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24/06/2015 | FRANCE | N°13/04565

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, CinquiÈme chambre civile, 24 juin 2015, 13/04565


COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 24 juin 2015
(Rédacteur : Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller,)
No de rôle : 13/4565

Association A.T.I -
c/
M.S.A. DE LA GIRONDESA AXA FRANCE IARD

Nature de la décision : Mixte : Complément d'expertiseet au fond

Grosse délivrée le :
aux avocatsDécision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 mars 2013 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (Chambre 6, RG 11/08040) suivant déclaration d'appel du 17 juillet 2013

APPELANTE :>A.T.I. d'AQUITAINE - Association de Tutelle et d'Intégration - en qualité de tuteur René X... né le 24/06/1952 à ST...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------

ARRÊT DU : 24 juin 2015
(Rédacteur : Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller,)
No de rôle : 13/4565

Association A.T.I -
c/
M.S.A. DE LA GIRONDESA AXA FRANCE IARD

Nature de la décision : Mixte : Complément d'expertiseet au fond

Grosse délivrée le :
aux avocatsDécision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 mars 2013 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (Chambre 6, RG 11/08040) suivant déclaration d'appel du 17 juillet 2013

APPELANTE :
A.T.I. d'AQUITAINE - Association de Tutelle et d'Intégration - en qualité de tuteur René X... né le 24/06/1952 à ST SEURIN DE CADOURNE (33) suivant décision du Tribunal d'Instance de Bordeaux du 25 mai 2012 - agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité Bureaux du Lac II - Bât. O - Rue Robert Caumont - 33049 BORDEAUX CEDEX,
représentée par Maître Antoine CHAMBOLLE, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉES :
M.S.A. DE LA GIRONDE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social 13, Rue Ferrère - 33052 BORDERAUX CEDEX,
assignée à personne habilitée, n'ayant pas constitué avocat,

SA AXA FRANCE IARD prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège 313 Terrasses de l'Arche - 92727 NANTERRE CEDEX,
représentée par Maître Annie BERLAND de la SELARL RACINE, avocat au barreau de BORDEAUX,

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 13 mai 2015 en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Henriette FILHOUSE, Président,Monsieur Bernard ORS, Conseiller,Madame Béatrice SALLABERRY, Conseiller,qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. Gwenaël TRIDON DE REYGreffier lors du délibéré : Madame Sylvie HAYET
ARRÊT :
- contradictoire- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

OBJET DU LITIGE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Monsieur René X... a été victime d'un accident de la circulation le 1er juillet 2008. Conducteur de son vélo il a été heurté par un véhicule dont l'assureur responsable, le groupe AXA, ne conteste pas le droit à indemnisation. Un protocole d'accord a été signé entre les parties visant à désigner le professeur Z... afin d'examiner les séquelles de René X..., cette expertise ayant, selon les parties, la valeur d'une expertise judiciaire.
Monsieur René X... bénéficie d'une mesure de curatelle renforcée exercée par l'Association de Tutelle et d'Intégration d'Aquitaine (A.T.I. AQUITAINE) désignée par décision du Tribunal d'Instance de Lesparre en date du 29 juin 2007. Avant l'accident il vivait à son domicile en compagnie de ses frères également majeurs protégés tous les trois bénéficiant de l'assistance d'une aide ménagère.
Le médecin expert a déposé son rapport le 29 juillet 2010.
Il en résulte que René X... a présenté, à la suite de l'accident du 1er juillet 2008, les lésions suivantes : - une hémorragie sous-arachnoïdienne traumatique, prédominant au niveau temporo-pariétal gauche, une contusion frontale et temporale droite, une contusion au niveau du pédoncule droit ainsi qu'une contusion hémorragique pariétale gauche, - une embarrure temporo-pariétale gauche, associée à une fracture du rocher gauche, - une fracture non déplacée de la mandibule droite.
Les suites ont été marquées par un séjour en réanimation, suivie d'une longue prise en charge en réadaptation au château Rauzé. Au cours de ce séjour, René X... a eu deux crises comitiales alors qu'il n'était pas épileptique avant les faits en cause. Depuis sa date de consolidation il est allé vivre à Handivillage, structure mutualisée de prise en charge de personnes ayant perdu leur autonomie.
L'expert souligne que le changement de cadre de vie est la conséquence de l'accident qui a décompensé un équilibre, certes précaire mais qui existait grâce à la proximité de l'environnement relativement contenant, rassurant et parfaitement connu du blessé. Il a cependant rappelé que, dans sa situation antérieure, il existe des inconnues dans la mesure où il vivait avec ses frères dont le handicap nécessitait une aide, qui était donc mutualisée. L'évaluation globale tient compte de cette décompensation générale, tant des capacités physiques et intellectuelles, que de son environnement.
- Date de consolidation : 18 février 2010
Après consolidation il subsiste comme séquelles un syndrome frontal avec une aphasie et une apraxie contractive, pour un taux de Déficit Fonctionnel Permanent de 45%. Il est précisé par l'expert que " en rapport avec ce seul accident, ce taux prend en considération l'altération antérieure existante qualifiée de débilité mentale moyenne-légère par le docteur A... dans son expertise". - Déficit Fonctionnel Temporaire Total du 1er juillet 2008 au 29 septembre 2008- Déficit Fonctionnel Temporaire Partiel 50% du 30 septembre 2008 au 18 février 2010- Déficit Fonctionnel Permanent 45%- Souffrances Endurées : 4/7- Préjudice Esthétique : 2/7- Activité d'agrément: pas d'élément d'information au point de vue médico légal- Préjudice Sexuel : pas d'élément d'information- Frais Futurs: traitement anti-épileptique avec une consultation neurologique par an, le tout pendant 5 ans et prise en charge par la structure Handivillage à hauteur de 60 % imputable au seul accident et 40% à son état antérieur de débilité mentale légère-moyenne.- Retentissement professionnel : il travaillait avant l'accident à temps plein. Il ne peut plus travailler désormais, ce qui est la conséquence directe de l'accident.
Par actes d'Huissier en date des 3 août 2011, Monsieur René X..., représenté par son curateur l'ATI d'Aquitaine a assigné la société AXA et la MSA de la Gironde devant le tribunal de grande instance de Bordeaux aux fins d'obtenir l'indemnisation de son préjudice corporel.
Par jugement du 6 mars 2013 le tribunal de grande instance de Bordeaux a :
- Fixé le préjudice subi par René X... résultant de l'accident du 1er juillet 2008, à la somme totale de 455.558,74 ¿ (hors postes tierce personne avant et après consolidation), suivant le détail suivant :* dépenses de santé actuelles ......................................................... : 232.940,51 ¿* perte de gains actuels ................................................................. : 20.838,38 ¿* dépenses de santé future ............................................................. : 7.618,85 ¿* perte de gains professionnels futurs ............................................ : 83.697,00 ¿* déficit fonctionnel temporaire ..................................................... : 7.465,00 ¿* déficit fonctionnel permanent ..................................................... : 90.000,00 ¿* souffrances endurées .................................................................. : 10.000,00 ¿* préjudice esthétique permanent .................................................. : 3.000,00¿- Condamné AXA France IARD après imputation de la créance de l'organisme social à payer à René X..., assisté de son curateur, en réparation de son préjudice, la somme de 100.888,45 ¿ après déduction de la provision allouée de 50.000 ¿Avant dire droit sur les postes "assistance par tierce personne" avant et après consolidation : - Ordonné un complément d'expertise sur la personne de René X... et désigné pour la réaliser le Professeur Z... qui aura pour mission de:* dire si une aide tierce personne à domicile avant consolidation est nécessaire (hospitalisation de jour) au vu de l'état de la victime; décrire et quantifier, au vu de l'état de santé de Monsieur René X... et des séquelles l'affectant en relation avec l'accident, l'aide tierce personne à domicile nécessaire, et en préciser les modalités (aide active ou passive) et l'importance en terme d'heure- Fixé à la somme de 700 ¿ la consignation à valoir sur les frais d'expertise qui devra être versée par René X... au greffe dans le délai de 2 mois à compter du prononcé de la décision, sans autre avis du grefffe, à peine de la caducité de la mesure d'instruction.- Sursis à statuer sur la demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile - Renvoyé le dossier à la mise en état - Ordonné l'exécution provisoire- Réservé les dépens
Par déclaration en date du 17 juillet 2013, Monsieur René X..., assisté de son curateur l'ATI d'Aquitaine a interjeté appel de la décision du 6 mars 2013.
Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 12 août 2014 il demande à la cour de: Vu les dispositions de la loi du 5 juillet 1985Vu le rapport d'expertise du professeur Z...- Réformer le jugement dont appel- fixer comme suit son préjudice corporel hormis le poste de préjudice de tierce personne avant et après consolidation :
POSTES DE PREJUDICE MONTANT CREANCE TIERS PAYEUR SOLDE REVENANT A VICTIMEDépenses de santé actuelles 232.940,21 ¿ 232.940,21 ¿ 0 ¿Perte de gains professionnels actuelles 20.838,38 ¿ 20.838,38 ¿ 0 ¿Dépenses de santé futures 7.618,85 ¿ 7.618,85 ¿ 0 ¿Pertes de gains professionnels futurs * 258.331 ¿43.273 ¿ 215.058 ¿Déficit fonctionnel temporaire * 14.000 ¿ 0 ¿ 14.000 ¿Souffrances endurées * 22.000 ¿ 0 ¿ 22.000 ¿Déficit fonctionnel permanent * 125.000 ¿0 ¿ 125.000 ¿Préjudice esthétique * 7.000 ¿0 ¿ 7.000 ¿TOTAL 687.728,44 ¿ 304.670,44 ¿ 383.058 ¿ * : Réformation demandée
- Réformer le jugement dont appel en ce qu'il a retenu que l'autonomie de Monsieur X... était réduite avant son accidentEn conséquence :- Désigner à nouveau le professeur Z... en ordonnant une expertise complète sur l'évaluation du poste de préjudice tierce personne avant et après consolidation- Dire et juger que l'évaluation de ce poste de préjudice sera faite sans considération d'un soi-disant état antérieur et sans tenir compte des modalités d'hébergement actuelles de Monsieur X... compte tenu de son besoin en tierce personne avant consolidation et après consolidation- Condamner la compagnie AXA à payer à Monsieur X... la somme de 5.000 ¿ en vertu de l'article 700 du code de procédure civile. Dans ses dernières conclusions d'intimé et d'appelant incident du 7 août 2014, la société AXA France IARD demande à la cour de :
A titre principal- Donner acte à Monsieur X... assisté de son curateur l'ATI d'Aquitaine de ce qu'il renonce à solliciter devant la cour l'indemnisation des préjudices relatifs à la tierce personne provisoire et définitive- Débouter Monsieur X... représenté par l'ATI de sa demande de complément d'expertise aux fins de voir à nouveau statuer sur le poste de préjudices tierce personne- Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé que l'accident n'a pas été l'élément déclenchant d'une pathologie latente, l'autonomie de Monsieur X... étant déjà réduite lorsqu'il s'est produit- Lui donner acte qu'elle n'a jamais contesté le principe de l'indemnisation des préjudices de Monsieur X...- Donner acte à Monsieur X... de l'absence de demande à son profit concernant les postes de préjudices concernant les dépenses de santé restées à charge, les pertes de gains professionnels actuels et les dépenses de santé future- Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à Monsieur X... les montants d'indemnisation suivants : * Dépenses de Santé Actuelles ....................................................... : 239.940,51 ¿* Perte de Gains Professionnels Actuels ......................................... : 20.838,38 ¿* Dépenses de Santé Futures .......................................................... : 7.618,85 ¿* Déficit Fonctionnel Permanent .................................................... : 90.000,00 ¿* Souffrances Endurées ................................................................. : 10.000,00 ¿* Préjudice Esthétique Permanent .................................................. : 3.000,00 ¿- Réformer le jugement déféré en ce qu'il a liquidé les préjudices suivant de la sorte : * Perte de Gains Professionnels Futurs ........................................... : 83.697,00 ¿* Déficit Fonctionnel Temporaire :................................................. : 7.465,00 ¿Statuant à nouveau sur ces points- Lui donner acte des montants d'indemnisation qu'elle entend proposer dans l'intérêt de Monsieur X..., assisté de son curateur l'ATI d'Aquitaine et les juger satisfactoires :* concernant le Déficit Fonctionnel Temporaire Total .................... : 2.093,00 ¿* concernant le Déficit Fonctionnel Temporaire Partiel .................. : 5.237,00 ¿- Dire et juger que Monsieur X... n'a subi aucune Perte de Gains Professionnels Futurs et le débouter des demandes formées de ce chef- Dire et juger que si une somme devait être versée à Monsieur X... au titre des Pertes de Gains Professionnels Futurs avec application de la table de capitalisation publiée la gazette du palais du 27 mars 2013, le versement interviendra forcément sous forme de rente et non de capital, En tout état de cause- Déduire les provisions versées des montants d'indemnisation à intervenir, soit la somme de 50.000 ¿- Dire et juger que la créance de la MSA versée au titre de la rente accident du travail à hauteur de 43.273,55 ¿ viendra en déduction des sommes perçues par Monsieur X... au titre de son Déficit Fonctionnel Permanent- Débouter Monsieur X..., assisté de son curateur l'ATI d'Aquitaine du surplus de ses demandes- Condamner Monsieur X... assisté de son curateur l'ATI d'Aquitaine aux entiers dépens de l'appel et au paiement d'une somme de 3.000 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La MSA de la Gironde a été assignée à personne, les conclusions des parties lui ont été notifiées. Elle n'a pas constitué avocat, l'arrêt sera réputé contradictoire en application des dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 29 avril 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande d'expertise concernant la tierce personne dont le poste est réservé par le jugement dont appel
La question relative à la liquidation de la tierce personne est pendante devant la 6ème chambre du tribunal de grande instance de Bordeaux. Par conclusions signifiées le 9 janvier 2014 Monsieur X... assisté de son curateur l'ATI d'Aquitaine, a renoncé à demander l'évocation par la cour et la liquidation du poste de préjudice "tierce personne". La société Axa demande qu'il lui en soit donné acte.
La victime demande une nouvelle expertise sur la tierce personne avant et après consolidation afin que le tribunal puisse avoir tous les éléments pour statuer sur ses demandes qu'il a réservées et dont il ne demande plus l'évocation par la cour.
Le fait que Monsieur X... qui était autonome avant l'accident soit aujourd'hui à temps complet dans une structure spécialisée, devant bénéficier d'une aide pour s'exprimer, marcher, s'alimenter, pour faire sa toilette et s'habiller, démontre que ses capacités d'autonomie de vie ont été réduites du fait de l'accident.
La débilité légère/moyenne, préexistante à l'accident, n'emportait pas pour autant un handicap physique. Son autonomie physique pour les actes de la vie courante n'était donc pas amoindrie par son handicap intellectuel. Il exerçait une activité professionnelle à temps plein dans le travail de la vigne et assurait lui-même ses déplacements.
Il ressort des éléments communiqués aux débats que, selon le bilan d'autonomie réalisé le 5 octobre 2009 l'état de Monsieur X... requiert une aide active pour l'ensemble de l'alimentation, habillage, soin d'hygiène et du logement, lavage des habits etc et une certaine stimulation et supervision, autant d'actes de la vie courante pour lesquels il était en grande partie autonome avant l'accident.
L'expertise déposée le 29 juillet 2010 a indiqué que la prise en charge de la structure Handivillage doit être considérée à hauteur de 60% imputable au seul accident et 40 % à son état antérieur de débilité légère/moyenne. Il est précisé que la structure répondant parfaitement à l'état de la victime et à ses besoins il n'a besoin aucune aide humaine supplémentaire.
Cependant le fait que Monsieur X... soit pris en charge dans la structure adaptée d'Handivillage ne doit pas entrer en considération dans le calcul du besoin en aide humaine résultant directement des conséquences de l'accident.
Aussi il apparaît que la limitation de la mission de l'expert au seul examen du besoin en tierce personne avant la consolidation, n'est pas de nature à renseigner la juridiction saisie de l'ensemble des besoins en aide humaine de Monsieur X..., indépendamment des modalités de sa prise en charge actuelle et ce pour préserver sa possibilité de choix d'un autre projet de vie pour l'avenir.
Il n'y a pas lieu de désigner à nouveau le professeur Z... en ordonnant une expertise complète sur l'évaluation du poste de préjudice tierce personne avant et après consolidation comme le sollicite Monsieur X..., mais la cour étant saisie de l'appel de la décision ayant, "avant dire droit sur les postes de préjudice assistance par tierce personne avant et après consolidation," ordonné un complément d'expertise confié au Professeur Z..., il y a lieu de modifier la mission confiée à l'expert.
En effet le tribunal l'a limitée à l'examen du besoin en tierce personne avant consolidation alors même qu'il a réservé également les demandes faites au titre de la tierce personne après consolidation.
Il convient donc de modifier la mission confiée à l'expert en l'étendant à l'étude du besoin de la victime en aide humaine après la date de consolidation et en distinguant l'aide nécessaire tant qu'il bénéficie de l'accueil dans la structure Handivillage et celle qui serait nécessaire dans l'hypothèse d'une prise en charge en dehors d'un milieu institutionnel, le cas échéant, d'un retour à domicile.
Sur l'indemnisation du préjudice corporel de Monsieur X...
L'ensemble des préjudices a été évalué dans le cadre de l'expertise déposée par le Professeur Z... le 29 juillet 2010 dont les éléments ont été exposés ci-avant.
Les parties s'accordent sur la confirmation des sommes allouées par le jugement déféré au titre des Dépenses de Santé Actuelles, des Pertes de Gains Professionnels Actuels et des Dépenses de Santé Futures.
Le jugement déféré sera donc confirmé sur ces points.
Au total cinq postes de préjudice sont contestés par l'une ou l'autre partie, les Pertes de Gains Professionnels Futurs, le Déficit Fonctionnel Permanent, le Déficit Fonctionnel Temporaire, les Souffrances Endurées et le Préjudice Esthétique Permanent .
Les postes de préjudice contestés seront examinés ci-après.

- 1- Les Pertes de Gains Professionnels Futurs :
Le tribunal a alloué à Monsieur X... la somme de 83.697 ¿ en réparation du préjudice subi du fait de la perte de ses gains professionnels futurs.
Monsieur X... représenté par l'ATI demande l'infirmation du jugement soutenant être totalement inapte à toute activité professionnelle alors qu'avant l'accident il percevait un salaire de 1.068,61 ¿ par mois en tant que salarié à temps plein de l'entreprise du Château Couffran. C'est sur cette base qu'ont été calculées les indemnités journalières qui lui ont été versées, d'où une perte annuelle de 1.068,61 x 12 = 12.817,44 ¿. Il conteste l'absence de capitalisation viagère de cette perte, pourtant justifiée compte tenu de sa situation et du fait qu'il n'a sollicité aucune somme au titre de l'incidence professionnelle. Il demande à la cour de faire application du barème de capitalisation 2013 compte tenu des différences entre les taux d'intérêt des précédents barèmes. Il sollicite donc au titre des Pertes de Gains Professionnels Futurs la somme de 258.331 ¿ (12.817,44 x 20,113), après déduction de la créance de la MSA de 43.273 ¿, le solde en sa faveur s'établira à la somme de 215.058 ¿ qu'il demande à la cour de lui allouer.
La compagnie AXA demande également l'infirmation du jugement sur ce poste de préjudice et à titre principal conclut au débouté de la demande estimant que Monsieur X... qui, âgé de 56 ans au jour de l'accident avait déjà cotisé 36 ans, était proche de la retraite et ne justifie d'aucune perte de gains professionnels futurs. A titre subsidiaire elle demande que l'éventuelle somme qui lui serait attribuée à ce titre soit versée sous forme de rente capitalisée avec application de la table de capitalisation publiée à la gazette du Palais du 27 mars 2013.
En l'espèce, quelle que soit la durée pendant laquelle Monsieur René X... aurait du continuer à travailler pour avoir une retraite à taux plein, celui-ci avait, avant l'accident, la possibilité de travailler jusqu'à 65 ans, comme l'a retenu le tribunal. Aussi la compagnie AXA est mal fondée à dire que qu'il ne justifie d'aucune perte de gains professionnels futurs.Il n'y a pas lieu de prévoir une capitalisation viagère comme le sollicite l'ATI pour Monsieur X..., ni le versement d'une rente viagère comme le propose à titre subsidiaire sans la chiffrer la compagnie AXA, mais une capitalisation de la perte de ses gains jusqu'à l'âge de 65 ans. Les indemnités journalières, perçues jusqu'à sa consolidation ont été versées sur la base d'un revenu moyen mensuel de 1.068,61 ¿. Le jugement déféré a retenu un salaire net de 1.006,58 ¿ compte tenu des déclarations du curateur. Il convient de retenir ce montant, pour le calcul du capital alloué à ce titre compte tenu de l'absence de pièces justificatives supplémentaires.
En conséquence le jugement déféré, qui a fait une exacte appréciation de ce poste de préjudice, sera confirmé sur ce point.
- 2 - Le Déficit Fonctionnel Temporaire Total et Partiel :
L'expert a retenu un Déficit Fonctionnel Temporaire se décomposant en deux périodes, un Déficit Fonctionnel Temporaire Total du 1er juillet 2008 au 29 septembre 2008 soit 91 jours et un Déficit Fonctionnel Temporaire Partiel de 50 % du 30 septembre 2008 au 18 février 2010. Il a précisé que ce taux tient compte du handicap intellectuel antérieur qui permettait à Monsieur X... de vivre dans un milieu contenant, très proche de son lieu de travail, avec ses frères également handicapés mentaux et en présence d'une personne vivant avec eux et leur apportant une aide globale.Monsieur X... conteste le fait que le professeur Z... ait considéré qu'entre le 30 septembre 2008 et le 18 février 2010 son Déficit Fonctionnel a été partiel à hauteur de 50%. En conséquence, il sollicite au titre de ce poste de préjudice, compte tenu de ce qu'il considère avoir subi 20 mois d'incapacité temporaire totale, une somme de 14 000 ¿ (20 mois X 700).La compagnie AXA demande la fixation de la somme allouée à 2.093 ¿ pour le déficit fonctionnel temporaire total et à 5.237 ¿ pour le déficit fonctionnel temporaire partiel, pour un total de 7.330 ¿.
Le tribunal a fixé à la somme de 7.465 ¿ l'indemnité totale accordée pour les deux périodes de Déficit Fonctionnel Temporaire.Aucun élément ne justifie la remise en cause de l'appréciation argumentée de l'expert sur la durée du Déficit Fonctionnel Temporaire Total et Partiel, le tribunal a fait une juste appréciation de la somme allouée au titre de ce poste, elle sera confirmée.
- 3 - Les Souffrances Endurées : Monsieur X... demande la somme de 22.000 ¿ pour l'indemnisation des Souffrances Endurées.La compagnie AXA demande la confirmation du jugement déféré qui a alloué à la victime la somme de 10.000 ¿. L'expert a évalué ce poste de préjudice à 4/7.
Monsieur X... représenté par l'ATI n'apporte pas d'élément susceptible de conduire à une évaluation différente de celle faite par le tribunal conforme à la jurisprudence de la cour. La décision sera confirmée sur ce point.
- 4 - Le Déficit Fonctionnel Permanent DÉFICIT FONCTIONNEL PERMANENT. Monsieur X... considère que le taux de 45% retenu par l'expert est sous évalué. Il demande au total une indemnité de 125.000 ¿ comprenant la somme de 90.000 ¿ pour les séquelles physiques, la somme de 15.000 ¿ pour les souffrances post-consolidation et la somme de 20.000 ¿ pour l'impact sur la qualité de vie. La compagnie AXA demande la confirmation du jugement déféré qui a accordé à la victime la somme de 90.000 ¿.
Il n'y a pas lieu de faire de distinction, comme le fait Monsieur X..., dans les différentes composantes de son Déficit Fonctionnel Permanent, les souffrances post consolidation et l'impact des séquelles sur la qualité de vie faisant partie intégrante de ce poste de préjudice, ont été prises en compte dans le taux de 45 % fixé par l'expert qui a retenu à juste titre , en partie l'état antérieur du blessé au regard de son handicap préexistant.Ce poste de préjudice sera évalué en tenant compte de la date de consolidation, de l'âge de la victime à cette date (57 ans) et du taux de 45% qu'aucun élément ne permet de remettre en cause.
Cependant au vu de ces éléments, il apparaît que le tribunal a sous-évalué l'indemnité devant être allouée à Monsieur X..., laquelle sera fixée à la somme de 106.000 ¿.La décision déférée sera infirmée sur ce point.
- 5 - Le Préjudice Esthétique
Monsieur X... demande en réparation de son préjudice esthétique la somme de 7.000 ¿. La compagnie AXA demande la confirmation de la somme de 3.000 ¿ fixée par le jugement déféré. L'expert retient un taux de 2/7, qui n'est pas contesté. La somme allouée par le tribunal est conforme à la jurisprudence de la cour, elle sera confirmée.
Ainsi la décision déférée sera confirmée sur tous les postes de préjudice excepté sur celui relatif au Déficit Fonctionnel permanent réévalué par la cour à la somme de 106.000 ¿.
Conformément aux demandes des parties, l'imputation de la créance de la MSA d'un montant de 43.273, 55 ¿ se fera sur la Perte de Gains Professionnel Futurs.
La provision de 50.000 ¿ déjà versée par la compagnie AXA à la victime sera déduite des sommes revenant à celle-ci et mises à la charge de l'assureur.
Il sera fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'ATI d'Aquitaine représentant Monsieur René X....
La compagnie AXA sera condamnée à supporter les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFSla cour
- Donne acte à Monsieur X... assisté par son curateur l'ATI d'Aquitaine de ce qu'il renonce à sa demande d'évocation par la cour de la liquidation du préjudice résultant de son besoin en tierce personne
- Confirme le jugement déféré en ce qu'il a Avant dire droit sur les postes "assistance par tierce personne" avant et après consolidation, ordonné un complément d'expertise sur la personne de René X... et désigné pour la réaliser le Professeur Z... qui aura pour mission de :* dire si une aide tierce personne à domicile avant consolidation est nécessaire (hospitalisation de jour) au vu de l'état de la victime ; décrire et quantifier, au vu de l'état de santé de Monsieur René X... et des séquelles l'affectant en relation avec l'accident, l'aide tierce personne à domicile nécessaire, et en préciser les modalités (aide active ou passive) et l'importance en terme d'heureY ajoutant - Dit que la mission du complément d'expertise confiée au Professeur Z... par le jugement déféré sera complétée comme suit :Sans remise en cause de l'imputabilité des séquelles de l'accident, prédéterminée par le rapport du 29 juillet 2010, de 60% à l'accident et de 40% à son état antérieur,* dire si une aide tierce personne à domicile après consolidation est nécessaire ; * décrire et quantifier, au vu de l'état de santé de Monsieur René X... depuis la consolidation et au vu des séquelles en relation avec l'accident, l'aide en tierce personne à domicile nécessaire, et en préciser les modalités (aide active ou passive) et l'importance en terme d'heure et ce quel que soit le mode de prise en charge de la victime, y compris hors cadre institutionnel et notamment dans l'hypothèse d'un retour à domicile,
- Fixe à 500 ¿ la consignation supplémentaire mise à la charge de Monsieur X... assisté par l'ATI d'Aquitaine qui devra être versée au greffe du tribunal de grande instance de Bordeaux dans le délai de 2 mois sans autre avis du greffe à peine de caducité de la mesure d'instruction
- Confirme le jugement déféré dans ses autres dispositions relatives à la liquidation du préjudice, excepté sur les sommes allouées à Monsieur X... au titre du Déficit Fonctionnel Permanent et sur le montant total de l'indemnité revenant à la victime et mise à la charge de la compagnie AXA
Statuant à nouveau sur ces points- Fixe à la somme de 106.000 ¿ l'indemnité allouée à Monsieur X... au titre du Déficit Fonctionnel Permanent
- Condamne la compagnie AXA à payer à Monsieur X... assisté de son curateur l'ATI d'Aquitaine, la somme de 116.888,45 ¿ déduction faite de la créance de l'organisme social et de la provision déjà reçue
- Condamne la compagnie AXA à payer à Monsieur X... assisté de son curateur l'ATI d'Aquitaine la somme de 2.500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel
- Condamne la compagnie AXA à supporter les dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Henriette Filhouse, Présidente, et par Sylvie Hayet, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Le Greffier Le Président

S. Hayet H. Filhouse


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : CinquiÈme chambre civile
Numéro d'arrêt : 13/04565
Date de la décision : 24/06/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bordeaux;arret;2015-06-24;13.04565 ?
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