SM/ATF
COPIE OFFICIEUSE
COPIE EXÉCUTOIRE
à :
- SCP GERIGNY & ASSOCIES
NOTIFICATION AUX PARTIES
NOTIFICATION AU MINISTÈRE PUBLIC
LE : 20 AVRIL 2023
COUR D'APPEL DE BOURGES
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 20 AVRIL 2023
N° 207 - 6 Pages
N° RG 22/00339 - N° Portalis DBVD-V-B7G-DOCF
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de NEVERS en date du 07 Mars 2022
PARTIES EN CAUSE :
I - M. [R] [Z] pris tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de la SAS TBN,
né le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 6]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté et plaidant par la SCP GERIGNY & ASSOCIES, avocat au barreau de BOURGES
timbre fiscal acquitté
APPELANT suivant déclarations des 22/03/2022 et 24/03/2023
II - M. PROCUREUR GENERAL, près la Cour d'Appel de BOURGES, domicilié en cette qualité en son bureau
[Adresse 5]
[Localité 2]
En la personne de M. BONNEFOY, Avocat Général
INTIMÉ
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Mars 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. TESSIER-FLOHIC, Président chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. TESSIER-FLOHIC Président de Chambre
M.PERINETTI Conseiller
Mme CIABRINI Conseillère
***************
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme MAGIS
***************
Le dossier a été communiqué au Ministère Public le 10/05/2022, date à laquelle il a rédigé des conclusions qui ont été transmises par voie électronique aux avocats des parties le même jour.
***************
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
**************
EXPOSÉ DU LITIGE
Par jugement en date du 26 novembre 2018, statuant sur assignation de l'URSSAF de Bourgogne Franche-Comté, le tribunal de commerce de Nevers a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la SAS TBN dirigée par M. [R] [Z].
La liquidation judiciaire de cette société a été prononcée par la même juridiction par jugement du 3 juin 2019 infirmée cependant par arrêt de la présente cour en date du 6 février 2020.
A l'issue de la période d'observation, renouvelée par la juridiction consulaire le 6 avril 2021, le tribunal de commerce a de nouveau prononcé la liquidation judiciaire de la société TBN par jugement du 7 juin 2021.
Se prévalant de plusieurs manquements de la part du gérant de la société TBN, le Ministère Public a saisi le président de la juridiction consulaire de Nevers d'une requête, reçue le 15 novembre 2021, tendant à la convocation de M. [Z] aux fins de voir prononcer à son encontre une mesure de faillite personnelle.
Par ordonnance rendue le 22 novembre 2021, le président du tribunal de commerce a saisi le tribunal afin de voir statuer sur la demande du ministère public à l'audience du 31 janvier 2022.
M. [Z], convoqué par les soins du greffe, a exposé à l'audience ne pas connaître le motif de sa convocation et a contesté l'argumentation développée par le ministère public.
Par jugement en date du 7 mars 2022, le tribunal de commerce de Nevers a :
- prononcé une mesure de faillite personnelle pour une durée de 15 ans à rencontre de [R] [Z],
- précisé que conformément aux dispositions de l'article L 653-2 du Code de commerce, la faillite personnelle emportait interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole ou toute entreprise avant toute autre activité indépendante, et toute personne morale,
- ordonné la publicités de la décision par le greffier,
- rappelé que la sanction ferait l'objet d'une inscription au Fichier national des interdits de gérer, dont la tenue est assurée par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce,
- condamné [R] [Z] aux entiers dépens de la présente décision, et
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision nonobstant appel et sans caution.
Pour se prononcer ainsi, le tribunal a retenu :
- un défaut de coopération avec les organes de la procédure,
- un défaut de tenue de comptabilité,
- une omission de déclarer l'état de cessation des paiements,
- une disposition des biens de la personne morale comme de ses biens propres ou avoir détourné tout ou partie des actifs de la société,
- l'absence de mise à jour du siège social de la société au Registre du Commerce et des Sociétés.
Par actes distincts reçus au greffe les 22 et 24 mars 2022, M. [R] [Z], déclarant agir tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de la SAS TBN, a interjeté appel de cette décision critiquant toutes ses dispositions lui faisant grief et précisant, dans sa deuxième déclaration, que son appel tendait, à titre principal, à l'annulation de la décision entreprise.
Les appels, distinctement enrôlés, ont fait l'objet d'une jonction.
En l'état de ses dernières conclusions, signifiées le 18 juillet 2022, l'appelant demande à la cour, vu la jonction des procédures enrôlées sous les n° RG 22/00339 et 22/00340 :
- de juger nulle la citation à comparaître du 23 novembre 2021,
- d'annuler en conséquence le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Nevers en date du 07 mars 2022,
- Subsidiairement, de débouter le Ministère Public de sa demande de faillite personnelle emportant interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole ou toute entreprise ayant toute autre activité indépendante, et toute personne morale, à son encontre, et
- de condamner le Trésor Public au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Au soutien de son appel, [R] [Z] invoque l'irrégularité de sa convocation entachant de nullité le jugement entrepris et privant la cour de toute possibilité de statuer au fond dès lors que l'acte introductif d'instance serait vicié.
En effet, selon lui, la procédure devait suivre les règles prescrites par les articles R. 653-2, R. 631-4 et R. 651-5 du code de commerce desquelles il résulte qu'il aurait dû avoir connaissance de la requête du ministère public, être convoqué par lettre recommandée contenant le motif de sa convocation et avoir été destinataire du rapport du juge-commissaire un mois au moins avant la date de l'audience, ce qui n'a pas été respecté en violation des droits nécessaires pour assurer sa défense.
Subsidiairement, si la cour devait s'estimer saisie après annulation, il soutient n'avoir pas eu communication des pièces du parquet requérant en première instance et avoir reçu une assignation indiquant la clôture de la procédure comme objet de l'audience, ce qui n'est pas contesté, et qui devra, en tout état de cause, conduire au rejet de la demande.
Par observations écrites en date du 10 mai 2022, portées à la connaissance des parties par le biais du réseau privé virtuel justice, le ministère public a conclu principalement à la confirmation du jugement entrepris soutenant que le tribunal n'a pas été saisi par le parquet mais par une citation délivrée par huissier de justice le 23 novembre 2021, ce qui n'impliquait pas d'appliquer les dispositions de l'article L. 651-5 du code de commerce et ce d'autant que ces dispositions ne concernent pas la procédure tendant au prononcé d'une faillite personnelle.
S'il admet qu'une erreur matérielle affecte la citation délivré à M. [Z], le ministère public prétend cependant qu'elle reste sans conséquence dès lors que le respect des droits de la défense a pu être assuré du fait de la comparution de M. [Z].
Par arrêt avant dire droit du 3 novembre 2022, la cour prescrivait la réouverture des débats en invitant le Parquet général à comparaître au motif que la présence d'un représentant du Ministère Public était nécessaire même si des réquisitions écrites avaient été échangées.
L'affaire a été rappelée à l'audience du 8 mars 2023, sans que [R] [Z] n'ait pris de nouvelles écritures. Elle a été mise en délibéré et l'arrêt a été mis à la disposition des parties le 20 avril 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la forme
Il a été statué sur la recevabilité de l'appel qui n'est pas contestée.
Ensuite, le Parquet Général présent à l'audience du 8 mars 2023, a oralement repris ses écritures et les a développées, de sorte que la procédure se trouve conforme aux dispositions de l'article 431 du code de procédure civile qui dispose que le ministère public n'est tenu d'assister à l'audience que dans les cas où il est partie principale, comme dans le cas de l'espèce, puisqu'il était à l'origine de la demande de faillite personnelle.
Encore, sur la citation devant la juridiction commerciale de [R] [Z], celui-ci ait été assigné en qualité de représentant légal de la SAS TBN sur la base de l'ordonnance sur requête du 22 novembre 2021 et en application des dispositions de l'article R 643-17 du code de commerce et visant expressément 'l'examen de la clôture de la procédure collective à l'encontre de la SAS TBN' ;
Ces dispositions visent la clôture de la procédure et non les dispositions des articles L 653-1 à L653-11 du même code qui régissent la faillite personnelle.
Cette assignation a été délivrée au dernier domicile connu de la SAS TBN, qui est aussi le domicile personnel de [R] [Z].
Il résulte en outre des pièces versées aux débats par le seul appelant que cette cédule de citation, n'est pas accompagnée de l'ordonnance sur requête du 22 novembre 2021 ; le parquet général n'en rapporte pas la preuve contraire. Dès lors rien ne démontre que ladite ordonnance ait été portée à la connaissance de [R] [Z] pour lui permettre de connaître l'exacte portée de l'acte de convocation judiciaire et ce même si [R] [Z] était comparant à l'audience du 31 janvier 2022 et a soutenu notamment ignorer que la faillite personnelle était sollicitée à son endroit et n'avait déposé aucunes conclusions.
En outre et en droit, il n'est pas rapporté que lui ait été communiqué le rapport du juge-commissaire conformément aux dispositions de l'article R 651-5 du même code.
La cour doit donc constater que l'assignation est entachée de nullité ; la réformation de l'entière décision est encourue.
Les dépens resteront à la charge du Trésor Public
PAR CES MOTIFS
La cour,
- Infirme le jugement entrepris,
- Constate la nullité de l'assignation saisissant la juridiction commerciale aux fins de faillite personnelle contre [R] [Z].
- Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.
L'arrêt a été signé par M. TESSIER-FLOHIC, Président, et par Mme MAGIS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président
S. MAGIS A. TESSIER-FLOHIC