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27/02/2020 | FRANCE | N°18/05427

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 2, 27 février 2020, 18/05427


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 2



ARRÊT DU 27/02/2020





****



N° de MINUTE : 20/

N° RG 18/05427 - N° Portalis DBVT-V-B7C-R36E



Jugement (N° 2017002009) rendu le 18 septembre 2018 par le tribunal de commerce de Valenciennes





APPELANTE



SA CIC Nord Ouest agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

ayant son siège

social [Adresse 5]

[Localité 4]

représentée par Me Eric Tiry, constitué aux lieu et place de Me Christophe Doutriaux, avocat au barreau de Valenciennes



INTIMÉE



Mme [H] [M] épouse [W]

n...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 27/02/2020

****

N° de MINUTE : 20/

N° RG 18/05427 - N° Portalis DBVT-V-B7C-R36E

Jugement (N° 2017002009) rendu le 18 septembre 2018 par le tribunal de commerce de Valenciennes

APPELANTE

SA CIC Nord Ouest agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 5]

[Localité 4]

représentée par Me Eric Tiry, constitué aux lieu et place de Me Christophe Doutriaux, avocat au barreau de Valenciennes

INTIMÉE

Mme [H] [M] épouse [W]

née le [Date naissance 1] 1953, de nationalité française

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Jean-Pierre Congos, avocat au barreau de Douai

ayant pour conseil Me Emmanuel Ludot, avocat au barreau de Reims

DÉBATS à l'audience publique du 19 novembre 2019 tenue par Laurent Bedouet magistrat chargé d'instruire le dossier.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Valérie Roelofs

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Laurent Bedouet, président de chambre

Nadia Cordier, conseiller

Agnès Fallenot, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 27 février 2020 après prorogation du délibéré initialement prévu le 30 janvier 2020 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Laurent Bedouet, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 15 octobre 2019

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 7 novembre 2013, la Banque CIC Nord Ouest a consenti à la SAS Société d'Embouteillage [W] (SEG) un prêt professionnel de 200.000,00 euros remboursable en 84 mois.

Pour garantir ce prêt, outre la contre-garantie de la BPI à hauteur de 50 % et le nantissement du fonds de commerce, la banque a recueilli la caution personnelle et solidaire de M. [B] [W] et de Mme [H] [W] à hauteur chacun de 100.000,00 euros.

Le 3 juin 2015, la SEG a conclu avec le CIC Nord Ouest un autre prêt professionnel de 400.000,00 euros, remboursable en 60 mensualités.

Pour garantir ce prêt, outre la contre-garantie de la BPI à hauteur de 35 % et le nantissement du fonds de commerce, la banque a également reçu la caution personnelle et solidaire de M. [B] [W] et de Mme [H] [W] à hauteur chacun de 200.000 euros.

Le 18 avril 2016, le tribunal de commerce de Valenciennes a prononcé le redressement judiciaire de la SEG ; le 26 avril 2016, le CIC Nord Ouest a déclaré sa créance entre les mains du mandataire judiciaire.

Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du 3 octobre 2016.

Par acte d'huissier du 3 mars 2017, le CIC a fait assigner Mme [W] en paiement devant le tribunal de commerce de Valenciennes.

Par jugement contradictoire rendu le 18 septembre 2018, le tribunal de commerce de Valenciennes a :

Vu les articles 1134, 1231-1, 2288, 2313 du code civil ;

Vu les articles L.313-1,L.341-4 du code de la consommation ;

Vu l'article L.3 13-22 du code monétaire et financier ;

- accueilli partiellement le CIC Nord Ouest en ses demandes,

- dit que la déclaration de créances n'est pas nulle et qu'elle a été valablement faite entre les mains du mandataire de justice,

- dit que les cautionnements consentis par Mme [W] ne sont pas manifestement disproportionnés,

- dit que le cautionnement de Mme [W] doit être limité à 25 % ,

En conséquence,

- condamné Mme [W] à payer au CIC Nord Ouest les sommes ci après :

* Quarante deux mille huit cent soixante dix euros trente et un centimes (42.870,3l euros), outre les intérêts au taux conventionnel de 3.15 % à compter du 3 février 2017, date de dernier décompte jusqu'à parfait paiement,

* Cent trois mille trois cent quatre vingt trois euros vingt-deux centimes

(103 383,22 euros), outre les intérêts au taux de 2.85 % à compter du 3 février 2017, date du dernier décompte jusqu'à parfait paiement,

- dit que le CIC Nord Ouest sera déchu du droit aux intérêts:

* du 31 mars 2015 au 13 octobre 2016 pour le prêt de 200.000 euros,

* du 31 mars 2016 au 13 octobre 2016 pour le prêt de 400.000 euros;

- enjoint au CIC Nord Ouest de produire un nouveau décompte,

- débouté Mme [W] de sa demande de dommages et intérêts,

- débouté Mme [W] de sa demande relative au TEG,

- dit n'y avoir lieu d'allouer de part et d`autre une indemnité procédurale sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [W] aux entiers frais et dépens de l'instance. liquides pour frais de greffe à la somme de 67,98 euros.

Par déclaration du 1er octobre 2018, la SA CIC Nord Ouest a relevé appel partiel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 5 mars 2019, la SA CIC Nord Ouest demande à la cour d'appel de :

Vu les articles 1103,1104 et 1193 du Code Civil

Vu les articles 2008 et suivants du même Code,

Réformant partiellement la décision entreprise sur la déchéance et sur le quantum des condamnations,

- condamner en sa qualité de caution solidaire de la SAS D'EMBOUTEILLAGE [W] Madame [W] née [M] [H] à payer au CIC NORD OUEST :

* Au titre du premier prêt la somme de 206.766,44 euros selon arrêté de compte au 2 février 2017 correspondant à 50 % de l'encours, avec intérêts au taux conventionnel de 2,85% l'an du 03 février 2017 jusqu'à parfait paiement,

* Au titre du second prêt la somme de 85.740,62 euros selon arrêté de compte au 2 février 2017 correspondant à 50 % de l'encours, avec intérêts au taux conventionnel de 3,15% l'an du 03 février 2017 jusqu'à parfait paiement,

Et dire n'y avoir lieu à diminuer de 25% l'encours de la Banque,

- réformer la décision à ce qu'elle a estimé le CIC déchu des intérêts conventionnels du 31 mars 2015 au 13 octobre 2016 pour le prêt de 200.000 euros et du 31 mars 2016 au 13 octobre 2016 pour le prêt de 400.000 euros,

- la débouter de ses demandes reconventionnelles et de ses appels incidents,

- condamner Madame [W] née [M] [H] au paiement d'une indemnité d'un montant de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'en tous les frais et dépens.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 30 janvier 2019, Mme [H] [M] ép. [W] demande à la cour de :

Vu les pièces versées aux débats,

- DÉCLARER la SA CIC NORD OUEST CIN mal fondée en son appel,

- L'en DEBOUTER,

Au contraire,

- DÉCLARER Madame [H] [W] bien fondée en son appel incident,

En conséquence

- INFIRMER le jugement entrepris dans la mesure utile,

A titre principal

- DÉCLARER nulle et de nul effet la déclaration de créances effectuée par la société CIC NORD OUEST entre les mains de Me [V] [I], ès-qualités,

En conséquence,

- DÉBOUTER La société CIC NORD OUEST de toutes ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

- DIRE ET JUGER que la société CIC NORD OUEST a commis une faute lourde engageant sa responsabilité à l'égard des cautions tant à l'égard de ses obligations vis-à-vis de la société débitrice qu'à l'égard de son devoir de mise en garde des cautions,

En conséquence,

Vu l'article 1231-1 du Code Civil,

- CONDAMNER la société CIC NORD OUEST à payer à Mme [W] [H] la somme de 300.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

A titre plus subsidiaire,

Vu l'article L341-4, du code de la consommation,

- DIRE ET JUGER que les cautionnements de Madame [W] sont disproportionnés,

En conséquence,

- DÉCHARGER Madame [W] de son engagement de caution,

- DÉBOUTER la société CIC NORD OUEST de toutes ses demandes,

A titre infiniment subsidiaire,

Vu l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier,

- CONSTATER l'absence d'information annuelle de la caution,

- DÉCHOIR la société CIC NORD OUEST de son droit aux intérêts.

A titre infiniment subsidiaire,

- CONFIRMER le jugement,

A minima,

- CONSTATER l'erreur dans les deux TEG indiqués,

En conséquence,

- RÉDUIRE à 338.363,06 et 127.393,97 euros les sommes dues au titre des deux prêts,

- APPLIQUER ensuite le taux de 50%.

- CONDAMNER la société CIC NORD OUEST au paiement d'une somme de

10.000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- LA CONDAMNER en tous les dépens.

SUR CE, LA COUR

Sur la validité de la déclaration de créance

L'intimée soutient que la déclaration de créance qui a été effectuée par le CIC au passif de la société SEG, entre les mains du mandataire judiciaire de cette dernière, l'a été par une personne qui n'avait aucune délégation de pouvoir de sorte qu'elle est nulle et que la créance se trouve de facto éteinte par l'irrégularité commise.

Il résulte toutefois des pièces versées aux débats que suivant acte notarié du 16 mai 2014, la Banque CIC Nord Ouest, représentée par son président directeur général, M [Z] [F], a délégué les pouvoirs qu'il détient de ses fonctions, à 9 salariés de l'entreprise exerçant des fonctions de direction ou d'encadrement pour 'établir et signer toute déclaration de créance, produire tous titres et pièces, affirmer la sincérité de créances (...).'

Figure notamment parmi ces salariés délégataires, Mme [L], directeur du département contentieux de la banque.

S'il est effectivement établi que la lettre de d'accompagnement de la déclaration de créances du 26 avril 2016, adressée à Maître [I], ès-qualités, a été signée par

Mme [E] [T], la déclaration de créances en elle même (deuxième feuillet de la dite lettre) sur laquelle figure le décompte des sommes dues et la demande d'admission, comporte, au recto en bas de page, la mention suivante:

'Déclaration certifiée sincère et véritable.

Pour la BANQUE CIC [Adresse 6] représentée(e) par [R] [L] agissant en vertu d'une délégation de pouvoirs notariée en date du 16 mai 2014

A [Localité 4] le 26.04.2016

Signature autorisée:'

Figure ensuit un encadré avec le cachet suivant :

CIC Nord Ouest

Siège

Département Contentieux

[Adresse 3]

[Localité 4]

lequel est signé à la main et dont il n'est pas contesté qu'il s'agit de la signature de

Mme [L].

C'est donc vainement que l'intimée soutient que la déclaration de créance est irrégulière faute d'avoir été signée par une personne habilitée.

Sur l'irrégularité de la demande tirée de l'absence aux débats de la société BPI France

L'intimée indique que BPI France, qui agit en qualité de fond national de garantie, n'a, à tort, pas été actionnée.

Elle soutient que la demande du CIC aurait en conséquence due être déclarée irrecevable.

Cette fin de non recevoir n'est toutefois pas reprise dans le dispositif de ses écritures de sorte que la cour n' a pas à statuer sur cette prétention, conformément à l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile.

Sur la responsabilité pour faute de la banque vis à vis de la société SEG

Mme [W] reproche à la banque d'avoir accordé à la société le second prêt, d'un montant de 400 000,00 euros, dont l'objet était le remboursement du fonds de roulement, et de ne pas l'avoir mise en garde sur les conséquences de sa signature, alors qu'elle devait tenir compte de l'évaluation prévisible de la situation de la société.

Pour caractériser la faute de la banque, elle fait observer :

- que la SEG se trouvait déjà en difficultés du fait des agissements de son fournisseur de matériel, la société Krones, qui a gravement manqué à ses obligations contractuelles dans la mise en conformité de la chaîne d'embouteillage d'eau de source,

- que l'endettement ainsi mis en place par le CIC, sans vérifier et s'assurer des ratios comptables, relève d'une irresponsabilité contractuelle évidente,

- que la procédure de redressement judiciaire a été ouverte 10 mois après l'octroi de ce crédit, qui n'a servi qu'à masquer l'état de cessation des paiements,

- que le CIC a mis fin à la facilité de trésorerie dont bénéficiait la SEG sous forme de billet à ordre d'un montant de 225 000 euros, pour obtenir des garanties qu'elle n'avait pas auparavant, le fait de prévoir en outre une garantie BPI à hauteur de 70 % et 50 % pour les prêts ne pouvant que déterminer la société à contracter.

Elle ajoute que les deux crédits, d'un montant total de 600 000,00 euros, avec des échéances exhorbitantes et des durées inadaptées de 60 et 84 mois auraient du conduire la banque à mettre en garde la société qui n'aurait jamais dû accepter, à minima, le second prêt.

De ce chef elle sollicite la somme de 300 000,00 euros à titre de dommages et intérêts.

Il est toutefois versé aux débats par le CIC, l'ensemble des pièces et courriers qui ont été adressés par M [B] [W] au CIC au soutien de la demande de prêt.

Il en résulte que le CIC a été destinataire :

- d'une première demande de prêt en 2015, laquelle détaille la situation de l'entreprise au 31 Mars 2015 et ses chiffres clés, explicite l'augmentation de capital décidée et la demande de prêt présentée ainsi que les tableaux prévisionnels fournis,

- de la présentation des statuts de l'entreprise,

- d'un plan de trésorerie prévisionnel particulièrement précis,

- d'un ensemble de relevés statistiques de ses principaux clients et de ses circuits de distribution par le biais d'enseignes de la grande distribution (notamment, Auchan, Carrefour, Intermarché, Leclerc Match, Cora, Netto)

- d'un état des commandes prévisionnelles, des projections de rentabilité de l'entreprise,

- du détail précis, par enseigne, des points de ventes en Ile de France, Hauts de France et Haute Normandie.

L'intimée ne conteste pas par ailleurs, les affirmations du CIC selon lesquelles les parties se sont rencontrées à plusieurs reprises compte tenu de l'importance du dossier et de l'existence d'un pool bancaire.

Il convient dès lors de débouter Mme [W] de sa demande indemnitaire, aucune légèreté ou attitude fautive de la banque n'étant établie quant aux conditions d'octroi des crédits sollicités et obtenus, alors par ailleurs, que le litige ayant existé entre la société SEG et la société Krones est indifférent à la caractérisation d'une quelconque attitude fautive de la banque vis à vis de la société SEG.

Sur le caractère disproportionné des cautionnements

Mme [W] soutient que lorsqu'elle a souscrit les deux cautionnement objet du présent litige, elle s'était déjà engagée par deux cautionnements au profit de la société SEG et de la SCI Hirondelle à hauteur de 473 000 euros, ce qui correspond, avec les cautionnements souscrits en faveur du CIC, à 773 000 euros d'engagements, caractérisant ainsi une disproportion manifeste.

Elle expose dans ses écritures ses revenus ou ressources et détaille la composition de son patrimoine immobilier.

Aux termes de l'article L 332-1 du code de la consommation, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où elle est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Contrairement à ce que soutien l'intimée, les deux'fiches patrimoniales caution' qui constituent les fiches de renseignements adressées à la banque sont versées aux débats par le CIC.

Ces deux documents, datés des 28 octobre 2013 et 20 août 2015, relatifs respectivement aux deux prêts souscrits par la société SEG, pour lesquels les époux [W] se sont engagés en qualité de caution, font état de ce que :

- ceux ci sont mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts,

- ceux ci perçoivent des revenus annuels de 36 000,00 euros (Monsieur), 12 000,00 euros (Madame), 9 500,00 euros en 2013 et 11 000,00 euros en 2015 (en commun),

- aucun crédit n'est en cours,

- au titre des charges ils participent annuellement à hauteur de 6 000,00 euros (en 2013) et 6 500,00 euros (en 2015) à l'entretien des bâtiment de la Sci Hirondelle,

- le montant des cautionnements consentis déclarés s'élève à 473 000,00 euros en 2013 et à 673 000,00 euros en 2015,

- leur patrimoine immobilier, en indivision, est composé de la maison d'habitation pour une valeur de 460 000,00 euros, et d'un appartement à la Clusaz d'une valeur de

450 000,00 euros,

-leur patrimoine mobilier s'élève en 2013 à la somme de 210 832,00 euros et en 2015 à la somme de 265 416,00 euros.

Il est ainsi établi que les cautionnements souscrits par Mme [W] n'apparaissent pas disproportionnés à ses biens et revenus, au sens du texte précité, de sorte que le CIC peut s'en prévaloir.

Sur la déchéance du droit aux intérêts et ses conséquences sur le montant de la créance du CIC

Aux termes de l'article L 313-22 du code monétaire et financier, les établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année, de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.

Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information, jusqu'à la date de communication de la nouvelle information.

Le CIC verse aux débats la copie de lettres, datées des 20 février 2015, 18 février 2016, 17 février 2017, intitulées 'information des cautions' qui détaillent les engagements au 31 décembre 2014, 2015 et 2016. Celle-ci faite apparaître en destinataire M [B] [W] et Mme [H] [W].

Toutefois, la seule production de la copie d'une lettre ne suffit pas à justifier de son envoi à la caution de sorte que le CIC ne rapporte pas la preuve de l'accomplissement des formalités prévues par le texte sus visé depuis la conclusion du prêt.

C'est de manière inopérante que le CIC verse aux débats trois constats d'huissier établis en mars 2015, février 2016 et mars 2017, lesquels explicitent la confection des lettres d'information, leur mise sous pli, l'ouverture de certains d'entre eux par la banque pour s'assurer de leur conformité et l'enlèvement par des véhicules postaux de la totalité des dits courriers, ces actes n'étant pas de nature à justifier de la preuve de l'envoi des courriers à Mme [W].

Le CIC qui n'établit pas le respect des formalités prévues à l'article précité, se trouve en conséquence déchu du droit aux intérêts contractuels depuis la conclusion des contrats de prêt.

Il convient en conséquence de dire, au vu de la déclaration de créance, du décompte, et du tableau d'amortissement fournis, que le montant de la créance du CIC vis à vis de la société SEG s'établi ainsi:

Au titre du prêt de 400 000 euros :

-montant dû au titre du capital au 2 février 2017 : 374 192,28 euros

(capital échu impayé et capital restant dû)

-déduction des intérêts dus depuis la signature du contrat: 29 630,61 euros

TOTAL344 561,67 euros

Au titre du prêt d'un montant de 200 000 euros:

-montant dû au titre du capital au 2 février 2017 :154 050,22 euros

(capital échu impayé et capital restant dû)

-montant dû au titre de l'assurance à cette date : 1 404,81 euros

-déduction des intérêts dus depuis la signature du contrat: 23 519,26 euros

TOTAL 131 935,77 euros

Compte tenu du fait que M et Mme [W] se sont engagés solidairement à hauteur de 200 000,00 euros et 100 000,00 euros, soit, conformément aux stipulations des contrats de cautionnements à 50% de l'encours des prêts, c'est à tort que le tribunal a dit que Mme [W] est tenue à hauteur de 25% et non de 50% du montant des sommes dues au titre de chacun d'eux.

-Sur le taux effectif global des deux prêts

Mme [W] soutient que le taux effectif global stipulé dans le prêt de

200 000,00 euros est erroné, notamment au titre de l'assurance obligatoire et n'intègre pas tous les coûts qui devraient y être de sorte que le montant restant dû au titre de ce prêt s'élève à la somme de 127 393,97 euros.

S'agissant du prêt de 400 000,00 euros elle fait valoir que le taux effectif global n'intègre par l'assurance BPI France et n'est pas établi de manière globale de sorte que le montant restant dû s'élève en réalité à la somme de 338 363,06 euros.

Au soutien de ses prétentions de ce chef elle verse aux débats, pour chacun des prêts concernés une 'étude d'analyse financière' réalisée par 'Y Delaporte Conseils' (pièce n°10 et 11) dont on ignore la profession, la qualité et en quoi il est qualifié pour remettre en cause les modalités de calcul de chaque taux effectif global effectué par la banque.

Ces documents prétendent que les dits taux ne sont pas calculés conformément aux dispositions du code de la consommation.

La cour considère cependant que ces documents ne sont pas de nature à remettre en cause le calcul des taux opéré par le CIC, explicités par ce dernier dans ses pièces 37, 37 bis, 38 et 38 bis desquelles il ressort que les frais, de garantie, relatifs au nantissement du fonds de commerce et à BPI France, ont été pris en compte pour la détermination des TEG de chaque prêt.

Les prétentions de Mme [W] de ce chef sont dès lors inopérantes.

Il résulte de tout ce qui précède que cette dernière doit être condamnée à payer la somme de 172 280,83 euros au titre du prêt de 400 000,00 euros, outre la somme de

65 967,88 euros au titre du prêt de 200 000,00 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 3 février 2017, date de la mise en demeure.

Il n'y a pas lieu à condamnation de quiconque sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné Mme [W] aux dépens de première instance.

Le sens de l'arrêt conduit à la condamner aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement, sauf sur le montant des condamnations mises à la charge de

Mme [H] [M] épouse [W] ;

Statuant à nouveau de ce chef,

La condamne à payer à la SA CIC Nord Ouest les sommes de 172 280,83 euros au titre du prêt de 400 000,00 euros, et 65 967,88 euros au titre du prêt de 200 000,00 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 3 février 2017 ;

Dit n'y avoir lieu à condamnation de quiconque sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

La condamne aux dépens d'appel.

Le greffierLe président

V. RoelofsL. Bedouet


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 2
Numéro d'arrêt : 18/05427
Date de la décision : 27/02/2020

Références :

Cour d'appel de Douai 22, arrêt n°18/05427 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-02-27;18.05427 ?
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