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28/08/2024 | FRANCE | N°21/03157

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 28 août 2024, 21/03157


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



--------------------------







ARRÊT DU : 28 AOUT 2024







PRUD'HOMMES



N° RG 21/03157 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MEPP

















Monsieur [O] [N]



c/



Madame [M] [X]

















Nature de la décision : AU FOND



















Grosse dé

livrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 mai 2021 (R.G. n°F 19/01794) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 02 juin 2021,





APPELANT :

Monsieur [O] [N]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représe...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 28 AOUT 2024

PRUD'HOMMES

N° RG 21/03157 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MEPP

Monsieur [O] [N]

c/

Madame [M] [X]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 mai 2021 (R.G. n°F 19/01794) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 02 juin 2021,

APPELANT :

Monsieur [O] [N]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Julie ELDUAYEN substituant Me Nicolas SANCHEZ de la SARL TGS FRANCE AVOCATS, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMÉE :

Madame [M] [X]

née le 27 Novembre 1956 à [Localité 3] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Philippe-Adrien BONNET de la SELARL ADRIEN BONNET, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 juin 2024 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame ROUAUD-FOLLIARD Catherine, présidente chargée d'instruire l'affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

Greffier lors des débats : Evelyne Gombaud,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [M] [X], née en 1956, a été engagée en qualité d'assistante de vie par Monsieur [O] [N], dans le cadre d'un emploi à caractère familial à compter du mois de mai 2017. Mme [X] devait assister Mme [N], atteinte d'une maladie dégénérative très invalidante, sept heures le samedi et, de manière exceptionnelle la nuit en l'absence de l'époux.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999 (IDCC 2111).

Le 27 octobre 2018, Mme [X] a été placée en arrêt de travail pour une durée de 10 jours jusqu'au lundi 5 novembre 2018.

Le 10 novembre 2018, une convention a été conclue moyennant une indemnité de 4.500 euros.

Le 1er janvier 2019, par courrier adressé au directeur du centre national CESU, M. [N] a procédé à une déclaration papier des salaires perçus par Mme [X] pour la période de mai 2017 à novembre 2018.

Par courrier du 15 janvier 2019, M. [N] a informé Mme [X] de la régularisation de sa situation contractuelle auprès du Centre National CESU.

Le 3 mars 2019, M. [N] a adressé la déclaration d' accident du travail au directeur du centre national CESU et non à la caisse primaire d'assurance maladie.

Par courrier du 18 juin 2019, Mme [X] a contesté le nombre d'heures déclarées au centre national CESU.

Par courrier du 7 juillet 2019, M. [N] a rectifié le relevé d'heures du mois de mai et du mois de septembre 2018 en précisant un nombre d'heures travaillées et en validant le nombre mensuel des heures indiqué par Mme [X] pour les seize autres mois. Il a également indiqué à Mme [X] qu'il avait décidé d'ajouter aux heures travaillées un forfait mensuel de 24 heures sur chacun des mois de la période de mai 2017 à février 2018 en lui précisant que la somme de 4.500 euros qu'elle avait perçue couvrait largement la totalité de ce forfait d'heures déclaré en sus. Il a enfin informé Mme [X] qu'il avait procédé à une nouvelle déclaration au CESU prenant en compte l'ajout de ces 24 heures forfaitaires soit 240 heures.

Le 23 décembre 2019, Mme [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux, soutenant que la convention du 10 novembre 2018 est nulle, que la rupture de son contrat de travail est sans cause réelle et sérieuse, qu'elle a réalisé un travail dissimulé à compter du 5 mai 2017 en l'absence de contrat de travail, demandant la résiliation judiciaire de la relation de travail ayant existé entre elle et M. [N] et réclamant une somme à titre de salaire net outre les charges sociales au titre des salaires sur la période du 5 janvier au 28 octobre 2018, une somme au titre de la rupture abusive du contrat de travail et diverses indemnités.

Par jugement rendu le 7 mai 2021, le conseil de prud'hommes a :

- constaté que le document signé entre les deux parties le 10/11/2018 ne satisfait pas aux exigences de l'article 1237-11 du code du travail,

- dit que la rupture des relations de travail du 10/11/2018 s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné M. [N] à verser à Mme [X] la somme de 3.032 euros au titre de domages et intérêts, la somme de 1.516 au titre d'indemnités de préavis, et la somme de 1.963,30 euros au titre des congés payés,

- dit que l'employeur n'apporte pas la preuve du règlement des 4.500 euros,

- jugé qu'il y a travail dissimulé,

- condamné M. [N] à verser à Mme [X] la somme de 9.096 euros,

- constaté l'absence de contrat de travail,

- condamné M. [N] à verser à Mme [X] la somme de 19.633 euros nets,

- débouté Mme [X] de la demande de dommages et intérêts pour défaut de licenciement,

- ordonné à M. [N] la remise des bulletins CESU comprenant la régularisation des charges sociales, certificat de travail et attestation Pôle Emploi suivant le présent jugement sous astreinte de 30 euros à compter du 15ème jour suivant la notification du présent jugement et ce, pendant 30 jours,

- condamné M. [N] au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

- condamné M. [N] aux dépens.

Par déclaration du 2 juin 2021, M. [N] a relevé appel de cette décision, notifiée par lettre adressée aux parties par le greffe le 10 mai 2021.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 13 mai 2024, M. [N] demande à la cour de :

- déclarer recevable l'appel interjeté par lui,

In limine litis,

- déclarer irrecevable la demande de nullité de la convention de rupture du 10 novembre 2018 et donc la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- déclarer irrecevable la demande de dommages et intérêts pour défaut de procédure de licenciement,

- déclarer irrecevable la demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

Subsidiairement,

Y ajoutant et statuant à nouveau,

- débouter Mme [X] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouter Mme [X] de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

- débouter Mme [X] de sa demande d'indemnité de préavis et d'indemnité de congés payés,

En tout état de cause

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [X] de sa demande de dommages et intérêts pour défaut de procédure de licenciement,

- débouter Mme [X] de sa demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet,

En conséquence,

- la débouter de sa demande de rappel de salaire de 23.500 euros,

- débouter Mme [X] de sa demande d'indemnité de congés payés,

- débouter Mme [X] de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter Mme [X] de plus amples demandes, fins et prétentions,

- condamner Mme [X] à lui rembourser la somme de 1.716,73 euros ainsi que la somme de 13.644 euros réglée à titre provisoire,

- condamner Mme [X] au paiement de la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [X] aux entiers dépens en ce compris ceux éventuels d'exécution.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 19 avril 2024, Mme [X] demande à la cour de :

- déclarer irrecevable et mal fondé M. [N] en son appel,

- le débouter de toutes ses demandes, fins et prétentions,

- confirmer le jugement du 7 mai 2021 en toutes ses dispositions, à savoir,

* constaté que le document signé entre les deux parties le 10/11/2018 ne satisfait pas aux exigences de l'article 1237-11 du code du travail,

* dit que la rupture des relations de travail du 10/11/2018 s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* et condamné M. [N] à verser à Mme [X] la somme de 3.032 euros au titre de dommages et intérêts, la somme de 1.516 euros au titre d'indemnités de préavis, et la somme de 1.963,30 euros au titre des congés payés,

* dit que l'employeur n'apporte pas la preuve du règlement des 4.500 euros,

* jugé qu'il y a travail dissimulé,

* et condamné M. [N] à verser à Mme [X] la somme de 9.096 euros,

* constaté l'absence de contrat de travail,

* et condamné M. [N] à verser à Mme [X] la somme de 19.633 euros nets,

* débouté Mme [X] de la demande de dommages et intérêts pour défaut de licenciement,

* ordonné à M. [N] la remise des bulletins CESU comprenant la régularisation des charges sociales, certificat de travail et attestation Pôle Emploi suivant le présent jugement sous astreinte de 30 euros à compter du 15ème jour suivant la notification du présent jugement et ce, pendant 30 jours,

* condamné M. [N] au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

* condamné M. [N] aux dépens,

Y ajoutant,

- condamner M. [N] au paiement de la somme de 7.200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les parties n'ont pas souhaité entrer en médiation.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 mai 2024 et l'affaire a été fixée à l'audience du 11 juin 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

a - la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet

Au visa de l' article L.1323-6 du code du travail, Mme [X] fait valoir qu'en l'absence de contrat de travail écrit, la durée du travail est présumée à temps complet et qu'elle devait se tenir- 24h/24- à la disposition de son employeur; Mme [X] demande paiement de la somme de 23 508 euros à titre du salaire net et complémentaire sur la période du 1er mai 2017 au 27 octobre 2018, étant précisé qu'elle n'a pas perçu la somme de 4 500 euros mentionnée dans la document daté du 10 novembre 2018.

Au visa des articles L.3123-6, L.3123-14 et L.7221-2 du code du travail et de la convention collective du particulier employeur, M. [N] fait valoir le paiement de la somme de 23 500 euros est uniquement demandé au titre d'une requalification du contrat de travail en contrat de travail à temps plein ; que Mme [X] n'a pas saisi le conseil des prud'hommes d'une demande subsidiaire de rappel de salaire au titre d' heures de travail effectuées et non réglées.

Aux termes de l'application conjuguée des articles L.3123-6 et L.7221-1 du code du travail, sont seules applicables au salarié engagé par un particulier pour réaliser des travaux à caractère familial ou ménager, les dispositions relatives au harcèlement moral et sexuel, à la journée du 1er mai, aux congés payés notamment pour raison familiale et à la surveillance médicale. Les dispositions relatives au contrat de travail à temps partiel ne sont ici pas applicables.

La demande de Mme [X] en requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet et en paiement de salaire dû en raison de cette requalification sera rejetée. La cour constate par ailleurs que Mme [X] n' a jamais demandé et ne demande pas devant elle, le paiement d'un rappel de salaire au titre d'heures effectuées et non payées.

b- le travail dissimulé

Au visa de l' article L.8223-1 du code du travail, Mme [X] fait valoir que M. [N] n'a pas établi de contrat de travail écrit, n'a procédé à la déclaration auprès du CESU qu'après l' accident du travail sans mentionner le nombre exact des heures de travail réalisées.

M. [N] répond que cette demande est prescrite dès lors que Mme [X] a saisi le conseil des prud'hommes plus de deux ans à compter du jour où elle a eu connaissance des faits lui permettant d'exercer ses droits : dès son embauche le 5 mai 2017, Mme [X] savait qu'elle n'était pas déclarée, qu'elle serait payée en espèces, sans émission de bulletin de paye et qu'elle n'avait pas signé de contrat de travail. Mme [X] aurait dû agir avant le 5 mai 2019 et sa demande formulée devant le conseil des prud'hommes le 23 décembre suivant est prescrite.

À titre subsidiaire, M. [N] conteste le caractère intentionnel visé par les dispositions sus visées et précise, s'agissant de la déclaration tardive auprès du CESU, qu'il a régularisé la situation spontanément avant toute réclamation de Mme [X] et plusieurs mois avant la saisine du conseil des prud'hommes.

Aux termes de l' article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paye, de mentionner un nombre d'heures inférieur à celui réellement accompli ou de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales.

Aux termes de l' article L. 8223- 1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l' article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Aux termes de l' article L.1471-1 du code du travail, toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits qui lui permettent d'exercer son droit.

La demande relative au travail dissimulé relève de l'exécution du contrat de travail et sa recevabilité doit être examinée au regard du respect du délai de deux ans à compter du jour où Mme [X] a connu ou aurait dû connaître ses droits.

Dès son embauche et en tout cas, dès la fin du mois de mai 2017, Mme [X] , qui travaillait pour d'autres employeurs, savait qu'aucun contrat de travail écrit n'avait été rédigé. Elle n'avait pas reçu de bulletin de paye de l'organisme chargé du CESU. Cependant, M. [N], reconnaissant être' dans l'illégalité', n'a entendu régulariser la situation de Mme [X] auprès du service dédié que par lettre datée du 1er janvier 2019, après l' accident du travail survenu le 27 octobre 2018 dont la déclaration nécessitait la reconnaissance d'un travail salarié . Il adressera aussi à ce service la déclaration d' accident du travail le 3 mars 2019 ('j'ai conscience que je n'ai pas réglé cette affaire convenablement'). Cette déclaration n'ayant pas été transmise à la la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 3], cette dernière a informé la salariée de l'absence de déclaration d' accident du travail par lettre datée du 30 janvier 2019.

Mme [X] a saisi le conseil des prud'hommes moins de deux ans après avoir eu connaissance de la carence de M. [N] et cette demande est recevable.

L'élément intentionnel du délit est avéré dès lors que M. [N] a reconnu avoir agi ' dans l'illégalité ' et souhaité déclarer le travail salarié de Mme [X] suite au chantage dont il était victime ( lettre au directeur du CESU du 1er janvier 2019) et non de manière spontanée,la régularisation postérieure n' effacant pas le délit.

M. [N] devra verser à Mme [X] une indemnité correspondant à six mois de salaire calculée sur la base des bulletins de paye et non d'un salaire pour un travail à temps complet.

M. [N] sera condamné à payer à Mme [X] la somme de 1 622,04 euros.

c- la rupture du contrat de travail

Mme [X] demande à la cour de dire nulle la convention datée du 10 novembre 2018 parce que contraire aux dispositions relatives à la rupture conventionnelle du contrat de travail et ne pourrait constituer un acte de rupture du contrat de travail voire une démission.

M. [N] n'ayant pas procédé à son licenciement, la rupture du contrat de travail produirait les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Elle fait encore état de l'absence de déclaration par M. [N] de l' accident du travail survenu le 27 octobre 2018.

M. [N] oppose l'irrecevabilité de cette demande formulée plus de douze mois après la rupture du contrat de travail formalisée par écrit daté du 10 novembre 2018.

Il ajoute qu'en tout état de cause, Mme [X] a signé ce document sans évoquer de manquement de l' employeur, qu'elle a démissionné de manière non équivoque ( ' Mme [X] ne souhaitant plus travailler'), pour prendre sa retraite; que la résiliation judiciaire ne peut être demandée parce que le contrat de travail était rompu.

À ce dernier titre, la cour constate que le dispositif des conclusions de Mme [X] ne mentionne pas de demande de prononcer la résiliation du contrat de travail.

Aux termes de l' article L.1471-1 du code du travail, la demande portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture.

Aux termes de l' article L.1237-11 du code du travail, l' employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. Cette rupture est exclusive du licenciement ou de la démission et ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties. Elle résulte d'une convention signée par les parties au contrat de travail dans les conditions posées par l' article L.1237-12 du code du travail aux termes duquel les parties conviennent du principe d'une rupture conventionnelle lors d'un ou plusieurs entretiens au cours duquel le salarié et l'employeur peuvent se faire assister, le défaut d'entretien entraîne la nullité de la convention. La convention de rupture fixe la date de la rupture qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l'homologation. À compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d'entre elles dispose d'un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. À l'issue du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse une demande d'homologation à l'autorité administrative, avec un exemplaire de la convention de rupture. La validité de la convention est subordonnée à son homologation.

Si la tenue d'un entretien le 10 novembre 2018 n'est pas contestée, aucune demande d'homologation n'a été effectuée auprès de l'autorité administrative de sorte que la convention est nulle.

En conséquence, le délai de prescription de douze mois pour contester la rupture du contrat de travail n'a pas pu courir à compter de cette date du 10 novembre 2018 qui ne peut caractériser la rupture du contrat de travail. La demande de Mme [X] de dire nulle la convention et que la rupture du contrat de travail s'analyse en licenciement sans cause réelle et sérieuse est recevable.

Ensuite, la démission dont se prévaut M. [N] doit être un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

Le document signé le 10 novembre 2018 par M. [N] et Mme [X] est ainsi rédigé : ' suite à cet accident du travail, les parties sont convenues d' une manière ferme ... que :

1 - en dédommagement de sa perte de temps et de la douleur occasionnée par sa chute, elle recevrait sous quinzaine la somme de 4 500 euros,

2- Mme [X] ne souhaitant plus travailler, le paiement de cette somme clôt définitivement toute procédure...'.

La convention du 1 novembre 2018 a été annulée et ces termes ne constituent pas un acte unilatéral par lequel Mme [X] manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail la liant à M. [N]. La formule'Mme [X] ne souhaitant plus travailler' n'y suffisant pas.

Les demandes de Mme [X] de dire nulle la convention du 10 novembre 2018 et que la rupture du contrat de travail emporte les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse sont bien-fondées.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Mme [X] demande la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné M. [N] au paiement des sommes de 3 032 euros à titre de dommages et intérêts, de 1 516 euros à titre d' indemnité compensatrice de préavis et de 1 963,30 euros au titre des congés payés.

M. [N] oppose les dispositions de l' article L. 1235-3 du code du travail et que le salaire de référence n'est pas celui d'un travail à temps complet.

Mme [X] ne précise pas sa situation financière depuis la rupture du contrat de travail. Compte tenu de son ancienneté, des circonstances de la rupture et du montant du salaire mensuel, M. [N] sera condamné à payer à Mme [X] la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

À titre d' indemnité compensatrice de préavis, M. [N] devra verser à Mme [X] la somme de 270,34 euros majorée des congés payés afférents (27,03 euros).

Mme [X] demande paiement de la somme de 2 879,60 euros au titre des congés payés représentant le 10ème des rémunérations dues.

M. [N] oppose que le salaire horaire net figurant sur le chèque emploi service est égal au salaire horaire net convenu majoré de 10%.

Aux termes de la convention collective applicable, lorsque l' employeur et le salarié ont opté au chèque emploi- service, le salaire horaire net figurant sur ce dernier est égal au salaire net convenu majoré de 10% au titre des congés payés .

Mme [X] n'a pas contesté l'option du chèque emploi-service, se contentant de contester le nombre d'heures de travail indiquées. Elle ne conteste pas non plus le taux horaire net de 10 euros, compatible avec le salaire minimum majoré des congés payés. Elle sera déboutée de cette demande.

d- les dommages et intérêts pour défaut de licenciement

La cour constate que le dispositif des conclusions de Mme [X] ne comporte pas de demande de paiement de dommages et intérêts pour absence de procédure de licenciement mais la confirmation de la décision du premier juge qui l'a déboutée ce chef.

e- les demandes reconventionnelles de remboursement de sommes

M. [N] demande le remboursement des sommes de :

-13 644 euros versée au titre de l'exécution provisoire du jugement. Cette demande relève de l'exécution du jugement et de l'arrêt;

- 1 716,73 euros versée le 8 juin 2020 sur les conseils de son précédent avocat alors que la demande de Mme [X] de requalification du contrat de travail en contrat de travail à temps complet n'est pas fondée; M. [N] verse la photocopie d'un chèque d'un montant de 1 716,73 euros émis au profit de la CARPA par le conseil de Mme [X] à la date de l'émission du chèque.

Ce qui a été perçu sans être dû est sujet à répétition. M. [N] n'établit pas que cette somme a été payée par erreur ou qu'elle correspond à une créance liée à une demande relative à la demande de requalification du contrat de travail en contrat à temps complet. Il sera débouté de sa demande.

f- la somme de 4 500 euros

Mme [X] demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que l' employeur n'apporte pas la preuve du règlement de la somme de 4 500 euros qu'elle n'a jamais perçue. La mention ' règlement de la somme de 4 500 euros ' ne serait pas de son écriture et elle verse un document écrit et signé de sa main.

La cour constate que M. [N] ne demande pas le remboursement de cette somme.

La convention datée du 10 novembre 2018 porte les mentions manuscrites ' bon pour accord le 10 /11/2018" et ' règlement de la somme de 4 500 euros ce jour. Bon pour accord le 10-11-2018";

La première est relative aux termes de la convention et la seconde au paiement de la somme de 4 500 euros.

La cour constate qu' au regard de la comparaison des écrits manuscrits de M. [N] et de Mme [X], cette dernière n'est pas la rédactrice ou la signataire de ces mentions.

M. [N] ne verse, enfin aucune pièce bancaire, notamment, qui établirait le paiement effectif de cette somme.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que la preuve du paiement de cette somme n'est pas apportée.

M. [N] délivrera à Mme [X] un certificat de travail et une attestation France Travail conformes à l'arrêt dans le délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt sous astreinte journalière de 30 euros passé de délai.

Vu l'équité, M. [N] sera condamné à payer à Mme [X] la somme totale de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par celle ci dans le cadre des procédures de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

la cour,

Constate que Mme [X] ne demande pas le paiement d' une indemnité pour procédure de licenciement irrégulière ;

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a :

- dit que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- dit que la preuve du paiement effectif de la somme de 4 500 euros n'est pas rapportée,

statuant à nouveau des autres chefs et y ajoutant,

Dit recevables les demandes de Mme [X] ;

Déboute Mme [X] de sa demande de paiement de somme au titre de la requalification du contrat de travail en contrat de travail à temps complet ;

Déboute Mme [X] de sa demande de paiement d' indemnités de congés payés ;

Condamne M. [N] à payer à Mme [X] les sommes suivantes :

- 1 622,04 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

- 300 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 270,34 euros majorée des congés payés afférents (27,03 euros) au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents ;

Dit que M. [N] devra délivrer à Mme [X] l'attestation France Travail rectifiée dans le délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt sous astreinte journalière de 30 euros passé de délai ;

Déboute M. [N] de ses demandes,

Condamne M. [N] à payer à Mme [X] la somme totale de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par elle dans le cadre des procédures de première instance et d'appel ;

Condamne M. [N] aux entiers dépens des procédures de première instance et d'appel.

Signé par Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Catherine Rouaud-Folliard


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 21/03157
Date de la décision : 28/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-28;21.03157 ?
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