LE TRENTE NOVEMBRE DEUX MILLE QUATRE LA CHAMBRE CIVILE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBERY a rendu l'arrêt dont la teneur suit : dans la cause 03/00584- 1ère Chambre
opposant : APPELANTE SARL LES MAISONS X..., représentée par son gérant, dont le siège social est situé au 27 rue de Bramafan - 73230 BARBY représentée par Me FILLARD - M. Y..., Es qualités de suppléants de Me DELACHENAL, Avoué assistée de Me Didier BESSON, avocat au barreau de CHAMBERY à : INTIMES M. Pascal Z..., ... par la SCP FILLARD/COCHET-BARBUAT, avoués à la Cour assisté de Me El-Hem SELINI, avocat au barreau de CHAMBERY SA Z... etamp; ASSOCIÉS GRANIER, dont le siège social est situé au 5 Boulevard Gambetta - 73000 CHAMBERY représentée par la SCP FILLARD/COCHET-BARBUAT, avoués à la Cour assistée de Me El-Hem SELINI, avocat au barreau de CHAMBERY COMPOSITION DE LA COUR : Lors de l'audience publique des débats, tenue le 27 septembre 2004 avec l'assistance de Madame A..., Greffier, Et lors du délibéré, par : - Monsieur AZOULAY, Président de chambre, - Monsieur LECLERCQ, Conseiller, - Monsieur JICQUEL, Conseiller. Par déclaration au greffe du 5 mars 2003, la SARL "LES MAISONS X..." fait régulièrement appel contre Monsieur Pascal B... - RETORD etamp; contre la SA "B... - RETORD etamp; associés GRANIER" d'un Jugement du Tribunal de Grande Instance de CHAMBERY du 30 janvier 2003. La SARL "LES MAISONS X..." avait initialement une activité d'entrepreneurs en maçonnerie. Sa comptabilité était tenue depuis 1976 par le cabinet d'experts-comptables SA " B... - RETORD etamp; associés GRANIER" Cependant une lettre de mission n'était établie que le 4 octobre 2000. Aux termes d'un contrôle de la CRAM RHONE ALPES, cette société n'était plus tenue à payer les cotisations correspondant à l'activité "bâtiments et travaux publics" qui s'élevaient selon les années à un
taux voisin de 10 % pour être réduit à 1,40 % avec effet au 1er avril 2000 dès lors que son activité permettait de la classer de la catégorie " intermédiaire du commerce non spécialisé. La SARL "LES MAISONS X..." réclame à son expert-comptable le paiement des cotisations indues estimant qu'il a manqué à son devoir de conseil. ************* Le jugement déféré avait statué dans les termes suivants : " Met hors de cause monsieur Pascal Z.... Donne acte à la société Z... etamp; ASSOCIES GRANIER de son intervention volontaire aux débats. Dit l'action engagée par la société MAISONS X... mal fondée et l'en déboute. Condamne la société MAISONS X... à payer à la société Z... etamp; ASSOCIES GRANIER une somme de 800 euros, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Condamne la société MAISONS X... aux dépens (...) " *************** La SARL "LES MAISONS X..." a déposé ses dernières conclusions le 26 mai 2004 pour voir : Infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et statuant à nouveau : Condamner la SA " B... - RETORD etamp; associés GRANIER" à lui payer la somme de 392 787,92 F, soit 59 880,13 ä avec intérêts de droit à compter de l'assignation du 16 novembre 2001, Condamner encore la SA " B... - RETORD etamp; associés GRANIER" à lui payer une indemnité de 3.000 ä sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi que les entiers dépens avec application pour ceux d'appel des dispositions de l'article 699 du même code au profit de Messieurs Y... et FILLARD, suppléants de Me DELACHENAL, avoué. *************** La SA "B... - RETORD etamp; associés GRANIER" et Monsieur Pascal B... - RETORD ont déposé leurs dernières conclusions le 9 septembre 2004 pour voir : Confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, Condamner la SARL "LES MAISONS X..." à leur payer une indemnité de 3.000 ä sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi que les
entiers dépens avec application pour ceux d'appel des dispositions de l'article 699 du même code au profit de la SCP FILLARD et COCHET BARBUAT, avoués associés. ************* Par mention au dossier du 27 avril 2004, le ministère public conclut à la confirmation du Jugement ; SUR CE : Attendu que la SA " B... - RETORD etamp; associés GRANIER" avait reçu de la SARL "LES MAISONS X..." une mission comprenant notamment l'établissement des bulletins de salaire et le calcul des charges sociales ; Attendu que la société appelante estime que celle-ci a manqué à son devoir de conseil en omettant de rechercher si, compte tenu de l'évolution de l'activité de son client au fil des ans, celui-ci n'aurait pas pu cotiser pour le risque accidents du travail dans une autre catégorie que celle du bâtiment et des travaux publics ; Attendu que pour s'exonérer de sa responsabilité la SA " B... - RETORD etamp; associés GRANIER" se fonde sur le libellé de l'inscription au registre du commerce et des sociétés de la SARL "LES MAISONS X...", qu'elle fait encore valoir que la comptabilité de cette société faisait apparaître une importante facturation de matériaux qui relèverait de l'activité d'entrepreneur du bâtiment et enfin que le bilan faisait apparaître des immobilisations représentant du matériel de chantier, qu'enfin Monsieur X... continuait d'être présent sur les chantiers ; Attendu que selon l'article D 242-6-1 du code de la sécurité sociale, la tarification des cotisations à l'assurance accidents du travail est déterminée par établissement et par classement de l'établissement dans une catégorie de risque en fonction de l'activité exercée ; Attendu que selon les dispositions du premier alinéa de l'article L. 242-5, de l'article L. 242-7 et du cinquième alinéa de l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, le taux de cotisations dues au titre des accidents du travail est déterminé annuellement pour chaque catégorie de risque par la caisse régionale d'assurance-maladie ;
Attendu qu'il résulte de l'article R 143-21 du même code que l'employeur dispose d'un recours dans un délai de deux mois à compter de la réception de la notification par lettre simple par la caisse régionale d'assurance-maladie de sa décision concernant ses taux de cotisation ; Attendu que l'arrêté du 28 décembre 1984 abrogé et remplacé par l'arrêté du 17 octobre 1995, textes pris pour l'application de l'article D 242-6-1 précité du code de la sécurité sociale, définit les catégories de risque servant à fixer les taux de cotisation de chaque établissement en fonction de l'activité exercée, en référence au rattachement de cette activité à l'un des comités techniques nationaux ; Attendu que la liste des comités techniques nationaux, leur mode de fonctionnement et leurs prérogatives sont fixés par un arrêté du 23 février 1968 abrogé par un arrêté du 22 décembre 2000, qui était toutefois le texte applicable pendant la période visée par l'action engagée par la SARL "LES MAISONS X..." ; Attendu qu'on cherche vainement dans ce texte le critère de rattachement des entreprises à l'un ou l'autre des comités énumérés aux articles 1 et 2 ; Attendu que la jurisprudence se fonde sur l'activité effective des salariés, qu'il a ainsi notamment été jugé que le classement doit se faire d'après la nature du risque créé par l'activité de l'entreprise et non pour chaque catégorie de personnel, et que celle-ci ne peut bénéficier du taux reduit de cotisation pour ses bureaux que s'ils sont indépendants de tout autre établissement ; Attendu qu'il résulte des explications de la SARL "LES MAISONS X...", non contredites par la partie adverse que depuis 1991, cette société n'avait que trois salariés, à savoir Monsieur Santo X..., Monsieur Angelo X..., et Madame X..., que tous trois exercaient des fonctions administratives ou commerciales ; Attendu par ailleurs que les deux ouvriers précédemment employés ont été licenciés en 1991 ; Attendu que la SARL "LES MAISONS X..." expose enfin que depuis cette
époque, tous les travaux de construction dont elle se chargeait étaient systématiquement sous-traités ; Attendu que les moyens développés par la société intimée pour tenter de s'exonérer de sa responsabilité sont inopérants dans la mesure où ils ne font aucune référence à l'activité des salariés de la SARL "LES MAISONS X...", sauf toutefois pour faire valoir que Monsieur X... se rendait sur les chantiers ; Attendu que la SA "B... - RETORD etamp; associés GRANIER" ne peut sérieusement soutenir que la présence éventuelle sur les chantiers de salariés de la SARL "LES MAISONS X..." n'entrait pas dans le cadre de l'activité de maîtrise d'oeuvre qui ne justifie pas la classification de l'entreprise dans la catégorie "bâtiment" ; Qu'en effet la SA " B... - RETORD etamp; associés GRANIER" ne pouvait ignorer que par l'activité effective de ses salariés, la SARL "LES MAISONS X..." était devenue un prestataire de services ; qu'elle savait, pour avoir participé à leur licenciement que l'entreprise s'était séparée de ses maçons salariés ; Attendu que l'importance des cotisations payées au titre du risque accidents du travail qui s'élevaient à 10 % de la masse salariale et qui apparaissaient dans la comptabilité établie par la SA "B... - RETORD etamp; associés GRANIER" lui imposait une obligation de vigilance particulière ; Attendu que le manquement de l'expert-comptable à son obligation de conseil justifie qu'il soit condamné à rembourser à son client les cotisations payées à tort par celui-ci, qu'il y a donc lieu d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré ; Attendu qu'à défaut de contestation sur le montant des sommes réclamées, et qui ont été calculées à partir des relevés établis par la SA " B... - RETORD etamp; associés GRANIER", il convient de faire droit à la demande ; PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement et contradictoirement : Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré et statuant à nouveau : Condamne la SA " B... - RETORD etamp; associés GRANIER" à payer à la SARL "LES MAISONS X..." la somme de 59.880,13 ä et les intérêts au taux légal à compter du 16 novembre 2001 ; Condamne la SA " B... - RETORD etamp; associés GRANIER" à payer à la SARL "LES MAISONS X..." une indemnité de 2.000 ä sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de première instance d'appel avec application pour ces derniers des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile au profit de Messieurs Y... et FILLARD, suppléants de Me DELACHENAL, avoué.
Ainsi prononcé en audience publique le 30 novembre 2004 par Monsieur AZOULAY, Président, qui a signé le présent arrêt avec Madame C..., Greffier, présente à cette audience.