La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/03/2023 | FRANCE | N°21/01786

France | France, Cour d'appel de Chambéry, 2ème chambre, 23 mars 2023, 21/01786


COUR D'APPEL de CHAMBÉRY







2ème Chambre



Arrêt du Jeudi 23 Mars 2023



N° RG 21/01786 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GZKH



Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ANNECY en date du 04 Août 2021, RG 19/00707



Appelante



LA CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAVOIE, dont le siège social est sis [Adresse 3] - prise en la personne de son représentant légal



Représentée par Me Hélène ROTHERA, avocat au barreau d'ANNECY
<

br>



Intimé



M. [I] [Y]

né le [Date naissance 2] 1986 à [Localité 4] ([Localité 4]), demeurant [Adresse 1]



Représenté par Me Lionel FALCONNET, avocat au barrea...

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY

2ème Chambre

Arrêt du Jeudi 23 Mars 2023

N° RG 21/01786 - N° Portalis DBVY-V-B7F-GZKH

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ANNECY en date du 04 Août 2021, RG 19/00707

Appelante

LA CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DES SAVOIE, dont le siège social est sis [Adresse 3] - prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Hélène ROTHERA, avocat au barreau d'ANNECY

Intimé

M. [I] [Y]

né le [Date naissance 2] 1986 à [Localité 4] ([Localité 4]), demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Lionel FALCONNET, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue le 24 janvier 2023 avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,

Et lors du délibéré, par :

- Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente

- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,

- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,

-=-=-=-=-=-=-=-=-=-

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du samedi 8 septembre 2018, M. [I] [Y] a vendu son véhicule à M. [S] [H] qui lui a remis un chèque de banque d'un montant de 31 500 euros tiré sur une agence de la société AXA banque située à [Localité 5].

Préalablement à la remise des clefs du véhicule, M. [I] [Y], muni d'une impression papier de la photographie du chèque de banque, a consulté Mme [J] [M], directrice de l'agence de la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie de Saint Pierre en Faucigny, afin de se faire confirmer l'authenticité du chèque de banque. M. [I] [Y] prétend que l'authenticité du chèque lui a alors été confirmée et, que sur les conseils de Mme [J] [M], il a demandé à son acheteur de lui fournir un extrait de compte afin de vérifier que le montant du chèque de banque avait bien été débité. L'intéressé lui a alors remis un extrait de compte en date du '07.09" portant les mentions 'chèque de banque', le numéro du chèque et le nom de [I] [Y] avec, inscrite au débit, la somme de 31 500 euros.

L'acte de cession du véhicule a alors été formalisé le soir même.

Le mardi 11 septembre 2018, M. [I] [Y] s'est rendu au guichet de son agence du crédit agricole pour déposer le chèque sur son compte bancaire. Mais par courriel du 18 septembre 2018, il lui a été indiqué que le chèque de banque était en réalité un faux. Le montant n'a donc jamais été porté au crédit de son compte.

Après avoir porté plainte pour escroquerie le 15 mai 2019, M. [I] [Y] a assigné la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie aux fins de voir engager sa responsabilité contractuelle et d'obtenir une indemnisation.

Par jugement contradictoire du 4 août 2021, le tribunal judiciaire d'Annecy a :

- dit que la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie a commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle à l'égard de M. [I] [Y],

- condamné la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie à payer à M. [I] [Y] la somme de 31 500 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2019,

- ordonné la capitalisation des intérêts échus au moins pour une année,

- condamné la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie à payer à M. [I] [Y] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

Par déclaration du 6 septembre 2021, la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie a interjeté appel du jugement.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 18 novembre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie demande à la cour de :

- réformer purement et simplement le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Annecy le 4 août 2021 en ce qu'il :

- a dit qu'elle a commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle à l'égard de M. [I] [Y],

- l'a condamnée à payer à M. [I] [Y] la somme de 31 500 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2019,

- a ordonné la capitalisation des intérêts échus au moins pour une année,

- l'a condamnée à payer à M. [I] [Y] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamnée aux dépens,

statuant à nouveau,

- dire et juger qu'elle n'a pas commis de faute engageant sa responsabilité contractuelle ou délictuelle à l'égard de M. [I] [Y],

- rejeter les demandes de M. [I] [Y] en ce qu'elles sont dénuées de tout fondement,

- condamner M. [I] [Y] au paiement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont ceux de première instance,

- rejeter toutes autres demandes.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 3 novembre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, M. [I] [Y] demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Annecy le 4 août 2021 en ce qu'il a :

- dit que la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie a commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle à son égard,

- condamné la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie à lui payer la somme de 31 500 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2019,

- ordonné la capitalisation des intérêts échus au moins pour une année,

- condamné la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie aux dépens.

y ajoutant,

- condamner la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en indemnisation des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- condamner la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie aux dépens de première instance et d'appel avec distraction, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, au profit de maître Falconnet, avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la responsabilité de la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie

M. [I] [Y] reproche en premier lieu à la banque de n'avoir pas détecté les anomalies apparentes contenues dans le chèque de banque qu'il a présenté à l'encaissement.

Il est constant, en jurisprudence, que le banquier qui accepte de prendre un chèque à l'encaissement doit se livrer à un contrôle du titre. Toutefois, sa responsabilité n'est susceptible d'être engagée que si l'encaissement a été effectivement fait sans vérification préalable.

En l'espèce M. [I] [Y] s'est présenté à la banque le mardi 11 septembre 2018 pour faire encaisser son chèque de banque. Il ne peut toutefois pas faire grief à la banque de ne pas avoir vérifié la régularité de son chèque avant l'encaissement dans la mesure où c'est précisément ce qu'elle a fait et qui lui a, justement, permis de ne pas l'encaisser. Elle a d'ailleurs immédiatement alerté M. [I] [Y] du problème par courriel du mardi 18 septembre 2018 à 16h39 en lui joignant la note du service vérificateur qu'elle venait de recevoir, laquelle lui précise qu'il convient d'informer le client que son chèque ne sera pas encaissé (pièce intimé n°19). A cet égard, le fait que l'employé de la banque qui a reçu M. [I] [Y] le 11 septembre 2028 n'a lui-même rien relevé d'anormal est indifférent dans la mesure où le contrôle a bien eu lieu ensuite avant l'encaissement et où, si cette personne avait détecté une anomalie, cela n'aurait rien changé à la situation de M. [I] [Y] qui avait déjà livré sa voiture à ce moment là et qui n'aurait pas davantage été payé.

M. [I] [Y] reproche en second lieu à la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie de ne pas avoir vérifié la régularité du chèque en amont de sa présentation à l'encaissement, lorsqu'il a montré à la directrice d'agence une photographie du chèque litigieux afin qu'elle en contrôle l'authenticité le samedi 8 septembre 2018.

La cour observe que, c'est à tort que l'assureur de M. [I] [Y] écrit le 27 novembre 2018 (pièce intimé n°7) que, lorsque ce dernier s'est rendu à la banque le samedi 8 septembre 2018, il lui a été confirmé que le chèque était valable. En effet, dès sa réponse du 20 décembre 2018 la banque indique que la directrice d'agence a tenté vainement de joindre la société Axa banque et qu'elle a alors invité M. [I] [Y] à repasser le mardi suivant ou à vérifier l'opération avec l'acheteur sur ses relevés de comptes. Elle n'a donc a aucun moment précisé que le chèque était authentique. Aucun élément versé par M. [I] [Y] ne permet d'établir le contraire.

La cour observe encore que la directrice d'agence n'avait, alors, pas d'obligation contractuelle de vérification formelle du chèque qui ne lui était montré qu'en copie et qui ne lui était pas présenté à l'encaissement. Elle ne peut pas se voir reprocher un défaut de conseil dans la mesure où sa première indication, après qu'elle n'a pas pu avoir en ligne la banque tirée, a été de dire à son client de revenir le mardi suivant. Elle ne l'a donc pas laissé sans réponse ayant, au contraire, voulu vérifier l'authenticité du chèque auprès de la banque tirée.

Or c'est bien par choix personnel que M. [I] [Y] n'a pas reporté la vente de son véhicule et s'est contenté de l'extrait de compte donné par son interlocuteur pour se convaincre de l'authenticité du chèque. La cour observe pourtant que ce document (pièce intimé n°3) est un faux grossier dont peut se convaincre même une personne qui ne fait pas métier de banquier. En effet, si la date en en-tête est '7/09/2018", soit la veille de l'achat, le tableau indique 'solde créditeur au 07/09/2010". En outre un solde de 79 248,78 euros apparaît avant trois opérations de 31 500, 1 500 et 6 000 euros, alors que le nouveau solde affiche 24 501,20 euros après ces trois opérations. Un calcul, même rapide et approximatif permet de voir que ce solde ne peut pas être le bon après les trois opérations en question.

En conséquence, en l'absence de faute pouvant être reprochée à la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie, il convient d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de débouter M. [I] [Y] de toutes ses demandes.

Sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, M. [I] [Y] qui succombe sera condamné aux dépens de première instance et d'appel. Il sera corrélativement débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile comme n'en remplissant pas les conditions d'octroi.

Aucune considération d'équité ne permet de faire supporter à M. [I] [Y] tout ou partie des frais irrépétibles non compris dans les dépens exposés par la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie. Elle sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Déboute M. [I] [Y] de ses demandes,

Condamne M. [I] [Y] aux dépens de première instance et d'appel,

Déboute M. [I] [Y] et la société caisse régionale de crédit agricole mutuel des Savoie de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé publiquement le 23 mars 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/01786
Date de la décision : 23/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;21.01786 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award