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08/11/2017 | FRANCE | N°15/06017

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 08 novembre 2017, 15/06017


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



--------------------------







ARRÊT DU : 8 NOVEMBRE 2017



(Rédacteur : Madame Catherine DUPOUY DE GORDON, Présidente)



PRUD'HOMMES



N° de rôle : 15/06017







Madame [H] [X]



c/



ASSOCIATION DES PARALYSES DE FRANCE APF [Établissement 1]

















Nature de la décision : AU FOND










>

Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,





Grosse délivrée le :



à :

Décision d...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 8 NOVEMBRE 2017

(Rédacteur : Madame Catherine DUPOUY DE GORDON, Présidente)

PRUD'HOMMES

N° de rôle : 15/06017

Madame [H] [X]

c/

ASSOCIATION DES PARALYSES DE FRANCE APF [Établissement 1]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par

voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 31 août 2015 (R.G. n°F12/02699) par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 01 octobre 2015,

APPELANTE :

Madame [H] [X]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

assistée de Me Stanislas LAUDET, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

ASSOCIATION DES PARALYSES DE FRANCE APF [Établissement 1] prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Établissement 1] [Adresse 2]

représentée par Me Hervé MAIRE, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 septembre 2017 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine Dupouy de Gordon, présidente chargée d'instruire l'affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine Dupouy de Gordon, présidente

Madame Isabelle Lauqué, conseillère

Madame Annie Cautres, conseillère

Greffier lors des débats : Madame Anne-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSE DU LITIGE

Mme [H] [X] a été embauchée par l'Association des Paralysés de France (APF) [Établissement 1] le 31 juillet 1990 en qualité de garde-malade, suivant contrat de travail à durée déterminée.

Le 1er avril 1992, l'APF a conclu avec Mme [X] un contrat à durée indéterminée à temps partiel en qualité d'aide-soignante et le 8 septembre 1998, un avenant a été signé précisant qu'elle effectuerait un temps de travail mensuel de 126,75 heures pour un poste de nuit. Puis un nouvel avenant a été signé le 31 mars 2000 réduisant son temps de travail à 113 heures et 45 minutes.

La salariée a été mise à pied à titre conservatoire à compter du 30 avril 2011 et par lettre du 14 juin 2011, son licenciement pour faute grave lui a été notifié.

Le 16 novembre 2012, Mme [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux d'une contestation de son licenciement et de diverses demandes de condamnations à la charge de l'employeur.

Par jugement de départage prononcé le 31 août 2015, le conseil de prud'hommes a débouté Mme [X] de toutes ses demandes et l'a condamnée à verser à l'Association des Paralysés de France la somme de 450 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Mme [X] a relevé appel le 1er octobre 2015.

Par conclusions remises le 19 mai 2016 et développées oralement à l'audience, Mme [X] demande à la cour de réformer en toutes ses dispositions le jugement attaqué, de retenir l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement ainsi que les graves manquements de l'employeur à ses obligations de sécurité et de bonne foi dans l'exécution du contrat de travail, au détriment de la salariée, et de condamner en conséquence l'Association des Paralysés de France, [Établissement 1], à lui verser les sommes suivantes :

- rappel de salaire pendant la mise à pied : 3414,73 euros, et congés payés afférents soit 341,47 euros,

- indemnité compensatrice de préavis : 4454 € et les congés payés afférents soit 445,40 euros,

- indemnité de licenciement : 11'622 € ,

- dommages et intérêts sur le fondement de l'article L 1235-3 du code du travail : 55'000 €,

- dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et abusif : 20'000 €,

- dommages et intérêts sur le fondement des articles L 1222-1 et L4121-1 du code du travail : 20'000 €,

- dommages et intérêts pour violation ANI du 11 janvier 2008 : 2227 € ,

- dommages et intérêts pour absence d'information du droit au DIF : 2227 €,

- dommages et intérêts pour délai de carence pôle emploi : 3195,75 euros,

- remboursement des allocations chômage pôle emploi sur le fondement de l'article L 1235-4 du code du travail,

- 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les frais d'huissier,

- intérêts légaux de droit,

- capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1154 du Code civil,

- entiers dépens.

Mme [X] demande en outre à la cour d'ordonner à l'APF la remise des documents désignés ci-dessous :

- bulletins de salaires pour les mois de juillet et août 2011,

- bulletins de salaires rectifiés pour les mois de mai et juin 2011,

- certificat de travail rectifié du 31 juillet 1990 au 15 août 2011,

- attestation pôle emploi rectifiée,

- registre du personnel de 2007 à 2011,

sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document, avec exécution provisoire, la cour se réservant la liquidation de l'astreinte.

Par conclusions déposées le 16 février 2017 et développées oralement à l'audience, l'Association des Paralysés de France demande en revanche à la cour de déclarer irrecevable et en tout cas non fondé l'appel interjeté par Mme [X], de l'en débouter, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré fondé sur une faute grave le licenciement de Mme [X] et à titre reconventionnel, de condamner celle-ci à verser la somme de 4000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la prescription et le caractère tardif de la notification du licenciement

La lettre de licenciement du 14 juin 2011 est en particulier libellée en ces termes :

' Madame,

...nous avons souhaité entendre vos explications sur des fautes graves commises par vous dans l'exercice de votre travail et dont nous avons eu récemment connaissance.

Vous adoptez vis-à-vis des résidents des comportements inadmissibles et vous tenez des propos dégradants à leur égard.

De plus, vous ne respectez pas les règles élémentaires du travail en équipe et vous créez un climat de tension dans les relations avec vos collègues qui s'en trouvent perturbées et s'en plaignent.

Plusieurs exemples ont été soulignés et illustrés lors de l'entretien et notamment...

Lors de l'entretien, vous avez reconnu un certain nombre d'agissements tout en les minimisant....

Le fait est que vos comportements sont totalement incompatibles avec ce que nous sommes en droit d'attendre d'une professionnelle de votre niveau.

.....

L'analyse que nous faisons de vos comportements relèvent d'acte de maltraitance qui nous ont obligé à effectuer un signalement auprès des autorités compétentes et à engager, en outre, une procédure de licenciement à votre égard.

Cet entretien n'a pas permis de trouver dans vos explications ce qui pourrait vous exonérer de vos responsabilités dans les fautes qui vous sont reprochées et qui constituent des violations multiples et graves au règlement intérieur du personnel de l'APF.

Vos comportements fautifs et votre totale incapacité à vous remettre en question nous oblige à constater que vous représentez un danger grave dans notre établissement, tant vis-à-vis des usagers que de vos collègues de travail et de l'image de notre association dont vous engagez la responsabilité.

Cette situation ne nous permet plus de vous maintenir à votre poste.

Compte tenu de ce qui précède, nous sommes à présent dans l'obligation de vous notifier, par le présent courrier, votre licenciement pour faute grave.

Votre contrat de travail prendra fin des la première présentation de cette lettre et ce sans indemnité ni préavis.

...

Enfin, compte tenu de la gravité des motifs de ce licenciement, nous vous informons que votre période de mise à pied conservatoire ne vous sera pas rémunérée.

...'

Le licenciement pour faute grave est de nature disciplinaire et le caractère disciplinaire de la procédure résulte explicitement de la lettre de convocation à l'entretien préalable du 29 avril 2011.

Conformément aux dispositions de l'article L 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.

À la suite d'un courrier de signalement pour maltraitance envoyé le 3 mai 2011 par l'APF au procureur de la République, une enquête préliminaire a été diligentée mais, à l'issue de celle-ci, il n'a pas été engagé de poursuites pénales de sorte que le délai de prescription n'a pas été interrompu.

En revanche, le délai de prescription ne court que du jour où l'employeur a eu une connaissance exacte et complète des faits reprochés et en l'espèce, il est produit un premier document établi par Mme [P], responsable du service de vie quotidienne, relatant une rencontre du mardi 19 avril 2011 avec Mme [X] et l'une de ses collègues Mme [T], puis une rencontre du mercredi 20 avril 2011 avec deux autres aides-soignantes de nuit, faisant apparaître des difficultés susceptibles d'être provoquées par un comportement inadapté de la part de Mme [X].

Au vu de ces éléments, et d'un entretien téléphonique avec Mme [T] le 23 avril 2011, Mme [C], directrice de l'APF [Établissement 1], a confié à Mme [P], le 26 avril 2011, un ordre de mission afin qu'elle rencontre l'ensemble des professionnels travaillant la nuit et qu'elle fasse un état des lieux du travail de nuit avec Mme [H] [X], sollicitant que les éléments de réponse soient transmis au plus tard le jeudi 28 avril 2011 par un rapport écrit et détaillé.

Dès le 29 avril 2011, et par lettre recommandée avec accusé de réception, Mme [C], en qualité de directrice de l'APF [Établissement 1], a engagé une procédure disciplinaire à l'encontre de Mme [X], la convoquant à un entretien préalable fixé au 12 mai 2011 en raison des fautes graves dont elle a eu connaissance, la mettant dans l'obligation d'envisager une sanction, voire un licenciement, et notifiant à la salariée que compte tenu de la gravité des fautes reprochées, elle était mise à pied à titre conservatoire dès la première présentation du courrier jusqu'à ce qu'une décision définitive soit prise à son égard.

Il résulte en conséquence de la confrontation des dates ci-dessus que la prescription de deux mois de l'article L 1332-4 du code du travail n'est pas acquise.

Les dispositions de l'article L.1332-2 du code du travail, aux termes duquel la sanction ne peut intervenir plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien préalable, sont également applicables aux licenciements prononcés pour des faits considérés comme fautifs par l'employeur.

La lettre de licenciement pour motif disciplinaire, en l'occurrence faute grave, devait en conséquence être notifiée à la salariée dans le mois suivant le jour fixé pour l'entretien préalable.

Le délai d'un mois pour notifier la sanction courait donc à compter du 12 mai 2011, date fixée pour cet entretien préalable. Or, en l'espèce, la lettre de licenciement est datée du 14 juin 2011 et elle a été effectivement présentée à la salariée le 15 juin 2011.

L'APF fait valoir à ce sujet que la salariée a accusé réception de la convocation le 30 avril 2011 mais qu'elle ne s'est pas présentée à l'entretien préalable et que ce serait donc de façon particulièrement malvenue qu'elle reprocherait à l'employeur d'avoir décidé de son propre chef de la reconvoquer alors qu'il s'agissait simplement de la constatation de la carence de la salariée qui, sans aucune explication, ne s'était pas présentée. L'APF ajoute qu'il sera en conséquence donné acte qu'à aucun moment la salariée n'a donné les raisons de son absence puisque la seule missive qu'elle a transmise est une lettre du 1er mai indiquant qu'elle contestait le principe de la mise à pied qu'elle estimait abusive et caduque mais que compte tenu de la gravité des faits qui lui étaient reprochés, l'employeur a estimé nécessaire d'entendre Mme [X] et de recueillir effectivement ses explications en reportant la date de l'entretien préalable, observant que Mme [X] ne s'est pas plainte de la fixation d'une nouvelle convocation et qu'elle a d'ailleurs comparu, assistée de deux personnes. L'APF en déduit que le seul entretien préalable qui a eu lieu est celui du 26 mai 2011, à une date reportée dans l'intérêt commun des parties, invoquant en dernier lieu une demande implicite de la salariée.

Il apparaît toutefois qu'aucune pièce ne permet de caractériser une demande de report de la date de l'entretien préalable formulée par la salariée, même de façon implicite, à supposer que cette notion soit susceptible d'avoir une incidence.

En effet, dans son courrier du 1er mai 2011, Mme [X] conteste toute sanction, indique qu'elle refuse la mise à pied et transmet un arrêt de travail avec un justificatif de décès de sa belle-mère sans évoquer directement ou indirectement la date de l'entretien préalable et a fortiori, sans évoquer un quelconque report à envisager.

C'est donc à l'initiative de l'employeur que le report de date de l'entretien préalable a été effectué et quand bien même ce report aurait eu pour finalité de favoriser la présence du salarié, il n'en demeure pas moins que le licenciement disciplinaire pour faute grave est intervenu en méconnaissance des dispositions susvisées et que le licenciement de Mme [X] est, pour ce motif, dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement du 31 août 2015 sera donc infirmé en ce qu'il a débouté Mme [X] de ses demandes.

Sur le rappel de salaire durant la mise à pied et les congés payés afférents

Dans la mesure où la procédure disciplinaire n'a pas été régulièrement menée, il sera fait droit à la demande de Mme [X] au titre d'un rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire.

Elle sollicite à cet égard une somme de 3414,73 euros alors que l'APF estime que la somme accordée ne peut être supérieure à 2644,46 euros, pour la même période du 30 avril au 15 juin 2011.

Mme [X] fonde ses calculs sur le salaire moyen brut des 12 derniers mois soit 2227 € et l'APF fonde ses calculs sur la moyenne des heures travaillées par Mme [X], également au cours des 12 derniers mois, soit 138,57 heures avec une évaluation des différentes primes et indemnités ainsi que d'un nombre de nuits travaillées.

La cour retiendra le calcul de Mme [X], basé sur le salaire moyen brut dans la mesure où le salaire moyen brut inclut toutes les sommes perçues par la salariée devant servir de base à l'évaluation de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir durant la période de mise à pied et fera droit à sa demande à hauteur de 3414,73 euros sur 46 jours ainsi qu'à sa demande au titre des congés payés afférents soit la somme de 341,47 euros.

Sur l'indemnisation de la rupture du contrat de travail

En l'absence de faute grave, la salariée a droit aux indemnités de rupture, soit une indemnité compensatrice de préavis de même qu'une indemnité de licenciement.

Sur les mêmes bases que ci-dessus, Mme [X] sollicite une indemnité de préavis d'un montant de 4454 € soit deux mois sur la base du salaire brut mensuel moyen de 2227 €

ainsi que les congés payés afférents.

L'APF également sur les mêmes bases que ci-dessus considère que la somme revenant à Mme [X], au titre de l'indemnité compensatrice de préavis de deux mois, s'élève à une somme de 3170,85 euros outre les congés payés afférents.

Également pour la même raison que ci-dessus, il sera fait droit à la demande de Mme [X] en ce qui concerne le montant de 4454 € outre les congés payés afférents à hauteur de 445,40 euros.

*

Au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, Mme [X] sollicite le

versement d'une somme de 11'622 € calculée exactement sur la base du salaire moyen brut des trois derniers mois soit une somme mensuelle de 1937 €.

Il sera en conséquence fait droit à la demande qu'elle formule de ce chef.

*

Mme [X] avait au moment de la rupture du contrat de travail près de 21 ans d'ancienneté dans une entreprise occupant habituellement plus de 11 salariés et elle était âgée de 49 ans. Elle estime que l'employeur a porté atteinte à son honneur, sa probité, à sa dignité, à sa réputation professionnelle en la licenciant pour faute grave et qu'il a ainsi gravement compromis son avenir professionnel.

Elle sollicite en conséquence le versement d'une indemnité de 55'000 € soit 24 mois de salaires à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au titre de l'article L 1235-3 du code du travail, indiquant être toujours sans emploi et elle produit à ce sujet une attestation pôle emploi du 5 juillet 2011 l'avisant de sa prise en charge au titre de l'allocation d'aide au retour à l'emploi.

Compte tenu de son ancienneté, ce document ne peut pas justifier de la situation de Mme [X] pour la période écoulée postérieurement et de la durée pendant laquelle elle serait restée sans emploi.

Au regard du contexte ci-dessus rappelé, des pièces produites et des explications des parties, il apparaît justifié d'évaluer à la somme de 20'000 € le montant de l'indemnité revenant à Mme [X].

*

Mme [X] reprend à l'appui d'une demande de 20'000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et abusif le fait qu'elle aurait été brutalement licenciée pour faute grave de façon illégale et injustifiée après plus de 20 ans de bons et loyaux services de sorte qu'elle subirait un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi.

Outre le fait que Mme [X] a déjà fait valoir l'atteinte à son honneur, à sa probité, à sa dignité et à sa réputation professionnelle en ce qui concerne l'évaluation de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, il apparaît qu'elle ne justifie d'aucune circonstance vexatoire qui aurait accompagné la mise en oeuvre de la procédure de licenciement et en particulier, aucune précipitation ni légèreté dans la mesure où l'APF avait fait diligenter à la fois des vérifications internes et une enquête préliminaire. Le classement sans suite intervenu ne remet pas en cause la légitimité de la demande d'enquête.

Mme [X] sera donc déboutée de ce chef de demande.

*

Mme [X] sollicite également le versement d'une somme de 20'000 € à titre de dommages intérêts sur le fondement des articles L 1222-1 et L4121-1 du code du travail.

Elle fait valoir que l'employeur a manqué de manière délibérée à son obligation de sécurité de résultat en ne protégeant pas la santé morale de la salariée et qu'il n'a pas exécuté le contrat de travail de bonne foi ce qui l'oblige à réparer le préjudice matériel ou moral résultant de ces manquements et, une nouvelle fois, des conditions vexatoires du licenciement. Mme [X] fait état d'un préjudice distinct de celui lié au licenciement injustifié.

Elle rappelle en particulier avoir vécu des événements douloureux du mois d'octobre 2010 à avril 2011, en relation avec l'état de santé de sa belle-mère. Il s'agit donc d'événements de nature tout à fait personnelle, qui se sont déroulés à l'extérieur de l'entreprise, sans lien avec la vie professionnelle.

Mme [X] relate également que sa collègue, Mme [T], lui en voulait pour plusieurs raisons et cherchait par tous les moyens à se venger.

Contrairement à ce que soutient Mme [X], l'employeur a tenté d'aider les deux employées à s'entendre ou à trouver une solution de compromis en particulier le 19 avril 2011 puisque Mme [P], responsable du service Vie Quotidienne, a proposé une rencontre que Mme [X] a refusée, au motif qu'elle était persuadée que Mme [T] allait s'emporter. Selon le même compte rendu de Mme [P], Mme [T] souhaitait que Mme [X] reste pour un entretien mais celle-ci a maintenu sa décision de partir, prétextant qu'elle devait vite se rendre dans un autre lieu.

En conséquence, Mme [X] sera déboutée de sa demande d'indemnisation.

Sur l'absence d'information sur la portabilité de la prévoyance

L'APF s'oppose à la demande d'indemnisation formulée par Mme [X] de ce chef au motif que les mesures sur la portabilité de la prévoyance ne sont pas applicables dans la branche professionnelle sanitaire, sociale et médico-sociale, incluant le secteur associatif sanitaire et social.

Il apparaît effectivement que si toutes les entreprises relevant du champ d'application de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 sont concernées par la portabilité de la prévoyance, cet accord ne s'appliquait pas, lors du licenciement de Mme [X], à l'économie sociale, incluant le secteur associatif sanitaire et social.

Mme [X] sera donc déboutée de sa demande.

Sur la demande relative au droit individuel à la formation

En vertu de l'article L6323-19 du code du travail, dans sa rédaction applicable en l'espèce, dans la lettre de licenciement, l'employeur informe le salarié, s'il y a lieu, de ses droits en matière de droit individuel à la formation. Cette information comprend les droits visés à l'article L6323-17 et, dans les cas de licenciements visés à l'article L1233-66, les droits du salarié en matière de droit individuel à la formation définis par l'article L1233-67.

Nonobstant les mentions du certificat de travail auxquelles se réfère l'employeur, il est certain et non contesté que la lettre de licenciement ne comporte pas les mentions prescrites et ci-dessus rappelées.

Toutefois, en ce qui concerne le montant de l'indemnisation, Mme [X] ne fournit pas d'éléments précis à l'appui du montant par elle réclamé. Il apparaît en conséquence justifié d'évaluer le montant des dommages et intérêts à la somme de 200 euros.

Sur les dommages et intérêts pour délai de carence de Pôle Emploi

Ainsi que l'observe l'APF, les régles légales appliquées par Pôle Emploi pour le calcul et les modalités de versement des allocations de chômage, lors de la prise en compte des indemnités allouées à la salariée par une décision de justice, ne sont pas susceptibles d'engager la responsabilité de l'employeur à l'égard de celle-ci et Mme [X] sera déboutée de sa demande d'indemnisation de ce chef.

Sur la remise des documents rectifiés

L'APF sera condamnée à remettre à Mme [X], en conformité avec le présent arrêt, les bulletins de salaire des mois de juillet et août 2011, les bulletins de salaire rectifiés pour les mois de mai et juin 2011 ainsi que le certificat de travail rectifié du 31 juillet 1990 au 15 août 2011, et l'attestation Pôle Emploi rectifiée, sans qu'il apparaisse nécessaire de prononcer une astreinte.

En ce qui concerne le registre du personnel pour la période 2007-2011, la demande de remise sera rejetée comme non justifée.

Sur les intérêts et la capitalisation

Les condamnations ayant le caractère de créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la date de réception par le défendeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et les créances à caractère indemnitaire portent intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Il sera fait droit à la demande de capitalisation des intérêts échus dans les conditions de l'article 1154 du code civil, devenu l'article 1343-2 du code civil.

Sur le remboursement des allocations de chômage à Pôle Emploi

En application de l'article L.1235-4 du code du travail, il y a lieu d'ordonner d'office le remboursement par l'APF [Établissement 1] des indemnités de chômage versées à Mme [X], et cela à concurrence de 2 mois.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la décision intervenue, les dépens de première instance et d'appel seront laissés à la charge de l'APF [Établissement 1] qui ne peut prétendre au bénéfice de l'article 700 du code de procédure civile .

Il apparaît en outre équitable d'accorder à Mme [X] une somme de 1.500 euros de ce même chef.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau sur le tout,

Dit que le licenciement de Mme [H] [X] est dénué de cause réelle et sérieuse, comme notifié tardivement,

Condamne l'APF [Établissement 1] à payer à Mme [H] [X] les sommes suivantes :

- 3414,73 euros à titre de rappel de salaires durant la mise à pied ainsi que les congés payés afférents soit 341,47 euros,

- 4454 € à titre d'indemnité de préavis outre les congés payés afférents soit 445,40 euros,

- 11'622 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 20'000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 200 euros à titre de dommages et intérêts pour absence d'information du droit au DIF,

Condamne l'APF [Établissement 1] à remettre à Mme [X], en conformité avec le présent arrêt, les bulletins de salaire des mois de juillet et août 2011, les bulletins de salaire rectifiés pour les mois de mai et juin 2011 ainsi que le certificat de travail rectifié du 31 juillet 1990 au 15 août 2011, et l'attestation Pôle Emploi rectifiée,

Dit n'y avoir lieu à astreinte,

Dit que les condamnations ayant le caractère de créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la date de réception par le défendeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et que les créances à caractère indemnitaire portent intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Fait droit à la demande de capitalisation des intérêts échus dans les conditions de l'article 1154 du code civil, devenu l'article 1343-2 du code civil,

Ordonne d'office le remboursement par l'APF [Établissement 1] à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à Mme [X], et cela à concurrence de 2 mois,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne l'APF [Établissement 1]à verser à Mme [H] [X] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ,

Condamne l'APF [Établissement 1] aux dépens de première instance et d'appel.

Signé par Madame Catherine Dupouy de Gordon, présidente et par Anne-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Anne-Marie Lacour-Rivière Catherine Dupouy de Gordon


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 15/06017
Date de la décision : 08/11/2017

Références :

Cour d'appel de Bordeaux 4A, arrêt n°15/06017 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-11-08;15.06017 ?
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