COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE 7 SECTION 2 ARRÊT DU 10/02/2005 * * * No RG : 03/05754 Tribunal de Grande Instance de DOUAI du 29 Août 2003 REF : AR/MW/KD APPELANTE Madame Josée X... épouse Y...
... par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour assistée de Me Bruno CARPENTIER, avocat au barreau de LILLE INTIMÉ Monsieur Yves Emile Elysées Y...
... par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour assisté de Me Patrick GRIFFON, avocat au barreau de DOUAI COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ M. CHARBONNIER, Président de chambre M. ANSSENS, Conseiller Mme REGENT, Conseiller --------------------- GREFFIER LORS DES Z... : Mme C. A...
Z... à l'audience en chambre du Conseil du 28 Octobre 2004, Mme REGENT, magistrat chargé du rapport, a entendu les conseils des parties. Ceux-ci ne s'y étant pas opposés, ce magistrat en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (Article 786 NCPC) ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 10 Février 2005 après prorogation du délibéré du 09 Décembre 2004 (date indiquée à l'issue des débats) par M. CHARBONNIER, Président, qui a signé la minute avec Mme C. A..., Greffier, présents à l'audience lors du prononcé de l'arrêt. ORDONNANCE DE CLÈTURE DU : 09/09/2004
Madame Josée X... et Monsieur Yves Y... se sont mariés le 16 octobre 1965 sous contrat préalable. De leur union sont issus :
- Eric, né le 28 mai 1966
- Delphine, née le 7 juin 1970
Par jugement en date du 12 avril 2001, le Juge aux Affaires Familiales de DOUAI a, sur la demande des parties, sursis à statuer dans la procédure de divorce les opposant, jusqu'à ce qu'elles élaborent un acte notarié réglant leurs rapports patrimoniaux.
Par déclaration en date du 3 octobre 2003, Madame Josée X... a
relevé appel du jugement en date du 29 août 2003 rendu par le Juge aux Affaires Familiales de DOUAI qui a :
- prononcé le divorce aux torts de l'épouse
- condamné MadameJosée X... aux dépens.
Dans ses conclusions récapitulatives signifiées le 16 juin 2004, Madame Josée X... demande à la Cour :
- au principal, de dire n'y avoir lieu à révoquer le jugement de sursis à statuer en date du 12 novembre 2001 et de commettre Monsieur le Président de la Chambre des Notaires pour élaborer un acte notarié réglant les rapports patrimoniaux des époux ;
- subsidiairement :
* de prononcer le divorce aux torts exclusifs du mari
* de le condamner au paiement de la somme de 100.000 Euros à titre de dommages-intérêts
* de le condamner au paiement d'une prestation compensatoire en capital de 100.000 Euros
* de le condamner au paiement de la somme de 2.000 Euros par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
* de le condamner aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SCP MASUREL-THERY-LAURENT.
Dans ses conclusions signifiées le 16 avril 2004, Monsieur Yves Y... sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qui concerne le prononcé du divorce aux torts exclusifs de l'épouse.
Formant appel incident, il demande à la Cour de condamner Madame Josée X... à lui payer 30.500 Euros à titre de
dommages-intérêts sur le fondement des articles 266 et 1382 du code civil, outre 2.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Il sollicite enfin sa condamnation aux dépens dont distraction au profit de la SCP CARLIER REGNIER.
MOTIFS ;
1) Sur l'exception de procédure :
Madame Josée X... soutient que le premier juge ne pouvait révoquer le sursis à statuer au fond, et qu'il aurait appartenu à Monsieur Yves Y... de frapper d'appel la décision du 12 novembre 2002 en saisissant le Premier Président de la Cour d'appel d'une autorisation à cette fin.
La Cour constate que dans son jugement du 12 novembre 2002 non frappé d'appel, le Juge aux Affaires Familiales a, sur la demande conjointe des parties, sursis à statuer dans la procédure de divorce à ce qu'elles élaborent un acte notarié réglant leurs rapports patrimoniaux.
Il n'est pas contesté que Maître PIETTRE, notaire choisi par les parties, a refusé de poursuivre sa mission (lettre du 24 octobre 2001) et que ni le mari ni la femme n'ont saisi un autre Notaire.
Ces seules circonstances justifient qu'en application de l'article 379 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile, le Juge aux Affaires Familiales ait décidé de révoquer le sursis et de statuer sur le fond du divorce alors qu'aucune obligation légale n'impose l'établissement d'un acte liquidatif de communauté avant le prononcé de la dissolution du lien conjugal.
2) Sur les demandes en divorce :
Madame Josée X... fait grief au mari d'avoir quitté le domicile conjugal courant 1997 pour rejoindre sa maîtresse.
La réalité de cette relation extra-conjugale, à tout le moins à compter du 25 mai 1998, est suffisamment démontrée par la production
aux débats d'un contrat de bail établi à cette même date pour un logement sis à FLINES LEZ RACHES au profit de Monsieur Yves Y... et de Madame Annie B...
Monsieur Yves Y... ne justifie par aucune preuve de ce que les époux auraient décidé de se séparer d'un commun accord en 1997.
Le départ du domicile conjugal et la naissance de la relation extra-conjugale sont antérieurs à l'ordonnance de non conciliation du 3 octobre 2000 et constituent, à une époque où le mari était toujours tenu au devoir de fidélité, une violation grave et renouvelée des obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune.
Monsieur Yves Y... fait grief à l'épouse d'avoir noué une relation amoureuse avec Monsieur C... à la même époque que celle où lui-même s'est installé avec Madame B...
La réalité d'une liaison extra-conjugale de l'épouse est démontrée par le constat d'adultère établi par Huissier le 2 février 2001. Interrogé par cet auxiliaire de justice, Monsieur C... a reconnu connaître Madame Josée X... depuis 1998.
Il est ainsi suffisamment établi que l'épouse, tout comme le mari, s'est cru autorisée à se départir de son obligation de fidélité.
La concordance des dates à laquelle cette violation d'un devoir essentiel du mariage est intervenue de la part de chacun des époux justifie que le divorce soit prononcé à leurs torts partagés.
Le jugement déféré sera donc réformé en ce sens.
3) Sur les demandes de dommages-intérêts :
Chacun des époux ayant contribué par sa propre faute à la ruine définitive du lien conjugal, il y a lieu de les débouter de leurs demandes respectives de dommages-intérêts sur le fondement tant de l'article 1382 du code civil que de l'article 266 du code civil.
4) Sur la prestation compensatoire :
Chacun des époux a fourni la déclaration sur l'honneur prévue à l'article 271 du code civil.
Le mariage aura duré 37 ans dont 33 ans de vie commune et deux enfants aujourd'hui majeurs et indépendants sont issus de l'union.
Madame Josée X... est âgée de 56 ans.
Ses ressources actuelles s'élèvent à 1.212,62 Euros par mois et ses droits prévisibles en matière de pension de retraite, alors qu'elle indique n'avoir jamais cessé de travailler du temps de la vie commune, sont de 1.149;35 Euros par mois.
Monsieur Yves Y... est âgé de 58 ans.
Il bénéficie d'une pension d'invalidité de 1.077 Euros par mois.
Le couple est très endetté. Monsieur Yves Y... justifie de quatre condamnations solidaires avec l'épouse auprès de SOFINCO pour 16.250,54 Euros et de 11.295,37 Euros auprès de SOGEFINANCEMENT, de 5.403,54 Euros auprès de la B.N.P. Il justifie par ailleurs d'une assignation en paiement de la somme de 23.709,77 Euros émanant de la Société Générale.
L'actif de communauté se compose essentiellement de l'immeuble dans lequel demeure à ce jour l'épouse et évalué entre 129.581 Euros et 137.204 Euros (occupation à titre gratuit en vertu d'un arrêt de la Cour de ce siège en date du 30 avril 2003).
Au vu des éléments analysés ci-dessus, la Cour estime qu'il n'est nullement établi que la rupture du mariage va créer au détriment de la femme une disparité dans les conditions de vie respectives ;
Il convient donc de débouter la femme de sa demande de prestation compensatoire.
5) Sur les dépens et l'article 700 du nouveau code de procédure civile :
Le divorce étant prononcé aux torts partagés des époux, chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens.
L'équité ne commande pas, en outre, de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au bénéfice de l'une ou de l'autre.
PAR CES MOTIFS ;
Confirme la décision déférée en ce qu'elle a prononcé le divorce des époux avec toutes ses conséquences de droit quant à la publicité et à la liquidation des droits matrimoniaux des époux ;
La réformant quant à l'attribution des torts ;
Dit que le divorce est prononcé aux torts partagés des époux ;
Déboute chacune des parties de leurs plus amples demandes ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens engagés tant en première instance qu'en cause d'appel.
Le Greffier
Le Président
C. A...
P. CHARBONNIER