La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/12/2018 | FRANCE | N°17/06134

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 4, 20 décembre 2018, 17/06134


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 4

ARRÊT DU 20/12/2018



BAUX RURAUX

N° de MINUTE : 18/1451

N° RG 17/06134 - N° Portalis DBVT-V-B7B-RDG

Jugement (N° 51-13-04) rendu le 28 Septembre 2017

par le tribunal paritaire des baux ruraux de Montreuil sur mer

APPELANT



Monsieur [C] [B]

né le [Date naissance 1] 1984 à [Localité 1] (62) - de nationalité française

[Adresse 1]



Représenté par Me Philippe Meillier, a

vocat au barreau d'Arras



INTIMÉES



Madame [J] [F] Épouse [H]

née le [Date naissance 2] 1938 à [Localité 2] (75) - de nationalité française

[Adresse 2]



Madame [O...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 4

ARRÊT DU 20/12/2018

BAUX RURAUX

N° de MINUTE : 18/1451

N° RG 17/06134 - N° Portalis DBVT-V-B7B-RDG

Jugement (N° 51-13-04) rendu le 28 Septembre 2017

par le tribunal paritaire des baux ruraux de Montreuil sur mer

APPELANT

Monsieur [C] [B]

né le [Date naissance 1] 1984 à [Localité 1] (62) - de nationalité française

[Adresse 1]

Représenté par Me Philippe Meillier, avocat au barreau d'Arras

INTIMÉES

Madame [J] [F] Épouse [H]

née le [Date naissance 2] 1938 à [Localité 2] (75) - de nationalité française

[Adresse 2]

Madame [O] [H] épouse [C]

née le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 3] (Congo) - de nationalité française

[Adresse 3]

Représentées par Me Jean-Philippe Verague, avocat au barreau d'Arras

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Pascale Pelissero, président de chambre

Emilie Pecqueur, conseiller

Louise Theetten, conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Elodie Recloux

DÉBATS à l'audience publique du 13 Septembre 2018 après rapport oral de l'affaire par Pascale Pelissero

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 20 Décembre 2018 après prorogation du délibéré du 15 novembre 2018 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pascale Pelissero, président, et Julie Caron, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par acte authentique reçu par Maître [Y], notaire à [Localité 4] le 13 avril 2011, Monsieur [F] [O], son épouse Madame [S] [F], et Madame [J] [F] épouse [H] ont consenti à Monsieur [C] [B] un bail de carrière portant sur une propriété sise à [Adresse 4], dite « [Localité 5] » comprenant un bâtiment à usage d'habitation, des terres à usage de pâtures et des terres à labour, pour une contenance totale de 98 ha 70 a 68 ca, cadastrée section AI [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4], section ZA [Cadastre 5] et [Cadastre 6] et section ZE [Cadastre 7], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 8], étant précisé que sont expressément exclus du bail les bâtiments d'exploitation érigés sur les parcelles cadastrées AI [Cadastre 2] et AI [Cadastre 9] ainsi que la cour de ferme AI [Cadastre 9].

Ce bail a commencé à courir le 10 février 2009 pour une durée de 25 années entières et consécutives pour se terminer le 9 février 2034, précision donnée que Monsieur [C] [B] exploitait les terres depuis 2004, époque à laquelle il avait succédé au précédent exploitant.

Monsieur [F] [O] et Madame [S] [F] épouse [O] ont cédé leurs droits sur les immeubles objet du bail à Madame [O] [H] épouse [C] après l'introduction de la procédure et celle-ci a poursuivi l'instance.

Le 30 mars 2013, les bailleurs initiaux saisissaient le tribunal paritaire des baux ruraux de Montreuil sur Mer aux fins de voir prononcer la résiliation du bail aux torts de Monsieur [C] [B], de voir ordonner son expulsion sous astreinte de 500 euros par jour de retard après un délai de 15 jours, de voir désigner un expert pour décrire l'état de l'habitation et les travaux de remise en état nécessaires, leur coût et de déterminer le préjudice des bailleurs, de voir condamner Monsieur [C] [B] au paiement de la somme de 30 000 euros à titre provisionnel, à valoir sur le coût de la remise en état de la ferme, outre 3500 euros au titre des frais irrépétibles.

Par jugement du 12 janvier 2015, le tribunal paritaire des baux ruraux de Montreuil sur Mer a, avant dire droit, ordonné une mesure d'expertise, commis pour y procéder Monsieur [K] [D], décrit la mission de l'expert, sursis à statuer sur les autres demandes et réservé les dépens.

Monsieur [K] [D] a déposé son rapport le 15 janvier 2016.

Après dépôt du rapport, l'affaire a été évoquée à l'audience du 29 juin 2017 à l'occasion de laquelle Madame [J] [F] épouse [H] et Madame [Q] [H] [H] épouse [C] ont demandé la résiliation, aux torts de Monsieur [C] [B], du bail consenti le 13 avril 2011, que soit ordonnée son expulsion dans un délai de 15 jours suivant la décision à intervenir et passé ce délai sous astreinte de 500 euros par jour de retard, la condamnation de Monsieur [C] [B] au paiement d'une somme de 62 009 euros TTC outre intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la procédure, et celle de 5000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que la mise à sa charge des dépens. À l'audience, elles ont demandé que la décision à intervenir soit assortie de l'exécution provisoire.

Monsieur [C] [B] a demandé le débouté des demandes de Madame [J] [F] épouse [H] et de Madame [Q] [H] [H] épouse [C], de voir dire que la remise en état de l'immeuble leur incombe, de voir condamner les demanderesses à l'exécution sous astreinte des travaux dans les trois mois de la signification du jugement et au paiement d'une somme de 60 397,94 euros outre indemnité procédurale à hauteur de 5000 euros et leur condamnation aux dépens.

Par jugement du 28 septembre 2017, le tribunal paritaire des baux ruraux de Montreuil sur Mer a :

- prononcé la résiliation du bail souscrit le 13 avril 2011 entre les parties,

- ordonné l'expulsion de Monsieur [C] [B] et de tous occupants de son chef sous astreinte de 100 euros par jour de retard qui commencera à courir à compter du jour où le jugement deviendra définitif,

- condamné Monsieur [C] [B] à payer à Madame [J] [F] épouse [H] et Madame [Q] [H] [H] épouse [C] la somme de 33 331,34 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- débouté Monsieur [C] [B] de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné Monsieur [C] [B] à payer à Madame [J] [F] épouse [H] et Madame [Q] [H] [H] épouse [C] la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens en ce compris les frais d'expertise.

Le 17 octobre 2017, Maître Philippe Meillier, avocat de Monsieur [C] [B], a interjeté au nom de son client appel de l'ensemble des dispositions du jugement rendu le 28 septembre 2017.

Après plusieurs renvois, l'affaire a été appelée à l'audience du 13 septembre 2018 à l'occasion de laquelle les avocats des parties ont développé oralement les conclusions déposées, régulièrement visées, en s'y rapportant en tant que de besoin.

Monsieur [C] [B], représenté par Maître Philippe Meillier, demande à la cour de le dire et juger recevable et bien-fondé en son appel, d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de condamner Madame [J] [F] épouse [H] et Madame [Q] [H] [H] épouse [C] à procéder à la réfection de l'immeuble loué selon les devis des entreprises Ferton, Mille et Sergent dans le délai de trois mois à compter de la notification du (jugement) à intervenir et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard pendant un an, de les condamner à lui payer à titre de dommages et intérêts la somme de 60 397,94 euros outre la somme de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise.

Madame [J] [F] épouse [H] et Madame [Q] [H] [H] épouse [C], représentées par Maître Jean-Philippe Verague, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail reçu le 13 avril 2011 aux torts de Monsieur [C] [B], d'ordonner son expulsion et celle de tout occupant de son chef dans un délai de 15 jours suivant la décision à intervenir et passé ce délai sous astreinte de 500 euros par jour de retard, d'infirmer partiellement le jugement en ce qu'il a limité le quantum des condamnations prononcées contre Monsieur [C] [B] et de condamner celui-ci à leur payer la somme de 62 009 euros TTC à titre de dommages et intérêts outre intérêts au taux légal à compter de la date d'introduction de la demande, de le débouter de l'ensemble de ses demandes et de le condamner à leur payer la somme de 7000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Pour l'exposé des moyens des parties, examinés dans les motifs de l'arrêt, il est expressément renvoyé aux conclusions déposées dans leur intérêt auxquelles leurs conseils se sont rapportés.

Puis l'affaire a été mise en délibéré pour arrêt être rendu le 15 novembre 2018. À cette date, à raison d'une surcharge de travail, le délibéré a été prorogé à plusieurs reprises pour arrêt être finalement rendu le 20 décembre 2018 par mise à disposition au greffe.

SUR CE

Sur la demande de résiliation du bail

Sur les dégradations de l'immeuble d'habitation

Il ressort de la lecture du bail liant les parties qu'au titre des charges et conditions, le preneur à l'obligation de maintenir le bien loué en bon état d'entretien et d'avertir le bailleur des usurpations dont il serait victime. Il est expressément stipulé à la rubrique « Occupation : il (le preneur) sera tenu d'occuper personnellement les locaux loués à usage d'habitation » et à la rubrique « Assurances : le preneur est tenu d'assurer la maison d'habitation contre les sinistres dont il serait responsable et de présenter cette attestation d'assurance au bailleur, ce dernier étant lui-même assuré contre l'incendie ». Il est joint une autorisation de sous-location consentie dans le cadre de l'article L 411-35 du code rural du 4 mars 2008 aux termes de laquelle le bailleur, par dérogation aux dispositions du bail et à l'obligation faite au preneur d'occuper les biens loués, autorise le preneur à sous-louer le logement loué à Monsieur [C] [B] dans le cadre d'un bail à effet du 10 février 2003, à Madame [V] [E].

Selon le bail de sous-location du 4 mars 2008, ce contrat était conclu pour une durée de trois années, commençant à courir le 15 octobre 2007 pour se terminer le 14 octobre 2010.

Il était acquis aux débats et jusque dans les propres écritures de l'appelant à hauteur d'appel (page 5) que l'immeuble d'habitation avait été libéré au mois d'août 2010 par Madame [E] et que Monsieur [C] [B] n'avait pas retrouvé de locataire.

Curieusement, il est pour la première fois à hauteur d'appel soutenu par l'appelant que le dernier sous-locataire a quitté l'immeuble le 1er décembre 2010 et la cour est « renvoyée sur ce point à l'attestation de Madame [Z] [E] précisant avoir loué la maison d'habitation de [Localité 5] du 1er septembre 2009 au 1er décembre 2010' ». Il ressort de l'examen de cet écrit daté du 20 mai 2014 qu'il ne remplit pas les conditions de forme édictées par les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile pour être qualifié d'attestation (absence d'indication des renseignements d'identité du scripteur autre que son nom, prénom et adresse, d'un éventuel lien de parenté ou d'alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration.., de mention selon laquelle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur a connaissance qu'une fois attestation l'expose à des sanctions pénales, d'annexes en original ou en photocopie d'un document officiel justifiant de l'identité et comportant sa signature). Cet écrit bien tardif et son contenu ne sauraient emporter la conviction alors qu'il résulte des déclarations constantes jusque là de l'appelant, ainsi qu'il l'a été rappelé dans ses propres écritures devant la cour, mais également devant l'expert commis comme devant l'expert de sa propre compagnie d'assurances (pièce 28), que le dernier sous-locataire avait quitté les lieux en août 2010.

Monsieur [C] [B] prétend que le sinistre dégât des eaux est survenu le 8 décembre 2010 en raison de l'arrêt accidentel de la chaudière gaz suite à une rupture de courant électrique ayant provoqué le gel des canalisations. Il n'est nullement justifié de la survenance d'une coupure d'électricité dans la commune de [Localité 6] le 7 ou 8 décembre 2010. Il ressort en revanche de la lecture des propres pièces de l'appelant qu'il a le 9 décembre 2010 effectué une déclaration de sinistre en indiquant : « je viens par la présente vous informer que ma maison située [Localité 5] à [Localité 6] a été l'objet d'un dégât des eaux constaté le 8 décembre 2010. Suite à une coupure accidentelle de la chaudière au gaz alimentant l'habitation, inoccupée pour le moment, j'ai été victime du gel des canalisations. » et des factures (pièce 7) de Totalgaz, adressées à son père sans qu'en soient expliquées les raisons, qu'une commande de gaz a été effectuée le 14 décembre 2010, soit postérieurement à la découverte du sinistre ; qu'à cet égard, le rapport d'expertise de l'assureur de Monsieur [C] [B] indiquant que le gel des canalisations à l'étage est la résultante d'un arrêt accidentel de la chaudière au gaz suite à une coupure de courant est sans emport, dès lors que l'expert n'a procédé à aucune vérification.

Il n'est pas sérieusement contestable que Monsieur [C] [B] avait au titre des obligations contractuelles lui incombant celle d'occuper personnellement les locaux loués à usage d'habitation et que par dérogation, il était autorisé à sous-louer ces locaux, lesquels devaient être constamment occupés. Cette occupation permanente permettait d'assurer un entretien et un chauffage des lieux loués or, malgré la saison hivernale, le preneur s'est abstenu de veiller à tout le moins, à la mise hors gel des canalisations, quand bien même eût il dû couper l'alimentation en eau ce que par commodité au regard de l'alimentation des bâtiments d'exploitation il s'est abstenu de faire, et de visiter régulièrement les lieux pour s'assurer de leur bon état.

S'agissant des désordres causés postérieurement par les actes de vol ou de vandalisme, à une époque où l'immeuble d'habitation était toujours inoccupé, sans que n'ait été mise en 'uvre la moindre mesure de surveillance effective ou de protection par le preneur qui avait de fait abandonné les lieux et les avaient ainsi livrés à la convoitise des malfaiteurs, Monsieur [C] [B] a également failli à ses obligations contractuelles.

C'est par de justes motifs que le tribunal a écarté l'argumentaire de Monsieur [C] [B] qui tente, pour échapper à sa responsabilité, de déplacer le débat sur les obligations respectives des parties en matière d'assurance. Il sera, en tout état de cause, rappelé qu'à ce titre, la seule obligation pesant sur les bailleresses était, aux termes du contrat de bail, de se faire garantir des risques liés à l'incendie, assurance qu'elles ont justifié avoir souscrite et sans objet en l'espèce alors qu'aucune obligation légale ne leur incombait quant aux risques de dégâts des eaux ou de vol et de vandalisme. Monsieur [C] [B] ne justifie pas avoir rencontré quelconque difficulté pour assurer l'immeuble, ainsi qu'il y était tenu par le bail, de ces risques et d'en avoir avisé les bailleresses lesquelles font justement observer la modestie du plafond d'indemnisation souscrit, ce qui caractérise une exécution déloyale par Monsieur [C] [B] de ses obligations, auprès d'une compagnie qui n'est tenue, quelque soit le contrat, qu'à garantie. Au surplus, alors que l'immeuble était totalement vide de tout meuble, le preneur ne conteste pas avoir perçu une indemnité de 12 476,07 euros en suite de la déclaration du sinistre vol vandalisme mais n'a pas entrepris la moindre réparation.

Il est constant, au vu de l'importance des dégâts et du montant des réparations, que les manquements fautifs du preneur ont compromis la bonne exploitation de l'immeuble d'habitation, et par suite, le bail étant indivisible, du fond loué et le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du bail dont s'agit.

Sur la sous-location alléguée des terres

Il n'y a pas lieu davantage pour la cour que pour le tribunal paritaire des baux ruraux d'examiner le bien-fondé du second grief formé par les intimées à l'encontre de l'appelant, tiré de la sous-location alléguée des terres, au soutien de leur demande en résiliation du bail dont s'agit dès lors qu'il n'est pas contesté que le bail soit indivisible et que sa résiliation a été confirmée pour manquement du preneur à ses obligations de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds.

En conséquence de la résiliation du bail, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné l'expulsion de Monsieur [C] [B] et de tous occupants de son chef à défaut de libération volontaire des lieux loués. Cependant, le recours à la force publique, en tant que de besoin, suffit à assurer l'exécution de cette mesure ainsi qu'il sera dit au dispositif du présent arrêt sans qu'il paraisse nécessaire d'assortir l'expulsion ordonnée du prononcé d'une astreinte, le jugement querellé étant infirmé de ce chef.

Le bail dont s'agit étant résilié aux torts de Monsieur [C] [B], sa demande reconventionnelle de condamnation des bailleresses à effectuer des travaux sous astreinte ne peut prospérer et le jugement sera confirmé en ce qu'il l'en a débouté.

Sur les demandes à titre de dommages et intérêts

La demande à titre de dommages et intérêts de l'appelant qu'il n'hésite pas à chiffrer au montant des loyers qu'il aurait indûment payés alors qu'il ne peut ni occuper ni sous-louer l'immeuble d'habitation a été rejetée par les premiers juges par une disposition qui sera confirmée.

D'une part, Monsieur [C] [B] n'a jamais occupé la maison d'habitation dont s'agit ni manifesté à quelque moment que ce soit son intention de l'occuper, d'autre part, ledit immeuble n'était déjà plus sous-loué lors de la survenance du dégât des eaux et Monsieur [C] [B] ne justifie d'aucune demande de sous-location qu'il aurait dû refuser à raison de l'état des lieux alors et surtout qu'il lui incombait de réparer ou de faire réparer les dommages causés tant par le dégât des eaux que par le vandalisme, conséquences de son inexécution, et/ou de son exécution déloyale, des obligations contractuelles à sa charge et dont il est seul responsable.

Enfin, il ne peut qu'être observé son désintérêt manifeste pour cet immeuble, dès lors qu'il n'en tirait plus profit, qu'il ne justifie, alors qu'il se prétend victime du refus des bailleresses de procéder aux réparations, d'aucune demande de ce chef, ou à tout le moins en réduction du montant du fermage, avant l'introduction de l'instance en résiliation de bail par les bailleurs, et qu'il ne conteste pas avoir perçu de son assureur une indemnité de 12 476,07 euros en suite du sinistre vol-vandalisme, alors que l'immeuble était vide de tout mobilier, sans qu'il ait entrepris la moindre réparation.

À défaut de démonstration d'une faute imputable aux intimées, le débouté de sa demande à titre de dommages et intérêts doit être confirmé.

Le montant des travaux de réparation des dommages dont l'appelant est responsable a été fixé par l'expert à la somme de 62 009,10 euros TTC, sur devis des entreprises Ferton, Mille et Sergent, d'autant moins critiqués par Monsieur [C] [B] qu'il s'en prévaut au soutien de ses propres demandes reconventionnelles.

L'expert, en ce critiqué par les intimées, a appliqué à ce coût un coefficient de vétusté et chiffré le préjudice subi par les bailleresses à la somme de 44 521,63 euros. Les premiers juges ont indiqué retenir ce chiffre, ont déduit de cette somme le montant de celle versée directement aux bailleresses par la compagnie d'assurances du preneur en suite du dégât des eaux, qu'elles contestent avoir perçue, à hauteur de 5190,29 euros, et ont condamné en conséquence Monsieur [C] [B] à leur payer la somme de 33 331,34 euros. Ce montant résulte manifestement d'une erreur de calcul ou d'une erreur matérielle de frappe, malencontreusement reprise au dispositif du jugement entrepris. En effet, à suivre la motivation des premiers juges, il y aurait lieu de condamner Monsieur [C] [B] à payer aux intimées la somme de 39 331,34 euros (44 521,63 - 5190,29).

S'agissant du montant retenu par l'expert, il ressort de la lecture du rapport que l'expert a considéré l'état des lieux établi contradictoirement entre les parties le 15 février 2004 annexé au contrat de bail dont il ressort notamment que la peinture des murs est dans toutes les pièces à rafraîchir, que trois lames du parquet du salon sont à remplacer et que le parquet doit être poncé et vitrifié, qu'il n'existe pas de cumulus dans la chaufferie, que les revêtements de sol à l'étage sont d'un état moyen, qu' a également été retenue une facture produite par Monsieur [C] [B], datée du 10 décembre 2004, pour l'installation et le coût d'une chaudière murale pour la somme de 1679, 99 euros.

Au regard de l'état d'origine des lieux loués, daté de près de 12 ans avant son rapport, sans qu'il ne soit allégué d'autres travaux que ceux retenus par lui, l'expert a appliqué certains abattements (déduction du coût de la chaudière pour une valeur de 2960 euros dès lors que la chaudière vandalisée avait été payée par le preneur, remplacement des lames de parquet déjà défaillantes, ponçage et vitrification') et un coefficient de vétusté, variable selon notamment la nature des réparations, qui n'est pas autrement critiqué par les intimées que par l'affirmation du principe de la réparation intégrale du préjudice subi. S'il est constant que les intimées peuvent prétendre à la réparation intégrale du préjudice par elles subi, elles ne sauraient, ainsi que l'a justement rappelé le tribunal paritaire des baux ruraux, prétendre à davantage et notamment au coût de la remise à l'état neuf des lieux loués, une indemnisation à cette hauteur constituant un enrichissement sans cause.

La cour, comme le tribunal, retiendra, entérinant les conclusions de l'expert, que le préjudice subi par les bailleresses s'élève à la somme de 44 521,63 euros.

L'expert a indiqué, en réponse à un dire de Maître Verague que dans les documents qu'il possède, « il y a un chèque émis par BNP Paribas le 22 septembre 2011 au nom de [H] [F] pour la somme de 5190,29 euros. » Puis s'interroge « cependant ce chèque a-t-il été remis à Madame [H] [F] ». Le tribunal paritaire des baux ruraux a déduit ce montant, quand bien même aurait-il commis une erreur de calcul, du montant du préjudice subi par les bailleresses qui de leur côté, persistent à soutenir ne l'avoir jamais reçu, et donc jamais perçu. Monsieur [C] [B] produit (pièce 30) un courrier à lui adressé par son agent assurance composé d'une lettre datée du 22 septembre 2011 lui indiquant « vous trouverez ci-joint un chèque de 5190,39 euros que nous vous adressons à titre commercial correspondant à la réfection du plancher de la maison située à [Localité 5] la suite au sinistre dégât des eaux survenues le 8 décembre 2010. C'est en effet au propriétaire de couvrir les dommages immobiliers quelque soit la cause du sinistre ... » et d'une lettre chèque d'Axa France Iard adressé à son agent d'assurance avec un chèque d'un montant de 5190,29 euros, tiré sur la banque BNP Paribas, le 22 septembre 2011, portant comme nom de bénéficiaire « Huret de Cacqueray » (sic).

Il n'est cependant pas justifié de la remise de ce chèque à Madame [F] épouse [H] ni de l'encaissement de celui-ci et à l'examen des pièces produites, il n'y a pas lieu de déduire le montant de ce chèque du montant des dommages et intérêts alloués aux bailleresses au paiement desquels Monsieur [C] [B] doit être condamné.

Enfin, une condamnation à dommages et intérêts ne saurait porter intérêts au taux légal avant la décision en fixant le montant et la demande des intimées aux fins de voir courir les intérêts à compter de la date de l'acte introductif d'instance sera rejetée.

En conséquence, infirmant de ce chef le jugement entrepris, la Cour condamnera Monsieur [C] [B] à payer à Madame [J] [F] épouse [H] et à Madame [Q] [H] [H] épouse [C] une somme de 44 521,63 euros à titre de dommages et intérêts outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Sur les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il y a lieu de confirmer les premiers juges en ce qu'en équité, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ils ont condamné Monsieur [C] [B] à payer à Madame [J] [F] épouse [H] et à Madame [Q] [H] [H] épouse [C], ensemble, une somme de 2000 euros. Ajoutant au jugement, pour le même motif et sur le même fondement, la Cour condamnera l'appelant, débouté de sa demande à ce titre, à payer à Madame [J] [F] épouse [H] et à Madame [Q] [H] [H] épouse [C], ensemble, la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par elles à hauteur d'appel, les intimées étant déboutées de leurs plus amples demandes.

La cour confirmera le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Monsieur [C] [B], partie perdante, aux dépens de première instance lesquels comprendront les frais d'expertise et y ajoutant, dès lors qu'il succombe en l'exercice de sa voie de recours, le condamnera aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu par le tribunal paritaire des baux ruraux de Montreuil sur Mer le 28 septembre 2017 en ce qu'il a assorti d'une astreinte à hauteur de 100 euros par jour de retard l'expulsion ordonnée de Monsieur [C] [B] et de tous occupants de son chef commençant à courir du jour où le jugement deviendra définitif et en ce qu'il a condamné Monsieur [C] [B] à payer à Madame [J] [F] épouse [H] et à Madame [Q] [H] [H] épouse [C] la somme de 33 331,34 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Ordonne l'expulsion de Monsieur [C] [B] et de tous occupants de son chef avec, si besoin est, le concours de la force publique, à défaut de libération volontaire des lieux loués dans le mois de la signification du présent arrêt,

Dit n'y avoir lieu à astreinte,

Condamne Monsieur [C] [B] à payer à Madame [J] [F] épouse [H] et à Madame [Q] [H] [H] épouse [C] une somme de 44 521,63 euros à titre de dommages et intérêts outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions,

Ajoutant au jugement entrepris,

Condamne Monsieur [C] [B] à payer à Madame [J] [F] épouse [H] et à Madame [Q] [H] [H] épouse [C], ensemble, la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par elles à hauteur d'appel,

Déboute les parties de leurs autres, contraires ou plus amples demandes,

Condamne Monsieur [C] [B] aux dépens d'appel.

Le greffier,Le président,

J. CaronP. Pelissero


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 4
Numéro d'arrêt : 17/06134
Date de la décision : 20/12/2018

Références :

Cour d'appel de Douai 84, arrêt n°17/06134 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-20;17.06134 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award