COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 07/06/2010
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N° de MINUTE :
N° RG : 09/00213
Jugement (N° 07/573)
rendu le 14 Novembre 2008
par le Tribunal de Grande Instance de SAINT OMER
REF : MM/AMD
APPELANT
Monsieur [K] [O]
né le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 10]
demeurant [Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par la SCP COCHEME-KRAUT-LABADIE, avoués à la Cour
Assisté de Maître Patrick DELCROIX, avocat au barreau de LILLE
INTIMÉE
S.A.S. CLINIQUE DE [Localité 9]
ayant son siège social [Adresse 5]
[Adresse 6]
[Localité 4]
Représentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour
Assistée de Maître Anne-Sophie MOULIN, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Evelyne MERFELD, Président de chambre
Monique MARCHAND, Conseiller
Pascale METTEAU, Conseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Nicole HERMANT
DÉBATS à l'audience publique du 19 Avril 2010 après rapport oral de l'affaire par Evelyne MERFELD
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 07 Juin 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Evelyne MERFELD, Président, et Nicole HERMANT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 02 février 2010
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Monsieur [K] [O] est docteur en médecine, spécialisé en oto-rhino-laryngologie.
Il a progressivement orienté son activité vers la chirurgie plastique qu'il pratiquait à raison d'une journée par semaine au sein de la SAS CLINIQUE DE SAINT OMER dans le cadre d'un contrat d'exercice verbal à durée indéterminée conclu dans le courant de l'année 1985.
Le18 janvier 2007, la Clinique lui adressait une lettre libellée ainsi qu'il suit :
« Nous venons de recevoir deux courrier des quatre anesthésistes de la clinique de [Localité 9] relatif à votre activité au sein de notre établissement et dénonçant à votre encontre certains événements.
Ceux-ci mettent en exergue des dysfonctionnements graves et répétés de votre activité chirurgicale mettant notamment en danger les patients que nous accueillons et ne respectant pas les règles et obligations tant légales que déontologiques.
Ils précisent qu'ils « déclinent toute responsabilité quant aux conséquences catastrophiques que cette situation induira inéluctablement » et ne veulent plus assurer l'anesthésie de vos patients.
De ce fait et en raison de la gravité des faits exposés, nous vous demandons de suspendre immédiatement toutes vos interventions chirurgicales (avec anesthésie générale ou anesthésie locale et de quelque nature que ce soit) au sein de la clinique de [Localité 9], de prendre toutes les mesures nécessaires auprès de vos patients et de nous excuser des désagréments qui pourront leur être occasionnés du fait de ce changement.
Nous avons demandé au Dr [A], président du conseil de bloc, de bien vouloir
organiser une réunion au plus vite, soit le mercredi 21 janvier 2007 à 19 heures, avec les anesthésistes, la direction, le président de CME et la chef de bloc.
Cette rencontre permettra de solutionner définitivement l'ensemble des différents éléments exposés en vue de rétablir une activité chirurgicale garantissant une prise en charge optimale des patients conforme aux dispositions textuelles. »
Monsieur [K] [O] avait pour sa part expédié le 17 janvier 2007 deux lettres très circonstanciées datées des 5 et 6 janvier 2007 aux termes desquelles il relatait divers incidents survenus à l'occasion d'interventions pratiquées au bloc opératoire, dont il imputait la responsabilité aux anesthésistes, les docteurs [C], [H], [P] et [R]. Il y mettait en exergue le climat très conflictuel régnant entre lui et les quatre médecins auxquels il reprochait notamment de solliciter auprès de ses patients le versement d'honoraires particulièrement élevés.
La réception de ce courrier était suivie d'un abondant échange de correspondance entre le médecin et la clinique.
Le 24 janvier 2007, le directeur de la clinique répondait à Monsieur [K] [O] en ces termes :
« Suite aux différents courriers des anesthésistes à votre encontre et l'obligation pour la direction de la clinique de [Localité 9] de garantir une prise en charge optimum des patients, nous avons été contraints de prendre des mesures conservatoires vous demandant de reporter vos interventions du vendredi 19 janvier 2007 (cf notre fax et lettre du 18 janvier 2007).
Par retour de fax, vous me faites part de votre ressenti, en accusant ouvertement les anesthésistes d'un manquement grave à l'éthique médicale.
Je souhaite avant tout vous rappeler votre obligation de signalement auprès de la direction de l'établissement de tous dysfonctionnements.
Nous avions souhaité organiser une réunion ce mercredi 24 janvier avec l'ensemble des protagonistes (cf notre lettre du 18 janvier 2007) afin de régler directement et définitivement l'ensemble des difficultés relevées et de réinstaurer toutes les conditions devant caractériser l'activité de la clinique de [Localité 9].
En raison des nouveaux éléments venant d'être portés à notre connaissance (cf. vos deux lettres du 18 et 19 janvier 2007), nous demandons la réunion d'une CME exceptionnelle afin de solutionner l'ensemble des difficultés caractérisant actuellement l'activité de la chirurgie reconstructrice, plastique et esthétique de notre établissement.
Par conséquent je vous renouvelle ma demande concernant la suspension de vos interventions des vendredis jusqu'à là réunion de cette CME exceptionnelle et l'adoption de mesures définitives. »
Par lettre du 2 février 2007, Monsieur [K] [O] exposait qu'il ne pourrait reprendre son activité que si des garanties lui étaient données.
Il indiquait notamment : « En premier lieu, je ne puis continues à accepter de travailler en équipe avec les anesthésistes de la clinique de [Localité 9] s'ils exigent de mes patients la reconnaissance écrite et préalable que les interventions que je leur propose de réaliser à la clinique relèvent de la chirurgie esthétique, alors qu'elles relèvent toutes de la chirurgie réparatrice et sont prises en charge à ce titre par la sécurité sociale.
En second lieu, je veux avoir l'assurance que la clinique accepte le principe de me dédommager pour les multiples désagréments occasionnés par cette suspension de mon activité qu'elle m'a imposée unilatéralement.
Enfin, je voudrais qu'il me soit donné, par la clinique, la garantie d'une part que je pourrai toujours compter sur l'équipe d'anesthésistes de la clinique pour accompagner les interventions que la bonne pratique médicale impose, et la garantie d'autre part que la sécurité et l'asepsie de mes patients ne seront plus compromises lorsque survient un différend comme cela est arrivé ces dernières semaines avec le Dr [B] [P]. »
Une conférence médicale exceptionnelle était organisée le 5 février 2007, au cours de laquelle une charte de conciliation était soumise à la signature de Monsieur [K] [O].
A l'issue de cette réunion, aucun accord ne se dégageait entre les parties.
Par lettre du 6 février 2007, le directeur de la Clinique et le docteur [S], président de « la CME » écrivaient à Monsieur [K] [O] :
« Nous faisons suite à votre lettre du 2 courant reçue ce jour par notre établissement et relative à la réunion de la CME programmée ce lundi 5 février 2007 à 19 heures.
Nous avons été surpris et désolés de votre refus de signer la charte de conciliation proposée lors de la CME extraordinaire du lundi 5 février 2007. Cette charte, reconnue et acceptée par vos pairs au sein de la clinique, n'avait que pour but le respect de l'ensemble des normes conformes à la réglementation en vigueur.
De ce fait la CME reconduit à titre conservatoire votre interdiction d'exercer au sein de la clinique de [Localité 9] l'activité de chirurgie O.R.L. et de chirurgie plastique et reconstructrice jusqu'obtention d'un accord amiable.
Nonobstant les faits ci-dessus, suite à votre demande d'indemnisation, nous vous précisons une nouvelle fois que notre démarche du report de vos interventions constituait une mesure conservatoire face à l'impossibilité pour la direction de l'établissement de garantir le respect de l'ensemble de ses obligations en matière notamment de prise en charge conforme aux textes en vigueur. »
Aux termes d'un courrier en date du 9 février 2007, le conseil de Monsieur [K] [O] indiquait au directeur de la clinique que la charte de conciliation qu'il avait préparée unilatéralement était inacceptable en l'état dès lors que seul son client était tenu à un engagement.
Il soulignait en outre que ce document n'apportait aucune garantie au médecin et qu'il ne précisait pas comment l'établissement dédommagerait ce dernier du préjudice subi en raison de la suspension d'exercice qui lui avait été imposée.
Il relevait enfin que la charte ne précisait pas clairement quand et dans quelles conditions la conférence médicale autoriserait Monsieur [K] [O] à reprendre son activité au sein de la clinique. Il présentait en conséquence un contre-projet de charte que son client serait en mesure d'accepter.
*****
Par exploit d'huissier du 10 mai 2007, Monsieur [K] [O] a fait assigner la Clinique devant le tribunal de grande instance de [Localité 9], afin de voir constater la rupture de la convention d'exercice verbal aux torts et griefs de la défenderesse et de solliciter la condamnation de celle-ci à réparer l'entier préjudice qu'il prétendait avoir subi en raison de la rupture brutale et abusive de ladite convention.
Par jugement en date du 14 novembre 2008, le tribunal a :
- débouté Monsieur [K] [O] de sa demande tendant à voir déclarer la clinique responsable de la rupture de la convention d'exercice les liant ;
- débouté en conséquence Monsieur [K] [O] de ses demandes indemnitaires ;
- condamné ce dernier à payer à la Clinique la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;
- condamné Monsieur [K] [O] aux dépens.
Par déclaration en date du 13 janvier 2009, Monsieur [K] [O] a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions déposées le 22 octobre 2009, il demande à la cour :
vu les articles 1134, 1135, 1142 et suivants du code civil,
- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et, statuant à nouveau;
- de constater la rupture de la convention d'exercice verbal à durée indéterminée conclue entre les parties aux torts et griefs de la Clinique ;
- de condamner cette dernière à réparer l'entier préjudice subi par lui en raison de la rupture brutale et abusive de ladite convention ;
- avant dire droit sur le quantum de ce préjudice, d'ordonner une mesure d'expertise confiée à un expert-comptable celui-ci ayant pour mission de rechercher et de chiffrer le montant des honoraires versés au concluant pour son activité chirurgicale à la clinique au cours de ses trois dernières années d'activité dans cet établissement, tous les éléments de la perte subie par ce dernier ainsi que le manque à gagner du fait de la résiliation de la convention d'exercice intervenue sans le moindre préavis ;
et, dans l'attente du rapport d'expertise :
- de condamner la Clinique à lui payer une indemnité provisionnelle de 123.000 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ainsi qu'une indemnité provisionnelle de 100.000 € en réparation des préjudices annexes (préjudice économique à venir du fait de la perte de clientèle, préjudice matériel du fait du déménagement, préjudice moral, atteinte à la réputation professionnelle notamment) ;
- de débouter la Clinique de toutes ses demandes ;
- de la condamner à lui payer une indemnité de 6.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- de la condamner aux dépens.
Il expose qu'il n'a eu, au sein de la Clinique de [Localité 9], qu'une activité de chirurgie plastique reconstructrice, cet établissement n'étant pas assuré pour la pratique de la chirurgie à visée uniquement esthétique, activité qu'il n'exerçait qu'à la Clinique [8] à [Localité 7].
Il précise qu'à compter de janvier 2005, ses relations avec l'équipe des quatre anesthésistes, qui bénéficiaient d'un contrat d'exclusivité avec la Clinique, se sont dégradées; que les activités de chirurgie plastique reconstructrice s'avérant parfois assez longues, elles n'étaient pas appréciées par les intéressés car seul l'un d'eux, le docteur [R], était « en secteur 2 conventionné » et pouvait en conséquence fixer librement ses honoraires.
Il prétend :
- que les docteurs [C], [H], [P] et [R] ont alors imaginé de requalifier les actes de chirurgie plastique reconstructive qu'il effectuait en acte de chirurgie esthétique ou de chirurgie plastique non reconstructive, à seule fin de réclamer aux patients des honoraires importants classifiés « hors nomenclature » et par conséquent non remboursés par la sécurité sociale ;
- qu'il a dénoncé cette pratique frauduleuse, menée de surcroît sans tact ni mesure ;
- que les quatre anesthésistes ainsi mis en cause ont alors tout entrepris pour le mettre en défaut en vue d'obtenir son éviction de la clinique ;
- qu'ils ont ainsi refusé de prendre en charge une partie de ses programmes opératoires ; que le docteur [P] a en outre fait délibérément courir des risques graves à deux de ses patients en refusant que les mesures d'asepsies les plus élémentaires soient prises à l'égard des fixations de l'intubation présente directement dans le champ opératoire ;
- qu'informés de son intention de dénoncer ces faits, les anesthésistes ont cherché « à le prendre de vitesse » ;
- qu'ils ont ainsi adressé deux courriers calomnieux à la direction de la Clinique et au président des instances médicales de l'établissement ;
- qu'alors qu'aucune plainte d'un patient à son encontre n'avait jamais été enregistrée et que la clinique n'avait jamais reçu de contestation de la part des organismes de sécurité sociale, s'agissant de la prise en charge de ses honoraires, le directeur de l'établissement a pris fait et cause pour les anesthésistes, sans chercher à l'entendre, ni à s'assurer de la continuité de soins à assurer aux patients.
Il fait valoir :
- que tenue d'une obligation de loyauté dans l'exécution de la convention d'exercice qui les liait depuis près de 22 ans, la direction de la clinique ne pouvait reconduire la mesure de suspension qui lui avait été notifiée le 18 janvier 2007 sans avoir au préalable vérifié si les griefs formulés par les anesthésistes étaient avérés ;
- qu'à ce jour, la clinique est toujours dans l'incapacité de démontrer la réalité de ces griefs alors qu'il rapporte quant à lui la preuve de la pratique affairiste des anesthésistes, contraire à l'éthique médicale et aux dispositions de l'article R 4127-53 du code de la santé publique et de l'article 4.3e de l'arrêté du 3 février 2005 portant approbation de la convention nationale des médecins généralistes et médecins spécialistes, qui rappellent que les honoraires doivent toujours être sollicités avec tact et mesure ;
- que la charte qui lui a été proposée contenait des dispositions que l'ordre des médecins a considéré comme critiquables.
Il soutient :
- que dans un contrat à durée indéterminée, à exécution successive, la résiliation unilatérale est, sauf abus sanctionné par l'article 1134 alinéa 3 du code civil, offerte aux deux parties ;
- que si la clinique disposait en conséquence du droit de rompre la convention d'exercice, elle ne pouvait cependant le faire sans respecter le préavis d'usage en l'absence de toute faute grave ;
- qu'il apparaît cependant que l'intimée a résilié la convention d'exercice de manière soudaine, brutale, sans préavis et en l'absence de toute faute grave ;
- que l'abus de droit est caractérisé par la suspension du contrat, décidée unilatéralement avec un effet immédiat, sans que cette mesure ait été précédée d'un quelconque avertissement ou d'une mise en garde pour manquement à une obligation, sans qu'il ait été mis en mesure de s'expliquer sur les allégations fallacieuses formulées à son encontre par les anesthésistes et sans qu'il ait été procédé à de quelconques vérifications sur leur bien-fondé ;
- que s'il est vrai que les établissements doivent désormais garantir la qualité des soins et la sécurité des patients et veiller à la mise en place et au respect des procédures de lutte contre les infections nosocomiales, cette obligation pèse de la même manière sur les praticiens en charge des patients ;
- que cette obligation solidaire ne dispense pas les établissements d'agir avec discernement, réflexion et prudence ;
- que si la cour venait à considérer que dans un premier temps, la mesure de suspension pouvait être légitime, il n'en demeure pas moins que la clinique se devait, si elle maintenait sa décision d'interdire toute activité chirurgicale au concluant, de s'engager dans une procédure de résiliation de la convention d'exercice en saisissant le tribunal de grande instance de [Localité 9] ;
- que le refus de la clinique de répondre à la lettre qui lui avait été adressée par le conseil du concluant le 9 février 2007 et son absence de toute offre de reprise de contact démontrent que sa réelle volonté était de mettre un terme au contrat d'exercice sans régler une quelconque somme au titre d'un préavis ;
- que la clinique ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une décision prise par la commission médicale d'établissement ; qu'aucun procès-verbal de délibérations n'est en effet versé aux débats ; qu'en toute hypothèse il ne relève pas de la compétence de la conférence de reconduire, ne serait-ce qu'à titre conservatoire, une interdiction d'exercer notifiée à un praticien de l'établissement ;
- que la clinique a cherché à récupérer des journées opératoires pour accueillir des activités médicales spécialisées plus lucratives pour l'établissement que celles du concluant, tout en occupant moins de lit et pour une période moins longue.
S'agissant de l'indemnisation de son préjudice, il expose notamment :
- que la clinique était tenue de respecter un préavis dont la durée, en l'absence de convention écrite, devait se référer aux usages, en application de l'article 1135 du code civil ;
- que la jurisprudence considère comme un usage professionnel la durée de préavis prévue dans le contrat type adopté par l'ordre des médecins, lequel est de deux ans pour une ancienneté au-delà de quinze ans ;
- qu'outre la perte de son chiffre d'affaires lié à son activité au sein de à la clinique, la décision prise par l'intimée a entraîné un bouleversement de l'activité libérale du concluant, de sorte que son préjudice économique est considérable.
Par conclusions déposées le 7 juillet 2009, la SAS Clinique de [Localité 9] demande à la cour :
* à titre principal, de confirmer en toutes ses dispositions la décision entreprise;
* à titre subsidiaire, si la cour considérait que la rupture est imputable à la concluante ;
- de dire que Monsieur [K] [O] ne rapporte pas la preuve de son préjudice ;
- de rejeter la demande d'expertise ;
- de débouter l'appelant de la totalité de ses demandes ;
* en tout état de cause,
- de condamner ce dernier à lui payer la somme de 5.000 € HT au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- de le condamner aux dépens.
Elle expose en premier lieu :
- qu'aux termes des deux courriers qu'ils lui ont adressés le 11 janvier 2007, les anesthésistes ont dénoncé des fautes particulièrement graves commises par Monsieur [K] [O] à l'occasion de son activité chirurgicale, les conduisant à refuser de poursuivre leur collaboration avec ce praticien, ainsi que des agissements frauduleux consistant à pratiquer des actes de chirurgie esthétique, sous couvert d'une activité de chirurgie réparatrice et de facturer pour cette activité des honoraires aux organismes d'assurance maladie ;
- que dès lors qu'elle n'avait pas les autorisations requises et n'avait pas souscrit de contrats d'assurance adaptés, elle ne pouvait autoriser les praticiens à exercer cette activité, sauf à engager sa responsabilité civile et pénale ;
- que compte tenu de la gravité des faits qui lui étaient rapportés, et étant animée du souci de garantir la sécurité des patients, elle a demandé à l'appelant d'interrompre son activité et l'a convoqué en urgence à une réunion de concertation avec les instances médicales de l'établissement ;
- qu'après réception des lettres envoyées par Monsieur [K] [O] et face à la dimension inquiétante prise par le dossier, elle a souhaité recueillir l'avis de la communauté médicale et a organisé en conséquence une conférence médicale extraordinaire, tout en maintenant, dans l'attente de la tenue de cette réunion, sa décision de suspension provisoire de l'activité de Monsieur [K] [O] ;
- que cette conférence avait pour objet de consulter la communauté médicale sur la faculté de laisser Monsieur [K] [O] poursuivre son activité en son sein et de solliciter l'adhésion de ce dernier à une charte de conciliation avec les anesthésistes et l'établissement ;
- qu'une proposition de charte a été remise à tous les médecins en début de réunion ; que ladite charte a fait l'objet d'amendements compte tenu des observations formulées tant par l'appelant que par les anesthésistes ; que Monsieur [K] [O] a néanmoins refusé de donner son accord au document qui lui était soumis ;
- qu'en dépit de l'ensemble des efforts de la concluante et des anesthésistes, qui acceptaient de reprendre la collaboration avec lui, l'appelant a refusé de souscrire aux engagements de qualité qui lui étaient demandés aux termes de la charte ;
- que face à ce comportement la CME a voté à l'unanimité le maintien de la suspension d'activité de Monsieur [K] [O].
Elle fait valoir ensuite :
- que la bonne foi est toujours présumée et que c'est à celui qui invoque un abus dans l'exercice d'un droit d'en rapporter la preuve ;
- que le dol suppose que soient démontrés une intention de nuire, une malveillance ou un mépris volontaire des intérêts du cocontractant ;
- que les évolutions législatives et réglementaires introduites par l'ordonnance du 24 avril 1996 et la loi du 4 mars 2002, tenant à l'information du patient ainsi qu'aux impératifs de qualité médicale, suppose désormais une intervention de la clinique dans le domaine de l'activité des médecins ;
- que chargés de garantir la qualité des soins et la sécurité des patients, de veiller à la mise en place et au respect des procédures de lutte contre les infections nosocomiales, à la gestion des risques médicaux, les établissements de santé ne peuvent en effet se désintéresser des modalités de prise en charge médicale des patients ;
- que ces établissements deviennent garants de la qualité et de la compétence des professionnels qui interviennent en son sein ;
- qu'il importe donc que la concluante puisse suspendre un contrat d'exercice dès lors qu'elle redoute légitimement des dysfonctionnements dans les pratiques médicales ;
- que la suspension d'activité dont l'appelant a fait l'objet ne peut être utilement qualifiée de résiliation de la convention d'exercice verbal ;
- que garante de la sécurité des patients dans le cadre du contrat d'hospitalisation qui la lie aux personnes qu'elle accueille, elle était tenue, au vu de la gravité des faits dénoncés par les anesthésistes, de suspendre l'activité de Monsieur [K] [O] ; qu'à défaut elle se serait rendue coupable d'une grave négligence fautive engageant sa responsabilité civile et pénale ;
- que les anesthésistes venaient en effet de lui notifier leur décision de ne plus collaborer avec l'appelant et qu'elle ne pouvait imposer aux intéressés de poursuivre cette collaboration compte tenu de leur statut libéral et de leur indépendance technique ;
- que les relations professionnelles entre les praticiens exerçant au sein d'une clinique doivent être gouvernées par une entente sans faille dont l'éventuelle disparition autorise l'établissement à prendre toutes les mesures adaptées pour maintenir la sécurité de l'organisation médicale afin de ne pas mettre en danger les patients ;
- que les dépassements d'honoraires demandés par l'appelant à ses patients attestent en outre de la réalité de l'exercice d'une activité de chirurgie esthétique non autorisée dans l'établissement, ce qui était susceptible de nuire au renouvellement du conventionnement avec l'agence nationale d'hospitalisation (article L. 6114-1 et suivants du code de la santé publique) ;
- qu'elle a par conséquent agi avec discernement, réflexions et prudence.
Elle soutient par ailleurs :
- que la mesure de suspension avait pour objectif de préserver la poursuite de la relation contractuelle avec Monsieur [K] [O] ;
- qu'elle a mis en place en urgence une procédure de concertation de l'ensemble des instances médicales de l'établissement ayant l'autorité et la crédibilité nécessaire pour apprécier le comportement professionnel d'un praticien ;
- qu'en refusant de souscrire aux engagements prévus dans la charte de conciliation, l'appelant a lui-même provoqué et entretenu la situation de blocage, empêchant la reprise des relations, alors que la concluante avait effectué toutes les démarches possibles pour tenter de trouver une solution permettant la reprise de la collaboration entre Monsieur [K] [O] et les anesthésistes.
A titre subsidiaire, la Clinique conteste la réalité du préjudice que l'appelant prétend avoir subi.
MOTIFS :
Il est acquis aux débats que la Clinique, tenue de garantir la qualité des soins et la sécurité des patients, doit notamment veiller à la mise en place et au respect des procédures de gestion des risques médicaux.
Il convient notamment de souligner que le contrat d'hospitalisation met à la charge de l'établissement de soins en matière d'infections nosocomiales, une obligation de sécurité de résultat.
Sont versées aux débats les deux lettres qui ont été adressées le 11 janvier 2007 au directeur de clinique par les docteurs [C], [H], [P] et [R].
Le premier de ces courriers est libellé ainsi qu'il suit :
« Les quatre anesthésistes de la clinique tiennent à porter à la connaissance de la gérance de la clinique, de la direction ainsi que les présidences de CME et de conseil du bloc opératoire un certain nombre de faits qui caractérisent la pratique du docteur [O] dans la clinique :
- la survenue répétitive de malaises graves chez des patients opérés sous anesthésie locale, nécessitant l'appel en urgence d'un anesthésiste
- le non-respect évident des posologies d'anesthésiques locaux injectés
- les prescriptions hasardeuses de « cocktails pré chirurgicaux » à ces mêmes patients sans respecter les règles élémentaires d'associations médicamenteuses
- le non-respect des règles de jeûne pour ces mêmes patients opérés sous anesthésie locale, au bloc opératoire
- les difficultés voire l'impossibilité de le joindre pendant les week-ends et jours fériés et son éloignement géographique rendant toute intervention vitale impossible sans aucun autre praticien (capable d'intervenir rapidement) désigné pour lui suppléer
- les complications post opératoires extrêmement sérieuses dont des transfusions post opératoires obligatoires, par deux fois, sur anémie aiguë post chirurgicale
- la continuité des soins pour le moins lacunaire au cours de l'hospitalisation
- la désinformation active systématique de ses patients quant aux risques opératoires, à la durée des interventions, à la douleur
- le non-respect des protocoles et des recommandations en vigueur.
Nous mettons en garde le Dr [O] depuis des années sur ces dérives qui engagent directement notre responsabilité ainsi que celle de la clinique en cas d'incident.
Ce dernier ne semble nullement vouloir se remettre en question : nous n'avons constaté aucun changement, bien au contraire.
Ces faits gravement préoccupants, récurrents et de plus en plus fréquents, sont portés à présent à votre connaissance.
Il va de soi que nous dégageons dès à présent toute responsabilité quant aux conséquences catastrophiques que cette situation induira inéluctablement. Les patients opérés par le Dr [O] sous anesthésie locale relèveront de sa responsabilité et de celle de la clinique exclusivement.
Nous visons l'excellence et la sécurité.
Nous sommes bien conscients que notre contrat nous liant à la clinique nous oblige à fournir l'anesthésie aux praticiens de la clinique, mais certainement pas en bafouant toutes les règles légales et professionnelles de prise en charge.
La collaboration et la confiance minimale nécessaire à la prise en charge normale des patients n'est plus possible.
Nous attendons que la direction, la gérance, le conseil d'administration de la clinique nous communiquent officiellement et rapidement les décisions qu'ils comptent prendre à ce sujet. »
Le second courrier comporte les mentions suivantes :
« Un décret récent (2005) réglemente strictement la chirurgie esthétique dans les établissements de soins.
Comme vous le savez, la clinique de [Localité 9] ne dispose ni des assurances, ni des locaux, ni de l'administration requise pour se conformer aux dispositions légales en matière de chirurgie esthétique.
Le Dr [O] continue malgré cela à pratiquer ce type de chirurgie à la clinique. Il n'y a pas de chirurgie reconstructrice.
Nous aimerions savoir s'il s'agit d'une méconnaissance de cette situation illégale, s'il s'agit d'une attitude permissive délibérée.
De plus et alors qu'il s'agit de chirurgie purement esthétique (les critères sécurité sociale pour leur prise en charge ne sont jamais remplis), il y a facturation de code CCAM, donc prise en charge d'honoraires conventionnels (en sus des dépassements) et des frais de séjour. Ceci est totalement illégal.
Nous avons besoin de connaître la position officielle de la clinique à ce sujet. »
Compte tenu de la gravité des accusations ainsi portées par les anesthésistes à l'encontre de l'appelant et du refus des intéressés de prêter désormais leur concours aux actes chirurgicaux pratiqués par Monsieur [K] [O], la décision prise, à titre conservatoire, par la Clinique de suspendre l'activité de ce dernier au sein de l'établissement dans l'attente de l'adoption en urgence de mesures propres à résoudre le conflit opposant les praticiens, se révèle parfaitement adaptée à la situation de crise à laquelle elle devait faire face dans l'urgence.
La lecture des différentes pièces versées aux débats par les parties révèle que les négociations qui ont été menées au cours de la réunion de la conférence médicale exceptionnelle du 5 janvier 2007, ont permis d'intégrer au projet de charte de conciliation - qui ne comportait à l'origine d'obligations qu'à la charge de Monsieur [K] [O] - la mention de l'engagement des anesthésistes d'assurer la sécurité et la continuité de soins des patients de l'appelant et de calculer avec tact et mesures les dépassements d'honoraires sollicités auprès de ces derniers.
Il apparaît toutefois :
- d'une part qu'aucun accord n'a pu se dégager s'agissant de la demande de Monsieur [K] [O] de 'récupération' des journées opératoires perdues;
- et d'autre part que la mention selon laquelle la durée de validité de la charte était limitée à deux mois a été maintenue dans le document soumis à la signature du praticien, de sorte qu'il n'était offert à ce dernier aucune garantie sur la continuité de son activité à moyen terme au sein de l'établissement.
Il ne peut être fait grief à Monsieur [K] [O] d'avoir refusé de signer ledit document, dès lors que celui-ci n'était pas de nature à protéger suffisamment ses intérêts, ainsi que l'a au demeurant souligné à juste titre le président du conseil départemental de l'ordre des médecins dans ses deux courriers du 22 février 2007.
L'intimée ne verse aux débats aucun écrit au soutien de ses allégations selon lesquelles la conférence médicale exceptionnelle a décidé de reconduire, à titre conservatoire, la suspension d'activité imposée à l'appelant. En tout état de cause, faute de précision sur la composition de ladite conférence et sur les missions qui lui sont imparties , il convient de considérer que celle-ci n'a qu'un rôle purement consultatif, de sorte que la décision litigieuse n'a pu être prise que par les organes directeurs de la Clinique.
Il apparaît en outre que la Clinique n'a pas apporté de réponse au courrier qui lui avait été adressé le 9 février 2007 par le conseil de l'appelant, aux termes duquel Maître [I] formulait une contre proposition de charte.
Il y a lieu par conséquent de constater qu'en réitérant, pour une durée indéterminée, la mesure de suspension d'activité prise à l'encontre de Monsieur [K] [O] et en ne donnant aucune suite au courrier susmentionné, la Clinique a, de fait, pris l'initiative de la rupture des relations contractuelles.
Le jugement déféré sera donc réformé en ce qu'il a débouté Monsieur [K] [O] de sa demande tendant à voir déclarer la clinique responsable de la rupture de la convention d'exercice liant les parties.
Si chacune des parties à un contrat à durée indéterminée dispose, à tout moment, de la faculté de résilier celui-ci de façon unilatérale, cette faculté ne doit toutefois pas s'exercer de façon abusive.
Il s'en déduit que seule l'existence d'une faute grave commise par le cocontractant, peut justifier la rupture du contrat sans préavis.
La Clinique ne verse aux débats aucune pièce lui permettant de démontrer que les accusations portées par les anesthésistes à l'encontre de Monsieur [K] [O] selon lesquelles ce dernier pratiquait au sein de l'établissement des actes de chirurgie esthétique présentés faussement comme des interventions de chirurgie reconstructrice, étaient fondées.
La circonstance que l'intéressé ait pratiqué régulièrement d'importants dépassements d'honoraires est inopérante, dès lors qu'il n'est pas contesté que celui-ci exerçait en 'secteur 2" et pouvait à ce titre, fixer librement ses honoraires, en ce compris pour les interventions bénéficiant d'une prise en charge par la sécurité sociale.
Il sera surabondamment souligné qu'il ne peut être accordé qu'un crédit très limité aux allégations des docteurs [C], [H], [P] et [R] dès lors qu'il ressort des différentes attestations de patients, produites par l'appelant, que le comportement des quatre anesthésistes n'était nullement exempt de toute critique.
Il apparaît en effet que les entretiens pré-opératoires menés par ces derniers consistaient, pour l'essentiel, en un marchandage sur le montant de leurs honoraires, les intéressés exigeant des patients de Monsieur [K] [O] qu'ils signent un document intitulé « devis » aux termes duquel ils reconnaissaient que l'intervention qu'ils allaient subir faisaient partie des opérations 'hors nomenclature' et ils s'engageaient à verser à l'anesthésiste des honoraires qui ne seraient pas remboursés par la sécurité sociale.
Par ailleurs, si l'intimée verse aux débats un courrier en date du 26 janvier 2007 dans lequel le docteur [V] [A], président du bloc opératoire, exposait notamment que de nombreux incidents dans le fonctionnement opératoire avaient émaillé depuis deux ans l'activité de chirurgie plastique, elle n'explique pas comment, dans ces conditions, son directeur a pu, dans une attestation du 9 janvier 2006 établie à l'appui du dépôt par la clinique d'un dossier de demande d'autorisation d'exercice de la chirurgie esthétique, indiquer notamment : 'Le docteur [K] [O] ... exerce dans notre établissement depuis 1985 sans problème'.
Cependant, aux termes des deux courriers qu'il a transmis à la clinique le 17 janvier 2007, l'appelant relate de la façon suivante deux 'incidents' récemment survenus dans la cadre de son activité au sein de l'établissement :
« Je me vois forcer maintenant de signaler deux fautes professionnelles identiques, manifestes contre lesquelles je n'ai rien pu faire et qui sont survenues depuis un peu plus d'un mois environ et qui se répéteront si rien n'est fait '
La première faute est survenue le 17 novembre dernier au cours de l'intervention de Monsieur [I] [D] opéré de rhinoplastie post-traumatique avec génioplastie avec entente préalable.
Au cours de cette intervention il est nécessaire que la fixation de la sonde d'intubation soit latéralisée sur la commission buccale du patient, ce que je demandais. Le Dr [P] a refusé ouvertement verbalement cette demande devant moi-même et devant mes infirmières aides-opératoires. Le plus grave encore ce fut son refus que nous puissions prendre les mesures antiseptiques les plus élémentaires vis-à-vis de cette intervention de chirurgie osseuse avec sonde d'intubation dans le champ opératoire, je m'explique.
En effet, mon confrère a non seulement refusé de latéraliser la fixation de la sonde d'intubation mais surtout que mes infirmières ne badigeonnent le sparadrap de fixation avec l'antiseptique d'usage comme cela est classique dans toute intervention et a fortiori dans les interventions où nous touchons l'os nasal et mentonnier et où la sonde d'intubation et sa fixation sont totalement dans le champ opératoire.
De retour en salle j'ai voulu badigeonner personnellement la région de la commissure buccale, les infirmières en présence me sommèrent de faire très attention, rapportant que le docteur [P] avait quitté la salle en menaçant de réveiller le patient s'il constatait que nous avions badigeonné la fixation de la sonde.
Rien ne m'insupporte plus que les conflits et craignant les réactions de mon confrère, celui-ci risquant de revenir à tout instant et de s'exécuter, je n'ai pas osé créer un conflit ouvert.
(....)
Sachant bien que le docteur [P] passerait sans état d'âme à l'acte, j'ai simplement prévenu alors mes infirmières collaboratrices qu'un jour ou l'autre avec de tels comportements nous aurions vraisemblablement un problème sceptique sérieux et que cette attitude devait figurer dans le dossier du patient, ce qui fut fait. J'ai prié le ciel que cela soit sans conséquence et comme toujours j'ai fait le gros dos en pensant que cela ne serait plus, je me trompais lourdement '
Le vendredi 15 décembre dernier, au cours de l'intervention de Mlle [E] [L], opérée également de rhinoplastie post traumatique et de génioplastie, ' j'ai demandé comme cela est la règle au docteur [P] de bien vouloir latéraliser la fixation de la sonde d'intubation ce qu'il n'a pas fait.
Pour éviter tout conflit dans cette atmosphère comme toujours pesante, je suis allé me laver les mains espérant qu'il en viendrait à plus de raison. À mon retour la fixation de la sonde intubation était à nouveau blanche et immaculée par rapport au reste du visage.
J'ai posé la question de la raison de cette absence d'antiseptie, mes infirmières ont à nouveau fait part de l'interdiction par le docteur [P] de badigeonner l'intubation et surtout sa fixation toute deux en plein dans le champ opératoire.
Le climat étant tellement pesant, clairement verbalisé, craignant comme toujours les réactions, j'ai à nouveau fait contre mauvaise fortune bon coeur. J'ai simplement signalé et fait remarquer à mes infirmières collaboratrices qu'un jour ou l'autre nous aurions un problème sceptique dont je n'assumerai pas la responsabilité dans de telles conditions illogiques imposées.
Avant de fermer les voies d'abord lors de cette intervention, je leur ai demandé un lavage bétadiné à la seringue.
Le 20 décembre dernier j'ai été appelé en urgence par la maman de Mlle [L] [E] qui présentait des douleurs violentes au niveau du nez et du menton ' J'ai demandé à la voir rapidement en consultation.
J'ai alors constaté un écoulement purulent au niveau de la plaie dans les fosses nasales, au niveau de la région endo-buccale et au niveau de la région mentonnière qui présentaient des signes cliniques évidents de fluctuation sceptique.
J'ai alors fait de mon mieux pour tenter de gérer le problème au cabinet médical' Les choses semblaient s'arranger.
L'antibiogramme retrouvait cependant un staphylocoque doré et un pseudomonas aeruginosa tous deux heureusement sensibles aux traitements que j'avais prescrits.
Jusqu'à ce 4 janvier 2007 tout semblait s'arranger tant au niveau nasal que mentonnier mais au niveau mentonnier tout a redémarré et j'ai été contraint d'hospitaliser cette patiente en urgence pour la drainer et éviter une fistutilisation laissant des traces visibles.
La famille pense pour l'instant qu'il s'agit d'un aléa thérapeutique, je ferai tout pour que cet accident soit sans suite pour le Dr [P], pour la clinique et pour moi-même et tout pour ne pas révéler à la famille les conditions exactes de la survenue de cette affection que je n'ai jamais constatée en près de 30 ans d'exercice ' »
« Il y a deux semaines encore, il y a eu le problème de Mademoiselle [L] [E], opérée comme [D] [I], un mois plus tôt, sans les règles d'asepsie du champ opératoire les plus élémentaires le 15 décembre dernier que j'espère maintenant de tout coeur réglé et que sans l'opposition du docteur [H] pour son hospitalisation du 4 décembre, j'aurais définitivement « tenu sous silence» à vous-mêmes, auprès de l'ordre des médecins et de l'administration de la clinique et de mon conseil juridique ' »
Force est de constater que l'appelant reconnaît d'une part avoir délibérément pris le risque de mettre en danger la santé de deux de ses patients et d'autre part avoir poursuivi l'objectif de dissimuler aux yeux de tous, et notamment de la Clinique, de très graves manquements à la déontologie et aux bonnes pratiques médicales.
Compte tenu de l'extrême gravité de la faute commise par l'intéressé, la décision prise par l'intimée de résilier sans préavis la convention d'exercice la liant à Monsieur [K] [O] se révèle pleinement justifiée et n'est donc pas constitutive d'un abus de droit.
Il convient par conséquent de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur [K] [O] de ses demandes indemnitaires.
*****
Les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile seront confirmées.
Monsieur [K] [O] sera en outre condamné aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à la Clinique la somme de 2.000 euros à titre d'indemnisation des frais, non compris dans les dépens, que celle-ci a exposés devant la cour .
L'appelant sera débouté de sa demande présentée sur le même fondement.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement,
Confirme le jugement en ses dispositions non contraires au présent arrêt ;
L'infirme en ce qu'il a débouté Monsieur [K] [O] de sa demande tendant à voir déclarer la clinique responsable de la rupture de la convention d'exercice les liant ;
Et, statuant à nouveau de ce seul chef,
Constate que la SAS CLINIQUE DE SAINT OMER a résilié unilatéralement la convention d'exercice à durée indéterminée la liant à Monsieur [K] [O] ;
Dit que les conditions de cette résiliation ne présentent pas un caractère abusif ;
Y ajoutant,
Condamne Monsieur [K] [O] aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP d'avoués CARLIER-REGNIER ;
Le condamne à payer à la SAS CLINIQUE DE SAINT OMER la somme de 2.000 euros à titre d'indemnisation des frais, non compris dans les dépens, que celle-ci a exposés devant la cour ;
Déboute Monsieur [K] [O] de sa demande présentée sur le même fondement.
Le Greffier,Le Président,
N. HERMANT.E. MERFELD.