COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre des Libertés Individuelles
N° RG 22/01926 - N° Portalis DBVT-V-B7G-USDJ
N° de Minute : 1939
Ordonnance du lundi 31 octobre 2022
République Française
Au nom du Peuple Français
APPELANT
M. [E] [I]
né le 18 Mars 1991 à [Localité 3] - PAKISTAN
déclarant à l'audience qu'il est né à [Localité 1] au Pakistan
de nationalité Pakistanaise
Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]
dûment avisé, comparant en personne par visioconférence
assisté de Me Zubair AHMAD, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, avocat choisi et de M. [C] [P] interprète assermenté en langue ourdoue, tout au long de la procédure devant la cour
INTIMÉ
MME LA PREFETE DE L'OISE
dûment avisée, absente non représentée
PARTIE JOINTE
M. le procureur général près la cour d'appel de Douai : non comparant
MAGISTRAT(E) DELEGUE(E) : Danielle THEBAUD, conseillère à la cour d'appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché
assisté(e) de Véronique THÉRY, greffière
DÉBATS : à l'audience publique du lundi 31 octobre 2022 à 14 h 00
Les parties comparantes ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance sera rendue par mise à disposition au greffe
ORDONNANCE : prononcée à Douai, le lundi 31 octobre 2022 à
Le premier président ou son délégué,
Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et spécialement les articles L 743-21, L 743-23, R 743-10, R 743-11, R 743-18 et R 743-19 ;
Vu l'aricle L 743-8 du CESEDA ;
Vu la demande de l'autorité administrative proposant que l'audience se déroule avec l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle ;
Vu l'accord du magistrat délégué ;
Vu l'ordonnance rendue le 29 octobre 2022 par le Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER prolongeant la rétention administrative de M. [E] [I] ;
Vu l'appel motivé interjeté par Maître AHMAD venant au soutien des intérêts de M. [E] [I] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 31 octobre 2022 ;
Vu le procès-verbal des opérations techniques de ce jour ;
Vu l'audition des parties, les moyens de la déclaration d'appel et les débats de l'audience ;
EXPOSE DU LITIGE
M. [E] [I], ressortissant pakistanais a fait l'objet d'une mesure de placement en rétention administrative ordonnée par madame la préfète de l'Oise et commencée le 30 août 2022 à 18h45 pour 1'exécution d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français délivrée le 22 avril 2022 par madame la préfète de l'Oise.
Par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-mer en date du 2 septembre 2022, confirmée en appel par ordonnance de la cour d'appel de Douai du 03 septembre 2022, son recours en annulation de l'arrêté de placement en détention a été rejeté et le placement en rétention administrative a été prolongé pour une période de 28 jours.
Par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-mer en date du 29 septembre 2022, confirmée en appel par ordonnance de la cour d'appel de Douai du 30 septembre 2022, le placement en rétention de M. [E] [I] a été prolongé de 30 jours.
Vu l'article 455 du code de procédure civile
Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-mer du 29 octobre 2022 ordonnant une troisième prolongation exceptionnelle du placement en rétention administrative de l'appelant pour une durée de 15 jours.
Vu la déclaration d'appel de M. [E] [I] du 31 octobre 2022 à 11h17 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative et à laquelle il sera renvoyé pour l'exposé des moyens de l'appelant.
Au soutien de son appel M. [E] [I] soulève :
- aucune des conditions formelles posées par l'article L 742-5 3° n'est remplie.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il a été considéré par la précédente décision du juge des libertés et de la détention que toutes les diligences utiles pour organiser l'éloignement ont été réalisées dans la précédente période de rétention.
L'article L 742-5 du CESEDA dispose que :
"A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :
1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;
2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :
a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 9° de l'article L. 611-3 ou du 5° de l'article L. 631-3 ;
b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.
Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application du huitième alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours."
L'article L.742-7 du CESEDA dispose que :
"A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-6, dans les conditions prévues à l'article L. 742-5. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas deux cent dix jours."
Il convient de rappeler que lorsque la procédure se situe dans le cadre des articles précités et concerne une demande de troisième ou de quatrième prorogation exceptionnelle du placement en rétention administrative :
-Il n'existe aucune obligation de justification d'une arrivée à "bref délai" des documents et titres en attente pour exécuter l'éloignement dés lors que l'étranger a fait obstruction à la mesure d'éloignement, dans les 15 jours précédents la demande, notamment par des demandes dilatoires d'asile ou de protection.
-En revanche, lorsqu'aucune obstruction ne peut être invoquée à l'encontre de l'étranger, une troisième prorogation exceptionnelle du placement en rétention administrative ne peut être ordonnée que si l'administration française est en mesure de justifier que les obstacles administratifs à la mise en 'uvre de l'éloignement peuvent être levés "à bref délai".
En l'espèce, aucune obstruction ne peut être reproché à M. [E] [I] et l'administration justifie de la délivrance d'un laissez-passer consulaire en date du 26 octobre 2022, à compter de cette date les obstacles administratifs à la mise en 'uvre de l'éloignement ont été levés, elle avait donc jusqu'au 29 octobre pour organiser le départ de M. [E] [I]. Ce qui n'a pas été fait.
Étant rappelé que l'article L 742-5 3° envisage uniquement les nécessités liées à la délivrance des documents de voyage par le pays de destination, et non à l'absence de vol utile dans le temps de la seconde prolongation, et l'organisation matérielle de l'éloignement.
L'application des conditions édictées par l'article L 742-5 du CESEDA sont d'application strictes, la prolongation du placement en rétention administrative au delà de la période de soixante jours n'est donc pas justifiée
En conséquence, la décision querellée sera infirmée, et la rétention de M. [E] [I] levée.
Sur la notification de la décision à M. [E] [I]
En application de l'article R. 743-19 al 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'ordonnance rendue par le premier président ou son délégué est communiquée au ministère public. Elle est notifiée sur place à l'étranger et à son conseil, s'il en a un, ainsi qu'à l'autorité qui a prononcé la rétention.
Les parties présentes en accusent réception. Le greffier la notifie par tout moyen et dans les meilleurs délais aux autres parties qui en accusent réception.
En l'absence de M. [E] [I] lors du prononcé de la décision, la présente ordonnance devra lui être notifiée par les soins du greffe du centre de rétention administrative et en tant que de besoin, par truchement d'un interprète.
PAR CES MOTIFS
DÉCLARE l'appel recevable ;
INFIRME l'ordonnance entreprise,
Statuant à nouveau,
ORDONNE la levée de la rétention administrative de M. [E] [I].
DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;
DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [E] [I] par l'intermédiaire du greffe du centre de rétention administrative par truchement d'un interprète en tant que de besoin, à son conseil et à l'autorité administrative ;
LAISSE les dépens à la charge de l'État.
Véronique THÉRY, greffière
Danielle THEBAUD, conseillère
A l'attention du centre de rétention, le lundi 31 octobre 2022
Bien vouloir procéder à la notification de l'ordonnance en sollicitant, en tant que de besoin, l'interprète intervenu devant le premier président ou le conseiller délégué : M. [C] [P]
Le greffier
N° RG 22/01926 - N° Portalis DBVT-V-B7G-USDJ
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE 1939 DU 31 Octobre 2022 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l'intéressé au greffe de la cour d'appel de Douai par courriel - [Courriel 4]) :
Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Pour information :
L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Reçu copie et pris connaissance le
- M. [E] [I]
- par truchement téléphonique d'un interprète en tant que de besoin
- nom de l'interprète (à renseigner) :
- décision transmise par courriel au centre de rétention de pour notification à M. [E] [I] le lundi 31 octobre 2022
- décision transmise par courriel pour notification à MME LA PREFETE DE L'OISE et à Maître Zubair AHMAD le lundi 31 octobre 2022
- décision communiquée au tribunal administratif de Lille
- décision communiquée à M. le procureur général
- copie au Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER
Le greffier, le lundi 31 octobre 2022
N° RG 22/01926 - N° Portalis DBVT-V-B7G-USDJ