COUR D'APPEL de CHAMBÉRY
2ème Chambre
Arrêt du Jeudi 23 Mars 2023
N° RG 21/00894 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GV54
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce d'ANNECY en date du 07 Janvier 2021, RG 2019J00086
Appelant
M. [K] [S]
né le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 4], demeurant [Adresse 3]
Représenté par la SELARL FRANCINA AVOCATS, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS
Intimée
S.A. CA CONSUMER FINANCE, dont le siège social est sis [Adresse 2] prise en la personne de son représentant légal
Représentée par la SELARL CONNILLE - POZZALLO AVOCATS, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat plaidant au barreau de LYON
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COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l'audience publique des débats, tenue le 24 janvier 2023 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,
Et lors du délibéré, par :
- Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente
- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,
- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,
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EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 30 juin 2016 la société CA Consumer finance a consenti à la société Atout Chape, pour financer l'acquisition d'un véhicule, un prêt de 14.962,76 euros remboursable en 61 mensualités de 311,32 euros, au TEG de 5,746 %.
Par acte du même jour, M. [K] [S], gérant de la société, s'est porté caution solidaire et indivisible des engagements de la société Atout Chape, dans la limite de la somme de 17.332,80 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard, et pour une durée de soixante mois.
Par jugement du 3 novembre 2017 le tribunal de commerce de Thonon-les-Bains a prononcé la liquidation judiciaire simplifiée de la société Atout Chape.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 6 décembre 2018, adressée à M. [S], la société CA Consumer finance s'est prévalue de la déchéance du terme et a mis en demeure la caution de lui payer la somme de 14.284,85 euros.
Par acte délivré le 26 février 2019, la société CA Consumer finance a fait assigner M. [S] devant le tribunal de commerce d'Annecy en paiement de la somme de 14.284,23 euros.
M. [S] s'est opposé à la demande en invoquant l'absence de déclaration de la créance de la société CA Consumer finance au passif de la société Atout Chape, et, subsidiairement, a sollicité des délais de paiement.
Par jugement contradictoire rendu le 7 janvier 2021, le tribunal de commerce d'Annecy a :
- condamné M. [S] ès qualité de caution solidaire et indivisible de la société Atout Chape, à payer à la société CA Consumer finance, au titre du contrat du 30 juin 2016, la somme de 14 284.23 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 4.579 % à compter du 06 décembre 2018, date de la mise en demeure,
- condamné M. [S] ès qualité de caution solidaire et indivisible de la société Atout Chape, à payer à la société CA Consumer finance la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- condamné M. [S] aux entiers dépens de l'instance.
Par déclaration du 23 avril 2021, M. [S] a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions notifiées le 23 juillet 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, M. [S] demande en dernier lieu à la cour de:
Vu l'article 1343-5 du code civil,
déclarer recevable et bien fondée sa déclaration d'appel,
En conséquence,
infirmer la décision déférée ce qu'elle a:
- condamné M. [S] ès qualité de caution solidaire et indivisible de la société Atout Chape, à payer à la société CA Consumer finance, au titre du contrat du 30 juin 2016, la somme de 14.284,23 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 4,579 % à compter du 06 décembre 2018, date de la mise en demeure,
- condamné M. [S] ès qualité de caution solidaire et indivisible de la société Atout Chape, à payer à la société CA Consumer finance la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de toutes leurs autres demandes,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- condamné M. [S] aux entiers dépens de l'instance.
confirmer la décision déférée en ce qu'elle a débouté la société CA Consumer finance de l'application de l'article L. 441-6 du code de commerce et de sa demande indemnitaire y résultant de 800 euros HT,
Statuant à nouveau,
A titre principal,
débouter la société CA Consumer finance de l'ensemble de ses demandes, tant à titre principal qu'à titre subsidiaire,
A titre subsidiaire, si la cour considérait que l'engagement de caution de M. [S] devait produire ses effets,
accorder à M. [S] le droit de s'acquitter de sa dette en 24 mensualités,
ordonner que les échéances portent un intérêt au taux légal à l'exclusion du taux conventionnel,
ordonner que les paiements effectués s'imputent prioritairement sur le capital,
constater la suspension de plein droit des majorations d'intérêts et des pénalités de retard pendant le délai de paiement accordé,
En tout état de cause,
condamner la société CA Consumer finance à verser la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à M. [S],
condamner la société CA Consumer finance aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par conclusions notifiées le 22 octobre 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société CA Consumer finance demande en dernier lieu à la cour de:
Vu les articles 1103, 2288 et suivants du code civil,
confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions,
En conséquence,
débouter M. [S] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
condamner M. [S] ès qualité de caution solidaire et indivisible de la société Atout Chape, à payer à la société CA Consumer finance :
- au titre du contrat du 30 juin 2016, la somme de 14.284,23 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 4,579 % à compter du 6 décembre 2018, date de la mise en demeure,
- la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner M. [S] ès qualité de caution solidaire et indivisible aux entiers dépens de la procédure d'appel qui seront recouvrés selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile par Me Pozzallo.
L'affaire a été clôturée à la date du 15 décembre 2022 et renvoyée à l'audience du 24 janvier 2023, à laquelle elle a été retenue et mise en délibéré à la date du 23 mars 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande en paiement
Selon les articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.
Conformément aux articles 2288 et suivants du même code, dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021, applicable en l'espèce, celui qui se rend caution d'une obligation se soumet envers le créancier à satisfaire à cette obligation, si le débiteur n'y satisfait pas lui-même. Le cautionnement ne se présume point. Il doit être exprès et on ne peut l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté.
M. [S] ne conteste pas son engagement de caution, mais soutient que la société CA Consumer finance ne peut pas lui réclamer une quelconque somme dès lors que:
- la société CA Consumer finance n'ayant pas obtenu la restitution du véhicule sollicitée auprès du juge commissaire de la liquidation judiciaire, elle s'est désintéressée de sa créance,
- sa créance n'a jamais été déclarée au passif de la société Atout Chape,
- le véhicule a été vendu aux enchères et il appartenait au créancier de faire valoir ses droits sur le prix de vente.
Toutefois, il résulte des pièces produites aux débats que la société CA Consumer finance a déclaré sa créance au passif de la société Atout Chape par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à la société MJ Alpes, mandataire liquidateur, le 22 décembre 2017 (pièce n° 7 du bordereau de communication de pièces, portant le n° 8 dans le dossier de l'intimé, qui ne contient aucune pièce n°7). Le montant de la créance déclarée est de 14.284,85 euros.
Ainsi la société CA Consumer finance est parfaitement fondée à poursuivre la caution, étant rappelé que la liquidation judiciaire n'interdit pas au créancier d'agir à son encontre.
Concernant la vente du véhicule, M. [S] n'invoque aucun texte à l'appui de sa contestation.
S'il entend se fonder sur l'article 2314 (ancien) du code civil, qui dispose que la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en faveur de la caution, il y a lieu de rappeler qu'il appartient à la caution de rapporter la preuve de la valeur des droits dont elle aurait été privée du fait de la carence alléguée du créancier.
Or force est de constater que M. [S] ne justifie pas de la vente effective du véhicule financé, mais seulement d'une requête qui aurait été faite le mandataire liquidateur auprès du juge-commissaire pour être autorisé à faire cette vente (pièce n° 2 de l'appelant), sans qu'il soit justifié de la décision rendue, et encore moins du prix de vente éventuel, ni de ce qui aurait pu revenir au créancier sur ce prix dans le cadre de la liquidation judiciaire.
En conséquence cette contestation est sans effet sur le montant de la créance de la société CA Consumer finance, lequel n'est au demeurant pas discuté. Ce montant est conforme à la déclaration de créance et résulte des justificatifs produits (contrat de prêt, tableau d'amortissement, historique comptable et décompte de créance).
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a condamné M. [S] au paiement de la somme de 14.284,23 euros.
Toutefois, il convient de dire que cette somme portera intérêts au seul taux légal à compter de la mise en demeure du 6 décembre 2018.
En effet, l'engagement de caution de M. [S] ne contient pas de mention indiquant qu'il s'engage à payer les intérêts au taux conventionnel sur la somme due par le débiteur principal lorsqu'il est appelé. Par ailleurs, il y a lieu de souligner que la déclaration de créance ne fait état d'aucun intérêts à échoir, de sorte que M. [S] ne peut être tenu au-delà de la somme déclarée.
Le jugement déféré sera donc réformé de ce chef.
Sur la demande de délais de paiement
En application de l'article 1343-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, le juge peut prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront un intérêt à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.
En l'espèce, M. [S] sollicite des délais de paiement pendant une durée de deux ans mais ne justifie pas de sa situation financière actuelle. En effet, il ne produit pour tous justificatifs que ses avis de non imposition sur les revenus perçus en 2017 et en 2018, ce qui est notoirement insuffisant. En outre, il n'indique pas les modalités selon lesquelles il entend se libérer de sa dette dans le délai légal, étant souligné que, du simple fait de la durée de la procédure, il a d'ores et déjà bénéficié de larges délais de paiement qu'il n'a pas mis à profit pour commencer à payer la société CA Consumer finance.
Sa demande de délais de paiement sera donc rejetée.
Sur les demandes accessoires
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société CA Consumer finance la totalité des frais exposés en appel, et non compris dans les dépens. Il convient en conséquence de lui allouer la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [S], qui succombe en son appel, en supportera les entiers dépens, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Pozzallo, avocat.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Annecy le 7 janvier 2021, sauf en ce qu'il a assorti la condamnation en paiement de M. [K] [S] des intérêts au taux contractuel de 4,579 % à compter du 6 décembre 2018,
Statuant à nouveau de ce chef,
Dit que la condamnation de M. [K] [S] à payer à la société CA Consumer finance la somme de 14.284,23 euros est assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 6 décembre 2018,
Y ajoutant,
Déboute M. [K] [S] de sa demande de délais de paiement,
Condamne M. [K] [S] à payer à la société CA Consumer finance la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel,
Condamne M. [K] [S] aux entiers dépens de l'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Sarah-Emmanuelle Pozzallo, avocat.
Ainsi prononcé publiquement le 23 mars 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Présidente