République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 10/01/2013
***
N° MINUTE :
N° RG : 12/01076
Ordonnance (N° 10/01579)
rendu le 07 Février 2012
par le Juge de la mise en état de DUNKERQUE
REF : HB/VC
APPELANTS
Monsieur [H] [B] [Z] [E]
né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 10] - de nationalité Française
demeurant : [Adresse 4]
[Localité 5]
Représenté par Me François DELEFORGE (avocat au barreau de DOUAI)
Assisté de Me Hugues SENLECQ (avocat au barreau de DUNKERQUE)
Madame [T] [F] [W]
née le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 9] - de nationalité Française
demeurant : [Adresse 4]
Représentée par Me François DELEFORGE (avocat au barreau de DOUAI)
Assistée de Me Hugues SENLECQ (avocat au barreau de DUNKERQUE)
INTIMÉE
SA COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS SA à Conseil d'Administration prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège anciennement denommée COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES IMMOBILIERES venant aux droits et actions de la société SACCEF par suite de sa fusion par absorption selon décision de L'AGE
ayant son siège social : [Adresse 2]
Représentée par Me Eric LAFORCE (avocat au barreau de DOUAI)
DÉBATS à l'audience publique du 03 Octobre 2012
tenue par Hélène BILLIERES magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Pierre CHARBONNIER, Président de chambre
Benoît PETY, Conseiller
Hélène BILLIERES, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 10 Janvier 2013 après prorogation du délibéré du 29 novembre 2013 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Annie DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
Selon deux actes sous seing privé en date du 6 décembre 2006, Monsieur [H] [E] et Madame [T] [W], son épouse, ont accepté deux offres de prêt émises par la société BANQUE PALATINE le 21 novembre précédent d'un montant unitaire de 169 435 euros, remboursable, chacun, en 216 échéances mensuelles d'un montant initial de 1 200,86 euros au taux annuel révisable indexé sur l'indice EURIBOR 3 mois, outre composante fixe de 1,30 % et au taux effectif global de 5,34 %, prêts destinés à l'acquisition de divers lots de copropriété à usage locatif sis sur la commune de [Localité 11], proposés à la vente par la société APOLLONIA.
Ces prêts étaient notamment garantis par le cautionnement de la société SACCEF, aux droits et actions de laquelle vient à présent la société COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS.
Alléguant le défaut de paiement des échéances mensuelles, la société BANQUE PALATINE a prononcé la déchéance du terme des prêts par lettres recommandées avec demande d'avis de réception du 15 décembre 2009.
Après avoir, en sa qualité de caution, payé à la banque le 13 mars 2010 le solde de sa créance, soit 164 284,76 euros au titre du premier prêt et 164 284,75 euros au titre du second, la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS a, suivant exploit d'huissier du 31 août 2010, assigné en paiement Monsieur [H] [E] et Madame [T] [W], son épouse, devant le tribunal de grande instance de Dunkerque sur le fondement à la fois de son recours subrogatoire et de son recours personnel.
Par conclusions d'incident en date du 1er février 2011, les époux [E] ont saisi le juge de la mise en état d'un incident tendant à voir reconnaître, à titre principal, la connexité entre cette instance en paiement et l'instance en responsabilité qu'ils ont engagée contre l'établissement bancaire mais également la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS, les notaires intervenus dans l'opération et la société APOLLONIA devant le tribunal de grande instance de Marseille, et subsidiairement, de voir prononcer le sursis à statuer sur l'action de la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS jusqu'à ce qu'une décision définitive et irrévocable soit rendue sur la plainte déposée par eux, actuellement instruite devant l'un des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Marseille.
Par ordonnance du 7 février 2012, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Dunkerque a rejeté l'exception de connexité soulevée par les époux [E] et les a déboutés de leur demande de sursis à statuer.
Monsieur [H] [E] et Madame [T] [W], son épouse, ont relevé appel de cette décision le 21 février 2012.
Ils exposent que les deux prêts contractés auprès de la société BANQUE PALATINE dont il est sollicité le paiement s'inscrivent dans le cadre d'une vaste escroquerie, dont ils sont les victimes, comme près de deux mille autres personnes, qui fait l'objet d'une information judiciaire ouverte en 2008 au tribunal de grande instance de Marseille des chefs d'escroquerie en bande organisée, faux et usage de faux en écritures privées, faux en écritures publiques, abus de confiance, exercice illicite de la profession d'intermédiaire en opérations de banque, et dans le cadre de laquelle ils se sont constitués partie civile.
Ils expliquent ainsi qu'ils ont été démarchés, de manière agressive, par la société APOLLONIA, qui se présentait comme gestionnaire de patrimoine et mandataire des banques, et proposait des produits retraite, jouant sur la défaillance des caisses de retraite, et notamment l'acquisition d'un « package immobilier » composé de plusieurs lots dans des résidences para hôtelières destinées à la location à des sociétés spécialisées dans l'hôtellerie sous le statut de loueur meublé professionnel, financé à 100 % par des emprunts souscrits auprès de plusieurs banques installées loin de leur domicile ; qu'il leur a été garanti que le remboursement des prêts serait assuré par le remboursement des intérêts intercalaires par les promoteurs, le remboursement de la TVA par l'administration fiscale, les loyers, la revente des lots.
Ils précisent que la société APOLLONIA avait la maîtrise exclusive des offres de prêt, de sorte qu'ils n'ont eu aucun contact avec les banques et que les documents contractuels ont pu être falsifiés. Ils ajoutent que cette société faisait intervenir au domicile des victimes ou dans un hôtel de luxe « ses notaires attitrés du sud de la France et de Lyon » lesquels, sans aucun conseil ni lecture, leur ont fait signer des procurations destinées à la signature des actes authentiques de vente en VEFA et de prêts ; que c'est ainsi que la société APOLLONIA leur a fait signer un package d'investissements immobiliers constitués de lots de copropriétés différentes, financés par des établissements financiers différents, dont les prêts financés par la société BANQUE PALATINE, pour un total de 3 313 400 euros en principal.
Monsieur [H] [E] et Madame [T] [W], son épouse, concluent, pour l'essentiel, que l'action en responsabilité qu'ils ont intentée à l'encontre des intervenants aux opérations, dont la société BANQUE PALATINE et la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS, conditionne nécessairement le droit à poursuivre de la société de cautionnement dès lors qu'ils peuvent lui opposer toutes les exceptions et tous les moyens qu'ils avaient à l'encontre de la banque.
Ils estiment en outre que la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS a donné son cautionnement de façon imprudente sans examen de leur dossier et de leur situation financière, qu'elle a libéré les fonds alors même qu'elle connaissait parfaitement l'escroquerie de la société APOLLONIA et les irrégularités grossières affectant les prêts puisqu'elle s'était constituée partie civile le 14 juin 2010.
Ils assurent que la cause du cautionnement est illicite, qu'il existe un lien étroit entre les deux actions au point que la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS a porté plainte contre son propre cocontractant, qu'ils sont en droit de solliciter compensation entre les dommages et intérêts et l'action en paiement de la caution, que la nécessité d'une appréciation globale des opérations a été révélée par le tribunal de grande instance de Marseille, le juge d'instruction et le juge de la mise en état de Marseille et que par ailleurs de nombreuses juridictions se sont dessaisies au profit du tribunal de grande instance de Marseille.
Monsieur [H] [E] et Madame [T] [W], son épouse, invoquent en second lieu l'intérêt d'une bonne administration de la justice et le fait qu'ils ont été victimes comme d'autres personnes en France, d'une escroquerie en bande organisée, qu'une plainte a été déposée contre X par plusieurs autres victimes réunies en association et qu'outre la société APOLLONIA, les notaires rédacteurs des actes de vente, trois banques ont été mises en examen en juillet 2012 dans le cadre de cette affaire.
Ils rappellent que la demande de sursis à statuer constitue une exception de procédure qui relève de la compétence du juge de la mise en état.
Ils prétendent enfin que dissocier l'opération financée par la société BANQUE PALATINE des autres opérations de prêt change l'objet des débats et risque d'aboutir à une contradiction entre les deux décisions.
Monsieur [H] [E] et Madame [T] [W], son épouse, maintiennent en conséquence leur demande tendant au renvoi de l'affaire devant le tribunal de grande instance de Marseille, à titre principal, et, à titre subsidiaire, leur demande de sursis à statuer jusqu'à l'issue définitive de la plainte pénale en cours au visa de l'article 312 du code de procédure civile et de l'article 4 du code de procédure pénale. Ils sollicitent en tout état de cause une indemnité procédurale d'un montant de 2 000 euros.
Par conclusions en réponse déposées le 20 septembre 2012, la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS sollicite la confirmation de l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté l'exception de connexité formulée par les époux [E], faisant valoir à cet égard que sa propre demande en paiement et l'instance introduite par les appelants devant le tribunal de grande instance de Marseille tendent vers des buts radicalement différents, de sorte qu'il n'y a aucun risque de contrariété entre les décisions à intervenir, qu'elle est intervenue en amont des prêts dont elle n'avait pas à vérifier la régularité et que la solution qui pourrait être donnée au litige soumis à la juridiction de Marseille n'est pas de nature à influer sur celle devant être donnée à l'instance pendante devant le tribunal de grande instance de Dunkerque, dans la mesure où Monsieur [H] [E] et Madame [T] [W], son épouse, ne remettent en cause ni les actes de vente ni les prêts, mais sollicitent seulement des dommages et intérêts.
Formant appel incident, elle soutient par ailleurs que la plainte à laquelle il est fait référence ne constitue pas une cause obligatoire de sursis à statuer en application de l'article 4 du code de procédure pénale et que le juge de la mise en état n'est pas compétent pour statuer sur une demande de sursis à statuer facultative, laquelle n'est constitutive ni d'une exception de procédure ni d'un incident d'instance mettant fin à celle-ci et conclut en conséquence à l'irrecevabilité de la demande présentée à ce titre par les époux [E] devant le juge de la mise en état. Elle conclut, à titre subsidiaire, au rejet de la demande de sursis à statuer comme non fondée dès lors qu'il n'est pas établi par les pièces produites que la procédure pénale puisse avoir une quelconque incidence sur l'instance civile qui n'est pas fondée sur les actes authentiques dont la validité est contestée mais sur les actes sous signature privée des emprunteurs, et que, surtout, en sa qualité de simple organisme de caution, elle n'est pas l'un des prêteurs de deniers et n'est pas intervenue dans le montage et les opérations immobilières en cause.
La COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS demande en tout état de cause à la cour de condamner Monsieur [H] [E] et Madame [T] [W], son épouse, à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE
Sur l'exception de connexité
Attendu qu'aux termes de l'article 101 du code de procédure civile, s'il existe entre des affaires portées devant deux juridictions distinctes un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble, il peut être demandé à l'une de ces juridictions de se dessaisir et de renvoyer en l'état la connaissance de l'affaire à une autre juridiction ;
Que pour justifier un dessaisissement pour connexité, les instances portées devant deux juridictions distinctes doivent présenter une corrélation telle que la solution de l'une influe nécessairement sur la solution de l'autre, de telle sorte qu'il existe un risque de contrariété à les juger séparément ;
Attendu en l'espèce que l'instance pendante devant le tribunal de grande instance de Dunkerque et celle pendante devant le tribunal de grande instance de Marseille, si elles procèdent des mêmes contrats de prêts, ne sont pas, ainsi que l'a exactement relevé le premier juge, de même nature et n'ont pas le même objet, s'agissant pour l'une d'une action en paiement fondée sur le recours personnel de la caution prévu à l'article 2305 du code civil et le recours subrogatoire de l'article 2306 du code civil, et pour l'autre d'une action en responsabilité et en paiement de dommages et intérêts ;
Qu'il apparaît en effet, aux termes de l'assignation du 29 janvier 2010, que Monsieur [H] [E] et Madame [T] [W], son épouse, exercent devant le tribunal de grande instance de Marseille l'action civile découlant de l'action pénale et réclament l'indemnisation du préjudice résultant pour eux des infractions dont ils prétendent être les victimes et qu'ils fixent, à titre principal, à la somme de 2 882 658 euros correspondant au ratio de 87 % de l'investissement global hors taxe réalisé pour leur compte par l'entremise de la société APOLLONIA auprès des banques requises ;
Que cette action strictement indemnitaire dirigée contre la société BANQUE PALATINE et quatre autres banques, trois notaires et trois SCP de notaires, ainsi que la société APOLLONIA prise en la personne de son liquidateur, tend ainsi seulement à obtenir l'allocation de dommages et intérêts ;
Que Monsieur [H] [E] et Madame [T] [W], son épouse, ne sollicitent ainsi ni l'annulation ni la résolution des actes de vente ni, consécutivement, celle des actes de prêt qui en sont les accessoires et dont ils contestent pourtant les conditions de souscription ;
Que si, dans le cadre de cette procédure pour laquelle une décision de sursis à statuer est intervenue, ils ont, par exploit du 2 décembre 2010, également assigné en intervention forcée la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS en sa qualité de subrogée de la société BANQUE PALATINE, l'assignation ne contient aucun développement spécifique sur les fautes qui auraient été commises par la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS, sauf à indiquer que celle-ci a été régulièrement informée des particularités du financement et du contexte d'escroquerie qui l'entoure ;
Que dès lors, l'appréciation par le tribunal saisi de l'action en paiement de la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS, subrogée dans les droits de la BANQUE PALATINE du fait des paiements effectués qui sont justifiés par deux quittances subrogatives du 13 mars 2010 pour un montant total de 328 569,51 euros, et qui bénéficie du recours personnel propre des articles 2305 et 2306 du code civil, à l'encontre des emprunteurs qui peuvent notamment lui opposer, dans cette instance civile, tous les moyens relatifs aux violations du code de la consommation qu'ils développent dans les présentes conclusions et d'une manière générale tous les moyens nécessaires à leur défense au fond, est indépendante de l'appréciation du bien fondé de leur action exercée devant le tribunal de grande instance de Marseille en responsabilité pour faute à l'encontre de l'organisme prêteur qui leur a accordé ces prêts pour acquérir des biens immobiliers et de l'appréciation du préjudice qui en résulterait pour eux ;
Qu'il n'existe donc pas de risque de contrariété entre les décisions à intervenir, la validité des actes n'étant pas en cause ;
Que les conditions exigées par l'article 101 du code de procédure civile n'étant pas réunies en l'espèce, l'ordonnance déférée sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a rejeté l'exception de connexité présentée par les époux [E] ;
Sur la demande de sursis à statuer
Attendu qu'aux termes de l'article 771 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure ;
Attendu par ailleurs que l'article 73 du code de procédure civile définit l'exception de procédure comme « tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours » ;
Qu'il résulte des dispositions combinées de ces textes que, contrairement à ce que soutient la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS, la demande de sursis à statuer jusqu'à l'issue d'une procédure pénale, dès lors qu'elle tend à suspendre le cours de l'instance, constitue une exception de procédure, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre un sursis obligatoire et un sursis facultatif, et entre en conséquence, comme telle, dans le champ de compétence du juge de la mise en état et de la cour lorsqu'elle statue, comme en l'espèce, dans les limites des pouvoirs du premier juge ;
Que dès lors le moyen tiré de l'incompétence du juge de la mise en état doit être écarté ;
Attendu que, sur le bien fondé de la demande de sursis à statuer, les époux [E] incriminent « le package patrimonial » vendu par la société APOLLONIA et exposent que les prêts consentis par la BANQUE PALATINE sont le résultat d'une collusion frauduleuse entre la société Apollonia et les notaires impliqués dans le dossier, lesquels sont mis en examen et que les lots financés par la BANQUE PALATINE ne peuvent en être dissociés ; qu'ils insistent sur la situation de surendettement anormale des prêts litigieux ;
Qu'ils allèguent que la BANQUE PALATINE et son subrogé, la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS, sont responsables des agissements frauduleux de la société APOLLONIA en application des articles L. 519-1 du code monétaire et financier et 1384 du code civil ; que la caution est partie au montage frauduleux dès lors qu'elle ne pouvait ignorer les irrégularités affectant le dossier de financement ainsi que le risque de surendettement des emprunteurs et a ainsi accepté en toute connaissance de cause d'apporter sa garantie à l'opération litigieuse ; qu'elle aurait dû à tout le moins refuser le règlement ;
Qu'ils ajoutent que les actes de prêts sont contestés dans leur régularité et que seule la procédure pénale permettra de se prononcer sur les conditions d'octroi des prêts, sur le caractère faux et de déterminer les éventuelles collusions frauduleuses ;
Qu'ils prétendent que le sursis à statuer s'impose en application tant de l'article 4 du code de procédure pénale que de l'article 312 du code de procédure civile, ce dernier texte édictant un sursis à statuer obligatoire, compte tenu du fait que leur notaire a été mis en examen pour faux en écritures publiques ;
Mais attendu que le tribunal de grande instance de Dunkerque est saisi de l'action engagée par la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS, caution qui a payé à la BANQUE PALATINE la dette des époux [E] alors qu'il n'est pas contesté qu'ils ont reçu les fonds empruntés destinés à l'acquisition des biens à vocation locative ;
Que l'argumentation des époux [E] fondée sur la nullité pour faux et usage de faux des actes notariés ne peut justifier le prononcé d'un sursis à statuer sur le fondement de l'article 312 du code de procédure civile dès lors que les prêts litigieux n'ont pas été régularisés par actes notariés, seules les ventes ayant été souscrites par acte authentique ;
Qu'en tout état de cause, les conditions d'application de l'article 312 du code de procédure civile ne sont pas réunies en l'absence de procédure d'inscription de faux incidente telle que prévue par les articles 306 et suivants du code de procédure civile ;
Attendu ensuite que selon l'article 4 du code de procédure pénale, la mise en mouvement de l'action publique n'impose le sursis que sur le seul jugement de l'action civile exercée devant la juridiction civile en réparation du dommage causé par l'infraction ; que les autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu'elles soient, ne sont pas soumises à l'obligation de suspendre l'instance, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d'exercer directement ou indirectement une influence sur la solution du procès civil ;
Que si une procédure d'instruction est actuellement en cours devant le juge d'instruction de Marseille et concerne notamment la société APOLLONIA, gestionnaire de patrimoine, mise en examen ainsi que ses salariés et commerciaux pour escroquerie en bande organisée, abus de confiance, faux et usage de faux et exercice illégal de l'activité d'intermédiaire en opération de banque, mais également les notaires, mis en examen pour faux en écritures publiques et complicité d'escroquerie en bande organisée, ainsi que d'autres sociétés mises en examen pour escroquerie en bande organisée, abus de confiance, exercice illégal de l'activité d'intermédiaire en opération de banque, faux et usage de faux et les dirigeants et cadres de plusieurs établissements financiers, le prononcé du sursis à statuer dans l'attente de l'issue de cette procédure pénale présente un caractère facultatif pour être demandé dans une instance civile qui ne tend pas à la réparation du préjudice causé par les infractions, en sorte que la décision de suspendre l'instance relève du pouvoir conféré à la discrétion du juge en vue d'une bonne administration de la justice ;
Qu'en l'espèce, si les époux [E] justifient à cet égard avoir par ailleurs déposé le 28 juin 2012 entre les mains du juge d'instruction de Marseille une plainte complémentaire contre X pour tentative d'escroquerie au jugement, faux et usage de faux dénonçant les agissements de la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS à laquelle ils reprochent de poursuivre l'obtention d'un titre exécutoire sur la base d'un acte de prêt, fruit d'une escroquerie, il convient cependant d'observer qu'à supposer que la procédure pénale actuellement en cours porte sur les conditions dans lesquelles des prêts ont été accordés aux appelants par des établissements bancaires dont la société BANQUE PALATINE pour l'acquisition de biens immobiliers qui les auraient conduits selon eux à une situation de surendettement anormale, il n'est pas démontré une incidence des investigations pénales sur les recours subrogatoire et personnel exercés par la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS qui a réglé, en sa qualité de caution, à la société BANQUE PALATINE les emprunts qu'ils n'ont pas remboursés à cette dernière alors qu'ils ne soutiennent pas la nullité des actes de prêt dont le remboursement leur est demandé, ni celui des actes d'acquisition ;
Que de fait, les époux [E] n'entendent solliciter que l'indemnisation du préjudice qu'ils estiment avoir subi du fait des man'uvres frauduleuses dont ils auraient été victimes et ce, par le biais de l'action en responsabilité dirigée contre la société APOLLONIA, les banques, les notaires et la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS et dont ils ont déjà saisi le tribunal de grande instance de Marseille par actes des 29 janvier et 2 décembre 2010, ainsi que précédemment exposé ;
Que ni une bonne administration de la justice, ni le secret de l'instruction auquel ils ne seraient pas tenus en leur qualité de partie civile ne sauraient justifier que la COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS voit retarder probablement de plusieurs années, compte tenu de l'ampleur de l'instruction en cours, l'issue de l'instance qu'elle a introduite ;
Que l'ordonnance sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de sursis à statuer présentée par les époux [E] ;
Sur les frais irrépétibles
Attendu que compte tenu des circonstances de la cause, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles tant de première instance que d'appel ;
PAR CES MOTIFS ;
Statuant publiquement et contradictoirement ;
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Condamne Monsieur [H] [E] et Madame [T] [W], son épouse, aux dépens d'appel qui seront recouvrés par la SELARL Eric LAFORCE conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,
A. DESBUISSONSP. CHARBONNIER