disparité créée par la rupture du mariage dans les conditions de vie respectives, justifiant, par réformation la fixation d'une rente viagère de 500 euros par mois jusqu'au 31 octobre 2013, puis de 250 euros par mois ensuite, car, si Madame Y... pourra, après la vente de l'immeuble du PIAN-MEDOC, s'acheter un petit appartement avec la moitié du prix de vente, son absence actuelle de revenu et son âge lui interdisant de subvenir à ses besoins et justifient l'application exceptionnelle de l'article 276 du Code Civil prévoyant la possibilité de fixer une rente viagère au profit de la créancière, en prenant en compte le minimum vieillesse qu'elle pourra percevoir lorsqu'elle arrivera à l'âge de la retraite, dans le cadre de ses droits prévisibles, tandis que Monsieur X... pourra disposer du capital perçu correspondant à la moitié du produit de la vente de l'immeuble qu'il lui appartiendra de placer pour l'aider à régler ladite rente.
Chacune des deux parties a échoué en ses demandes, et doit donc conserver la charge de ses propres dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Sur la question afférente à la prestation compensatoire ;
Réformant le jugement attaqué,
Dit qu'à titre de prestation compensatoire Monsieur Pierre X... sera tenu de verser à Madame Corinne Y... une rente mensuelle viagère s'élevant à 500 euros par mois jusqu'au 31 octobre 2013, puis à 250 euros ensuite (donc en pratique de moitié, vu l'indexation annuelle) ;
Précise que cette rente variera en fonction de l'indice des prix à la consommation des ménages urbains - série France Entière - publié par l'INSEE et sera réactualisé, à la diligence du débiteur, le premier janvier de chaque année en fonction de l'indice du mois de novembre précédent (indice de base celui du mois du présent arrêt) et ce pour la première fois le 1er janvier 2009,
Y ajoutant,
Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément à la réglementation en matière d'aide juridictionnelle,
L'arrêt a été signé par la Présidente Marie-Paule LAFON, et par Valérie BRUNAS LAPIERRE, Greffier auquel elle a remis la minute signée de la décision.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,