République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
TROISIEME CHAMBRE
ARRÊT DU 07/06/2018
***
N° de MINUTE : 18/264
N° RG : 16/02565
Jugement rendu le 22 novembre 2007 par le Tribunal de Grande Instance de St Quentin
Arrêt (N° 08/00319) rendu le 09 Avril 2009 par la cour d'appel d'Amiens
Arrêt rendu le 3 mars 2011 par la cour de cassation
DEMANDEUR A LA DÉCLARATION DE SAISINE
Madame Corinne H...
[...]
Représenté par Me Véronique L..., avocat au barreau de Lille
Assisté de Me X..., avocat au barreau de Lille substituant Me Véronique L..., avocat au barreau de Lille
DÉFENDEURS A LA DECLARATION DE SAISINE
SA CBC Banque agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés [...]
Représentée par Me Philippe Y..., avocat au barreau de Lille
Assistée de Me Laurent Z..., avocat au barreau de Lille
Monsieur Michel A...
né le [...] à Lambersart
de nationalité française
[...]
Madame Madeleine B... épouse A...
née le [...] à Pas En Artois
de nationalité française
[...]
Monsieur Benoît A...
né le [...] à Lille
de nationalité française
[...] (Belgique)
Représentés par Me Sylvie C..., avocat au barreau de Douai
Assistés de Me Stefan D..., avocat au barreau de Lille
Monsieur Bertrand E...
de nationalité française
[...]
Madame Laurence A... épouse E...
de nationalité française
[...]
Représentée Me François F..., avocat au barreau de Douai
Assistée de Me Karl G..., avocat au barreau de Lille
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Benoît Mornet, président de chambre
Benoît Pety, conseiller
Sara Lamotte, conseiller
---------------------
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Fabienne Dufossé
DÉBATS à l'audience publique du 12 Avril 2018 après rapport oral de l'affaire par Benoît Mornet
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 07 Juin 2018 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Benoît Mornet, président, et Fabienne Dufossé, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
AVIS DU MINISTÈRE PUBLIC : 6 décembre 2017
Communiquées aux parties le 8 décembre 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 27 mars 2018
***
Exposé du litige
Le 28 juin 2005, la société CBC Banque (la banque) a assigné Maître H... (le notaire) afin de voir dire et juger que le notaire, en ne prenant pas les renseignements hypothécaires suffisants et en ne s'assurant pas de la remise des fonds au premier créancier hypothécaire inscrit, a commis une faute grave engageant sa responsabilité, et le condamner à verser à la banque les sommes de:
- 61 925,47 euros en réparation de son préjudice subi du fait des fautes commises dans l'acte notarié passé le 27 mai 1999 avec la SCI 8 Place JACQUES FEBVIER
- 120 159,59 euros en réparation de son préjudice subi du fait des fautes commises dans l'acte notarié passé le 27 mai 1999 avec la SCI PLACE VANHOENACKER
- 322 220,38 euros en réparation de son préjudice subi du fait des fautes commises dans l'acte notarié passé le 27 mai 1999 avec la SCI DE L'ARCHITECTE I...
- 99 099,93 euros en réparation de son préjudice subi du fait des fautes commises dans l'acte notarié passé le 27 mai 1999 avec la SCI 25 rue SAINT JACQUES.
Le 6 juin 2006, le notaire a assigné en intervention forcée MM. Michel et Benoît A..., Mmes Madeleine et Laurence A... et M. Bernard E... en leur qualité de cautions solidaires des prêts contractés auprès de la banque.
Par jugement du 22 novembre 2007, le tribunal de grande instance de Saint-Quentin a contradictoirement et avant dire droit :
- dit que Maître H... en n'assurant pas l'inscription hypothécaire de 1er rang de la société CBC Banque pour les prêts consentis à la SCI 8 Place Jacques Fébvrier et à la SCI de L'Architecte I... a commis une faute engageant sa responsabilité;
- constaté que la société CBC Banque n'est pas en mesure de chiffrer son préjudice et ordonné la réouverture des débats afin que la demanderesse puisse apporter toute précision utile sur l'importance de son préjudice.
Par arrêt rendu le 9 avril 2009, la cour d'appel d'Amiens a infirmé le jugement et débouté la CBC Banque de l'intégralité de ses prétentions.
Par arrêt rendu le 3 mars 2011, la Cour de cassation a cassé l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Amiens en toutes ses dispositions et renvoyé les parties devant la cour d'appel de Douai, aux motifs que le notaire, tenu de prendre toutes dispositions utiles pour assurer la validité et l'efficacité des actes auxquels il prête son concours ou qu'il a reçu mandat d'accomplir, doit, sauf s'il en est dispensé expressément par les parties, veiller à l'accomplissement des formalités nécessaires à la mise en place des sûretés qui en garantissent l'exécution, dont quelle que soient ses connaissances personnelles, le client concerné se trouve alors déchargé.
Par ordonnance rendue le 3 avril 2012, le magistrat chargé de la mise en état a constaté l'interruption de l'instance par l'effet de la cessation d'activité de la SCP Théry-Laurent, et a radié l'affaire du rôle.
Par conclusions du 30 mars 2016, Maître H... a repris l'instance.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 1er mars 2018, Mme H... , prise en sa qualité de notaire, demande principalement à la cour d'infirmer le jugement et de débouter la société CBC Banque de ses demandes et de la condamner à lui payer une indemnité de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; elle soutient qu'elle n'a commis aucune faute et que la banque ne rapporte pas la preuve d'un préjudice qui est purement hypothétique.
Subsidiairement, elle demande à la cour de condamner solidairement Michel A..., Madeleine B..., Benoît A..., Bertrand E... et Laurence A... à relever et garantir la SCP H... de toutes condamnation qui pourraient être prononcées au profit de la banque, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que Michel A..., Madeleine B..., Benoît A..., Bertrand E... et Laurence A... se sont portés cautions solidaires au titre des prêts contractés par les SCI, et qu'en s'abstenant de respecter leur engagement de caution, ils ont eu un comportement fautif.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 24 novembre 2017, la société CBC Banque demande à la cour, au visa des articles 1147 (ancien), 1382 (ancien), et 1240 (nouveau) du code civil, de :
- débouter Maître H... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- réformer le jugement rendu par le 22 novembre 2007 par le tribunal de grande instance de Saint-Quentin en ce que celui-ci n'est pas entré en voie de condamnation à l'encontre de Maître H... , pour l'ensemble des SCI concernées par les actes notariés du 27 mai 1999,
- dire et juger que Maître H... , notaire a engagé sa responsabilité vis-à-vis de CBC Banque,
En conséquence condamner Maître H... à payer à CBC Banque les sommes de :
- 518,65 euros selon compte arrêté au 20 septembre 2016 outre intérêts au taux de 5,213% l'an jusqu'à complet paiement, au titre de la SCI 57 RUE DE L'ARCHITECTE I...
- 16 885,13 euros selon compte arrêté au 24 octobre 2009 outre intérêts au taux de 5,213% l'an jusqu'à complet paiement, au titre de la SCI 25 RUE ST JACQUES
- 116 778,89 euros selon compte arrêté au 20 septembre 2016 outre intérêts au taux de 5,746 % jusqu'à complet paiement, au titre de la SCI 8 PLACE JACQUES FEVRIER
- 142 227,05 euros selon compte arrêté au 20 septembre 2016 outre intérêts au taux de 5,213 % jusqu'à complet paiement, au titre de la SCI VANHOENACKER;
Débouter en tant que de besoin les consorts A... de l'ensemble de leur demandes, fins et conclusions, si elles venaient à être dirigées contre CBC Banque,
Condamner Maître H... au paiement d'une somme de 20 000 euros, en application des dispositions de l' article 700 du Code de Procédure Civile.
Elle soutient que le notaire a manqué à son obligation d'assurer l'efficacité des actes qu'elle recevait ; la banque précise que si le notaire a bien procédé à l'inscription des hypothèques conventionnelles prévues aux différents actes, elle n'a effectué aucune diligence envers les créanciers dont les inscriptions préexistaient sur les immeubles, en vue qu'ils soient désintéressés et donnent mainlevée de leurs garanties, et elle a remis directement les fonds prêtés par la banque à chacune des SCI.
Elle ajoute qu'elle n'a reçu paiement de ses créances qu'en partie à la suite des liquidations judiciaires des SCI et que si les inscriptions hypothécaires qui avaient été convenues avaient été inscrites au rang voulu, la banque aurait perçu l'intégralité de ses créances.
Elle précise que les sommes réclamées ont nécessairement évolué depuis l'assignation du 28 juin 2005.
Dans leurs dernières conclusions notifiées le 15 novembre 2016, Michel A..., Madeleine B... ép. A... et Benoît A... demandent à la cour de confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Saint-Quentin et de condamner Maître H... à leur payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et dilatoire et une indemnité de 3000euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils soutiennent que le notaire a engagé sa responsabilité à l'égard de la banque en ne prenant pas les sûretés nécessaires ; ils ajoutent que s'ils étaient caution des SCI au titre des prêts souscrits, ils ne doivent aucune garantie au notaire qui a engagé sa responsabilité pour faute à l'égard de la banque, eux-même ayant été condamnés par la cour d'appel de Douai à indemniser la banque.
Dans leurs dernières conclusions notifiées le 4 décembre 2017, Bertrand E... et Laurence A... demandent à la cour de confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Saint-Quentin, et de condamner Maître H... à leur payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi qu'ne indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils soutiennent que leur qualité de caution au titre des prêts souscrits par les SCI n'a aucun lien avec la responsabilité pour faute du notaire et que l'appel en garantie n'a aucun fondement ; ils précisent que la banque n'a pu recouvrer à leur encontre qu'une somme totale de 14 331,42 euros.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 mars 2018
Motifs de la décision
I- Sur la faute du notaire
Il résulte de l'article 1231-1 du code civil (1147 ancien) que le notaire, tenu de prendre toutes dispositions utiles pour assurer la validité et l'efficacité des actes auxquels il prête son concours ou qu'il a reçu mandat d'accomplir, doit, sauf s'il en est dispensé expressément par les parties, veiller à l'accomplissement des formalités nécessaires à la mise en place des sûretés qui en garantissent l'exécution, dont, quelque soient ses compétences personnelles, le client se trouve alors déchargé.
En l'espèce, il est constant que quatre sociétés civiles immobilières, constituées par le consorts A... E..., la SCI du 57 rue de l'architecte I..., la SCI Vanhoenacker, la SCI du [...] , ayant sollicité auprès de la CBC Banque le refinancement des prêts immobiliers qui leur avaient été antérieurement consentis, ont chargé Mme H..., notaire, de la réitération en la forme authentique des offres de prêts de la banque qui prévoyaient, chacune, outre le cautionnement solidaire des associés, l'inscription d'hypothèques sur chacun des immeubles correspondant.
Les actes authentiques reçus par Mme H... le 27 mai 1999 et produits aux débats par la banque mentionnaient :
- le montant et les conditions de remboursement de l'ouverture de crédit consenti par CBC BANQUE à chaque SCI,
- le fait que chacune des SCI consentait à CBC BANQUE en garantie de ses engagements des sûretés sur les immeubles dont chacune était propriétaire, ou le bénéfice d'une caution hypothécaire,
- l'état des inscriptions grevant d'ores et déjà chacun des immeubles affectés en garantie,
- pour chaque SCI en quel rang devait venir la sûreté consentie aux termes de l'acte (premier rang pour les SCI 57 rue de l'architecte I..., SCI place Vanhoenacker, SCI 8 place Jacques Febvrier, et troisième rang pour la SCI 25 rue Saint-Jacques) ;
- la garantie des débiteurs que dans les 15 jours de la signature des actes, les hypothèques seraient inscrite en rang convenu et le resteraient aussi longtemps que la dette n'aurait pas été remboursée.
La banque démontre enfin que les fonds prêtés à chacune des SCI ont été versés en comptabilité du notaire, lequel ne peut dès lors reprocher à la banque d'avoir débloqué les fonds, lesquels étaient destinés à désintéresser les créanciers hypothécaires préexistants.
Il résulte de ces éléments que la notaire était tenue d'assurer l'efficacité de ses actes en veillant à désintéresser les créanciers bénéficiant d'inscription hypothécaires antérieures, et en obtenant en contrepartie leur main-levée, de façon à ce que les hypothèques, qu'elle a par ailleurs bien faites inscrire, vienne en rang utile tel que voulu dans les actes, à savoir en premier rang pour les SCI 57 rue de l'architecte I..., SCI place Vanhoenacker, SCI 8 place Jacques Febvrier, et troisième rang pour la SCI 25 rue Saint-Jacques.
Il résulte ensuite des pièces de la procédure et des conclusions échangées entre les parties que si la notaire a bien procédé à l'inscription des hypothèques conventionnelles prévues aux différents actes, elle n'a effectué aucune diligence envers les créanciers dont les inscriptions préexistaient sur les immeubles, en vue qu'ils soient désintéressés et donnent mainlevée de leurs garanties, et a remis directement les fonds prêtés par la banque à chacune des SCI.
Les échéances des prêts étant restées impayées, les procédures de saisies immobilières ont révélé l'existence d'inscriptions hypothécaires de rang préférable à celle de la banque qui n'a été payée qu'en partie à la suite de ces procédures.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la notaire a manqué à son obligation d'assurer l'efficacité de ses actes en ne procédant pas aux diligences nécessaires, y compris l'affectation des fonds qu'elle avait reçus pour un montant suffisant à l'apurement des créances antérieures garanties, et à l'inscription des hypothèques dont elle avait été chargée.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que Mme H... a commis une faute engageant sa responsabilité à l'égard de la banque.
II- Sur le préjudices de la banque en lien de causalité avec la faute
La faute commise par le notaire a eu pour conséquence immédiate de ne pas permettre à la banque de bénéficier des garanties hypothécaires de premier rang sur 3 des SCI et d'une garantie hypothécaire de 3ème rang sur la SCI 25 rue Saint-Jacques.
Il résulte ensuite du courrier établi par Maître J..., mandataire judiciaire chargé de la liquidation des SCI, adressé le 4 mai 2017 au parquet général à la suite de l'ordonnance du magistrat chargé de la mise en état que les créances de la banque ont été partiellement payées à la suite des liquidation judiciaire des SCI, à savoir :
- pour la SCI 57 rue de l'architecte I... : le mandataire mentionne dans son courrier que la banque avait déclaré une créance d'un montant de 315 774,73 euros et qu'elle a été intégralement désintéressée le 15 juin 2006 à hauteur de 344047,04 euros en principal et intérêts ; la banque ne rapporte donc pas la preuve d'un préjudice concernant le prêt consenti à cette SCI ; la banque sera en conséquence déboutée de sa demande de ce chef.
- pour la SCI 25 rue Saint-Jacques : le mandataire mentionne dans son courrier que la banque avait déclaré deux créances d'un montant total de 104 237,17 euros et qu'elle a été totalement désintéressée de ses créances comme l'ensemble des créanciers de cette procédure ; la banque ne rapporte donc pas la preuve d'un préjudice concernant le prêt consenti à cette SCI ; la banque sera en conséquence déboutée de sa demande de ce chef.
- pour la SCI 8 place Jacques Febvrier : le mandataire mentionne dans son courrier que la banque avait déclaré une créance de 135 709,91 euros demeurée impayée dans le cadre de la liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif le 5 avril 2013. Le mandataire précise que l'actif immobilier situé [...] a été réalisé par voie de saisie immobilière à la requête de la banque Scalbert Dupont, demeurée créancière inscrite en premier rang.
L'acte notarié du prêt consenti à cette SCI par la CBC Banque prévoyait que la créance de la CBC Banque serait garantie en premier rang.
La CBC Banque produit aux débats un décompte de cette créance, dont les contestations alléguées par la notaire ne sont étayées par aucune pièce produite aux débats ; le solde de la créance selon ce décompte, compte tenu d'acomptes payés par les débiteurs cautions, est de 116 778,89 euros.
Le préjudice causé directement à la banque par la faute du notaire peut donc être évalué à cette somme puisque sans la faute du notaire, la banque aurait été intégralement remboursée au titre de son privilège de premier rang.
Il convient donc de condamner Mme H... à payer à la banque la somme de 116 778,89 euros avec intérêts au taux de 5,746% à compter du 20 septembre 2016, date du décompte produit aux débats.
- pour la SCI Vanhoenacker : le mandataire mentionne dans son courrier que l'actif immobilier situé [...] a été vendu 260 000 euros avec répartition du prix avant le prononcé de la liquidation judiciaire, et que la CBC Banque avait déclaré une créance de 279 391,82 euros demeurée impayée dans le cadre de la liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif.
La banque produit aux débats un décompte de cette créance, dont les contestations alléguées par la notaire ne sont étayées par aucune pièce produite aux débats, faisant apparaître un solde de 142 227,05 euros compte tenu des acomptes intervenus depuis la liquidation.
Ces éléments démontrent que si la banque avait bénéficié d'une hypothèque de premier rang comme cela était prévu dans l'acte notarié, elle aurait été intégralement remboursée de sa créance.
Il convient en conséquence de condamner Mme H... à payer à la banque la somme de 142 227,05 euros avec intérêts aux taux de 5,213%, à compter du 20 septembre 2016.
III- Sur la demande de garantie à l'encontre des consorts A... E...
Il résulte des conclusions du notaire que la demande en garantie contre les consorts A... E... ne repose sur aucun fondement juridique.
La responsabilité des professionnels du droit ne présente pas un caractère subsidiaire, de sorte que la mise en jeu de la responsabilité d'un notaire, dont la faute est établie, n'est pas subordonnée à une poursuite préalable contre un autre débiteur, dès lors qu'est certain le dommage subi par sa faute, quand bien même la victime disposerait, contre un tiers, d'une action consécutive à la situation dommageable née de cette faute et propre à assurer la réparation du préjudice.
En l'espèce, la circonstance que les consorts A... E... soient cautions solidaires des prêts consentis aux SCI ne confère aucune garantie au notaire dont la faute est établie et dont les conséquences préjudiciables à la banque ont été évaluées.
Contrairement à ce que soutient le notaire, sa responsabilité ne présente pas un caractère subsidiaire, de sorte que la mise en jeu de sa responsabilité en raison de sa faute établie pour les motifs sus-énoncés n'est pas subordonnée à une poursuite préalable contre les cautions du prêt dès lors qu'est certain, pour les motifs sus-énoncés, le dommage causé par sa faute.
Il convient en conséquence de débouter la notaire de ses demandes à l'encontre des consorts A... E....
IV- Sur les demandes reconventionnelles des consorts A... E...
I résulte de l'article 1241 du code civil (1383 ancien) que l'exercice d'une action en justice ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts qu'en contradictoire à signifier de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol.
En l'espèce, si l'action en garantie à l'encontre des consorts A... E... est pour le moins audacieuse, ceux-ci ne rapportent pas la preuve d'une intention malicieuse ou dolosive de la notaire à leur encontre.
Ils ne démontrent pas plus l'existence d'un préjudice susceptible d'être rattaché à une faute de sorte qu'il ne pourront qu'être déboutés de leurs demande en dommages intérêts à son encontre.
V- Sur les dépens et les demandes d'indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Mme H... succombant à l'instance, elle en supportera les dépens et sera condamnée à payer à la société CBC Banque une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande en revanche de débouter les consorts A... E... de leurs demandes d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs
La cour,
Confirme le jugement rendu le 22 novembre 2007 par le tribunal de grande instance de Saint-Quentin en ce qu'il a dit Mme H..., notaire, a commis une faute engageant sa responsabilité à l'égard de la société CBC Banque;
Y ajoutant :
Condamne Mme H... à payer à la société CBC Banque :
- la somme de 116 778,89 euros avec intérêts au taux de 5,746% à compter du 20 septembre 2016 ;
- la somme de 142 227,05 euros avec intérêts aux taux de 5,213% à compter du 20 septembre 2016 ;
Déboute Mme H... de ses demandes à l'encontre des consorts A... E... ;
Déboute les consorts A... E... de toutes leurs demandes ;
Condamne Mme H... aux dépens de l'instance et à payer à la société Banque CBC Banque une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et déboute les consorts A... E... de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président
F. Dufossé B. Mornet