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20/09/2022 | FRANCE | N°20/00576

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 1ère chambre, 20 septembre 2022, 20/00576


COUR D'APPEL de CHAMBÉRY





Chambre civile - Première section



Arrêt du Mardi 20 Septembre 2022





N° RG 20/00576 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GOND



Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Commerce d'ANNECY en date du 20 Avril 2020, RG 2019J00169





Appelante



S.A.S. THC MANAGEMENT & CONSULTING dont le siège social est situé [Adresse 3]



Représentée par la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocats postulants au barreau de CHAMBERY

Représentée par la SELA

RL LEXCAP, avocats plaidants au barreau d'ANGERS









Intimé



M. [V] [T]

né le 12 Août 1966 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]



Représenté par la SELARL AVO...

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

Chambre civile - Première section

Arrêt du Mardi 20 Septembre 2022

N° RG 20/00576 - N° Portalis DBVY-V-B7E-GOND

Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Commerce d'ANNECY en date du 20 Avril 2020, RG 2019J00169

Appelante

S.A.S. THC MANAGEMENT & CONSULTING dont le siège social est situé [Adresse 3]

Représentée par la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocats postulants au barreau de CHAMBERY

Représentée par la SELARL LEXCAP, avocats plaidants au barreau d'ANGERS

Intimé

M. [V] [T]

né le 12 Août 1966 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]

Représenté par la SELARL AVOCALP DUFOUR MUGNIER LYONNAZ PUY, avocats au barreau d'ANNECY

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue le 31 mai 2022 avec l'assistance de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,

Et lors du délibéré, par :

- M. Michel FICAGNA, Président,

- Mme Alyette FOUCHARD, Conseiller,

- Madame Inès REAL DEL SARTE, Conseiller,

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Il a été procédé au rapport.

La société [B] est une société familiale détenue par la famille [B] qui exerce l'activité d'extraction et de traitement de sables et graviers, de fabrication béton et d'exploitation de carrières,

M [T] a souhaité céder avec sa mère la participation qu'il détenait dans la société Peletat à son oncle.

A cette fin, il est entré en contact avec M. [X], président de la société THC management & consulting (THC) afin d'être accompagné dans la négociation du prix.

M. [X] a démarré la mission en juin 2018 sans qu'aucun contrat de prestation n'ait été régularisé.

Un projet de contrat d'assistance et d'intermédiation a ensuite été adressé à M. [T], lequel a souhaité par courriel du 2 octobre 2018 des modifications à la proposition du contrat concernant le montant minimum de la vente à atteindre.

Par courriel du 2 octobre 2019, M. [T] a informé qu'il ne donnait pas suite au contrat mais qu'il était disposé à indemniser M. [X] sur présentation d'une facture.

Le 2 décembre 2018, M. [X] adressait à ce dernier une facture de 60 000 euros TTC mentionnant pour objet « Prestations contrat d'assistance et d'intermédiation (suivant contrat du 15 juin 2018), honoraires sur mission d'assistance, montant suivant courrier du 2 décembre 2018 ».

La facture n'étant pas payée, la société THC a fait assigner M. [T] devant le tribunal de commerce d'Annecy aux fins de paiement de la somme de 60 000 euros.

Par jugement en date du 20 avril 2020, le tribunal de commerce d'Annecy a :

Débouté la société THC de l'intégralité de ses demandes,

Débouté M. [T] de sa demande de dommages et intérêts,

Condamné la société THC à payer à M. [T] la somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la société THC aux entiers dépens.

Cette dernière a interjeté appel de la décision.

Aux termes de ses conclusions en date du 6 mai 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société THC demande à la cour de :

Vu les articles 1103, 1104 et 1231-1 du code civil,

Vu l'article 1113 du code civil,

Vu les articles 1787 et suivants du code civil,

' Dire et juger la société THC recevable et fondée en ses demandes,

En conséquence,

' Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [V] [T] de sa demande de dommages et intérêts,

' Infirmer le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs de jugement infirmés,

' Condamner M. [V] [T] à lui payer une somme de 97 200 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2019,

' Débouter M. [V] [T] de l'intégralité de ses demandes,

' Condamner M. [V] [T] à lui payer une somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du CPC,

' Condamner M. [V] [T] aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la selarl Juliette Cochet Barbuat.

Aux termes de ses conclusions en date du 21 octobre 2020, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, M. [T] demande à la cour de :

Vu les dispositions des articles 1103 et 1104 du code civil,

Vu les pièces versées aux débats,

Vu le jugement entrepris rendu par le tribunal de commerce d'Annecy le 20 avril 2020,

' Recevoir l'appel interjeté par la société THC mais le dire particulièrement mal fondé,

En conséquence,

' Débouter purement et simplement la société THC de l'intégralité de ses demandes comme particulièrement mal fondées,

' Et confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf à y ajouter,

' Condamner la société THC à payer à M. [V] [T] la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

' Condamner la société THC à payer à M. [V] [T] la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

' Condamner la même aux entiers dépens de l'appel.

L'ordonnance de clôture est en date du 2 mai 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'existence d'un contrat et son exécution

Selon l'article 1113 du code civil : « Le contrat est formé par la rencontre d'une offre et d'une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s'engager. Cette volonté peut résulter d'une déclaration ou d'un comportement non équivoque de son auteur. »

Il en résulte que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, l'existence d'un contrat n'est pas subordonnée à la rédaction d'un écrit.

Par ailleurs, l'article 1104 du code civil énonce : « Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette dispositions est d'ordre public. »

En l'espèce, il résulte des échanges par sms, courriels, et courriers les éléments de faits suivants :

- un projet de contrat a été adressé en juin 2018 par M. [X] représentant de la société THC à M. [T], contrat ayant pour objet :

- une mission d'assistance consistant à conseiller et assister M. [T] dans l'optimisation économique et fiscale de la cession de sa participation au sein de la société [B]

- un mandat d'intermédiation en vue de négocier la cession des actions détenues par ce dernier et accompagner les opérations liées à cette cession.

A titre de rémunération, il était prévu le versement d'une somme fixe et forfaitaire de 5 000 euros HT pour la mission d'assistance payable à hauteur de 50% au début de la mission, le solde étant exigible 3 mois après l'émission de la facture initiale.

S'agissant du mandat d'intermédiation, il était prévu un pourcentage progressif sur le prix de cession des actions lequel devait représenter un minimum de 2 700 000 euros soit :

Pour la partie du prix de cession de 2 700 000 euros : 3%

Pour la partie du prix de cession comprise entre 2 700 001 et 3 000 000 € : 5%

Pour la partie du prix de cession supérieure à 3 000 000 € : 10%

Le 2 juillet 2018, M. [T] adressait un courriel à l'attention de Mme [G] (Fidal) en ces termes :

« Je fais suite à notre réunion du vendredi 15 juin dans vos locaux en présence de Messieurs [L] [B], [O] [B] et de sa femme [N].

Je vous confirme ma réelle intention de vendre l'intégralité des actions que je détiens dans la sarl [B] à un prix qui reste à déterminer.

Afin de prendre en compte votre souhait dé réaliser rapidement l'opération, je vous propose de prendre contact courant juillet avec M. [Z] (KPMG, conseil de l'acquéreur ndlr) pour organiser une réunion de travail en vue d'une nouvelle valorisation basée sur les comptes arrêtés au 30 juin 2018.

Enfin, comme je vous l'avais indiqué lors de notre réunion, dans le cadre de cette opération, j'ai souhaité confié mes intérêts à M. [H] [X] ([XXXXXXXX01] ' [Courriel 5], en copie de cet email).

Lors de notre réunion, vous nous avez également indiqué avoir préparé un projet de cession d'actions, que je vous remercie par avance de nous adresser à [H] [X] et moi-même. »

Il résulte par ailleurs des échanges de courriels que si une estimation de la valeur des actions avait été effectuée par KPMG l'année d'avant, cette dernière devait être revue en fonction des résultats du bilan arrêté au 30 juin 2018, qui était en cours d'élaboration en septembre 2018.

En outre, afin d'avoir une idée de la situation financière de la société, M. [X] a sollicité des éléments financiers relatifs à l'acquisition par la société [B] d'une nouvelle centrale à béton qui s'est avérée faire l'objet d'un crédit bail.

Vainement M. [T] fait-il valoir que l'assistance de la société THC était inutile, alors que d'une part, il reconnaît n'avoir aucune compétence en matière économique et stratégie financière, et que d'autre part, il ressort très clairement des échanges de courriels entre les deux parties, qu'il a validé la stratégie proposée par M. [X], qu'il n'avait aucune confiance envers la société KPMG, conseil de l'acquéreur, et que par ailleurs il existait une mésentente entre les membres de la famille actionnaires rendant les négociations délicates (cf courriel du 20 juillet 2018).

C'est également en vain qu'il fait valoir que la signature de ce contrat était impensable alors qu'il résulte de son courriel du 2 octobre 2018, qu'il était parfaitement d'accord avec les termes et conditions ce dernier :

« Concernant notre contrat, j'aurais une remarque. Désolé je ne l'ai pas vue de suite. Le montant minimum à atteindre pour la vente n'est pas de 2 500 000 mais de 2 700 000. C'est ce qu'avait annoncé Mme [G] à notre première réunion à la relecture de l'expertise KPMG. Selon elle, donc, la fourchette suite à l'expertise de KPMG est de 5 400 (basse) et 6 200 (haute) K/€ pour 500 parts. Tu pourras également corriger sur le contrat la ligne « Pour la partie du prix de cession comprise entre 2 700 001 et 3 100 000 : 5% » et les deux autres lignes en conséquence.

J'en profite ici pour te confirmer que l'objectif à atteindre absolument n'est pas la fourchette basse mais la fourchette haute. Bien entendu.

La fourchette basse, pour eux, représentant le prix « on s'en sort bien » et la fourchette haute, le prix « normal et/ou ok ».

J'attends tes corrections et t'enverrais le chèque dans la foulée. »

Le contrat non signé, versé au débat, comporte lesdites corrections sollicitées par M. [T].

Alors que le contrat était en cours d'exécution, que des rendez-vous s'étaient déroulés à plusieurs reprises, M. [T] a brusquement rompu ce dernier par courriel du 30 octobre 2018, en ces termes :

« Par la présente, je vous informe de ma décision de ne pas donner une suite favorable à votre proposition de collaboration. Les honoraires sont trop élevés et, d'autre part, je n'ai pas été convaincu par votre argumentation.

Je suis néanmoins disposé à vous indemniser du temps passé pour réaliser les études préalables de mon dossier. A cette fin, vous me ferez parvenir tous les éléments en votre possession liés au projet de cession de mes parts. »

Enfin, alors que dans ses premières conclusions notifiées devant la cour le 21 octobre 2020, pour s'opposer à tout paiement, M. [T] n'a pas hésité à affirmer que la cession des actions n'était finalement pas intervenue, il apparaît que par acte sous seing privé en date du 28 mai 2020, enregistré le 4 juin 2020, ce dernier a cédé ses parts à la société MJM détenue et gérée par son cousin M. [O] [B], soit l'acquéreur prévu depuis l'origine, avec qui la société THC avait négocié, ce moyennant le versement à son profit, d'une somme de 2 700 000 euros, correspondant au prix minimum qu'il souhaitait.

Il résulte ainsi de l'ensemble de ces éléments, que :

- Les parties étaient engagées dans une relation contractuelle depuis plusieurs mois et il existait un accord sur le montant et les modalités de la rémunération de la société THC,

- M [T] n'a, à aucun moment adressé le moindre reproche à cette dernière, laquelle n'a vu ses prestations interrompues que du fait de la brusque rupture initiée par ce dernier, sans motif valable.

La société THC est ainsi en droit de percevoir la rémunération convenue représentant la somme de 81 000 euros HT soit 97 200 euros TTC correspondant à 3% du montant du prix de cession des actions, et le jugement déféré sera infirmé en ce sens.

Sur la demande indemnitaire de M. [T]

La légitimité de la demande de la société THC étant reconnue, les prétentions de M. [T] fondées sur l'existence d'une procédure abusive à son encontre, ne peuvent qu'être rejetées.

Le jugement qui a rejeté sa demande sera confirmé.

Sur les demandes accessoires

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société THC.

M [T], qui échoue en ses prétentions, est tenu aux entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [V] [T] de sa demande indemnitaire fondée sur l'existence d'une procédure abusive à son encontre,

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau,

Condamne M. [V] [T] à payer la société THC management & consulting la somme de 97 200 euros TTC outre intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2019, date de la mise en demeure,

Condamne M. [V] [T] à payer la société THC management & consulting la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [V] [T] aux dépens de première instance et d'appel.

Ainsi prononcé publiquement le 20 septembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Alyette FOUCHARD, Conseillère, en remplacement de Michel FICAGNA, Président, régulièrement empêché et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier, P / Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/00576
Date de la décision : 20/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-20;20.00576 ?
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