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04/06/2024 | FRANCE | N°22/03623

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 3ème chambre famille, 04 juin 2024, 22/03623


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



3ème CHAMBRE FAMILLE



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ARRÊT DU : 04 JUIN 2024







N° RG 22/03623 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MZ6Z









[L] [S]



c/



LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX

























Nature de la décision : AU FOND





















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Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la Cour : arrêt rendu le 07 juillet 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BORDEAUX (cabinet 2, RG n° 19/07416) suivant déclaration d'appel du 25 juillet 2022





APPELANT :



[L] [S]

né le 28 Janvier 1998 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité F...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

3ème CHAMBRE FAMILLE

--------------------------

ARRÊT DU : 04 JUIN 2024

N° RG 22/03623 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MZ6Z

[L] [S]

c/

LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX

Nature de la décision : AU FOND

10A

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : arrêt rendu le 07 juillet 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BORDEAUX (cabinet 2, RG n° 19/07416) suivant déclaration d'appel du 25 juillet 2022

APPELANT :

[L] [S]

né le 28 Janvier 1998 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Paul CESSO, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ :

LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX

demeurant [Adresse 4]

Représenté par Pauline DUBARRY, substitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 avril 2024 en audience publique, devant la Cour composée de :

Présidente : Hélène MORNET

Conseillère : Danièle PUYDEBAT

Conseillère : Isabelle DELAQUYS

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Véronique DUPHIL

Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE

Le 1er août 2016, M. [L] [S], se disant né le 28 janvier 1998 à [Localité 3] (Algérie), s'est vu opposer un refus de délivrance de certificat de nationalité française par le service de la nationalité des Français nés et établis hors de France, fondé sur les dispositions de l'article 47 du Code civil compte tenu de la discordance entre l'acte de naissance algérien et sa transcription à l'état civil français quant à la date à laquelle l'acte avait été dressé sur le registre algérien.

Suite au recours hiérarchique formé par M. [S], le Ministère de la Justice a confirmé ce refus par courrier en date du 2 janvier 2018, non remis à l'intéressé.

Contestant cette décision, M. [S] a, par acte d'huissier délivré le 19 juillet 2019, assigné le ministère public devant le tribunal de grande instance de Bordeaux aux fins de voir dire et juger qu'il est de nationalité française par filiation et d'ordonner les mentions requises par la loi.

Par jugement en date du 7 juillet 2022, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :

- constaté la délivrance du récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile.

- débouté M. [S] de l'intégralité de ses demandes,

- dit que M. [S] n'est pas de nationalité française,

- ordonné la mention prévue à l'article 28 du code civil,

- condamné M. [S] aux entiers dépens de l'instance.

Procédure d'appel :

Par déclaration d'appel en date du 25 juillet 2022, M. [S] a formé appel du jugement de première instance en ce qu'il a dit qu'il n'est pas de nationalité française.

Selon dernières conclusions en date du 21 octobre 2022, M. [S] demande à la cour de :

- réformer le jugement,

- dire et juger que M. [S], né à [Localité 3] (Algérie), le 28 janvier 1998, est de nationalité française par filiation,

- ordonner les transcriptions requises par la loi,

- condamner l'Etat aux entiers dépens de la procédure ainsi qu'à la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon dernières conclusions en date du 18 octobre 2022, le ministère public demande à la cour de :

- dire la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement de première instance,

- ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil.

Pour un plus ample exposé des moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 avril 2024.

L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 26 mars 2024 et mise en délibéré au 4 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le récépissé de l'article 1043 du code de procédure civile :

Il n'est pas discuté que, suite à l'appel interjeté par M. [S] par déclaration du 25 juillet 2022, la formalité de l'article 1043 du code de procédure civile a été accomplie et le récépissé a été délivré le 8 août 2022.

Sur la déclaration de nationalité française :

En application de l'article 30 alinéa premier du code civil, la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause.

En application de l'article 18 du code civil, est français l'enfant dont l'un des parents au moins est français.

L'article 47 alinéa premier du code civil précise que tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

Il est acquis par les parties que M. [O] [S], père du requérant, était français.

Le débat porte sur le caractère probant des actes d'état civil produits par M. [S] au soutien de sa demande pour justifier de sa filiation à son égard.

En l'espèce, M. [S] produit son acte de naissance avec sa copie, dressé le 29 janvier 1998 par l'officier d'état civil d'[Localité 3] (Algérie) dénommé [K] [B], qui indique notamment qu'il est né le 28 janvier 1998 de [O], sans profession et de [C] [W], également sans profession.

Le ministère public conteste la force probante de cette pièce en faisant valoir qu'elle ne respecte pas les dispositions tirées de l'ordonnance algérienne n° 70-20 du 19 février 1970 relative à l'état civil, faute pour elle de comporter un code barre ainsi que les dates et lieux de naissance des parents, la qualité du déclarant. Il relève aussi qu'il existe une discordance entre ces deux actes sur la date de déclaration.

Toutefois, M. [S] produit un acte de naissance rectifié qui comporte désormais le code barre, précise la qualité du déclarant, [X] [R], à savoir fonctionnaire et les dates de naissance de son père, [O], né le 26 février 1943 et celle de sa mère [C] [W], née le 25 décembre 1970.

Le ministère public conteste la force probante de cette nouvelle pièce aux motifs que la seule mention de "fonctionnaire" est insuffisante pour vérifier qu'il s'agit bien d'une personne habilitée à déclarer la naissance, comme le prévoit l'article 62 de l'ordonnance du 19 février 1970.

Or, M. [S] produit une attestation administrative non contestée par le ministère public, établie le 2 août 2020 par Mme [Z] [P], sous-directrice de la gestion administrative du malade au centre hospitalo-universitaire d'[Localité 3] et qui précise le grade de [X] [R], à savoir ouvrier professionnel ainsi que sa fonction, à savoir déclarant des naissances au service maternité du [2].

En outre, contrairement à ce que soutient le ministère public, si l'article 30 de l'ordonnance du 19 février 1970 relative à l'état civil prévoit que les fonctions ainsi que l'âge des personnes qui déclarent la naissance d'un enfant sont mentionnés, l'absence de ces mentions sur l'acte de naissance de M. [S] ne sauraient suffire à le rendre non probant de ce seul chef.

Le ministère public conteste enfin sa force probante en faisant valoir que l'acte de naissance a déclaré celle-ci le 29 janvier 1998, soit un jeudi qui était à cette époque un jour de fermeture des centres d'état civil.

En réponse, M. [S] produit un courrier qui émane du C.H.U. d'[Localité 3] qui indique que l'hôpital est pourvu d'un bureau spécial pour le traitement et le dépôt d'état civil qui s'occupe du transfert des dossiers à la mairie d'[Localité 3] et que la naissance a été déclarée après la rupture du jeune du 28 au soir, soit le 29 au matin. Il produit aussi un courrier de l'officier d'état civil de la commune d'[Localité 3] qui indique que le 29 janvier 1998 était un jour travaillé et qui réitère que l'acte de naissance a bien été inscrit sur les registres de l'état civil de la commune le 29 janvier 1998.

En tout état de cause, cette seule circonstance est impropre à exclure le caractère probant de l'acte.

Il s'impose dans ces conditions d'infirmer la décision déférée et de faire droit aux demandes de l'appelant.

La présente décision fera l'objet de la mention prévue à l'article 28 du code civil.

Sur les demandes accessoires :

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

L'agent judiciaire du trésor supportera la charge des dépens.

Il n'y a pas lieu de condamner l'Etat au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Constate la délivrance du récépissé prévu à l'article 1043 du code de procédure civile ;

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Dit que M. [L] [S], né le 28 janvier 1998 à [Localité 3] (Algérie), est de nationalité française ;

Ordonne la mention prévue à l'article 28 du code civil ;

Condamne l'agent judiciaire du trésor aux dépens de l'appel ;

Déboute les parties de toute autre demande.

Le présent arrêt a été signé par Hélène MORNET, présidente, et par Véronique DUPHIL, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre famille
Numéro d'arrêt : 22/03623
Date de la décision : 04/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-04;22.03623 ?
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