COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre des Libertés Individuelles
N° RG 22/02076 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UTCU
N° de Minute : 2089
Ordonnance du mardi 22 novembre 2022
République Française
Au nom du Peuple Français
APPELANT
M. [K] [B]
né le 19 Février 1990 à [Localité 5]
de nationalité Tunisienne
Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 3]
dûment avisé, comparant en personne par visioconférence
assisté de Me Pauline NOWACZYK, avocat au barreau de DOUAI, avocate commise d'office et de M. [L] [J] interprète assermenté en langue arabe, tout au long de la procédure devant la cour, serment préalablement prêté ce jour
INTIMÉ
M. LE PREFET DU NORD
dûment avisé, absent non représenté
PARTIE JOINTE
M. le procureur général près la cour d'appel de Douai : non comparant
MAGISTRATE DELEGUEE : Bertrand DUEZ, conseiller à la cour d'appel de Douai désignée par ordonnance pour remplacer le premier président empêché
assistée de Jean-Luc POULAIN, Greffier
DÉBATS : à l'audience publique du mardi 22 novembre 2022 à 08 h 30
Les parties comparantes ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance sera rendue par mise à disposition au greffe.
ORDONNANCE : rendue à Douai par mise à disposition au greffe le mardi 22 novembre 2022 à 14h00
Le premier président ou son délégué,
Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et spécialement les articles L 743-21, L 743-23, R 743-10, R 743-11, R 743-18 et R 743-19 ;
Vu l'aricle L 743-8 du CESEDA ;
Vu la demande de l'autorité administrative proposant que l'audience se déroule avec l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle ;
Vu l'accord du magistrat délégué ;
Vu l'ordonnance rendue le 20 novembre 2022 par le Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER prolongeant la rétention administrative de M. [K] [B] ;
Vu l'appel motivé interjeté par M. [K] [B] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 21 novembre 2022 ;
Vu le procès-verbal des opérations techniques de ce jour ;
Vu l'audition des parties, les moyens de la déclaration d'appel et les débats de l'audience ;
M. [K] [B] de nationalité tunisienne a fait l'objet d'un placement en rétention administrative ordonné par monsieur le Préfet du Nord le 18/11/2022 à 14h40 pour l'exécution d'un éloignement vers le pays de nationalité au titre d'une mesure de refus de renouvellement de carte de séjour et d'obligation de quitter le territoire français sous délai de 30 jours délivrée le 03 juin 2022.
' Vu l'article 455 du code de procédure civile
' Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Boulogne-sur-Mer en date du 20 novembre 2022 (12h32),ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de l'appelant pour une durée de 28 jours et rejetant la requête en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative.
' Vu la déclaration d'appel du 21 novembre 2022 à 11h56 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative
Au titre de sa déclaration d'appel M. [K] [B] soulève les moyens suivants :
Erreur d'appréciation quant aux garanties de représentation en ce que l'autorité préfectorale connaissait l'adresse de l'appelant : [Adresse 1], adresse à laquelle les demandes de titre de séjour ont été faites et qui figure sur le dossier judiciaire saisissant le conseil des prud'hommes en contestation du licenciement cause du non renouvellement du titre de séjour.
Incompatibilité du placement en rétention avec la procédure prud'homale en cours
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) L'erreur manifeste d'appréciation doit s'apprécier par rapport aux éléments de fait dont disposait l'autorité préfectorale au moment où l'arrêté de placement en rétention a été adopté et non au regard des éléments ultérieurement porté à la connaissance de la cour.
Aux termes des articles L 731-1 et L 731-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné à l'article L 612-2,3°, qu'il se soustraie à cette obligation.
Il s'en suit que le fait de justifier disposer 'd'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale' conforme à l'article L.612-3,8°du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile peut légitimement être considérée par l'autorité préfectorale comme néanmoins insuffisante pour accorder à l'étranger une assignation à résidence sur le fondement des articles précités, dés lors que d'autres éléments de fait permettent raisonnablement de considérer que l'étranger n'entend pas se conformer à l'obligation de quitter le territoire français.
Le moyen tiré de 'l'inutilité du placement en rétention administrative' relève en fait du contrôle de proportionnalité que le juge doit effectuer sur la mesure privative de liberté.
Le contrôle de proportionnalité doit évaluer la privation de liberté ordonnée par l'autorité administrative au regard de l'objectif de cette mesure, à savoir le risque de soustraction à l'exécution de la mesure d'éloignement tel que défini par les articles L 741-1 et L 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En l'espèce l'arrêté de placement en rétention administrative retient au titre des motifs qui le soutendent :
le fait que M. [K] [B] ait déclaré une autre identité lors de son interpellation
le fait que M. [K] [B] indique que son passeport se trouve en Tunisie
le fait qu'il déclare vouloir demeurer en France et ne pas accepter la mesure d'obligation de quitter le territoire français exécutoire
M. [K] [B] a été interpellé suite à un contrôle d'identité effectué sur réquisiiton du placement en rétention administrative de [Localité 7] le 17/11/2022 [Localité 4] à [Localité 8].
Lors de son interpellation il a donné l'identité de [P] [Z], identité qu'il a maintenu jusqu'en audition et qui n'a été rectifiée que par la consultation des fichiers biométriques.
Lors de son audition il a effectivement donné comme adresse [Adresse 2] mais a également indiqué ne pas vouloir quitter la France.
Il n'a cependant donné dans le cadre de cette audition aucun renseignement quant au fait qu'il aurait contesté son licenciement devant le conseil des prud'hommes et que cette action en Justice serait la raison de sa volonté de ne pas quitter la France.
Par ailleurs l'obligation de quitter le territoire français délivrée par monsieur le Préfet du Nord n'est pas uniquement fondée sur le licenciement de M. [K] [B] mais principalement sur les antécédants pénaux de l'intéressé et la menace à l'ordre public retenue par l'autorité préfectorale.
En conséquence et en l'espèce, l'autorité préfectorale n'a pas commis d'erreur d'appréciation en ordonnant le placement en rétention administrative de l'intéressé.
2) Enfin, à supposer comme il l'affirme en le justifiant par des pièces versées à l'audience, que M. [K] [B] ait engagé une instance devant le conseil des prud'hommes en contestation de son licenciement, ce dernier dispose parfaitement de la possibilité de se faire représenter dans cette instance civile par un avocat ou un représentant syndical sans devoir être présent à l'audience.
En tout état de cause à supposer que M. [K] [B] ait la volonté d'assister à l'audience du conseil des prud'hommes, il dispose du droit de solliciter un visa court séjour à cette fin, visa que l'autorité préfectorale ne pourra lui refuser ayant compétence liée sur ce point. CE : 06/06/2007 N° 292076 ; 6ème et 1ère sous-sections réunies
Le moyen sera donc rejeté.
Sur la notification de la décision à M. [K] [B]
En application de l'article R. 743-19 al 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'ordonnance rendue par le premier président ou son délégué est communiquée au ministère public. Elle est notifiée sur place à l'étranger et à son conseil, s'il en a un, ainsi qu'à l'autorité qui a prononcé la rétention.
Les parties présentes en accusent réception. Le greffier la notifie par tout moyen et dans les meilleurs délais aux autres parties qui en accusent réception.
En l'absence de M. [K] [B] lors du prononcé de la décision, la présente ordonnance devra lui être notifiée par les soins du greffe du centre de rétention administrative et en tant que de besoin, par truchement d'un interprète.
PAR CES MOTIFS :
DÉCLARE l'appel recevable ;
CONFIRME l'ordonnance entreprise ;
DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;
DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [K] [B] par l'intermédiaire du greffe du centre de rétention administrative par truchement d'un interprète en tant que de besoin, à son conseil et à l'autorité administrative.
LAISSE les dépens à la charge de l'État.
Jean-Luc POULAIN, Greffier
Bertrand DUEZ, conseiller
A l'attention du centre de rétention, le mardi 22 novembre 2022
Bien vouloir procéder à la notification de l'ordonnance en sollicitant, en tant que de besoin, l'interprète intervenu devant le premier président ou le conseiller délégué : M. [L] [J]
Le greffier
N° RG 22/02076 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UTCU
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE DU 22 Novembre 2022 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l'intéressé au greffe de la cour d'appel de Douai par courriel - [Courriel 6]) :
Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Pour information :
L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Reçu copie et pris connaissance le
- M. [K] [B]
- par truchement téléphonique d'un interprète en tant que de besoin
- nom de l'interprète (à renseigner) :
- décision transmise par courriel au centre de rétention de pour notification à M. [K] [B] le mardi 22 novembre 2022
- décision transmise par courriel pour notification à M. LE PREFET DU NORD et à Maître [Y] [M] le mardi 22 novembre 2022
- décision communiquée au tribunal administratif de Lille
- décision communiquée à M. le procureur général
- copie au Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER
Le greffier, le mardi 22 novembre 2022
N° RG 22/02076 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UTCU