COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 02/02/2006 * * * No RG : 05/04180 - 05/ 04517 - 05/04837 (jonction) Tribunal de Commerce de ROUBAIX TOURCOING du 22 Juin 2005 REF : TF/CP
PROCÉDURE No 05/04180
APPELANTE S.A. SUPERTAPE FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social Zone Industrielle Les Pierres 28130 MAINTENON Représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour Assistée de Maître DESURMONT Christophe, Avocat au barreau de LILLE
INTIMÉES S.A.S. UNITED BISCUITS INDUSTRIES prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social rue Bellevue 59850 NIEPPE Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assistée de la SCP WILINSKY du barreau de PARIS S.A.R.L. EUROPÉENNE D'EMBALLAGES prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 2 rue Diderot 59100 ROUBAIX Représentée par Me QUIGNON, avoué à la Cour Assistée de Maître POLLET substituant Maître BONDUE, Avocat au barreau de LILLE S.A. AGF IART prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 87 Richelieu 75002 PARIS Représentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour Assistée de Maître LE COFFRE, Avocat au barreau de PARIS Société SUPERTAPE BV prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social Bijverheldsweg 35 P.O. 14 - 4870 AA ETTEN LEUR PAYS BAS Représentée par la SELARL ERIC LAFORCE, avoués à la Cour Assistée de Maître SCHILLINGS Marinka, Avocate au barreau de PARIS
PROCÉDURE No 05/04517
APPELANTE : Société SUPERTAPE BV prise en la personne de ses représentants légaux idem voir ci dessus
INTIMES : S.A.S. UNITED BISCUITS INDUSTRIES prise en la personne de ses représentants légaux S.A. SUPERTAPE FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux
PROCÉDURE No 05/04837
APPELANTE : S.A.S. UNITED BISCUITS INDUSTRIES prise en la personne de ses représentants légaux idem voir ci dessus
INTIMES : SARL L'EUROPÉENNE D'EMBALLAGES représentée par ses dirigeants légaux idem voir ci dessus S.A. ASSURANCES GÉNÉRALES DE FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux idem voir ci dessus
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ M. FOSSIER, Président de chambre M. ZANATTA, Conseiller M. REBOUL, Conseiller
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme NOLIN
DÉBATS à l'audience publique du 08 Décembre 2005, Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 2 Février 2006 (date indiquée à l'issue des débats) par Monsieur FOSSIER, Président, et Mme NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La société par actions simplifiée UNITED BISCUITS INDUSTRIES (ci-après U.B.I.), fabricante des biscuits Delacre, a passé commande à la SARL EUROPENNE D'EMBALLAGES (ci-après L'Européenne) de bobines de ruban adhésif destiné au conditionnement de la production. L'Européenne a passé commande à la société anonyme SUPERTAPE FRANCE (ci-après S.France), qui s'est à son tour adressée à la société de droit néerlandais SUPERTAPE B.V. (Ci-après S.NL).
Le ruban, livré et facturé le 31 mai 2000, n'ayant pas donné satisfaction aux dires d'U.B.I. ou d'un de ses clients, cette société a obtenu en référé, tant contre L'Européenne que contre S.France, la désignation d'un expert. S.France avait fait appeler S.NL en garantie.
L'expert a déposé son rapport le 28 juillet 2003. Le 28 octobre suivant, S.NL a assigné S.France devant le Tribunal de Breda (NL) en jugement déclaratif sur les conditions de la garantie de la seconde par la première. Le 17 décembre suivant, U.B.I. a assigné L'Européenne, les A.G.F. -assureur de L'Européenne-, S.France au fond devant le Tribunal de commerce de Roubaix-et-Tourcoing pour obtenir une condamnation solidaire entre toutes à hauteur de 1.143.384 euros. Quant à S.NL, elle a fait l'objet à la fois d'une action directe d'U.B.I. solidairement avec les autres défendeurs, et d'une action en garantie de S.France.
Devant les juges français, S.NL, en réclamant la compétence de son juge national, a suggéré le sursis à statuer. Elle a visé ainsi l'article 28 paragraphe 2 du Règlement CE du 22 décembre 2000, selon lequel la juridiction saisie en second lieu peut également se dessaisir à condition que le tribunal premier saisi soit compétent.
Le Tribunal de Breda (NL) a sursis à statuer par jugement du 22 juin 2005, dans l'attente que le juge français : - se prononce sur l'opposabilité à U.B.I. d'une clause d'exclusion de garantie bénéficiant à S.NL dans ses rapports avec S.France ; - détermine s'il estime poursuivre l'instance commencée par voie de référé ou s'il estime être saisi d'une instance indépendante.
Par jugement contradictoire en date du 22 juin 2005, le Tribunal de commerce siégeant à Roubaix-et-Tourcoing : - s'est déclaré compétent pour connaître de l'action diligentée par U.B.I. contre L'Européenne, contre S. France et contre S. NL, - a déclaré recevable l'action en vices cachés d'U.B.I., - a débouté U.B.I. de ses demandes contre l'Européenne et les A.G.F. - mais s'est dit incompétent pour statuer sur l'appel en garantie de S.France contre S.NL. Une expertise complémentaire a été ordonnée avant dire droit sur le litige entre U.B.I. et les deux sociétés Supertape, spécialement pour évaluer l'entier préjudice et faire le compte des parties.
Par jugement du 21 septembre 2005, le Tribunal de Breda (NL)s'est finalement déclaré compétent pour connaître du marché entre S.France et S.NL et en a donné son interprétation. Ce jugement a été frappé d'appel.
La Cour d'appel de Douai est saisie : - d'un contredit de compétence de la SA Supertape-France (dossier no 4256), déclaré irrecevable, au profit de l'appel, par arrêt de la Cour de céans en date de ce jour ; - d'un appel d'U.B.I. (Dossier no 4837), qui demande la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a reconnu la recevabilité de l'action rédhibitoire art.1641 CC), mais l'infirmation en ses énonciations qui mettent L'Européenne hors de cause au motif qu'elle aurait satisfait à son obligation de délivrance conforme de la chose vendue (art.1604) ; l'appelante chiffre à 15.000 euros ses frais irrépétibles de procédure à la charge solidaire de tous ses adversaires ; - d'un appel général de la part de S.France (dossier no 4180), qui demande à la Cour de connaître de l'ensemble du litige, de dire qu'U.B.I. n'a pas agi à bref délai, que subsidiairement S. France ne peut voir sa responsabilité retenue, que très subsidiairement le préjudice d'U.B.I. est limité par une clause des conditions générales de vente, qu'en toute hypothèse S.NL doit garantie pour le tout à S.France ; l'appelante fixe à 10.000 euros ses frais irrépétibles de procédure à charge d'U.B.I., subsidiairement de S.NL ; - d'un appel de S.NL (dossier no 4517) exceptionnellement autorisé par ordonnance du délégué du Premier président en date du 18 juillet 2005, en raison de ce que les premiers juges ont, par motifs décisoires, établi la responsabilité de S.NL. L'appelante demande à la Cour de se déclarer incompétente sur l'appel en garantie formulé par S.France, subsidiairement de dire qu'U.B.I. n'a pas agi à bref délai, qu'en tout cas S.NL ne peut voir sa responsabilité retenue, que très subsidiairement le préjudice d'U.B.I. est à partager par moitié, qu'enfin S.NL ne peut être recherchée au-delà de la limite conventionnelle de sa garantie, soit 742,12 euros ; S.NL fixe à 15.000 euros ses frais irrépétibles de procédure à UBI.
L'EUROPÉENNE demande principalement la confirmation de sa mise hors de cause, subsidiairement la constatation de l'irrecevabilité des actions fondées sur les articles 1604 et 1641 du Code civil, très subsidiairement, la garantie des deux sociétés SUPERTAPE et celle des A.G.F.. L'EUROPÉENNE réclame 5.000 EUROS à U.B.I. pour frais de procédure.
La Compagnie d'assurances A.G.F. a conclu le 7.12.2005 dans le même sens que son assurée l'Européenne, sauf en ce qui concerne ladite assurance. Les AGF rappellent que la garantie souscrite par L'Européenne comporte une limitation à 762.245 euros pour les dommages matériels et 304.8989 euros pour les dommages immatériels, lesquels sont d'ailleurs exclus de la R.C. ; que ces limitations sont opposables aux tiers ; qu'en tout cas, les deux sociétés Supertape devront garantir les AGF des éventuelles condamnations qui interviendraient. Les AGF réclament 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 NCPC.
Selon ce qu'autorise l'article 455 NCPC, il est renvoyé aux dernières écritures des parties pour un exposé détaillé de leurs moyens et argumentations.
Les trois affaires seront jointes, étant connexes.
SUR QUOI LA COUR,
- Sur l'action menée contre L'Européenne et les actions menées contre S.France
1o - Défaut de délivrance de la chose vendue
Attendu que par application de l'article 1603 du Code civil, le vendeur, en l'espèce L'Européenne, a pour obligation principale de délivrer la chose qu'il a vendue;
Attendu qu'il n'est pas dénié que U.B.I. a reçu livraison le 31 mai 2000 du ruban adhésif litigieux ;
Que vainement, U.B.I. prétend, en reprenant les termes d'un arrêt rendu à Rouen en 2003, que la livraison différait, en qualité, en quantité ou en identité d'avec la commande, aucun élément de preuve n'étayant cette affirmation ;
Qu'ainsi les premiers juges en ont à juste titre décidé, résumant leur conception en indiquant que "les défauts déplorés n'étaient décelables ni à la réception ni à la pose et relevaient des compétences techniques exclusives du producteur" ;
Attendu par suite, que les défauts de la chose vendue n'auraient, s'ils ont existé, pas altéré sa nature, mais l'auraient rendue impropre à sa destination normale, en l'occurrence le scellement de boîtes de biscuits de forme octogonale ;
Attendu qu'en pareille hypothèse, la réclamation de l'acquéreur est soumise au régime de l'action en garantie (Com. 31 mai 1994), dont les conditions seront rappelées plus loin par la Cour ;
Que si cette distribution des deux actions en justice a perdu de sa netteté depuis l'irruption de l'action unique pour défaut de conformité (Convention de Vienne du 11 avril 1980 et Code de la consommation, art. L 211-1 suiv., après l'ordonnance du 17 février 2005), il n'apparaît pas û en dehors de ces deux cadres, qui ne concernent pas U.B.I.û que la jurisprudence ait pour le moment permis à l'acheteur de se placer à sa guise, pour les mêmes faits, sur le fondement de l'article 1603 ou sur celui de l'article 1641 du Code civil ;
Attendu que par suite, l'action engagée principalement par U.B.I. au visa exprès de l'article 1604 n'apparaît pas recevable ;
2o - Vices cachés de la chose vendue
Attendu en préalable qu'il faut, conformément à ce qu'attend U.B.I. (Parag. 49 et 50 de ses conclusions) écarter les dispositions conventionnelles qui mettent pratiquement L'Européenne et S.France à l'abri de l'action rédhibitoire ; qu'en effet, une jurisprudence désormais constante épargne les délais excessivement brefs ou les interdictions d'agir à ceux qui, même commerçants, ne sont pas de même spécialité que leur vendeur ; qu'ainsi, le dispositif légal trouve seul à s'appliquer à la cause ;
Attendu qu'aux termes de l'article 1648 du Code civil (dans sa rédaction applicable à la date de la vente litigieuse), l'action résultant de vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un bref délai, suivant la nature des vices rédhibitoires, et l'usage du lieu où la vente a été faite ;
Que cette mention expressis verbis de la nature des vices et de l'usage du lieu, conduit légitimement à estimer que l'action doit être introduite avant que toute vérification, à plus forte raison toute expertise de la chose elle-même, soient devenues illusoires, que de même l'action doit être introduite plus rapidement encore par un commerçant que par un particulier, qu'enfin l'action doit être introduite avant que le préjudice ne devienne considérable, pour ne pas dire démesuré par rapport au prix de la vente ;
Attendu qu'il faut encore rappeler que le point de départ du bref délai est fixé par la jurisprudence (et sera fixée par la loi pour les ventes postérieures à celle qui suscite le présent litige), non point au jour de la livraison mais au jour de la découverte du vice, dans son principe et dans sa gravité, sinon dans toutes ses causes et conséquences ;
Que ce point de départ peut être reporté, selon les arrêts de cours d'appel cités par U.B.I. et quelques autres décisions similaires, jusqu'à l'achèvement de pourparlers, à la condition qu'ils soient effectifs, c'est-à -dire qu'ils réunissent toutes les parties concernées et ne se limitent pas à quelqu' échange de lettre ou à une offre manifestement démesurée d'une part ou dérisoire de l'autre part ; qu'il revient à l'acheteur qui demande le report du délai, sinon d'engager ces pourparlers, en tout cas de démontrer qu'ils ont eu lieu ;
Qu'enfin, l'interprétation de la loi se fait, dans le doute, contre l'acheteur et au profit du vendeur ; qu'en effet, le bref délai est
une exigence d'autant plus forte qu'il suffit d'une assignation en référé pour l'interrompre et pour que la prescription trentenaire reprenne son empire ;
Attendu qu'en l'espèce, U.B.I. a eu connaissance d'un vice par son client américain, réceptionnaire des boîtes de biscuits mal fermées, le 17 août 2000
Attendu qu'en l'espèce, U.B.I. a eu connaissance d'un vice par son client américain, réceptionnaire des boîtes de biscuits mal fermées, le 17 août 2000 ; que son action en justice est intervenue dix-neuf mois plus tard ;
Qu'il faut relever qu'entre ces deux dates, U.B.I. a procédé à une dénonciation formelle de sa déconvenue, le 11 janvier 2001 et a fait procéder à des vérifications sur place par le Laboratoire National d'Essais le 12 mars 2001, démontrant ainsi qu'elle avait acquis une très exacte connaissance du vice qui affectait le ruban adhésif ; qu'à cette date au plus tard, le bref délai a commencé à courir, pour s'achever treize mois plus tard par l'assignation en référé ;
Que nonobstant cette connaissance complète du vice dans son principe et sa gravité, U.B.I. n'a pas tenu compte, au rebours de ce que son habitude des affaires de haut niveau aurait dû lui commander, du besoin urgent de ne pas laisser dépérir les preuves et augmenter son préjudice :
Que précisément, U.B.I. s'en est remis à la volonté, bonne ou mauvaise de ses cocontractants ou garants ; qu'elle n'a provoqué ni constat contradictoire, ni tentative d'arbitrage, ni expertise véritable et approfondie ; qu'il en résulte que les bases du travail de l'expert judiciaire désigné en 2003 sont totalement contestées par L'Européenne et par les sociétés Supertape, au point que la désignation même du vice û problème d'étiquetage ou problème d'adhésif û divise sérieusement les parties ;
Que s'agissant d'éventuels pourparlers effectifs, U.B.I. a attendu une offre transactionnelle de S.NL, qu'elle a rejeté sans faire de contre-proposition, en novembre 2001 ; qu'il n'est pas permis de dire que les quatre parties concernées, outre l'assureur A.G.F., ont été amenées à discuter concrètement d'une issue non judiciaire ;
Attendu que du rapprochement des principes juridiques sus-énoncés et des circonstances de fait ensuite rappelées, il s'évince qu'U.B.I. n'a pas eu une attitude différente de ce qu'aurait été celle du titulaire d'une action se prescrivant selon le droit commun ; qu'elle a ainsi pris le risque de se voir opposer le bref délai de l'article 1648 ; que partant, son action sur le fondement de l'article 1641 est tardive ; - Sur les actions menées contre S.NL
Attendu que S.NL fait l'objet d'appels en garantie diligentés par S.France et L'Européenne, de demandes accessoires (dépens et frais irrépétibles) de S.France, et U.B.I. et d'une action directe menée par U.B.I ;
Attendu que pour examiner ces diverses demandes, éventuellement même pour les dire sans objet ou infondées en considération des autres chefs du présent arrêt, seul le juge néerlandais est compétent ;
Attendu en effet, et s'agissant des demandes de S. France, que cette société est liée avec S.NL par une clause élective de compétence des juridictions des Pays-Bas ;
Qu'il n'est pas sérieusement soutenu que cette clause serait nulle ; qu'elle est d'ailleurs conforme à l'article 5-1-a du Règlement (CE) no 44.001 du 22 décembre 2000, par application duquel il faut désigner en matière contractuelle le lieu de la fabrication du produit litigieux ;
Attendu que de même, s'agissant des demandes de L'Européenne et de U.B.I. contre S.NL, ces demandes ne procèdent pas d'une prétendue "chaîne de contrats", notion dont le droit des communautés européennes n'admet (CJCE, 17 juin 1992, Jacob-Handte - Civ.1o, 6 juill. 1999) ni le principe ni les effets que lui confère la jurisprudence française ;
Qu'au contraire, dans le champ du droit communautaire, les rapports entre L'Européenne ou U.B.I. et S.NL sont nécessairement délictuels ; Qu'en ce cas, et conformément à l'article 5-3 du Règlement susvisé tel qu'interprété par la CJCE (notamm., 30 nov. 197, Mines-de-potasse d'Alsace), le demandeur dispose d'une option entre le lieu où le dommage s'est produit et le lieu de l'événement causal, outre le critère fondamental du domicile du défendeur (art. 2 du Règlement) ; que si le lieu de concrétisation du dommage est extérieur à la Communauté, alors le demandeur devra choisir entre le lieu du fait générateur, en l'occurrence de fabrication du produit défectueux (ici, les Pays-Bas) ou le domicile du défendeur (également les Pays-Bas) ;
Qu'en l'espèce, le lieu de réalisation du dommage a été les Etats-Unis ; qu'il résulte en effet du déroulement des faits de la cause, que seules les boîtes de biscuits livrés en Amérique ont présenté les prétendus problèmes d'étanchéité ; qu'en outre, l'expert désigné en 2003 est loin d'exclure que les mouvements forts en transport maritime, ou encore l'ambiance saline, aient pu être un des éléments, non seulement révélateur, mais même constitutif du dommage invoqué par U.B.I. ;
Que par suite, U.B.I. ne pouvait invoquer la compétence inhérente au lieu d'utilisation du produit défectueux et devait opter entre le lieu de fabrication ou le lieu de complète réalisation du dommage ;
Attendu qu'il n'est fait exception à ces règles que si l'action en justice comportant l'élément d'extranéité est connexe à une action déjà engagée devant une juridiction d'un Etat membre ; qu'en dispose ainsi l'article 28 du Règlement du 22 décembre 2000 ;
Qu'en l'espèce, la connexité n'est invoquée par les parties au présent procès, qu'en se fondant sur les chaînes de contrat, théorie dont il a été dit qu'elle n'était pas reçue en dehors de France et ne peut donc servir à résoudre un conflit de droit international ;
Qu'en toute hypothèse et pour dépasser le terrain sur lequel les parties se sont opposées, il n'apparaît pas que la solution que donneraient les juges néerlandais si les parties persévéraient devant eux, risquerait de contredire les termes du présent arrêt ; que la Cour de Douai est saisie de l'existence d'un préjudice contractuel et du droit ou pas d'en obtenir réparation par l'effet de contrats, alors que le tribunal de Breda et sa juridiction d'appel sont saisis des moyens de faire peser cette éventuelle réparation sur une société néerlandaise, ce qui ne remettra pas en cause les appréciations des juges français sur ladite réparation, ou bien sont ou seront saisis d'une action de fondement délictuel, dont les juges français n'ont pas eu à connaître ;
Attendu que du tout il résulte que, les juridictions néerlandaises étant seules compétentes pour examiner toutes les demandes dirigées contre S.NL, les premiers juges devaient décliner leur propre compétence et non point surseoir ni a fortiori trancher ; - Accessoires
Attendu que, succombant sur l'essentiel du principal, la société U.B.I. supportera la charge des dépens du présent appel ;
Attendu que la partie condamnée aux dépens indemnisera en outre ses adversaires par application de l'article 700 NCPC, à hauteur de 3.000 EUROS CHACUN ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, en dernier ressort, Ordonne la jonction des dossiers numéros 4837, 4180 et 4517 de l'année 2005; Confirme le jugement rendu le 22 juin 2005 par le Tribunal de commerce de Roubaix-et-Tourcoing, en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action engagée par U.B.I. sur le fondement de l'article 1604 du Code civil ; et en ce que les premiers juges se sont déclarés incompétents au profit des juridictions néerlandaises, pour connaître de l'action en garantie diligentée par la société SUPERTAPE FRANCE contre la société de droit néerlandais SUPERTAPE N.L. B.V. ; Infirme le jugement pour le surplus et statuant à nouveau, Déclare irrecevable comme tardive l'action engagée par U.B.I. contre les sociétés L'Européenne d'Emballages, les Assurances Générales de France (branche IART) et la S.A.S. United Biscuits Industries, sur le fondement de l'article 1641 du Code civil ; Se déclare incompétent pour connaître des demandes dirigées contre la société de droit néerlandais SUPERTAPE B.V. et renvoie les parties à se pourvoir comme elles aviseront ; Condamne la S.A.S. UNITED BISCUITS INDUSTRIES à payer les dépens d'appel, outre la somme de 3.000 (trois mille) euros par application de l'article 700 NCPC à chacun de ses adversaires :
SUPERTAPE BV, SA SUPERTAPE FRANCE, SARL EUROPENNE D EMBALLAGES et LES ASSURANCES GÉNÉRALES DE FRANCE ; Accorde aux avoués constitués, le bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIER
LE PRÉSIDENT
C . Nolin
T. Fossier