SM/MMC
COPIE OFFICIEUSE
COPIE EXÉCUTOIRE à :
- SCP PATURAU DE MIRAND - LE GALLOU
- SELARL AVELIA
COPIE CERTIFIÉE CONFORME AUX PARTIES
LE : 30 mars 2023
COUR D'APPEL DE BOURGES
CHAMBRE CIVILE
BAUX RURAUX
ARRÊT DU 30 MARS 2023
N° - Pages
N°RG 22/00013 N° Portalis DBVD-V-B7G-DPLH
Décision déférée à la Cour :
Jugement rendu par le tribunal paritaire des baux ruraux de CHATEAUROUX en date du 12 juillet 2022
PARTIES EN CAUSE :
I - Mme [I] [T]
Née le 17 mars 1957 à [Localité 9]
[Adresse 1]
[Localité 10]
- Mme [I] [B] épouse [E]
Née le 04 janvier 1964 à [Localité 9]
[Adresse 1]
[Localité 10]
Comparants assistées de la SCP PATUREAU DE MIRAND ' LE GALLOU, avocat au barreau de CHATEAUROUX
APPELANTES suivant déclaration du 16 août 2022
II ' M. [M] [H]
[Adresse 2]
[Localité 10]
Non comparant, représenté par la SELARL AVELIA,,avocat au barreau de CHATEAUROUX
INTIMÉ
30 MARS 2023
N° /2
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 janvier 2023 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme CIABRINI, Conseiller chargé du rapport
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CLÉMENT Président de Chambre,
M. PERINETTI Conseiller
Mme CIABRINI Conseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme JARSAILLON
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ARRÊT : CONTRADICTOIRE
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EXPOSÉ
Suivant acte de donation-partage reçu le 31 juillet 1993 par Me [S], notaire, M. [T] [I] est devenu propriétaire de parcelles situées sur le territoire de la commune de [Localité 8] (86), cadastrées section B n°[Cadastre 5], [Cadastre 4] et [Cadastre 6].
M. [I] a donné à bail ces parcelles à M. [M] [H] selon plusieurs baux verbaux, en échange de la location d'une parcelle appartenant à celui-ci, située sur la commune de [Localité 10] (36), cadastrée section ZI n°[Cadastre 3], le loyer de l'un devant être compensé par l'exploitation de l'autre.
M. [H] a pris sa retraite le 1er janvier 2019 et cessé d'exploiter les parcelles cadastrées section B n°[Cadastre 5], [Cadastre 4] et [Cadastre 6].
Suivant procès-verbal dressé le 18 novembre 2019 par Me [W], huissier de justice, il a été constaté que lesdites parcelles avaient été restituées en friche et que leur chemin de desserte était bouché par la végétation.
Suivant bail à ferme signé le 10 mai 2019, M. [H] a donné à bail la parcelle cadastrée section ZI n°[Cadastre 3] à M. [V] [D].
Suivant requête reçue au greffe le 3 juin 2021, M. et Mme [I] ont fait assigner M. [H] devant le Tribunal paritaire des baux ruraux de Châteauroux aux fins de voir, en l'état de leurs dernières demandes,
- condamner M. [H] à verser à M. [T] [I] les sommes de
- 1.154,40 euros au titre de l'entretien du chemin d'exploitation,
- 1.197,90 euros au titre de la remise en état des parcelles cadastrées section B n°[Cadastre 5], [Cadastre 4] et [Cadastre 6],
- condamner M. [H] à verser à Mme [B] [I] les sommes de
- 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance d'exploiter les parcelles cadastrées section B n°[Cadastre 5], [Cadastre 4] et [Cadastre 6],
- 7.000 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de chance d'exploiter la parcelle cadastrée section ZI n°[Cadastre 3],
- condamner M. [H] à leur payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [H] aux dépens.
En réplique, M. [H] a demandé au Tribunal de
- débouter M. et Mme [I] de l'ensemble de leurs demandes,
- condamner in solidum M. et Mme [I] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum M. et Mme [I] aux dépens.
Par jugement contradictoire du 12 juillet 2021, le Tribunal paritaire des baux ruraux de Châteauroux a :
- débouté M. et Mme [I] de l'intégralité de leurs demandes,
- condamné M. et Mme [I] sous le bénéfice de la solidarité à payer à M. [H] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- laissé à la charge de M. et Mme [I] les frais exposés par eux au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. et Mme [I] sous le bénéfice de la solidarité aux dépens,
- rappelé que l'exécution provisoire du présent jugement était de droit,
- rejeté toutes demandes plus amples ou contraires.
Le Tribunal a notamment retenu que M. et Mme [I] n'expliquaient pas la diminution de leur demande relative à l'entretien du chemin, qu'ils n'avaient pas attrait en la cause Mme [Y] [G], propriétaire de parcelles elles aussi desservies par ce chemin, que le constat de Me [W] était postérieur de presque onze mois au départ en retraite de M. [H], que le défaut d'entretien des parcelles cadastrées section B n°[Cadastre 5], [Cadastre 4] et [Cadastre 6] n'était pas établi, que M. [H] contestait avoir donné à bail la parcelle cadastrée section ZI n°[Cadastre 3] selon bail verbal, et qu'aucune contrepartie onéreuse à la mise à disposition de cette parcelle au profit de Mme [I] n'était démontrée.
M. et Mme [I] ont interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 23 août 2022.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 4 novembre 2022, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu'ils développent, M. et Mme [I] demandent à la Cour de :
REFORMER le Jugement entrepris et statuant à nouveau,
CONDAMNER M. [H] à verser à M. [T] [I] les sommes de :
- 1.240,18 euros au titre de l'entretien du chemin d'exploitation,
- 1.197,90 euros au titre de la remise en état des parcelles B [Cadastre 5], B [Cadastre 4] et B [Cadastre 6].
CONDAMNER M. [H] à verser à Mme [B] [I] les sommes de :
- 3.500 euros à titre de dommages & intérêts pour la perte de chance d'exploiter les parcelles B [Cadastre 5], B [Cadastre 4] et B [Cadastre 6].
- 7.000 euros à titre de dommages & intérêts pour perte de chance d'exploiter la parcelle ZI [Cadastre 3].
CONDAMNER M. [H] à verser à M. et Mme [I] la somme dc 3.000 euros au titre de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 21 décembre 2022, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu'il développe, M. [H] demande à la Cour de :
Voir confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Voir ainsi débouter M. et Mme [I] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
Voir condamnés ceux-ci in solidum au paiement d'une indemnité d'un montant de 3.500 euros du chef de l'article 700 du Code de procédure civile,
Voir leur délaisser les dépens d'appel.
L'affaire a été fixée pour être plaidée à l'audience du 24 janvier 2023.
MOTIFS
A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes tendant simplement à voir « dire et juger », « rappeler » ou « constater » ne constituent pas des demandes en justice visant à ce qu'il soit tranché un point litigieux mais des moyens, de sorte que la cour n'y répondra pas dans le dispositif du présent arrêt. Il en va de même de la demande de « donner acte », qui est dépourvue de toute portée juridique et ne constitue pas une demande en justice.
Sur la demande indemnitaire pour défaut d'entretien du chemin d'exploitation formée par M. et Mme [I] :
Aux termes de l'article L162-2 du code rural et de la pêche maritime, tous les propriétaires dont les chemins et sentiers desservent les fonds sont tenus les uns envers les autres de contribuer, dans la proportion de leur intérêt, aux travaux nécessaires à leur entretien et à leur mise en état de viabilité.
En l'espèce, les appelants indiquent que les parcelles appartenant à M. [I] se situent le long d'un chemin d'exploitation actuellement impraticable, bordé de parcelles dont les 4/5èmes sont la propriété de M. [H] et le surplus celle de M. [I]. Ils produisent un devis chiffrant le coût de la remise en état de ce chemin à la somme de 2.886 euros TTC.
Il doit tout d'abord être relevé que M. [H] ne conteste nullement la qualité de chemin d'exploitation attribuée à cette voie.
Il objecte en revanche que deux des parcelles bordant ce chemin appartiennent à Mme [Y] [G], et deux autres à un propriétaire inconnu en l'état. Il estime que ceux-ci doivent être attraits en la cause préalablement à toute tentative de calcul du montant de la participation de chaque propriétaire riverain au prorata des biens immobiliers détenus.
Toutefois, aucune disposition légale ne vient imposer une telle mise en cause de chacun des propriétaires, M. et Mme [I] demeurant libres de ne solliciter que la participation d'un seul ou de certains propriétaires seulement, à la condition que leur part n'excède pas la proportion de leur intérêt.
Par ailleurs, M. et Mme [I] proposent de procéder au calcul de l'assiette de la contribution à la remise en état du chemin dont serait redevable M. [H] en prenant pour base le plan cadastral à l'échelle 1/3000ème, qui leur permet d'affirmer que le chemin mesurerait 408 m et que M. [H] serait propriétaire de « 43 % de la largeur du chemin ».
Il convient néanmoins de rappeler, tout d'abord, que le plan cadastral est un document administratif à vocation essentiellement fiscale ou de publicité foncière et non juridique, qui a valeur de simple renseignement et ne peut en tout état de cause constituer une preuve de propriété immobilière.
De plus, la mention précitée selon laquelle M. [H] serait propriétaire riverain de « 43 % de la largeur du chemin » apparaît erronée, M. et Mme [I] ayant plutôt entendu, au vu du contexte qui se dégage de leurs écritures, lui attribuer ainsi la propriété de 43 % des parcelles bordant le chemin sur ses deux côtés. La notion de longueur serait ainsi plus pertinente.
Il ne peut néanmoins qu'être constaté que cette méthode de calcul à partir de mesures directes sur le plan cadastral s'avère particulièrement artisanale et source d'imprécision voire d'erreur. Le calcul de l'assiette de la contribution à échoir à M. [H] ne saurait aboutir à lui imputer plus ou moins que sa part des frais de remise en état du chemin concerné, même de façon minime. Cette méthode de calcul insuffisamment fiable ne peut ainsi être jugée acceptable.
Il suffit au demeurant, pour se convaincre de son manque de fiabilité, de constater, d'une part, que M. et Mme [I] affirment avoir abouti, à partir de cette méthode, à une longueur de 408 m concernant ce chemin, et d'autre part qu'ils produisent un devis de remise en état établi par la SARL Lambert Christian indiquant pour le même chemin « une longueur de 450 ml », soit un métrage sensiblement différent (450 au lieu de 408).
Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter comme mal fondée la demande de M. et Mme [I] tendant à la remise en état du chemin d'exploitation, et de confirmer le jugement entrepris en ce sens, par substitution de motifs.
Sur la demande de remise en état des parcelles en friche présentée par M. et Mme [I] :
L'article 1732 du code civil impose au preneur à bail de répondre des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu sans sa faute.
L'article 1777 du même code dispose que le fermier sortant doit laisser à celui qui lui succède dans la culture, les logements convenables et autres facilités pour les travaux de l'année suivante ; et réciproquement, le fermier entrant doit procurer à celui qui sort les logements convenables et autres facilités pour la consommation des fourrages, et pour les récoltes restant à faire.
Dans l'un et l'autre cas, on doit se conformer à l'usage des lieux.
En l'espèce, M. et Mme [I] soutiennent que M. [H] aurait restitué les parcelles cadastrées section B n°[Cadastre 5], [Cadastre 4] et [Cadastre 6] à M. [I] à l'état de friche, le contraignant à exposer des frais de remise en herbage à hauteur de 1.197,90 euros TTC.
Il doit tout d'abord être relevé que le devis ayant permis ce chiffrage ne comporte aucune dénomination ni coordonnées de l'entreprise qui l'aurait établi, le 28 août 2020, et a pour objet la « remise en état d'une parcelle », sans qu'il soit précisé de quel terrain ni de quelle superficie il s'agit.
M. et Mme [I] produisent aux débats un procès-verbal de constat établi le 18 novembre 2019 par Me [W], huissier de justice. Ce constat, postérieur de près d'onze mois au départ en retraite de M. [H] et à la restitution des parcelles à leur propriétaire, fait état de parcelles que l'huissier qualifie de non entretenues, envahies par endroits de ronces, de fougère et de mauvaises herbes. Il est assorti de photographies qui laissent en effet voir trois parcelles en herbe, sans traces d'entretien récent apparent.
Toutefois, ces éléments sont compatibles avec l'hypothèse d'une absence d'entretien durant dix mois et demi consécutivement au départ de l'ancien preneur. L'état des parcelles n'est pas révélateur d'une absence d'entretien pendant la durée du bail accordé à M. [H], contrairement à ce qu'affirment sans l'étayer M. et Mme [I].
MM. [F] et [D], dont la qualité de fermiers de M. [H] ne permet pas en soi d'écarter le témoignage, attestent en outre que ces parcelles étaient en bon état lors de leur restitution, le second précisant avoir lui-même élagué les haies sur les parcelles concernées.
Il se déduit de ces éléments qu'aucun défaut d'entretien des parcelles qu'il avait prises à bail n'est démontré à l'encontre de M. [H]. Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté M. et Mme [I] de la demande présentée à ce titre.
Sur la demande indemnitaire liée à l'état de friche des parcelles cadastrées section B n°[Cadastre 5], [Cadastre 4] et [Cadastre 6], présentée par Mme [I] :
L'article 1240 du code civil pose pour principe que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
En l'espèce, Mme [I] sollicite la condamnation de M. [H] à lui verser la somme de 3.500 euros au titre de la perte de chance d'exploiter les parcelles cadastrées section B n°[Cadastre 5], [Cadastre 4] et [Cadastre 6], soutenant à cet effet n'avoir aucun autre accès à ces parcelles que le chemin d'exploitation ci-dessus évoqué, dont l'état constaté par Me [W] interdirait un tel accès.
Il peut au passage être observé que Mme [I], devant les premiers juges, a soutenu être empêchée d'exploiter ces parcelles du fait de leur état de friche, aucune mention particulière de l'état du chemin n'apparaissant à la lecture du jugement entrepris.
Il ressort clairement des photographies annexées au procès-verbal de constat que ce chemin est en effet envahi de végétation sauvage (ronces, mauvaises herbes) qui le rend très difficilement praticable.
Il doit néanmoins être observé que M. [H] n'est pas le seul propriétaire riverain de ce chemin et comme tel redevable de son entretien, les parcelles bordant le chemin d'exploitation appartenant pour plus de la moitié, à s'en référer aux écritures de M. et Mme [I], aux appelants eux-mêmes, à Mme [G] ainsi qu'à un ou plusieurs propriétaire(s) non identifié(s). Pour autant, Mme [I] ne justifie pas avoir mis en demeure les autres propriétaires riverains de procéder à l'entretien de ce chemin afin de lui libérer l'accès à ses parcelles, ni avoir elle-même fait diligenter les opérations d'entretien nécessaires à ses frais avancés, en sa qualité de propriétaire riveraine ou d'usagère de cette voie d'accès. Elle ne démontre pas davantage, au demeurant, ne pas disposer d'autre accès aux parcelles litigieuses.
Aucun comportement fautif de M. [H] n'étant suffisamment caractérisé sur ce point, il y a lieu de confirmer, par substitution de motifs, le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté cette demande.
Sur la demande indemnitaire liée à l'éviction de la parcelle cadastrée section ZI n°[Cadastre 3] présentée par Mme [I] :
Les articles 1103 et 1104 du code civil posent pour principe que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
Aux termes de l'article L411-1 du code rural et de la pêche maritime, Toute mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole définie à l'article L. 311-1 est régie par les dispositions du présent titre, sous les réserves énumérées à l'article L. 411-2. Cette disposition est d'ordre public.
Il en est de même, sous réserve que le cédant ou le propriétaire ne démontre que le contrat n'a pas été conclu en vue d'une utilisation continue ou répétée des biens et dans l'intention de faire obstacle à l'application du présent titre :
-de toute cession exclusive des fruits de l'exploitation lorsqu'il appartient à l'acquéreur de les recueillir ou de les faire recueillir ;
-des contrats conclus en vue de la prise en pension d'animaux par le propriétaire d'un fonds à usage agricole lorsque les obligations qui incombent normalement au propriétaire du fonds en application des dispositions du présent titre sont mises à la charge du propriétaire des animaux.
La preuve de l'existence des contrats visés dans le présent article peut être apportée par tous moyens.
En l'espèce, Mme [I] soutient avoir loué la parcelle cadastrée section ZI n°[Cadastre 3] à M. [H] à compter de l'année 2017, pour une durée de neuf ans, et que le bailleur l'aurait néanmoins louée à M. [D] à compter du 1er janvier 2019, qui se serait au passage emparé de 31 bottes de foin qu'elle avait laissées sur la parcelle.
Mme [I] produit notamment, à l'appui de cette demande, une attestation de bail verbal datée du 1er octobre 2017 au sujet de laquelle M. [H] a déposé plainte des chefs de faux et usage de faux, le 22 juin 2022, auprès de la brigade de gendarmerie de [Localité 7] (36).
M. [H] conteste lui avoir donné à bail cette parcelle, et par conséquent rempli et signé cette attestation de bail verbal, rappelant avoir encore été lui-même en activité professionnelle à la date concernée.
Il doit tout d'abord être souligné que si la plainte déposée par M. [H] a été classée sans suite par le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Châteauroux, le 15 décembre 2021, le motif de classement retenu est le suivant : « régularisation sur demande du Parquet ».
Il s'en déduit que le procureur n'a pas estimé que l'infraction en cause était inexistante ou insuffisamment caractérisée en ses éléments constitutifs, mais que les faits dénoncés avaient fait l'objet d'une régularisation par leur auteur potentiel, à la demande du Parquet. Dès lors, les premiers juges ont pu à bon droit estimer qu'un doute raisonnable subsistait quant à l'authenticité de l'attestation de bail verbal et du bulletin de mutation de terres annexé à celle-ci, produits par Mme [I].
Il peut par surcroît être observé, ainsi que l'a fait le tribunal, que cette attestation mentionne clairement : « Cette attestation est destinée au seul usage de l'administration (DDT). En aucun cas, les parties signataires ne pourront s'en prévaloir devant un tribunal pour faire valoir des droits éventuels. » Le tribunal a ainsi logiquement estimé que Mme [I] ne pouvait se prévaloir devant lui de ladite attestation. Le même raisonnement demeure applicable en cause d'appel.
Mme [I] verse en outre aux débats un courrier recommandé daté du 27 juin 2019, adressé à M. [H], aux termes duquel M. et Mme [I], tous deux signataires, indiquaient « être en possession » de la parcelle ZI n°[Cadastre 3]. Cette pièce vient ainsi contredire l'affirmation de Mme [I] selon laquelle elle aurait été évincée de cette parcelle à compter du 1er janvier 2019 au profit de M. [D].
Enfin, le tribunal a relevé que Mme [I] ne démontrait pas verser de contrepartie onéreuse à M. [H] pour la mise à disposition de la parcelle ZI n°[Cadastre 3].
Mme [I] indique sur ce point que « la contrepartie de l'exploitation de la parcelle ZI [Cadastre 3] pour M. [T] [I] était l'exploitation par M. [H] de ses parcelles B [Cadastre 5], B [Cadastre 4] et B [Cadastre 6] », et que son époux lui aurait cédé l'exploitation de la parcelle ZI n°[Cadastre 3] à compter du 4 juillet 2017.
Or il ne peut qu'être observé que M. [H] a cessé toute activité agricole, en ce compris l'exploitation des parcelles appartenant à M. [I], à compter du 1er janvier 2019, ce point n'étant pas contesté. Il ne saurait ainsi être sérieusement soutenu que Mme [I], à la supposer titulaire d'un bail verbal, ait versé à M. [H] une contrepartie onéreuse pour la mise à disposition de cette parcelle ZI n°[Cadastre 3] à compter de cette date au moins.
Concernant la période comprise entre le 1er octobre 2017 et le 31 décembre 2018, durant laquelle M. [H] était encore en activité, il convient de relever, en sus du doute existant quant à l'authenticité de l'attestation de bail versée aux débats par Mme [I] et à l'impossibilité de se prévaloir de ce document devant une juridiction, que les parcelles dont l'exploitation par M. [H] aurait constitué la contrepartie onéreuse ne lui appartiennent pas mais sont la propriété de son mari.
Enfin, le relevé parcellaire étant établi sur la base des déclarations du preneur, la valeur probante d'un tel document apparaît particulièrement faible.
En considération de l'ensemble de ces éléments, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [I] de sa demande indemnitaire au titre de l'éviction alléguée de la parcelle ZI n°[Cadastre 3].
Sur l'article 700 et les dépens :
L'équité et la prise en considération de l'issue du litige déterminée par la présente décision commandent de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner in solidum M. et Mme [I], qui succombent en l'intégralité de leurs prétentions, à payer à M. [H] la somme de 3.000 euros au titre des frais exposés en cause d'appel qui ne seraient pas compris dans les dépens.
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie. M. et Mme [I], partie succombante, devront supporter la charge des dépens de l'instance d'appel.
Le jugement entrepris sera enfin confirmé de ces chefs.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
CONFIRME le jugement rendu le 12 juillet 2022 par le Tribunal paritaire des baux ruraux de Châteauroux en l'intégralité de ses dispositions ;
Et y ajoutant,
CONDAMNE in solidum M. [T] [I] et Mme [B] [E] épouse [I] à payer à M. [M] [H] la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toutes autres demandes, plus amples ou contraires ;
CONDAMNE M. [T] [I] et Mme [B] [E] épouse [I] aux entiers dépens de l'instance d'appel.
L'arrêt a été signé par Mme CLEMENT, Président, et par Mme MAGIS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président
S. MAGIS O. CLEMENT