COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 25 février 2015
(Rédacteur : Madame Henriette FILHOUSE, Président,)
No de rôle : 13/ 5766
FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS
c/
Madame Dominique X...
bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/ 20564 du 05/ 12/ 2013
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocatsDécision déférée à la Cour : décision rendu le 05 septembre 2013 par le Tribunal de Grande Instance de BERGERAC (RG 12/ 00015) suivant déclaration d'appel du 01 octobre 2013,
APPELANTE :
FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social 64 rue Defrance-94303 VINCENNES CEDEX,
représenté par Maître Marie-lucile HARMAND-DURON de la SCP ROUXEL-HARMAND, avocat au barreau de BORDEAUX,
INTIMÉE :
Madame Dominique X..., née le 12 Octobre 1957 à BERGERAC, de nationalité Française, demeurant ...
représentée par Maître Olivier DESCRIAUX, avocat au barreau de BORDEAUX,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 912 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 14 janvier 2015 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Henriette FILHOUSE, Président, chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Henriette FILHOUSE, Présidente,
Monsieur Bernard ORS, Conseiller,
Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Sylvie HAYET
Vu le visa du Ministère Public le 17 décembre 2014 qui s'en rapporte,
ARRÊT :
- contradictoire
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
Au cours de l'année 2004, Mme X... a été victime du vol de sa carte Cofinoga qui a été frauduleusement utilisée par la suite.
L'auteur du vol, mineur au moment des faits, a été condamné pour avoir commis ce délit et pour complicité d'escroquerie, alors que sa s ¿ ur a, par jugement du Tribunal Correctionnel de Bergerac en date du 8 février 2011, été condamnée aux peines prévues par la loi pour escroquerie commise notamment au préjudice de Mme X... à laquelle elle a été condamnée à verser la somme de 3 768, 55 ¿ en réparation de son préjudice matériel et la somme de 800 ¿ en réparation de son préjudice moral.
Par requête en date du 3 février 2012, Mme X... a saisi la Commission d'indemnisation des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions du Tribunal de Grande Instance de Bergerac (la Civi) d'une demande d'indemnisation à hauteur des sommes qui lui ont été accordées par le Tribunal Correctionnel.
Par une décision en date du 5 septembre 2013, la Civi a déclaré recevable et bien fondée la requête de Mme X... et lui a alloué la somme de 3768, 55 ¿ en réparation de son préjudice matériel outre celle de 800 ¿ en réparation de son préjudice moral soit au total 4568, 55 ¿ en précisant que cette somme était mise à la charge du Fonds de garantie.
Le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'Autres Infractions (le Fonds de Garantie) a relevé appel de cette décision.
Dans ses conclusions notifiées le 12 décembre 2013, il demande à la cour à titre principal d'infirmer la décision déférée et de déclarer Mme X... mal fondée dans sa requête et de l'en débouter et à titre subsidiaire, pour le cas ou la requête serait déclarée recevable, et bien fondée de limiter l'indemnité allouée à 4179 ¿. Il maintient que l'article 706-14 du code de procédure pénale prévoit l'allocation d'une aide plafonnée accordée au titre de la solidarité nationale aux victimes remplissant cumulativement plusieurs conditions et notamment celle de se trouver dans une situation matérielle ou psychologique grave imputée à l'infraction, que dans sa requête Mme X... n'évoquait pas être dans cette situation, que le certificat médical qu'elle a produit par la suite n'établit pas l'existence d'un lien entre les troubles dépressifs qu'elle a subis et l'infraction et que la commission ne pouvait décider le contraire. Il ajoute qu'en toute hypothèse le plafond de la garantie de garantie est limité à 4179 ¿ et que la Civi ne pouvait donc accorder 4 568, 55 ¿ à Mme X....
Dans ses conclusions notifiées le 6 février 2014, Mme X... demande à la cour de lui allouer la somme de 4 568, 65 ¿ et de condamner le Fonds de Garantie à lui verser la somme de 1 800 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens. Elle fait valoir que le lien entre l'infraction et la situation tant matérielle que psychologique grave subie par elle existe encore à ce jour puisqu'elle est en attente de se voir rembourser les frais, pénalités, et débours qu'elle a du régler à Cofinoga ce qui a entraîné pour elle des difficultés financières et psychologiques graves qui lui étaient épargnées avant les faits. Elle souligne qu'elle a du se servir de son compte épargne, qu'elle n'a plus eu droit à un découvert, qu'elle a du faire appel à sa famille, à ses relations et aux associations caritatives et qu'elle a du subir des interrogatoires pour les besoins de l'enquête qui a duré 7 ans ce qui a occasionné pour elle des problèmes d'angoisse et de mal vivre.
L'affaire a été communiquée au Parquet Général lequel dans ses réquisitions du 17 décembre 2014 a déclaré s'en rapporter à l'appréciation de la cour.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 31 décembre 2014.
SUR QUOI
Sur le bien fondé de la demande
Il résulte des dispositions de l'article 706-14 du code de procédure pénale que pour pouvoir bénéficier d'une aide plafonnée au titre de la solidarité nationale la victime d'une infraction doit justifier de ressources inférieures au plafond de l'aide juridictionnelle. Elle doit en outre ne pas avoir reçu une indemnisation effective et suffisante. Elle doit enfin être de ce fait dans une situation matérielle et psychologique grave.
Le Fonds de garantie conteste que cette dernière condition soit remplie.
C'est cependant à juste titre que la Civi a considéré que l'article 706-14 du code de procédure pénale devait être interprété en ce sens qu'il n'est pas exigé que la situation matérielle et psychologique grave de la victime permettant l'indemnisation, résulte de l'infraction elle même mais qu'il est seulement nécessaire que cette situation soit la conséquence de l'absence d'indemnisation du préjudice résultant de l'infraction.
La CIVI a en outre par de justes motifs qu'il convient d'adopter retenu que les attestation et les avis médicaux produits, dont le contenu n'est pas discuté par le Fonds de Garantie, établissent le lien existant entre l'absence d'indemnisation et la situation matérielle et les troubles psychologiques graves subis par Mme X....
La décision entreprise doit donc être confirmée sur le principe du droit à l'indemnisation de l'intéressée.
Le plafond de garantie
L'indemnité à laquelle peut prétendre la victime en application de l'article 706-14 du code de procédure pénale est limitée au triple du montant mensuel du plafond de ressources pour bénéficier de l'aide juridictionnelle partielle qui est de 1393 ¿.
C'est donc à juste titre que le Fonds de Garantie demande qu'elle soit limitée à :
1393 x 3 = 4. 179 ¿.
La décision attaquée sera donc infirmée sur ce point.
Article 700 du code de procédure civile
Il ne sera pas fait application de ce texte au profit de Mme X....
Les dépens
Il doivent dans tous les cas être mis à la charge du Trésor et non à la charge du Fonds de Garantie (R 92- 15eme du code de procédure pénale) comme le réclame Mme X....
PAR CES MOTIFS
la cour
Confirme la décision attaquée sur le principe du droit à indemnisation de Mme X....
L'infirme sur le montant de la somme qui doit lui être attribuée et statuant à nouveau sur ce point :
Fixe à 4 179 ¿ le montant de l'indemnité revenant à Mme X....
Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.
Le présent arrêt a été signé par Henriette Filhouse, Présidente, et par Sylvie Hayet, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président
S. Hayet H. Filhouse