République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 3
ARRÊT DU 20/03/2014
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N° MINUTE :
N° RG : 13/03892
Jugement (N° 13/00191)
rendu le 18 Juin 2013
par le Juge de l'exécution de Saint-Omer
REF : CC/VC
APPELANTS
Madame [U] [T] épouse [B]
née le [Date naissance 3] 1929 à [Localité 2] - de nationalité Française
demeurant : [Adresse 2]
Représentée par Me Bertrand RAMAS-MUHLBACH, avocat au barreau de LILLE
Madame [K] [B]
née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 2] - de nationalité Française
demeurant : [Adresse 4]
Représentée par Me Bertrand RAMAS-MUHLBACH, avocat au barreau de LILLE
Monsieur [Y] [B]
né le [Date naissance 4] 1948 à [Localité 2] - de nationalité Française
demeurant : [Adresse 3]
Représenté par Me Bertrand RAMAS-MUHLBACH, avocat au barreau de LILLE
INTIMÉS
Monsieur [A] [F]
de nationalité Française
demeurant : [Adresse 1]
N'a pas constitué avocat
Monsieur [S] [H]
né le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 1] - de nationalité Française
demeurant : [Adresse 8]
N'a pas constitué avocat
GAEC D'[Adresse 5]
ayant son siège social : [Adresse 7]
Représentée par Me Jean-Sébastien DELOZIERE, avocat au barreau de SAINT-OMER
DÉBATS à l'audience publique du 30 Janvier 2014 tenue par Catherine CONVAIN magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Patricia PAUCHET
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Pierre CHARBONNIER, Président de chambre
Catherine CONVAIN, Conseiller
Benoît PETY, Conseiller
ARRÊT RENDU PAR DÉFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 Mars 2014 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Patricia PAUCHET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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Vu le jugement contradictoire prononcé par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Saint-Omer le 18 juin 2013 ;
Vu l'appel formé le 3 juillet 2013 ;
Vu les conclusions transmises par voie électronique le 3 octobre 2013 pour les consorts [B], appelants ;
Vu les conclusions transmises par voie électronique le 2 décembre 2013 pour le GAEC D'[Adresse 5] et M. [A] [F], intimés ;
Vu l'assignation délivrée le 2 octobre 2013 à M. [S] [H], intimé qui n'a pas constitué avocat ;
Vu l'ordonnance d e clôture rendue le 9 janvier 2014 ;
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Par ordonnance en date du 14 décembre 2010, il a été ordonné l'expulsion de M. [S] [H], de M. [A] [F] et du GAEC D'[Adresse 5], ainsi que de tout occupant de leur chef sous astreinte de
50 € par jour de retard, outre 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par acte d'huissier en date du 6 février 2013, Mme [U] [B] né [T], Mme [K] [B] et M. [Y] [B] ont fait assigner M. [A] [F], M. [S] [H] et le GAEC D'[Adresse 5] devant le juge de l'exécution aux fins de voir condamner solidairement ces derniers à leur payer la somme de 51 520 € au titre de la liquidation de l'astreinte, les condamner solidairement à remettre en état de labours après nettoyage et enlèvement des plantations effectuées au cours de l'année culturale 2010/2011 restituant ainsi la parcelle ZD [Cadastre 1] en bon état, libre de toute occupation, et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard dans le mois de la signification de l'ordonnance à intervenir, pendant un an, les condamner solidairement à leur payer la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les condamner aux entiers dépens.
Aux termes de leurs dernières écritures, les consorts [B] ont fait valoir qu'ils disposaient de droits suffisants pour engager ladite action ; que Mme [B] était titulaire de la moitié des droits indivis dans cette parcelle au titre du conjoint survivant commun en biens et usufruitière du quart subsistant ; que chacun des enfants disposait de un huitième (1/8) ; qu'ils avaient qualité pour engager l'action, compte tenu de leurs droits respectifs dans l'indivision ; que la procédure était donc recevable. Ils ont fait valoir aussi que la parcelle n'avait nullement été libérée ; que la présente ordonnance avait été signifiée régulièrement le 6 janvier 2011 et qu'un commandement de quitter les lieux avait été délivré aux occupants par Maître [W] ; que par courrier en date du 21 avril 2011, le conseil de M. [A] [F] avait informé le conseil des consorts [B] que la parcelle était libre d'occupation ; que cette parcelle se trouvait être
emblavée ; que la culture avait donc poursuivi sa croissance et qu'aucune libération n'avait eu lieu ; que les consorts [B] ne disposaient d'aucun matériel pour remettre en état les parcelles. Ils ont sollicité la condamnation des défendeurs à la somme de 39 500 €. Ils ont soutenu que la mise hors de cause de M. [S] [H] ne pouvait intervenir, la parcelle ZD [Cadastre 1] étant au compte du GAEC depuis le 1er janvier 1999, GAEC qui comportait deux associés M. [A] [F] et M. [S] [H].
En défense, M. [S] [H], par l'intermédiaire de son conseil, a demandé au juge de l'exécution, à titre principal, de débouter les consorts [B] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, de les condamner solidairement au paiement de la somme de 2000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, et à titre subsidiaire, de ramener la demande des consorts [B] à l'euro symbolique et de les condamner solidairement au paiement de la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Au soutien de ses intérêts, il a indiqué ne pas être concerné par le présent litige. Il a précisé qu'il avait existé une mésentente dans le cadre du GAEC et qu'une dissolution de cette société avait été décidée ; qu'il n'avait jamais été occupant de la parcelle litigieuse ; qu'il ne pouvait donc lui être reproché le mauvais état de la parcelle. Il a fait valoir que l'astreinte prévue dans la décision du 14 décembre 2010 concernait uniquement l'obligation de quitter les lieux ; qu'il n'était fait aucune mention d'une quelconque remise en état ; que la parcelle avait été effectivement libérée ; que les consorts [B] avaient récupéré la parcelle en l'état et qu'il ne lui appartenait pas de procéder à la récolte, cette tâche incombant aux propriétaires des terres.
En défense, M. [A] [F], par l'intermédiaire de son conseil, a demandé au juge de l'exécution de constater que les consorts [B] étaient irrecevables, à titre subsidiaire, de débouter les consorts [B] de leurs demandes ; à titre reconventionnel, de condamner les consorts [B] à lui payer la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 1382 du Code civil en réparation du préjudice moral subi, de condamner les consorts [B] aux entiers dépens et de les condamner au paiement de la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Au soutien de ses intérêts, il a fait valoir qu'il manquait deux autres demandeurs à l'action, la rendant irrecevable ; que la décision avait été signifiée le 24 janvier ; que l'astreinte courait donc à compter du 24 février. Il a indiqué n'avoir plus remis les pieds sur la parcelle. Il a souligné que par courrier en date du 13 avril 2011, il était indiqué qu'il procéderait à la destruction de la culture ; que les consorts [B] étaient donc de mauvaise foi.
Par jugement en date du 18 juin 2013, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Saint-Omer a rejeté la fin de non recevoir soulevée par M. [A] [F], condamné solidairement le GAEC D'[Adresse 5], M. [S] [H] et M. [A] [F] à payer à M. [Y] [B], Mme [K] [B] et Mme [U] [B] la somme de 2000 € au titre de la liquidation de l'astreinte provisoire prononcée par la décision du 14 décembre 2010, pour la période de 24 février 2011 au 24 avril 2011, rejeté la demande de dommages-intérêts présentée par M. [A] [F], dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens et dit en conséquence n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au profit de quiconque.
Mme [U] [B] née [T], Mme [K] [B] et M. [Y] [B] ont relevé appel de ce jugement le 3 juillet 2013.
À l'appui de leur appel, Mme [U] [B] née [T], Mme [K] [B] et M. [Y] [B] demandent à la cour d'infirmer le jugement entrepris sur le montant de l'astreinte, de fixer l'astreinte à 51 520 € et de statuer comme de droit sur les dépens.
Le GAEC D'[Adresse 5] et M. [A] [F] demandent à la cour, à titre principal, de constater, dire et juger les consorts [B] irrecevables, à titre subsidiaire, de débouter les consorts [B] de leurs demandes, fins et conclusions, et à titre reconventionnel, de condamner in solidum les consorts [B] à payer à M. [A] [F] la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 1382 du Code civil en réparation du préjudice moral subi et de condamner les consorts [B] en tous les frais dépens de l'instance ainsi qu'au paiement d'une somme de 1500 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [S] [H], cité par acte d'huissier en date du 2 octobre 2013 remis à domicile (à Mme [G] [H] sa mère), n'a pas constitué avocat. L'arrêt sera rendu par défaut conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.
Selon ce qu'autorise l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.
Sur ce,
Sur la recevabilité de l'action des consorts [B]
Attendu qu'aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, « constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée » ; qu'il est constant que cette énumération des fins de non recevoir n'est pas limitative ;
Qu'aux termes de l'article 123 du code de procédure civile, « les fins de non recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt » ;
Qu'aux termes de l'article 124 du code de procédure civile, « les fins de non recevoir doivent être accueillies sans que celui qui les invoque ait à justifier d'un grief et alors même que l'irrecevabilité ne résulterait d'aucune disposition expresse » ;
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Attendu qu'en vertu des articles 467 et 468 du Code civil, dans leur rédaction issue de la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs, applicable le 1er janvier 2009, la personne en curatelle ne peut sans l'assistance de son curateur exercer les actions relatives à ses droits patrimoniaux et introduire une action en justice ou y défendre ;
Qu'en l'espèce, Madame [K] [B] qui a été placée sous curatelle renforcée par jugement du juge des tutelles du tribunal d'instance de Tourcoing en date du 5 décembre 2003, a introduit son action en liquidation d'astreinte avec remise en état sans l'assistance de son curateur ;
Que dès lors, l'action engagée par Mme [K] [B] n'est pas recevable ;
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Attendu par ailleurs qu'aux termes de l'article 815-3 du Code civil, « le ou les indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité, effectuer les actes d'administration relatifs aux biens indivis (...). » ;
Qu'il ressort de l'attestation immobilière en la forme authentique établie le 30 mai 2001 par Maître [S] [Q], notaire associé à [Adresse 6] (Pas-de-Calais) que M. [Z] [I] [B], décédé le [Date décès 1] 2000, a pour ayants droit Mme [U] [T] [B], son épouse survivante, et les quatre enfants vivants nés de leur union (M. [Y] [V] [B], Mlle [K] [O] [B], M. [M] [B] et Mme [C] [B]) héritiers ensemble pour le tout ou divisément chacun pour UN/QUART, sauf les droits d'usufruit de l'épouse survivante, usufruitière légale du quart des biens composant la succession de son défunt mari, en vertu de l'article 767 du Code civil (cf pages 2 et 3 de l'attestation immobilière du 30 mai 2001) ;
Que Mme [U] [T] [B] et M. [Y] [B] ne justifient pas qu'à eux deux, ils disposeraient des deux tiers des biens indivis ;
Que dès lors, leur action en liquidation d'astreinte avec remise en état qui s'analyse comme un acte d'administration, n'est pas non plus
recevable ;
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Attendu en conséquence que le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir soulevée par M. [A] [F] ;
Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive
Attendu que M. [A] [F], faisant valoir que l'action est à double titre abusive en ce qu'elle est irrecevable et mal fondée et que l'intention est incontestablement de nuire aux défendeurs, soutient que ce comportement doit être sanctionné par l'octroi d'une somme de 1500 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral qu'il a subi ;
Attendu toutefois que M. [A] [F] qui se contente d'invoquer l'abus de l'action, sans caractériser aucune intention de nuire ni justifier d'aucun préjudice qu'il qualifie de moral, résultant du caractère abusif de l'action qu'il allègue, doit être débouté de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Attendu que les consorts [B], partie perdante, seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel par application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile et à payer à M. [A] [F] la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS ;
Statuant publiquement et par défaut ;
Infirme le jugement déféré ;
Statuant à nouveau ;
Déclare irrecevable l'action des consorts [B] ;
Déboute Monsieur [A] [F] de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
Condamne les consorts [B] à payer à M. [A] [F] la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne les consorts [B] aux dépens de première instance et aux dépens d'appel.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,
P. PAUCHETP. CHARBONNIER