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11/10/2017 | FRANCE | N°16/01742

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 11 octobre 2017, 16/01742


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 11 OCTOBRE 2017



(Rédacteur : Monsieur Jean-François SABARD, Président,)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 16/01742







Monsieur [K] [O]



c/



SAS LÉON GROSSE AQUITAINE

















Nature de la décision : AU FOND













Notifié par LRAR le :r>


LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 11 OCTOBRE 2017

(Rédacteur : Monsieur Jean-François SABARD, Président,)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 16/01742

Monsieur [K] [O]

c/

SAS LÉON GROSSE AQUITAINE

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 février 2016 (R.G. n°F 14/02644) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 15 mars 2016,

APPELANT :

Monsieur [K] [O]

né le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 1], de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

assisté de Me Emmanuel SUTRE, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SAS Léon Grosse Aquitaine, Filiale du Groupe Léon Grosse, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 2]

N° SIRET : 327 512 539

représentée par Me Benoit PERINGUEY avocat au barreau de BORDEAUX, substituant Me Charles PHILIP de la SCP RACINE, avocat au barreau de NANTES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 juillet 2017 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-François SABARD, Président, chargé d'instruire l'affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-François Sabard, président

Madame Isabelle Lauqué, conseiller

Madame Annie Cautres, conseiller

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

- prorogé en raison de la charge de travail de la cour, à la date du 11 octobre 2017.

***

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Monsieur [K] [O] a été engagé par la société LEON GROSSE par lettre d'embauche pour un poste dans sa filiale GT CONSTRUCTION qui deviendra LEON GROSSE AQUITAINE.

Le 3 décembre 2012 un contrat de travail à durée indéterminée est signé par les parties pour l'exercice des fonctions de responsable des études, position B, coefficient 100 de la convention collective nationale des cadres du bâtiment.

Le 10 juin 2014 le salarié a refusé la proposition de rupture conventionnelle qui lui était faite lors de l'entretien le 3 juin 2014.

Le 11 juin 2014 il est convoqué à un entretien préalable qui se tient le 23 juin 2014.

Le 27 juin 2014 le salarié est licencié pour faute grave.

Le 6 octobre 2014 le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux qui par un jugement du 15 février 2016 a considéré que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné l'employeur au paiement des sommes suivantes :

' 9710 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis.

' 971 € à titre d'indemnité de congés payés afférents.

' 1699,25 euros à titre d'indemnité légale de licenciement.

' 35'000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause et sérieuse.

' 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Toutes les sommes sont assorties des intérêts de droit à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, pour les dommages-intérêts les intérêts courants à compter de la décision.

Le salarié est débouté du surplus de ses demandes et la société a été condamnée aux dépens de l'instance.

Monsieur [K] [O] a relevé régulièrement appel de cette décision par déclaration au greffe de la cour en date du 15 mars 2016.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

L'appelant conclut à la réformation du jugement sauf en ce qu'il a considéré que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et sollicite de la cour que le licenciement soit déclaré irrégulier et que l'employeur soit condamné au paiement des sommes suivantes :

' 2189,33 euros au titre de l'indemnité de licenciement.

' 12'510 € au titre de l'indemnité de préavis,

' 1251 € au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis,

' 19'958,64 euros à titre d'arriérés de rémunération sur heures supplémentaires et 351,22 euros au titre du salaire du 30 juin 2014.

' 85'000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice financier causé par la rupture du contrat de travail.

' 5000 €au titre du préjudice moral.

' 587,88 euros au titre du solde de remboursement de frais professionnels.

' 31'189 € au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

Il est demandé à titre subsidiaire sur le chef de la demande des heures supplémentaires d'ordonner avant-dire droit une mesure d'expertise judiciaire.

Il est sollicité enfin la condamnation de l'employeur à la remise des bulletins de paye rectifiés sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, Monsieur [K] [O] fait valoir qu'il a fait l'objet d'un licenciement verbal dans des conditions brutales et vexatoires quelques jours seulement après la proposition d'une rupture conventionnelle et sans avoir été informé de l'objet de l'entretien préalable pour lequel il avait reçu une convocation de l'employeur.

Il indique que l'employeur ne rapporte pas la preuve de la gravité de la faute qu'il lui est reproché alors que son contrat de travail ne mentionne pas l'existence d'une fonction commerciale auprès des acteurs locaux contrairement au compte rendu de l'entretien annuel du 17 février 2014 faisant référence aux missions commerciales et qu'il a convenablement accompli ses tâches comme le montre la lettre de félicitations par un client.

Il estime qu'il a subi un préjudice important dont il est en droit de demander réparation à la cour.

La société intimée conclut à la réformation du jugement entrepris en ce qu'il a été dit que le licenciement du salarié est sans cause réelle et sérieuse et demande à la cour de dire que le licenciement repose sur une faute grave et de débouter en conséquence le salarié de l'ensemble de ses prétentions en le condamnant par ailleurs au paiement d'une somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l'instance.

L'intimée expose que la procédure de licenciement est régulière et que la preuve d'une faute grave n'est pas rapportée dans la mesure où le salarié a refusé d'assurer sa mission commerciale et qu'il aurait commis des manquements en matière d'études de prix tant sur le plan quantitatif que qualitatif et que par ailleurs les autres demandes du salarié notamment sur les heures supplémentaires, sur l'indemnité pour travail dissimulé, sur le remboursement des frais professionnels ou sur la perte de chance doivent être rejetées par la cour.

Il convient pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties de se référer expressément à leurs conclusions écrites développées oralement à l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la régularité du licenciement :

S'il n'est pas établi que le salarié a fait l'objet d'un licenciement verbal le 27 juin 2014 comme il le soutient tout en étant mis dans l'obligation de remettre immédiatement ses clés de bureau, force est de constater qu'il a pris connaissance de la lettre de convocation à l'entretien préalable le 11 juin 2014 pour le 23 juin 2014 et remise en mains propres et que le salarié n'apporte aucun élément permettant d'étayer ses allégations contestées par l'employeur .

Sur le bien fondé du licenciement pour faute grave :

Au terme d'une jurisprudence établie, la faute grave dont la preuve doit être rapportée par l'employeur, est définie comme celle résultant de tout fait ou ensemble de faits, non déjà sanctionné, imputable au salarié constituant une violation des obligations découlant de son contrat de travail ou de sa fonction d'une importance telle qu'elle rend impossible son maintien dans la société concernée et ce même pendant la durée du préavis.

La lettre de licenciement du 27 juin 2014 lui reproche d'avoir refusé à plusieurs reprise sa mission de commercial auprès des acteurs locaux de la construction afin d'apporter des affaires étudiées par son service comme le prévoit le poste de responsable des études et depuis son arrivée en décembre 2012 d'avoir traité un nombre d'affaires insuffisant comparé au travail de ses collaborateurs et enfin de ne pas assurer son rôle de responsable d'études obligeant son directeur d'agence à le faire à sa place et à coordonner les différentes études entre lui et les autres personnes de son service.

La cour relève que le contrat de travail du salarié se borne à indiquer que dans le cadre de sa fonction de responsable des études, il doit assurer ce qui en relève directement et le cas échéant suppléer si nécessaire tout collaborateur afin que les résultats attendus soient obtenus.

Si sa mission de commercial est rappelée dans le compte rendu de l'entretien d'évaluation professionnelle du 17 février 2014, en revanche aucune mention sur une quelconque mission commerciale ne figure dans le contrat de travail ou dans la lettre de promesse d'embauche initiale et aucun objectif commercial ne lui a été fixé alors que sa rémunération est une rémunération fixe et que par ailleurs il n'est pas établi que le salarié aurait manqué gravement à ses obligations contractuelles, une éventuelle insuffisance professionnelle ne pouvant être qualifiée de faute grave dans le cadre d'un licenciement disciplinaire.

C'est donc à juste titre et pour des motifs que la cour approuve que le conseil de prud'hommes a retenu que les éléments versés aux débats sont insuffisants pour justifier un licenciement pour faute grave voire même pour un licenciement pour une cause réelle et sérieuse.

Sur la demande relative aux heures supplémentaires et sur l'indemnité pour travail dissimulé :

L'article L 3171 '4 du code du travail énonce «en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.»

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Il n'est pas établi que l'employeur a demandé au salarié d'effectuer des heures supplémentaires relatives à sa charge de travail alors que les tableaux établis par ce dernier ne permettent pas d'en déduire un horaire précis et une amplitude de travail effective et donc un dépassement de la durée contractuelle de travail sur une base mensuelle de 170 heures soit 39 heures hebdomadaires, sa rémunération incluant les heures supplémentaires comprises entre 35 et 39 heures.

L'envoi de courriels à chaque extrémité de la journée ne permet pas en tout état de cause d'en déduire un horaire ou une amplitude de travail entre les différents envois justifiant un dépassement de la durée légale du travail .

Il est justifié que les horaires de travail du salarié étaient du lundi au jeudi de 8 heures à 12 heures et de 14 heures à 18 heures et le vendredi de 8 heures à 12 heures et de 14 heures à 17 heures et que les captures d'écran communiquées par le salarié faisant état des fichiers modifiés sur le serveur de la société ne peuvent entraîner la conviction de la cour sur le temps de travail effectif décrit par le salarié dont les demandes seront rejetées.

Il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise avant-dire droit avec la mission proposée par l'appelant pour rechercher notamment si les historiques des modifications des datations d'enregistrement de fichiers font apparaître des modifications pour fausser la comptabilisation des heures de travail du salarié.

Il en va pareillement de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé en l'absence de toute intention de l'employeur de dissimuler une partie du salaire, la cour ayant considéré qu'il n'était justifié d'aucune heure supplémentaire effectuée par le salarié et non rémunérée en dehors des heures réalisées entre 35 et 39 heures par semaine.

Sur les conséquences de licenciement :

Compte tenu de l'ancienneté du salarié engagé le 3 décembre 2012 et licencié par courrier du 27 juin 2014 bénéficiant de moins de deux ans d'ancienneté dans un entreprise de plus de 10 salariés, il convient d'évaluer son préjudice qui au regard des éléments du dossier a été justement calculé à la somme de 35'000 € par le premier juge dont la décision sera confirmée sur ce point.

Il convient également de confirmer la décision relative à l'indemnité compensatrice de préavis fixée à 9710 € représentant deux mois de rémunération sur la base d'une rémunération de 4855 € par mois outre une somme de 971 € à titre d'indemnité de congés payés afférents.

L'indemnité de licenciement au regard de l'ancienneté du salarié et de sa rémunération de référence sera fixée à la somme de 1699,25 euros .

Sur les frais professionnels :

Le salarié avait sollicité le remboursement de frais professionnels auxquels s'est opposé l'employeur en l'absence de pièces justificatives.

Le 24 juillet 2014 l'employeur a régularisé le remboursement des frais par chèque d'un montant de 9385,43 euros.

En l'absence de justification sur les sommes restant dûes, sa demande sera rejetée par la cour.

Sur la perte de chance au titre de la retraite :

Force est de constater comme l'a souligné le premier juge que les périodes de chômage indemnisées sont prises en considération dans le calcul des droits à la retraite et que le salarié conserve la possibilité de liquider sa retraite au 31 décembre 2015 et non au 30 juin 2017 et que dès lors le préjudice qu'il estime avoir subi du fait de son licenciement injustifié quelques années avant sa retraite n'est pas justifié.

Sur le préjudice moral :

Aucun élément n'est versé aux débats de nature à établir l'existence d'un préjudice moral en raison des circonstances de la rupture du contrat de travail de sorte que ce chef de demande devra être rejeté par la cour.

Sur les autres demandes :

Le jugement déféré sera confirmé s'agissant du rejet de la demande de remise des documents compte tenu de ce qui a été jugé précédemment.

La cour confirmera également le jugement sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de condamner l'employeur à payer à Monsieur [K] [O] une indemnité de procédure de 1500 € au titre des frais non compris dans les dépens sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile lesquels dépens seront mis à la charge de la société LEON GROSSE AQUITAINE qui sera déboutée de sa demande sur le même chef.

PAR CES MOTIFS

Déclare l'appel régulier recevable mais mal fondé.

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Y ajoutant:

Condamne la societé LEON GROSSE AQUITAINE à payer à monsieur [K] [O] une indemnité de procédure de 1500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Rejette le surplus des demandes.

Condamne la société LEON GROSSE AQUITAINE aux dépens de l'instance.

Signé par Monsieur Jean-François Sabard, Président et par Anne-Marie Lacour-Rivière, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Anne-Marie Lacour-Rivière Jean-François Sabard


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 16/01742
Date de la décision : 11/10/2017

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°16/01742 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-10-11;16.01742 ?
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