République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 28/03/2011
***
N° de MINUTE :
N° RG : 10/00628
Jugement (N° 08/00680)
rendu le 20 Novembre 2009
par le Tribunal de Grande Instance de SAINT OMER
REF : JD/AMD
APPELANTE
SAS PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION venant aux droits de la SAS LES SENIORIALES,
ayant son siège social [Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués à la Cour
Assistée de Maître James Alexandre DUPICHOT, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE
SARL LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS prise en la personne de son liquidateur amiable Monsieur [I] [H]
ayant son siège social [Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Maître QUIGNON, avoué à la Cour
Assistée de Maître David-Franck PAWLETTA, avocat au barreau de LILLE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Evelyne MERFELD, Président de chambre
Pascale METTEAU, Conseiller
Joëlle DOAT, Conseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Nicole HERMANT
DÉBATS à l'audience publique du 31 Janvier 2011 après rapport oral de l'affaire par Evelyne MERFELD
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2011 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Evelyne MERFELD, Président, et Nicole HERMANT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 04 janvier 2011
***
Par acte en date du 26 janvier 2007 déposé au rang des minutes de Maître [K], notaire associé à SAINT-OMER le 30 janvier 2007, la SARL LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS a consenti au profit de la société de promotion immobilière SAS LES SENIORIALES aux droits de laquelle se trouve la SAS PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION une promesse unilatérale de vente relative à deux terrains situés à [Adresse 7], d'une surface de 43 327 mètres carrés et 4997 mètres carrés, sur lesquels devait être édifiée une résidence pour personnes âgées, sous conditions suspensives.
La société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION n'a pas levé le droit d'option dont elle bénéficiait, de sorte que la promesse de vente est devenue caduque.
Par acte d'huissier en date du 27 juin 2008, la SARL LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS, représentée par son liquidateur amiable, M.[I] [H], a fait assigner la SAS LES SENIORIALES devant le tribunal de grande instance de SAINT-OMER, pour s'entendre condamner celle-ci à lui payer la somme de 97 000 euros, avec intérêts au taux contractuel de 10 % l'an à compter du 1er novembre 2007 représentant le montant de l'indemnité d'immobilisation.
Par jugement en date du 20 novembre 2009, le tribunal a :
- condamné la SAS PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION venant aux droits de la SAS LES SENIORIALES à payer à M. [I] [H], es-qualités de liquidateur amiable de la SARL LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS, la somme de 97 000 euros avec intérêts au taux conventionnel de 10 % l'an à compter du 1er novembre 2007
- condamné la SAS PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION aux dépens et à payer à M. [I] [H], es-qualités de liquidateur amiable de la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS la somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
- ordonné l'exécution provisoire.
La SAS PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION venant aux droits de la SAS LES SENIORIALES a interjeté appel de ce jugement, par déclaration remise au greffe de la Cour le 28 janvier 2010.
Dans ses conclusions en date du 8 octobre 2010, elle demande à la Cour:
à titre liminaire, et à défaut pour Maître [I] [H], es-qualités, d'avoir satisfait au jour du prononcé de l'arrêt à intervenir à la sommation de communiquer le justificatif du dépôt à la Caisse des Dépôts et Consignations de la somme de 123 750 euros qu'elle lui a réglée en exécution du jugement dont appel,
- de le condamner par arrêt avant-dire droit à lui fournir une garantie à première demande à hauteur de la somme de 123 750 euros, émanant d'un établissement bancaire de premier rang, sous astreinte de 1000 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de l'arrêt à intervenir
à titre liminaire et sur le fond,
- de dire que le tribunal aurait dû solliciter les explications préalables des parties dès lors qu'il entendait fonder sa décision sur une pièce du dossier qui n'avait pas effectivement été débattue
- d'annuler le jugement en ce qu'il a été rendu en violation du principe de la contradiction
à titre principal,
- de dire que la demande de la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS est sans cause réelle et sérieuse sachant qu'elle n'a jamais eu à souffrir d'une prétendue immobilisation du bien dont s'agit dont elle n'a jamais acquis la propriété
à titre subsidiaire,
- de constater que la condition suspensive de l'obtention dans les délais impartis d'une autorisation de construire définitive et exempte de tout recours a défailli, compte-tenu du contrôle de légalité du permis entrepris par le Préfet
- de constater qu'il n'est pas rapporté la preuve qu'elle ait levé ou souhaité lever, dans les délais et conditions impartis, son droit d'option issu de la promesse unilatérale de vente du 26 janvier 2007
- de constater en tout état de cause que la levée d'option était subordonnée à la condition suspensive de l'acquisition par la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS des biens objet de la promesse du 26 janvier 2007
- de constater que la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS ne rapporte pas la preuve de la notification qui lui a été faite dans les conditions et délais impartis, d'une origine de propriété trentenaire et régulière sur les biens dont s'agit pour les avoir achetés
- d'infirmer le jugement
statuant à nouveau,
- de dire que la promesse unilatérale de vente du 26 janvier 2007 est caduque, compte-tenu de la défaillance des conditions suspensives, et que l'indemnité d'immobilisation n'est pas dûe
- de constater qu'elle-même n'a pas failli à ses obligations contractuelles et à son obligation de bonne foi et de loyauté
- de débouter la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS de l'ensemble de ses demandes
- de condamner à titre reconventionnel Maître [H], es-qualités de liquidateur amiable de la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS, défaillante dans l'accomplissement de ses obligations pour n'avoir pas été en mesure de justifier de la réalisation des conditions suspensives qui lui incombaient et qui lui auraient permis, le cas échéant, de pouvoir user de son droit d'option, à lui verser la somme de 80 000 euros, à titre principal, compte-tenu de la clause pénale au contrat, à titre subsidiaire, à titre de dommages et intérêts
- de condamner en tout état de cause Maître [H], es-qualités de liquidateur amiable de la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS, à lui verser une somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION soutient que le jugement dont appel a méconnu le principe de la contradiction en introduisant dans son raisonnement des éléments factuels dont les parties n'avaient jamais débattu, que la religion du tribunal a notamment été emportée par la déclaration à la presse de son ancien directeur général, dans laquelle il expliquait qu'il ne donnerait pas suite au projet compte-tenu de la nature du terrain, que dans ses écritures, la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS n'avait nullement exploité ce document en se bornant à viser la pièce, que le tribunal aurait dû solliciter des explications préalables des parties dès lors qu'il entendait fonder sa décision sur une pièce du dossier qui n'avait pas effectivement été débattue, que ces propos émis par voie de presse le 6 octobre 2007 étaient postérieurs au terme de la promesse, de sorte qu'à cette date, son dirigeant avait toute liberté pour indiquer qu'il ne cherchait plus à investir sur le programme immobilier de SAINT-OMER.
Elle affirme que la cause première de non-réalisation de la promesse est l'absence de levée des conditions avant le terme de la promesse, que c'est le 6 septembre 2007, 30 jours avant la parution de l'article de presse, qu'elle a écrit à la COMPAGNIE DES LOTISSEURS pour lui indiquer que toutes les conditions suspensives n'étaient pas levées, puisque notamment, le délai de purge du permis de construire n'était pas échu.
Elle fait valoir que la cause de l'indemnité d'immobilisation consiste non pas dans la faculté offerte au bénéficiaire de réaliser la vente, mais dans l'avantage procuré par l'immobilisation du bien au profit du bénéficiaire, que la COMPAGNIE DES LOTISSEURS ne pouvait faire état d'une immobilisation du bien promis dès lors qu'elle n'était pas propriétaire du bien à vendre, qu'elle ne justifie pas avoir elle-même versé une indemnité d'immobilisation à la suite de l'absence de réalisation du compromis qu'elle avait signé pour acquérir le bien, qu'elle n'a d'ailleurs pas produit sa propre promesse d'achat, que M. [H], es-qualités, ne justifie d'aucun préjudice lié à une prétendue immobilisation puisque la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS n'a jamais été propriétaire du bien qui n'a jamais été immobilisé.
Elle considère que l'indemnité d'immobilisation mise à sa charge n'était pas exigible tant que les conditions n'étaient pas réalisées.
Elle indique que, s'agissant d'une promesse unilatérale de vente, la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS ne rapporte pas la preuve de sa propre intention de vouloir user dans les délais et conditions requis de son droit d'option, qu'en réalité, elle n'a pas été en mesure d'user de son droit d'option en raison de la non-réalisation des condition suspensives de la promesse de vente, qu'en effet, le contrôle de légalité entrepris par le Préfet sur le permis de construire délivré le 10 mai 2007 par la commune de SAINT-OMER empêchait la réalisation de la condition suspensive de l'obtention d'un permis de construire définitif et exempt de tout recours avant le 2 octobre 2007, qu'il résulte de la lettre du 31 août 2007 que le Préfet estimait qu'en l'état, il ne pouvait valider le permis et que la légalité de ce dernier restait subordonnée à l'accomplissement de démarches qui manifestement ne pouvaient être accomplies dans le délai de la promesse, soit le 2 octobre 2007, qu'ainsi, cette lettre faisait clairement apparaître qu'à la date du 2 octobre 2007, il n'était pas acquis qu'il n'y aurait pas de recours ou qu'il ne serait plus possible d'en avoir.
La société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION estime que le liquidateur n'a manifestement pas perçu le sens et la portée de la lettre du 31 août 2007 que lui avait adressée la mairie de [Localité 6], qu'à la lecture de cette lettre, il existait un risque que le permis soit déféré à la juridiction administrative, qu'il n'était dès lors pas du tout acquis qu'au terme de la promesse, le délai de recours du Préfet contre l'arrêté de permis était purgé.
Elle ajoute que, tandis que son droit d'option était subordonné à la condition suspensive préalable de l'acquisition des biens par le promettant, la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle lui a notifié avant le 2 octobre 2007 l'acquisition des biens dont s'agit, qu'elle n'a jamais été en mesure de justifier des diligences entreprises pour acquérir lesdits biens, qu'ainsi, la promesse de vente doit être considérée comme nulle et non avenue du seul fait de la COMPAGNIE DES LOTISSEURS et que l'indemnité d'immobilisation n'est pas dûe.
Elle observe qu'elle a fait preuve de bonne foi en communiquant le 6 septembre 2007 à la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS la lettre de la mairie en date du 31 août précédent.
Elle forme une demande reconventionnelle tendant à voir condamner la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS à lui verser le montant de la clause pénale insérée au contrat, au motif que cette société est seule responsable de la 'rétractation ' de la promesse unilatérale de vente du 26 janvier 2007.
A titre infiniment subsidiaire, elle conteste l'application d'intérêts contractuels au taux de 10 % l'an à compter du 1er novembre 2007, au motif qu'au-delà de la date du 30 décembre 2007 stipulée au contrat, l'engagement de payer n'était plus mobilisable.
Dans ses conclusions en date du 1er septembre 2010, la SARL LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS en liquidation amiable prise en la personne de son liquidateur amiable, M. [I] [H], demande à la Cour :
- de confirmer le jugement
- de débouter la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION de l'ensemble de ses demandes
- de la condamner à lui payer la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que les conclusions de première instance visent expressément l'article de presse incriminé puisqu'il a constitué pour elle la découverte de l'abandon du projet et qu'il est la preuve de la déloyauté de la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION qui a abandonné purement et simplement l'ensemble de ses partenaires dans le Nord, qu'on ne voit pas en quoi elle n'aurait aucunement exploité ce document, qu'aucun démenti n'est intervenu dans la presse à la demande de l'appelante qui ne conteste pas du reste les affirmations du journaliste, que l'argument lié au non-respect du contradictoire doit être rejeté.
Elle soutient sur le fond qu'aucun recours administratif n'a été déposé contre le permis de construire et qu'à aucun moment, la mairie de [Localité 6] n'a envisagé de retirer le permis de construire qu'elle avait accordé pour un projet qu'elle souhaitait voir mis en oeuvre.
Elle observe qu'il est d'usage que la régularisation de l'acte définitif entre le promettant, titulaire d'un compromis, et son vendeur, s'effectue dans le même temps que la cession devant intervenir entre le promettant et le bénéficiaire, qu'elle-même souhaitait avoir la certitude de la mise en oeuvre du projet pour procéder de son côté à l'acquisition définitive du bien, que, pour cette raison, le notaire rédacteur a prévu à la charge du promettant qui se rétracterait de verser au bénéficiaire une clause pénale de 80 000 euros, qu'à aucun moment, le bénéficiaire n'a notifié officiellement et de manière claire et précise son souhait de mettre fin à l'opération immobilière.
Elle ajoute que la convention a été passée par acte authentique, que le notaire, garant de la sécurité juridique, a vérifié qu'elle était bien titulaire des droits immobiliers sur les parcelles vendues, que l'inexécution contractuelle imputable à la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION est antérieure à l'obligation pour elle de procéder à l'acquisition définitive du bien, que cette situation caractérise un comportement déloyal et le non-respect de la bonne foi au sens de l'article 1134 du code civil.
Elle précise qu'à aucun moment, la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION n'a douté de sa faculté à procéder à l'acquisition du bien, qu'il n'existe aucun écrit qui viendrait faire état des craintes du bénéficiaire de la promesse de voir son promettant faillir dans son engagement principal.
SUR CE :
Maître [I] [H] représentant la SELARL DUQUESNOY
et agissant en qualité de liquidateur amiable de la SARL LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS atteste lui-même le 9 novembre 2010 qu'il a reçu la somme de 123 750 euros en date du 10 septembre 2010 et qu'il a remis les fonds sur son compte auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations.
Il joint une copie de son compte à la Caisse des Dépôts et Consignations.
Dans la mesure où le Premier Président de la Cour a débouté la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION de ses demandes d'arrêt de l'exécution provisoire et de consignation des sommes allouées par le tribunal de grande instance de SAINT-OMER, la demande tendant à voir condamner M. [I] [H], es-qualités de liquidateur amiable, à lui fournir une garantie à première demande à hauteur de la somme de 123 750 euros, émanant d'un établissement bancaire de premier rang, n'est pas fondée.
Sur le principe du contradictoire
La société PV SENIORIALES PROMOTION ET
COMMERCIALISATION demande que le jugement dont appel soit annulé au motif qu'il s'est fondé sur un document qui n'aurait pas été débattu contradictoirement par les parties, contrevenant ainsi aux prescriptions de l'article 16 du code de procédure civile aux termes desquelles le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Dans son alinéa 2, l'article 16 énonce que le juge ne peut retenir dans sa décision les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.
Or, dès son assignation délivrée le 27 juin 2008, la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS a mentionné l'article de presse paru dans la VOIX DU NORD en date du 6 octobre 2007, tandis que la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION a fait signifier des conclusions en réponse et reconventionnelles I et II, de sorte qu'elle a régulièrement été mise en mesure de discuter cet élément qui faisait partie du débat.
Le tribunal, après avoir analysé la condition relative à l'obtention du permis de construire, a considéré que le risque juridique invoqué par la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION n'était pas établi, si bien que celle-ci pouvait, si elle le souhaitait, lever l'option avant le 2 octobre 2007. C'est à titre surabondant qu'il a fait état du communiqué paru dans la VOIX DU NORD, qui avait régulièrement été soumis au débat contradictoire des parties, pour en tirer des conséquences sur les raisons de la non levée de l'option.
Le grief tiré du non-respect du principe du contradictoire n'est pas fondé et doit être écarté.
Sur le fond
Par acte en date du 26 janvier 2007, la SARL LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS a consenti à la SAS LES SENIORIALES une promesse unilatérale de vente portant sur 'un terrain d'une contenance d'environ 43 327 mètres carrés à prendre dans les parcelles ci-après désignées après division et regroupement' et' un terrain d'une contenance d'environ 4997 mètres carrés à prendre dans les parcelles ci-après désignées , après division et regroupement, situés [Adresse 7]', moyennant le prix principal de 21 euros hors taxe par mètre carré pour l'article 1 et 12 euros hors taxe pour l'article 2.
Le bénéficiaire a déclaré vouloir destiner l'immeuble à la construction d'un ensemble immobilier à usage d'habitation pour une surface hors oeuvre nette minimum de 5000 mètres carrés en vue de la réalisation d'une résidence services pour le troisième âge d'environ 70 logements de type T2 et T3.
Il est mentionné à l'acte que :
- le promettant s'oblige à justifier de l'origine de propriété trentenaire du bien immobilier, objet de la présente promesse de vente , que cette origine ne devra révéler aucune cause susceptible d'entraîner l'éviction du propriétaire.
- le promettant précise qu'à la date des présentes, la propriété des immeubles ne lui est
pas encore acquise, un compromis de vente, établi sous diverses conditions suspensives devant faire l'objet d'une régularisation à son profit, par acte authentique, si toutes les conditions suspensives se réalisent, préalablement à la vente des immeubles, objet des présentes.
Il est précisé également à l'acte que la réalisation de la promesse pourra être demandée par le bénéficiaire, à compter de la réalisation de la condition suspensive ci-dessus stipulée 2) à l'égard de la régularisation de la vente au profit du promettant et au plus tard jusqu'au 2 octobre 2007 inclusivement, que passé ce délai sans que Maître [K], notaire associé, ait reçu de la part du bénéficiaire la déclaration d'intention d'acquérir les parcelles de terrain, la promesse sera considérée comme caduque, sans que le promettant ait besoin de faire aucune mise en demeure, ni de remplir aucune formalité judiciaire.
L'acte authentique constatant la réalisation de la vente devait être reçu par Maître [K], notaire, sous réserve de l'obtention de tous les documents nécessaires à la rédaction de l'acte, et la signature de cet acte devait intervenir dans le délai maximum d'un mois à compter de la levée de l'option.
De son côté, le promettant s'est engagé fermement et définitivement à vendre la parcelle de terrain au bénéficiaire qui a accepté, mais sans prendre l'engagement d'acheter.
La promesse unilatérale de vente a été enregistrée au service des impôts des entreprises de [Localité 5], le 5 février 2007.
A la date du 2 octobre 2007, la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION n'a pas levé l'option, de sorte que la promesse de vente est devenue caduque.
Les parties avaient convenu dans la promesse de vente de fixer une indemnité d'immobilisation d'un montant de 97 000 euros, dûe au promettant par le bénéficiaire en cas de non réalisation et garanti par un engagement de payer à première demande ou par un cautionnement bancaire.
L'indemnité d'immobilisation constitue pour le promettant la contrepartie de l'obligation qu'il souscrit de ne pas contracter avec un tiers pendant le délai d'option et de maintenir sa promesse au profit du bénéficiaire.
Dès lors, il n'y a pas lieu pour le promettant d'établir que la non levée de l'option lui cause un préjudice ou non.
L'acte stipule, en ce qui concerne l'indemnité d'immobilisation :
- qu'elle sera restituée purement et simplement au bénéficiaire dans tous les cas où la non-réalisation de la vente résulterait de la défaillance de l'une quelconque des conditions suspensives énoncées aux présentes
- que si toutes les conditions suspensives se réalisent, mais que le bénéficiaire ne lève pas l'option en respectant les modalités de validité et de délais prévues, elle sera acquise de plein droit au promettant et remise à celui-ci par le séquestre.
La société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION invoque la non réalisation de la condition suspensive d'obtention d'un permis de construire purgé de toutes voies de recours, soutenant que le contrôle de légalité entrepris par le Préfet a eu pour conséquence d'empêcher la réalisation de cette condition avant le 2 octobre 2007.
La promesse de vente contient une clause aux termes de laquelle la promesse est soumise à plusieurs conditions suspensives, et notamment celle-ci :
- obtention d'un permis de démolir les constructions existantes
- obtention d'un permis de construire purgé de toutes voies de recours des tiers, permettant la réalisation de l'opération suivante : construction d'un ensemble à usage d'habitation pour une surface hors oeuvre nette minimum de 5000 mètres carrés.
L'acte précise sur ce point que la réalisation définitive de la condition suspensive est liée à l'absence de recours des tiers pendant le délai fixé à cet effet et à l'absence d'annulation du dit permis en suite d'un pareil recours et qu'il est convenu que la condition d'obtention du dit permis sera réputée réalisée dès que celui-ci, sans avoir fait l'objet de recours contentieux ou gracieux, ne sera plus susceptible d'en faire l'objet.
L'hypothèse d'un contrôle de légalité du permis de construire n'a pas été envisagée à l'acte.
Toutefois, le permis de construire fait partie des actes concernés par le contrôle administratif de légalité, en application de l'article L 2131-2 du code général des collectivités territoriales.
En application de l'article L 424-7 du code de l'urbanisme, le permis de construire est exécutoire dès lors qu'il a été procédé à sa notification et à sa transmission au représentant de l'Etat.
L'article L 2131-1 du code général des collectivités territoriales précise qu'en ce qui concerne les décisions individuelles, la transmission au représentant de l'Etat dans le département intervient dans le délai de quinze jours à compter de leur signature.
Selon l'article L 2131-6 du même code, le représentant de l'Etat défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission.
Le permis de construire délivré le 10 mai 2007 devait dès lors être transmis au préfet le 25 mai 2007 au plus tard, de sorte que le délai pour former un déféré expirait en principe le 25 juillet suivant.
Néanmoins, ce délai ne court qu'à partir de la réception par le préfet de l'intégralité de l'acte et des documents annexes permettant d'apprécier la légalité de celui-ci.
Or, il ressort de la lettre en date du 31 août 2007 émanant de la Ville de SAINT-OMER que, dans le cadre du contrôle de la légalité du permis de construire, la sous-préfecture de SAINT-OMER a adressé des observations, à savoir:
- l'obligation pour la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION d'établir la notice prévue par l'article R421-2 du code de l'urbanisme permettant d'apprécier l'impact visuel du projet, dans le cadre du volet paysager du permis de construire, cette notice exposant et justifiant les dispositions prévues pour assurer l'insertion du paysage des constructions, de leurs accès et de leurs abords
- le projet étant situé dans une zone de protection des captages, les avis de la Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales et de la 'MISE' sont requis.
A cette lettre était joint l'avis de la Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales en date du 8 août 2007 indiquant :
- qu'une étude hydrogéologique spécifique effectuée par un hydrogéologue agréé en matière d'hygiène publique doit être produite par le pétitionnaire afin de s'assurer de la compatibilité de cet aménagement avec la protection des captages
- que toutes les dispositions doivent être prises pour que les prescriptions énoncées dans l'arrêté préfectoral de DUP en date du 17 février 2003 soient respectées
- que le dossier devra être soumis à l'avis des services de la police des eaux souterraines (DDAF/MISE).
La Ville de SAINT-OMER demandait en conséquence à la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION de fournir une notice paysagère conforme à l'article R421-2 du code de l'urbanisme, 'afin d'assurer la sécurité juridique de la décision favorable du permis de construire', indiquait qu'il serait souhaitable, avant d'entreprendre les travaux de se rapprocher de la direction des affaires sanitaires et sociales afin de pouvoir fournir l'étude hydrologique demandée et ajoutait que le dossier allait être soumis à l'avis des services de la police des eaux souterraines (DDAF/MISE).
La société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION a envoyé la copie de cette lettre à la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS le 6 septembre 2007 avec un courrier d'accompagnement aux termes duquel elle déclarait s'interroger sur la validité du permis de construire, le document faisant apparaître un réel risque juridique lui laissant penser que le délai de purge du permis n'était pas échu, et elle indiquait considérer que la totalité des conditions suspensives n'était pas levée.
La société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS a répondu à la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION qu'elle transmettait la lettre de la mairie à l'architecte, M. [R], 'afin de régler ce problème juridique dans les meilleurs délais' et qu'elle avait transmis les éléments réclamés dans le cadre du contrôle de légalité.
Le 25 septembre 2007, l'architecte a remis à la Ville de SAINT-OMER une notice paysagère, laquelle a été reçue le 1er octobre 2007.
Il ressort ainsi des éléments ci-dessus et notamment de l'avis de la Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales que ce permis ne pouvait être considéré comme définitif à la date du 2 octobre 2007, alors que l'avis de la police des eaux souterraines n'avait pas été rendu et qu'une étude hydrologique était exigée et non encore réalisée, de sorte qu'à la date du 2 octobre 2007, le représentant de l'Etat dans le département ne disposait manifestement pas de l'ensemble des documents lui permettant d'exercer son contrôle et que le délai de déféré n'avait pas encore couru.
Il n'est par ailleurs produit aucun courrier de la Ville de [Localité 6] postérieur à la date de réception de la notice paysagère du 1er octobre 2007 permettant d'établir que le délai de déféré du préfet se trouvait expiré, ni d'attestation du maire certifiant que le permis était définitif.
La condition suspensive d'obtention d'un permis de construire purgé de tout recours n'était donc pas réalisée à la date du 2 octobre 2007 fixée d'un commun accord entre les parties pour la levée de l'option.
En conséquence, l'indemnité d'immobilisation n'était pas dûe et le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION à payer à ce titre à M. [I] [H] en sa qualité de liquidateur de la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS la somme de 97 000 euros avec intérêts au taux conventionnel de 10 % l'an à compter du 1er novembre 2007, aux dépens et à la somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur la demande reconventionnelle
La société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION soutient que la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS a été défaillante dans l'accomplissement de ses obligations pour n'avoir pas été en mesure de justifier de la réalisation des conditions suspensives qui lui incombaient et qui lui auraient permis, le cas échéant, d'user de son droit d'option.
La promesse unilatérale de vente contient une clause pénale en vertu de laquelle 'le promettant s'engage fermement et définitivement à vendre la parcelle de terrain ci-devant désignée au bénéficiaire qui accepte, mais sans prendre l'engagement d'acheter. Au cas où le promettant se rétracterait, il devra verser au bénéficiaire à titre de clause pénale, conformément aux dispositions des articles 1152 et 1226 du code civil la somme de 80 000 euros.'
Dans la mesure où la caducité de la promesse de vente a été acceptée par
son bénéficiaire qui n'a pas exigé d'être en mesure de lever l'option, les conditions d'application de cette clause ne sont pas réunies.
Il n'est pas démontré en effet que le promettant se soit rétracté de son engagement de vendre à la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION, la simple non réitération de sa propre promesse synallagmatique de vente, alors que la condition suspensive d'obtention du permis de construire en faveur du bénéficiaire de la promesse n'était pas réalisée et que la promesse était devenue caduque, ne pouvant être considérée comme une rétractation.
La société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION ne rapporte pas non plus la preuve d'une faute qu'aurait commise LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS. Sa demande en paiement de la somme de 80 000 euros à titre de dommages-intérêts doit être rejetée.
Il y a lieu de mettre à la charge de Maître [I] [H], es-
qualités de liquidateur amiable de la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS les frais irrépétibles de première instance et d'appel supportés par la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION dont le recours est accueilli, à hauteur de 1500 euros.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire :
DEBOUTE la société PV SENIORIALES PROMOTION ET
COMMERCIALISATION de sa demande de nullité du jugement pour non-respect du principe du contradictoire
INFIRME le jugement
STATUANT à nouveau,
DEBOUTE Maître [I] [H], es-qualités de liquidateur amiable de la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS, de toutes ses demandes
DEBOUTE la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION de sa demande reconventionnelle
CONDAMNE Maître [I] [H], es-qualités de liquidateur amiable de la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS, aux dépens de première instance et d'appel et dit que, pour ceux d'appel, ils pourront être recouvrés par la SCP LEVASSEUR CASTILLE, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile
CONDAMNE Maître [I] [H], es-qualités de liquidateur amiable de la société LA COMPAGNIE DES LOTISSEURS, à payer à la société PV SENIORIALES PROMOTION ET COMMERCIALISATION la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier,Le Président,
Nicole HERMANT.Evelyne MERFELD.