République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 12/05/2022
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N° de MINUTE :
N° RG 20/02206 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TBIH
Jugement (N° 18/09776)
rendu le 20 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Lille
APPELANT
Monsieur [H] [G]
né le 13 juin 1949 à [Localité 9]
demeurant [Adresse 1]
[Localité 4]
représenté et assisté de Me Rodolphe Piret, membre de la SELARL Dragon-Biernacki-Piret, avocat au barreau de Douai
INTIMÉS
Monsieur [T] [G]
né le 02 janvier 1984 à [Localité 3]
demeurant [Adresse 5]
[Localité 6]
Monsieur [S] [G]
né le 09 juillet 1985 à [Localité 3]
demeurant [Adresse 2]
[Localité 3]
Monsieur [K] [G]
né le 17 juillet 1987 à [Localité 3]
demeurant [Adresse 5]
[Localité 6]
représentés par Me Hélène Pontière, avocat au barreau de Lille
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Christine Simon-Rossenthal, présidente de chambre
Emmanuelle Boutié, conseiller
Céline Miller, conseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe
DÉBATS à l'audience publique du 28 février 2022.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 mai 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Christine Simon-Rossenthal, présidente, et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 21 février 2022
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[N] [G], né le 18 avril 1922 à [Localité 6] et [A] [J], née le 12 février 1923 à [Localité 9] se sont mariés le 31 juillet 1948 à [Localité 9] sous le régime de la communauté d'acquêts suivant contrat de mariage reçu par Maître [B] [D], notaire à [Localité 8], le 22 juillet 1948. Aucune modification de ce régime matrimonial n'est intervenue par la suite.
Le couple a donné naissance à deux enfants dénommés [H] et [E].
[N] [G] est décédé le 25 novembre 1989, laissant comme héritiers son épouse [A] [J] et ses deux enfants. [A] [J] a fait valoir son option de 100 % en usufruit de la succession, en application de la donation entre époux résultant du contrat de mariage.
[A] [J] est décédée à son tour le 21 avril 2008, laissant pour lui succéder ses deux enfants.
Il dépendait principalement de la succession de la défunte :
- un immeuble à [Localité 9],
- un immeuble en Espagne,
- des terres agricoles,
- 342 parts de SCPI Notapierre,
- des liquidités bancaires de l'ordre de 20 000 euros.
L'indivision successorale n'a pas été partagée du vivant de [E] [G], qui était placé sous tutelle depuis le 20 janvier 2005.
[E] [G] est décédé le 29 août 2016, laissant pour lui succéder ses trois enfants dénommés [T], [S] et [K], intervenant dans la succession de [A] [J] en qualité d'ayants-droit de leur père prédécédé.
MM. [T], [S] et [K] [G] ont cédé leurs droits indivis dans la maison de [Localité 9] à M. [M] [G] et son épouse, Madame [C] [L] [O] et ont indiqué qu'ils n'étaient pas opposés à l'attribution des terres agricoles au profit de leur oncle. Un accord a également été trouvé sur le partage des parts de SCPI.
Le règlement amiable de la succession a cependant achoppé sur le sort de l'appartement en Espagne, M. [H] [G] souhaitant qu'il soit attribué à ses neveux et ces derniers revendiquant sa vente et le paiement par leur oncle d'une indemnité d'occupation relativement à cet appartement.
Par acte d'huissier du 17 décembre 2018, MM. [T], [S] et [K] [G] ont fait assigner M. [H] [G] devant le tribunal judiciaire de Lille afin d'obtenir principalement l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [A] [J].
Par jugement du 20 mai 2020, le tribunal judiciaire de Lille a :
- Ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [A] [J] ;
- Désigné pour y procéder Maître [P] [F], notaire à [Localité 6] ;
- Dit que M. [H] [G] est redevable, à l'égard de l'indivision, d'une indemnité d'occupation d'un montant de 2 900 euros par an courant à compter du 1er juillet 2014 ;
- Dit que M. [H] [G] est créancier, envers l'indivision, d'une somme de 2 485,07 euros au titre des frais exposés par lui pour la conservation de l'immeuble indivis situé en Espagne ;
- Dit n'y avoir lieu à statuer sur la vente de l'appartement indivis situé en Espagne ;
- Constaté l'accord de MM. [T], [S] et [K] [G] d'une part et de M. [H] [G] d'autre part pour qu'il soit procédé à la vente amiable de l'immeuble indivis situé en Espagne ;
- Dit que les terres indivises seront attribuées à M. [H] [G] ;
- Dit n'y avoir lieu à aucune condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Dit que les dépens seront payés comme frais de partage ;
- Dit en conséquence que le droit de recouvrement direct des dépens de l'avocat ne trouve pas à s'appliquer.
M. [H] [G] a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 18 février 2022, M. [H] [G] demande à la cour de confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a dit que M. [H] [G] devait à MM. [T], [S] et [K] [G] une indemnité pour l'occupation de l'appartement situé en Espagne, en ce qu'il a cantonné la créance de M. [G] sur l'indivision à la somme de 2 485,07 euros et en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande au titre des frais de justice, et statuant à nouveau, de :
- Juger que M. [H] [G] n'est débiteur d'aucune indemnité pour l'occupation de l'appartement situé en Espagne ;
- Juger que la créance de M. [H] [G] sur l'indivision se porte à la somme de 18 268,76 euros à parfaire à la date de l'arrêt des comptes par le notaire chargé de la liquidation ;
- Condamner MM. [T], [S] et [K] [G] in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais de traduction conformément à l'article 695 du code de procédure civile et à lui régler une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Il fait notamment valoir que [A] [J] avait fait faire un jeu de clefs pour l'appartement en Espagne pour chacun de ses deux fils, que les intimés ne rapportent pas la preuve de ce que l'appartement ait été exclusivement occupé par M. [H] [G] et ses enfants et que celui-ci les ait empêché de s'y rendre, étant précisé que le syndic de l'immeuble avait également en sa possession trois jeux de clefs pour permettre l'accès à l'immeuble en l'absence des propriétaires en vue d'éventuels travaux nécessaires, conformément au règlement de copropriété et que ses neveux pouvaient tout à fait s'y rendre en réclamant les clefs par le syndic. Il soutient que dès lors que l'occupation de l'immeuble n'était pas exclusive à son profit, il ne saurait être redevable d'une indemnité d'occupation à l'égard de l'indivision.
Il réclame par ailleurs la fixation au passif de l'indivision successorale de sa créance correspondant aux sommes qu'il a exposées pour la conservation de l'immeuble, le jugement qui lui reconnaît ce droit devant être infirmé en ce qu'il n'a retenu qu'une somme de 2 485,07 euros alors que depuis le décès de [A] [J] en 2008, il a dû supporter seul au nom et pour le compte de l'indivision le règlement complet des charges de copropriété comme des impôts, suivant justificatifs produits aux débats et traduits de l'espagnol, pour un montant total provisoire de 18 268,76 euros dont il est fondé à poursuivre le remboursement par ses coindivisaires à hauteur de la moitié, étant précisé que la créance d'un indivisaire pour gestion des biens indivis ne se heurte pas à la prescription quinquennale de l'article 2277 du code civil recodifiée à l'article 2224 du même code. Il sollicite donc la réformation du jugement et la fixation par la cour de sa créance sur l'indivision à la somme de 18 268,76 euros à parfaire à la date de l'arrêt des comptes par le notaire chargé de la liquidation.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 31 janvier 2022, Messieurs [S], [T] et [K] [G], formant appel incident, demandent à la cour, au visa des articles 1359 et suivants du code de procédure civile, 1686 du code civil et 1377 du code de procédure civile, 699 et 700 du code de procédure civile, de confirmer le jugement rendu le 20 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Lille, à l'exception de ses dispositions relatives à l'indemnité d'occupation due par M. [H] [G] ainsi qu'au montant de la créance que ce dernier revendique, et statuant à nouveau, de :
- Juger que M. [H] [G] est redevable à l'égard de l'indivision d'une indemnité d'occupation d'un montant de 3 600 euros par an à compter du 17 décembre 2013 ;
- Juger que M. [H] [G] est créancier à l'encontre de l'indivision d'une somme de 440,27 euros ;
- Débouter M. [H] [G] de toutes ses demandes plus amples ou contraires ;
- Condamner M. [H] [G] à payer à MM. [T], [S] et [K] [G], la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens de la présente procédure, dont distraction au profit de Maître Hélène Pontiere, en application de l'article 699 du code de procédure civile ;
- Très subsidiairement, faire masse des dépens de la procédure qui devront être réintégrés au sein du passif de la succession de [A] [J].
Ils soutiennent essentiellement qu'en application de l'article 815-9 du code civil, l'indemnité d'occupation due par l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est due même si l'indivisaire n'habite pas effectivement l'immeuble indivis dès lors que l'occupation est exclusive du droit des autres coindivisaires, ce qui est leur cas en l'espèce puisque M. [H] [G] et ses enfants disposent de la jouissance privative de l'appartement en Espagne depuis plus de dix ans, sans qu'eux-mêmes aient pu y avoir accès depuis cette date.
Ils contestent posséder les clefs de l'appartement, ce qui est attesté par le contenu d'un mail adressé par M. [S] [G] à son oncle le 4 juillet 2017. Ils affirment que quand bien même leur père aurait effectivement eu les clefs de l'appartement, ce qui n'est en tout état de cause pas démontré, cela n'est pas leur cas, étant précisé que celui-ci, qui est décédé en 2016, était placé sous tutelle depuis 2005. Ils ajoutent que la réponse apportée à M. [H] [G] à son neveu concernant les clefs démontre clairement son refus catégorique de lui permettre d'accéder à l'appartement. Par ailleurs, ils font valoir que l'attestation du syndic de l'immeuble en date du 28 juillet 2020 selon laquelle 'les propriétaires ont déposé trois jeux de clefs de leur appartement' démontre bien que tous les jeux de clefs étaient en possession de M. [H] [G] qui les a remis au syndic en juillet 2020. Ils en concluent que c'est par une juste appréciation des faits de l'espèce que le tribunal a considéré que les intimés n'avaient pas été en mesure d'exercer des droits concurrents à ceux de M. [H] [G] et que celui-ci doit en conséquence être redevable d'une indemnité d'occupation à l'indivision.
Enfin, ils soutiennent que compte tenu de l'évolution de la valeur locative de l'immeuble, l'indemnité d'occupation peut être évaluée à 3 600 euros par an et ajoutent que leur demande au titre de cette indemnité ayant bien été formulée dès leur assignation délivrée le 17 décembre 2018, l'indemnité d'occupation est due depuis le 17 décembre 2013.
S'agissant de la créance revendiquée par M. [H] [G] à l'encontre de l'indivision, ils font valoir que les documents produits par celui-ci à l'appui de sa demande sont dépourvus de valeur probante, s'agissant de documents en langue espagnol non traduits et d'un décompte qu'il a lui-même élaboré, et qui ne permettent pas d'établir le paiement effectif par ses soins des sommes réclamées. Ils ajoutent que le seul paiement justifié en première instance par M. [H] [G] concernait la somme de 400,27 euros relative aux frais sollicités par l'organisme dénommé 'Urbanizacion Eucc els Olivers', et qu'il convient de limiter à cette seule somme la créance due par l'indivision à M. [H] [G].
MOTIFS DE LA DÉCISION
Liminaire
Aux termes de l'article 562 du code de procédure civile, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
Il sera observé que le jugement déféré n'est contesté qu'en ce qu'il a :
-Dit que M. [H] [G] est redevable, à l'égard de l'indivision, d'une indemnité d'occupation d'un montant de 2 900 euros par an courant à compter du 1er juillet 2014 ;
- Dit que M. [H] [G] est créancier, envers l'indivision, d'une somme de 2 485,07 euros au titre des frais exposés par lui pour la conservation de l'immeuble indivis situé en Espagne ;
- Dit n'y avoir lieu à aucune condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Les autres dispositions de la décision contestée seront donc confirmées.
Sur l'indemnité d'occupation
Aux termes de l'article 815-9 du code civil, 'chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision. (...) L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.'
La jouissance privative résulte de l'impossibilité de droit ou de fait, pour les coindivisaires, d'user de la chose, pour des raisons imputables à l'occupant exclusif. Elle n'est pas due si l'occupation de l'immeuble par un indivisaire n'exclut pas la même utilisation par ses coindivisaires et elle peut être due même en l'absence d'occupation effective des lieux.
L'indemnité d'occupation ayant pour objet de réparer le préjudice causé à l'indivision, pendant la durée de la jouissance privative, par la perte des fruits et revenus de l'immeuble indivis et de se substituer à ces derniers, dont elle emprunte le caractère, elle peut être fixée notamment en référence à la valeur locative de l'immeuble.
C'est de manière pertinente que le premier juge, relevant qu'il résultait du courrier adressé par M. [H] [G] à Miami administraciones SL le 8 août 2012 que sa fille avait occupé l'appartement commun sis à [Adresse 7] jusqu'au 28 août 2010 et que lui-même était venu le 27 septembre 2010 pour l'occuper, en a déduit que M. [H] [G] avait accès à l'appartement et qu'il en détenait les clefs.
Il est par ailleurs exact que pour déterminer l'indemnité d'occupation, la permanence de l'occupation étant inopérante, le fait que M. [H] [G] réside habituellement en France ne doit pas être retenu comme un critère d'appréciation.
Il importe en revanche de déterminer si les co-indivisaires de M. [H] [G] pouvaient exercer leurs droits sur l'appartement de manière concurrente aux siens.
M. [H] [G] allègue que son frère [E], sous tutelle depuis 2005 et décédé en 2016, avait un double de clés qu'il a pu donner à ses fils.
Cependant, aucun élément ne permet de vérifier cette affirmation, notamment en attestant de séjours de [E] [G] ou de ses fils sur place.
Par ailleurs, si M. [H] [G] soutient que les différents trousseaux de clefs étaient à disposition des co-indivisaires auprès du syndic et que ses neveux auraient facilement pu se les procurer pour séjourner sur place, il résulte d'un courriel adressé par M. [S] [G] à son oncle le 4 juillet 2017, qu'il lui annonçait son souhait de se rendre sur place pour faire évaluer l'appartement, lui posait la question de savoir s'il y avait quelqu'un sur place et qu'il lui demandait comment obtenir les clefs si tel n'était pas le cas. Or, en réponse du même jour, M. [H] [G] lui a demandé de faire l'évaluation par un notaire mais ne lui a pas indiqué comment se procurer les clefs.
Cet échange démontre que d'une part que M. [S] [G] n'avait pas les clefs de l'appartement et d'autre part que son oncle ne lui a pas indiqué qu'il pouvait les obtenir par l'intermédiaire du syndic de l'immeuble.
En outre, si le syndic de l'immeuble atteste le 28 juillet 2020 avoir reçu trois jeux de clefs de l'appartement n°38 appartenant aux indivisaires, son attestation n'indique pas la date à laquelle il aurait reçu ces clefs et ne précise pas s'il était missionné pour remettre les clefs aux différents indivisaires lors de leurs passages respectifs.
Enfin, M. [H] [G] se prévaut de pièces en langue espagnol (p.11) pour indiquer qu'il a résilié les contrats d'eau et d'électricité en juin 2018 et que les dernières consommations remontent à novembre 2017, mais les factures produites, en espagnol non traduit, ne permettent pas d'attester de la résiliation desdits contrats, tandis que le diagramme de consommation d'électricité figurant sur l'un de ces documents témoigne d'une consommation d'électricité de juin à novembre 2017, ce qui ne prouve cependant pas que l'appartement n'ait pas été occupé par la suite.
Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'aucun élément n'établissant que MM. [T], [S] et [K] [G] avaient eu la possibilité matérielle d'accéder à l'appartement, notamment par la détention des clés, il en résultait qu'ils n'avaient pas été en mesure d'exercer des droits concurrents à ceux de M. [H] [G] et que celui-ci était redevable d'une indemnité d'occupation.
Sur la fixation de cette indemnité, le seul élément d'appréciation produit est une évaluation de valeur vénale de l'immeuble, estimé à 73 900 euros en octobre 2017, s'agissant d'un appartement de 70 m2, de type résidence secondaire dans un immeuble construit depuis 47 ans, dans une station balnéaire de la côte catalane. Il résulte d'un mail adressé à l'avocat des intimés par le même agent immobilier le 29 juin 2019, que cette valeur peut être augmentée de 10 %. Par ailleurs, il résulte des échanges de mails entre les co-indivisaires et leur notaire, Maître [I], qu'ils étaient tombé d'accord pour les besoins du partage sur une estimation de l'immeuble à 90 000 euros.
Au vu de ces éléments, il convient d'infirmer la décision déférée en ce qu'elle a fixé l'indemnité d'occupation due par M. [H] [G] à la somme de 2 900 euros par an et statuant à nouveau, de fixer l'indemnité d'occupation due par M. [H] [G] à la somme de 3 190 euros par an à compter du 1er juillet 2014, soit cinq ans avant la demande formulée par des conclusions notifiées le 1er juillet 2019.
Sur la créance de M. [H] [G] à l'égard de l'indivision
Aux termes de l'article 815-2 du code civil, 'Tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d'urgence. Il peut employer à cet effet les fonds de l'indivision détenus par lui et il est réputé en avoir la libre disposition à l'égard des tiers. A défaut de fonds de l'indivision, il peut obliger ses coindivisaires à faire avec lui les dépenses nécessaires. (...)'
Par ailleurs l'article 815-13 dudit code dispose que 'Lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.'
Les impôts locaux et charges de copropriété qui ne sont pas relatives à l'occupation privative et personnelle d'un indivisaire doivent figurer au passif du compte de l'indivision et être supportés par les indivisaires proportionnellement à leurs droits dans l'indivision.
La taxe foncière, dont le règlement a permis la conservation de l'immeuble indivis, incombe à l'indivision et doit être supportée par les indivisaires proportionnement à leurs droits dans l'indivision ; la jouissance privative dont l'immeuble a fait l'objet reste sans incidence à cet égard, le préjudice résultant de l'occupation privative étant compensé par l'indemnité prévue à l'article 815-9.
Le premier juge, estimant qu'un certain nombre de pièces produites par M. [H] [G] n'avaient pas de caractère probant en raison soit de leur rédaction en langue espagnole non traduite, soit de l'absence d'explication les accompagnant, a limité la créance dont M. [H] [G] entendait se prévaloir à l'égard de l'indivision à la somme de 2 485,07 euros correspondant d'une part à ce qui semblait être un appel de charges de copropriété par la société Miami administraciones SL du '8 de enero de 2010" d'un montant de 2 014,80 euros rapproché du relevé de compte bancaire de M. ou Mme [H] [G] à la Société Générale de [Localité 3] pour février 2010 qui montre un débit identique et d'autre part, à la somme dont MM. [T], [S] et [K] [G] admettent qu'elle a été payée par leur oncle à la Urbanizacion EUCC Oliviers, soit 470,27 euros.
M. [H] [G], demande à la cour la fixation de sa créance sur l'indivision au titre des dépenses par lui engagées au nom de l'indivision pour la conservation du bien commun à la somme de 18 268,76 euros correspondant à :
- charges de copropriété : 13 796,44 euros dont le paiement est attesté par le syndic de copropriété à hauteur de 12 889,54 euros, outre la somme de 700 euros correspondant à une facture d'électricien réglée directement par lui pour le compte de la copropriété défaillante ;
- charges EUC ELS Olivers : 440,27 euros déduction faite d'un remboursement de 29,77 euros qu'il a déjà perçu ;
- impôts locaux : 4 032,05 euros réglés à la Disputacio de Tarragona.
MM. [T], [S] et [K] [G] sollicitent la limitation de la créance de M. [H] [G] sur l'indivision à la somme de 440,27 euros correspondant au seul paiement justifié en première instance par M. [H] [G] relative aux frais sollicités par l'organisme dénommé 'Urbanizacion Eucc Els Olivers'. Ils font valoir que M. [H] [G] produit à l'appui de sa demande 118 pages de documents pour la majorité en langue espagnole, non traduits, plusieurs décomptes qu'il a lui-même établis, dénués de valeur probante, dont un décompte de charges qu'il ne démontre pas avoir réglées et des tickets de caisse non pertinents qui devront être écartés des débats.
Ceci étant exposé, il résulte des pièces versées en cause d'appel par M. [H] [G] que celui-ci produit désormais la traduction en français des documents en langue espagnole produits en première instance.
Au titre des charges de copropriété, il produit en pièce 5 un décompte établi par ses soins ainsi que les relevés de charges correspondant traduits en langue française, pour un montant de 13 796,44 euros incluant une somme de 700 euros qu'il indique avoir réglé directement à un électricien en lieu et place de la copropriété défaillante. Les relevés de charges, ainsi que l'attestation du syndic de copropriété versé en pièce 7 attestent du règlement régulier des charges à hauteur de la somme totale de 12 889,54 euros, outre la somme de 470,04 euros au titre du paiement des quotes-parts de l'EUC ELS Oliviers. La facture traduite de 700 euros de Santiago Moreno, électricien, pour le raccordement de l'appartement Marblau 38 est également versée aux débats et concordent avec le courrier de réclamation adressé par M. [H] [G] au syndic de copropriété le 8 août 2012. Elle sera donc également retenue.
Au titre des impôts locaux, il produit en pièce 6 un décompte, des avis de recouvrement traduits en français de l'espagnol et des justificatifs de virements bancaires pour un montant total de 3 788,75 euros. Cette somme sera donc retenue à titre de créance sur l'indivision.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a fixé la créance de M. [H] [G] sur l'indivision à la somme de 2 485,07 euros et statuant à nouveau, la créance de M. [H] [G] sera fixée à la somme de 18 055,23 (13 796,44 + 470,04 + 3 788,75) euros.
Sur les demandes accessoires
Le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile.
De la même manière, les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de partage, étant précisé qu'en l'absence de condamnation, le droit de recouvrement direct de l'avocat ne peut pas s'exercer.
L'équité commande de ne prononcer aucune condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme la décision déférée, sauf en ce qu'elle a :
- Dit que M. [H] [G] est redevable, à l'égard de l'indivision, d'une indemnité d'occupation d'un montant de 2 900 euros par an à compter du 1er juillet 2014 ;
- Dit que M. [H] [G] est créancier, envers l'indivision, d'une somme de 2 485,07 euros au titre des frais exposés par lui pour la conservation de l'immeuble indivis situé en Espagne ;
Statuant à nouveau,
- Dit que M. [H] [G] est redevable, à l'égard de l'indivision, d'une indemnité d'occupation d'un montant de 3 190 euros par an à compter du 1er juillet 2014 ;
- Dit que M. [H] [G] est créancier, envers l'indivision, d'une somme de 18 055,23 euros au titre des frais exposés par lui pour la conservation de l'immeuble indivis situé en Espagne ;
- Dit que les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de partage ;
- Dit en conséquence que le droit de recouvrement direct des dépens de l'avocat ne trouve pas à s'appliquer ;
- Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier,La présidente,
Delphine Verhaeghe.Christine Simon-Rossenthal.