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20/12/2012 | FRANCE | N°12/06149

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 20 décembre 2012, 12/06149


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 20/12/2012



***



MINUTE N° :

N° RG : 12/06149



Jugement (N° 12/01035)

rendu le 26 Juillet 2012

par le Tribunal de Grande Instance d'ARRAS



REF : PB / FR





APPELANTE



SCI SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE GMDP

[Adresse 4]

[Localité 3]



Représentée par Me Philippe BODEREAU (avocat au barreau D'ARRAS)



INTIMÉ



Maître [J] [G] agissant es-qualités de mandataire liquidateur de Mme [P]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me François DELEFORGE (avocat au barreau de DOUAI)

Assisté de Me Ala...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 20/12/2012

***

MINUTE N° :

N° RG : 12/06149

Jugement (N° 12/01035)

rendu le 26 Juillet 2012

par le Tribunal de Grande Instance d'ARRAS

REF : PB / FR

APPELANTE

SCI SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE GMDP

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe BODEREAU (avocat au barreau D'ARRAS)

INTIMÉ

Maître [J] [G] agissant es-qualités de mandataire liquidateur de Mme [P]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me François DELEFORGE (avocat au barreau de DOUAI)

Assisté de Me Alain ROBERT (avocat au barreau de BETHUNE)

DÉBATS à l'audience publique du 14 Novembre 2012 tenue par Philippe BRUNEL magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Françoise RIGOT

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Christine PARENTY, Président de chambre

Philippe BRUNEL, Conseiller

Sandrine DELATTRE, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 Décembre 2012 (date indiquée à l'issue des débats) par Philippe BRUNEL, Conseiller, qui a signé la minute avec Françoise RIGOT, adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier, présents à l'audience lors du prononcé de l'arrêt.

***

Vu le jugement du tribunal de grande instance d'Arras en date du 26 juillet 2012 qui, saisi par le liquidateur judiciaire du patrimoine de Mme [W] [P] d'une demande visant à être autorisé à céder le fonds de commerce exploité par celle-ci à M. [M] malgré l'opposition notifiée par la SCI GMDP , bailleur des locaux d'exploitation, a fait droit à cette demande en considérant que la clause du bail prévoyant l'agrément du bailleur en cas de cession était privée d'effet par les dispositions d'ordre public du code de commerce relatives aux procédures collectives, le refus d'autorisation du bailleur constituant en outre en l'espèce un abus de droit ;

Vu la déclaration d'appel de la SCI GMDP en date du 12 septembre 2012 ;

Vu l'ordonnance du délégué du premier président de cette cour en date du 18 octobre 2012 arrêtant l'exécution provisoire du jugement et autorisant la SCI GMDP à procéder par voie d'assignation à jour fixe ;

Vu l'assignation à jour fixe en date du 6 novembre 2012 ;

Vu les conclusions récapitulatives de la SCI GMDP en date du 13 novembre 2012 demandant l'annulation du jugement ou son infirmation ; elle fait valoir que c'est à tort que le premier juge a écarté l'application de la clause d'agrément insérée au bail qui, dès lors qu'elle n'édicte pas une interdiction absolue de céder le fonds, présente un caractère régulier, l'autorisation du bailleur devant nécessairement être recueillie préalablement à la saisine du juge commissaire aux fins d'autorisation de cession du fond alors qu'en l'espèce le juge-commissaire avait statué sans que le bailleur soit entendu et sans que l'ordonnance lui soit notifiée ; elle fait par ailleurs grief au premier juge d'avoir méconnu le principe de la contradiction en relevant d'office que la législation relative aux procédures collectives rendait sans objet la clause d'agrément et de n'avoir pas répondu à son argumentation relative au caractère nécessairement préalable de l'accord du bailleur ; elle fait valoir par ailleurs que son refus d'agrément n'est pas abusif dès lors que la solvabilité du cessionnaire ou de toute personne pouvant se substituer à lui n'est pas suffisamment établie ; elle demande que soit prononcée la résiliation du bail et la condamnation du liquidateur judiciaire es qualité à réparer son préjudice ;

Vu les conclusions de Me [G] es qualité de liquidateur du patrimoine de Mme [P] en date du 12 novembre 2012 demandant la confirmation du jugement ; il fait valoir que, si l'agrément du bailleur doit effectivement être obtenu, ni la loi ni le bail n'impose que celui-ci soit préalable à la décision du juge-commissaire, le simple bon sens imposant au contraire que l'ordonnance du juge-commissaire précède l'agrément ; il estime par ailleurs qu'aucun motif légitime ne justifie le refus d'agrément, ni la solvabilité ni l'honorabilité ou la compétence du cessionnaire ne pouvant être mise en doute, aucun justificatif n'ayant été demandé par la SCI quant à sa solvabilité ; le liquidateur estime enfin que la demande de dommages-intérêts présentée par la SCI devant la cour est irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile ;

SUR CE

Attendu que par acte notarié du 31 décembre 2009, la SCI GMDP a consenti à Mme [P] un bail commercial relatif à un immeuble situé à [Adresse 6] dans lequel était exploité un fonds de presse, cadeaux, bimbeloterie, confiseries, jeux, loto et tabac ; que dans le cadre des opérations de liquidation judiciaire ouvertes à l'égard de Mme [P] le 8 juillet 2011, le liquidateur a saisi de juge-commissaire d'une demande d'autorisation de cession du fonds de commerce au profit de M. [M] pour le prix de 130 000 € ; que le juge-commissaire y a fait droit par ordonnance du 7 octobre 2011, déférée à la cour dans le cadre d'une autre instance ; que l'intermédiaire chargé de la cession du fonds a sollicité par lettre du 24 novembre 2011 l'autorisation de cession du droit au bail auprès de la SCI GMDP ; qu'à défaut de réponse, le liquidateur a renouvelé cette demande d'autorisation le 17 février 2012 ; que la SCI a fait connaître son refus le 28 février 2012 et que le 21 juin 2012 le liquidateur a assigné la SCI devant le tribunal de grande instance d'Arras aux fins d'obtenir l'autorisation de céder le fond de commerce à M. [M] ; que par jugement du 26 juillet 2012, déféré à la cour dans le cadre de cette instance, le tribunal de grande instance a fait droit à la demande du liquidateur ;

Sur la demande d'annulation du jugement ;

Attendu que, pour demander l'annulation du jugement, la SCI GMDP fait grief au premier juge, d'une part, d'avoir méconnu le principe de la contradiction en soulevant d'office sans susciter la contradiction des parties, le moyen tiré du caractère d'ordre public des règles gouvernant les procédures collectives qui permettraient d'écarter la clause d'agrément stipulée dans un bail commercial ; qu'il lui fait également grief de n'avoir pas répondu à certains chefs de ses conclusions notamment à celui tiré de ce que l'agrément n'avait pas été sollicité avant l'ordonnance du juge-commissaire ; que sur ce dernier point, il convient de rappeler que l'insuffisance éventuelle des motifs d'une décision juridictionnelle ne peut être assimilée à l'absence totale de motivation ; que l'annulation ne saurait donc être encourue à ce titre ; que, sur le premier point, la cour ne peut que constater que l'indication donnée par le premier juge suivant laquelle les dispositions d'ordre public du code de commerce permettraient d'écarter et de priver d'effet, dans le cadre d'une liquidation judiciaire, une clause d'agrément stipulée dans un bail commercial, ne peut être considérée comme un moyen soulevé d'office dès lors que le juge n'a, précisément, pas écarté l'application en l'espèce de la clause d'agrément puisqu'il a au contraire examiné le bien-fondé des motifs du refus d'agrément opposé par le bailleur, ce dont il résulte qu'il a nécessairement entendu ne pas priver d'effet la clause stipulée au bail ; que l'annulation ne saurait donc être prononcée de ce chef ;

Sur la demande subsidiaire de la SCI visant à l'infirmation du jugement ;

Attendu que, dans le cadre d'une liquidation judiciaire, « le liquidateur peut céder le bail dans les conditions prévues au contrat conclu avec le bailleur avec tous les droits et obligations qui s'y rattachent » ainsi qu'il résulte de l'article L641 - 12 dernier alinéa du code de commerce ; que la clause d'agrément stipulée en l'espèce au bail conclu entre les parties est donc applicable dans le cadre de la cession du fonds de commerce engagée par le liquidateur es qualité ; que ce point ne fait d'ailleurs pas débat entre les parties, la clause d'agrément n'étant pas plus contestée dans son principe que dans son contenu; qu'elle est stipulée au bail sous la forme suivante : « le preneur ne pourra dans aucun cas et sous aucun prétexte céder son droit au présent bail ni sous-louer en tout ou en partie les locaux loués ni les aliéner sous quelque forme que ce soit sans le

consentement exprès et par écrit du bailleur. » ; que la cession du droit au bail attaché au fonds de commerce est donc subordonnée à l'accord du bailleur ; que le refus du bailleur de donner un tel accord peut toutefois, s'il est injustifié, être considéré comme abusif, la juridiction saisie pouvant alors autoriser la cession envisagée ;

Attendu en premier lieu que, pour contester le jugement déféré, la SCI GMDP fait valoir que son agrément aurait dû être demandé avant que soit saisi le juge-commissaire aux fins d'autoriser la cession ; que, toutefois,aucune disposition légale ou tirée en l'espèce des stipulations du bail, n'impose que l'agrément du bailleur soit sollicité ou recueilli avant la saisine du juge commissaire; qu'en saisissant le juge-commissaire aux fins d'obtenir l'autorisation de céder le fonds, le liquidateur lui demande d'arbitrer, au regard des enjeux de la procédure collective, entre les différentes offres d'acquisition ; que le juge-commissaire peut refuser d'autoriser la vente au profit du tiers proposé par le liquidateur, en estimant que les garanties offertes sont insuffisantes ou qu'une offre émise par un autre tiers serait préférable ; qu'en toute hypothèse, d'une part, lorsque le juge-commissaire autorise la cession amiable de biens mobiliers relevant de l'actif de la procédure collective, le transfert de propriété, sauf disposition contraire figurant dans l'ordonnance, n'intervient qu'après accomplissement des actes matériels de cession et, d'autre part, l'autorisation de cession ainsi donnée par le juge-commissaire ne vaut que sous la condition suspensive que l'accord du bailleur soit recueilli lorsque comme en l'espèce existe une clause d'agrément stipulée au bail ; que dans ces conditions, le moyen tiré par la SCI de ce que son agrément n'a pas été sollicité avant la cession du juge-commissaire ne peut être retenu ;

Attendu que la SCI GMDP soutient que la lettre de DELTA IMMOBILIER, intermédiaire étant intervenu pour la négociation de la vente du fonds, ne constituerait pas une demande d'agrément au motif que la SCI ne connaissait pas cet intermédiaire et que les justificatif de la situation du cessionnaire envisagé n'étaient pas joints ; que toutefois, la SCI se présentait comme mandatée pour la réalisation de la vente ; que par ailleurs, il appartenait à la SCI de solliciter du mandataire ou de son mandant les renseignements qu'elle souhaitait obtenir ; qu'enfin, force est de constater que le liquidateur judiciaire lui-même a saisi la SCI le 17 février 2012 d'une demande visant à obtenir son agrément pour la cession envisagée ; que le moyen soulevé à ce titre ne peut être retenu ;

Attendu que, au titre des arguments de fond susceptible de justifier le refus d'agrément opposé par elle, la SCI avait mis en doute devant le premier juge l'honorabilité de M. [M] ; que devant la cour, un tel grief n'est pas développé et n'est, en toute hypothèse, étayé par aucun élément de preuve ; qu'il est justifié que M.[M] dispose d'actifs financiers pour un peu plus de 135 000 € ; qu'il a obtenu par ailleurs de la Caisse d'Épargne deux prêts pour la reprise du fonds, l'un de 97 000 € sur 184 mois et l'autre de 12 000 € sur 60 mois avec un taux d'intérêt fixe de 3,95 % ; que c'est à juste titre que le premier juge a estimé ces garanties tout à fait suffisantes ; que, par ailleurs, si l' autorisation donnée par le juge-commissaire vise effectivement non seulement M. [M] mais également toute société qui se substituerait à lui, l'agrément du bailleur est demandé pour une transmission du bail au seul profit de M. [M] et non pas au profit d'une société qui pourrait se substituer à lui ; qu'il n'existe donc aucune incertitude à ce titre ;

Attendu en conséquence que c'est à juste titre que le premier juge a considéré que les arguments opposés par la SCI GMDP pour refuser son agrément n'étaient pas sérieux et que ce refus était constitutif d'un abus de droit ; qu'il a en conséquence légitimement autorisé le liquidateur judiciaire es qualité à céder le droit au bail dépendant du fonds de commerce, la cession devant toutefois, compte tenu des explications données devant la cour, intervenir au profit de M. [M] lui-même et non pas de toute société se substituant à lui ; que le jugement, sous cette réserve, sera pleinement confirmé ;

Attendu que, compte tenu des observations ci-dessus formulées, les demandes complémentaires formulées par la SCI en résiliation du bail, en restitution des clés et en dommages-intérêts doivent être écartées ;

Attendu qu'il serait inéquitable que le liquidateur judiciaire du patrimoine de Mme [P] conserve à sa charge le montant des frais irrépétibles engagés pour les besoins de l'instance suivie devant la cour ; que la SCI GMDP sera condamnée à lui payer la somme de 2500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement par arrêt mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Précise toutefois que l'autorisation de cession donnée au liquidateur judiciaire vise, en tant que cessionnaire, M. [U] [T] [M] à l'exclusion de toute société pouvant se substituer à lui,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la SCI GMDP à payer à Me [G] es qualité la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SCI GMDP aux dépens qui pourront être recouvrés directement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le GreffierP/ Le Président empêché l'un des conseillers ayant délibéré (art 456 CPC)

F. RIGOTPhilippe BRUNEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 12/06149
Date de la décision : 20/12/2012

Références :

Cour d'appel de Douai 21, arrêt n°12/06149 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-12-20;12.06149 ?
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