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08/06/2023 | FRANCE | N°20/01494

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 08 juin 2023, 20/01494


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 08/06/2023





****





N° de MINUTE :

N° RG 20/01494 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S6YE



Jugement (N° 18/07990) rendu le 28 février 2020 par le tribunal judiciaire de Lille







APPELANT



Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble '[5]'

prise en la personne de son syndic Safir Immo Investissement

ayant son siège soc

ial [Adresse 1]

[Adresse 1]



représenté par Me Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assisté de Me Kathia Beulque, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant, substitué à l'audien...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 08/06/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 20/01494 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S6YE

Jugement (N° 18/07990) rendu le 28 février 2020 par le tribunal judiciaire de Lille

APPELANT

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble '[5]'

prise en la personne de son syndic Safir Immo Investissement

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assisté de Me Kathia Beulque, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant, substitué à l'audience par Me Marion Mabriez, avocat au barreau de Lille

INTIMÉS

Madame [W] [O]

née le 26 février 1966 à [Localité 4]

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 1]

Monsieur [U] [T]

né le 07 février 1949 à [Localité 6]

Madame [H] [I] épouse [T]

née le 01 octobre 1955 à [Localité 3] (Maroc)

demeurant ensemble [Adresse 2]

[Adresse 2] (Belgique)

représentés par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistés de Me Odile Desmazières, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant

DÉBATS à l'audience publique du 24 novembre 2022 tenue par Bruno Poupet magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Bruno Poupet, président de chambre

Céline Miller, conseiller

Camille Colonna, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 08 juin 2023 après prorogation du délibéré en date du 02 mars 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 17 novembre 2022

****

La résidence du [5] est un ensemble immobilier situé [Adresse 1] à [Localité 7], comportant 146 lots soumis au statut de la copropriété et ayant depuis 2014 pour syndic la société Safir Immo Investissement.

Mme [W] [O] est propriétaire de lots au sein de cette résidence, M. et Mme [T]-[I] l'ont été jusqu'au mois de juin 2021.

Par un jugement en date du 28 février 2020, le tribunal judiciaire de

Lille, saisi par ces derniers, a notamment :

- dit les époux [T] et Mme [O] :

* irrecevables en leur demande d'annulation des contrats de syndic en date du 1er mars 2017 et 18 avril 2018,

* recevables à contester l'assemblée générale du 18 avril 2018,

* irrecevables à solliciter la condamnation de Safir Immo Investissement au profit du syndicat des copropriétaires,

- annulé l'assemblée générale du 18 avril 2018,

- rejeté la demande tendant à la désignation d'un administrateur provisoire,

- condamné Safir Immo Investissement à payer à M. et Mme [T] la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le syndicat des copropriétaires aux dépens,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble  [5]  a interjeté appel de ce jugement et, aux termes de ses dernières conclusions remises le 15 novembre 2022, demande à la cour de :

- confirmer ledit jugement en ce qu'il a dit les époux [T] et Mme [O] irrecevables en leur demande d'annulation des contrats de syndic en date du 1er mars 2017 et 18 avril 2018, débouté les époux [T] et Mme [O] de leurs demandes se fondant uniquement sur la nullité desdits contrats de syndic, à savoir notamment « annuler les conventions et procès-verbaux d'assemblée générale des copropriétaires du 18 avril 2018'», rejeté leur demande tendant à la désignation d'un administrateur provisoire, débouté les époux [T] et Mme'[O] de leurs autres demandes dont le tribunal était saisi, ce qui n'était pas le cas de leur demande de désignation d'un conseil syndical restreint provisoire,

- l'infirmer en revanche en ce qu'il a dit les époux [T] et Mme [O] recevables à contester l'assemblée générale du 18 avril 2018, a annulé l'assemblée générale du 18 avril 2018, a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, l'a condamné aux dépens et l'a débouté du surplus de ses demandes,

- rejeter l'appel incident des époux [T] et de Mme [O] pour le juger irrecevable et à défaut mal fondé,

- déclarer les époux [T] et Mme [O] irrecevables à contester l'assemblée générale du 18 avril 2018,

- les débouter de leur demande d'annulation de l'assemblée générale du 18 avril 2018, que ce soit dans son ensemble ou en certaines de ses résolutions,

- les débouter de l'intégralité de leurs demandes,

- les condamner solidairement, à défaut in solidum, à lui payer la somme de 5 000 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens avec droit pour la SCP Processuel de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

subsidiairement, pour le cas où la cour confirmerait la recevabilité de la contestation de l'assemblée générale du 18 avril 2018 et son annulation, ou annulerait la résolution n° 5 de l'assemblée générale du 18 avril 2018 :

- dire irrecevable, à défaut mal fondée, la demande de désignation d'un administrateur provisoire confirmant en cela le jugement du tribunal judiciaire de Lille du 28 février 2020, comme cela a été précédemment exposé au besoin par substitution de motifs,

- à défaut, dire et juger que ce n'est que faute de l'envoi dans le mois de la décision définitive à intervenir, par un copropriétaire de la résidence de l'immeuble « [5] », d'une convocation d'une assemblée générale en vue de la désignation d'un syndic, qu'un administrateur provisoire sera désigné avec pour mission de convoquer ladite assemblée en vue de l'élection d'un syndic ;

- débouter les époux [T] et Mme [O] de toutes leurs demandes,

- condamner solidairement, à défaut in solidum, M. et Mme [T]-[I] ainsi que Mme [W] [O] à lui payer la somme de 10 000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel avec droit pour la SCP Processuel de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de leurs dernières conclusions remises le 27 octobre 2022, Mme [O] ainsi que M. et Mme [T] demandent à la cour de :

- infirmer le jugement en ses dispositions qui les a déclarés irrecevables et les a déboutés de leurs demandes contre le syndicat des copropriétaires,

- déclarer recevable leur « action à contester'» l'assemblée générale en date du 18 avril 2018,

- annuler en totalité cette assemblée générale,

- débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes,

- si la cour ne prononçait pas l'annulation de l'ensemble de l'assemblée générale en date du 18.04.2018, annuler les quatrième, cinquième, sixième, septième, huitième, neuvième, dixième, onzième, douzièmes treizième et quatorzième résolutions avec toutes les conséquences de droit,

- confirmer le jugement en ses autres dispositions,

- condamner le syndicat des copropriétaires à leur payer ensemble la somme de

5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens pouvant être recouvrés par Me Laforce conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour l'exposé de leur argumentation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande d'annulation de l'assemblée générale du 18 avril 2018

Sur la recevabilité de cette demande

L'article 480 du code de procédure civile dispose que le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.

L'article 1355 du code civil précise que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; qu'il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

Au cours d'une précédente instance engagée par les époux [T] et Mme [O] le 2 juin 2016 aux fins d'annulation de l'assemblée générale du 30 mars 2016, les demandeurs ont, par voie de conclusions, contesté également l'assemblée générale du 1er mars 2017 puis celle du 18 avril 2018.

Le tribunal, par jugement irrévocable du 17 décembre 2018, les a déclarés irrecevables à contester les assemblées générales de 2017 et 2018 par voie de demandes additionnelles dans le cadre de ladite instance alors que les décisions d'assemblées générales sont autonomes les unes des autres et que leur contestation doit se faire par voie d'assignation.

Mme [O] et les époux [T] avaient parallèlement renouvelé leur demande d'annulation de l'assemblée générale du 18 avril 2018 par assignation en date du 6 juillet 2018, c'est celle dont la cour est aujourd'hui saisie, mais avaient sollicité un sursis à statuer dans l'attente de la décision susvisée du tribunal.

Le syndicat des copropriétaires oppose à cette demande la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 17 décembre 2018.

Il n'est pas contesté que la chose demandée est la même, que la demande est fondée sur la même cause et qu'elle oppose les mêmes parties.

Le syndicat des copropriétaires fait valoir de surcroît que l'autorité de la chose jugée ne s'attache qu'au dispositif de la décision, en l'espèce le prononcé d'une irrecevabilité qui interdirait donc une nouvelle demande identique, peu important le motif de cette décision, tel que le fait, en l'espèce, d'avoir choisi une mauvaise voie de saisine du tribunal ; il invoque en outre le principe de concentration des moyens qui, selon lui, aurait dû conduire le syndicat des copropriétaires à invoquer dès la première instance ceux qui pouvaient plaider en faveur d'une recevabilité et donc à demander la jonction à cette première instance de celle introduite parallèlement par une assignation, faisant ainsi disparaître la cause de l'irrecevabilité.

Cependant, il est constant que lorsqu'une décision d'irrecevabilité a été rendue, une nouvelle demande ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée du moment que la cause d'irrecevabilité a disparu (Cour de cassation, 3è chambre civile, 27 mai 2009) ; c'est ainsi qu'il est également acquis que l'autorité de la chose jugée attachée à un arrêt ayant déclaré irrecevable une demande comme formée pour la première fois en cause d'appel n'interdit pas à son auteur de présenter celle-ci dans une nouvelle instance devant les juges du premier degré (Civ. 1ère, 9 juillet 2009, pourvoi n° 08-17.600). La contestation qu'a tranchée au cas présent le tribunal par son jugement du 17 décembre 2018 est uniquement la question de la recevabilité de la demande additionnelle d'annulation de l'assemblée générale du 18 avril 2018 par voie de conclusions dans une instance ayant initialement un autre objet, ce qui n'excluait pas le renouvellement de la demande par la voie régulière de l'assignation dès lors que celle-ci est intervenue dans le délai de forclusion, ce qui n'est pas discuté, le tribunal ayant par ailleurs écarté pertinemment l'argument tiré du principe de concentration des moyens.

Le jugement mérite donc confirmation en ce qu'il a déclaré recevable la demande litigieuse.

Sur le fond

Les articles 15-1 et 17 du décret du 17 mars 1967, dans leur rédaction issue du décret n° 2020-834 du 2 juillet 2020, disposent notamment :

- que le syndic qui reçoit, en application du troisième alinéa du I de l'article 22 de la loi du 10 juillet 1965, un mandat avec délégation de vote sans indication du nom du mandataire, remet ce mandat en début de réunion au président du conseil syndical ou, à défaut, à un membre du conseil syndical, afin qu'il désigne un mandataire pour exercer cette délégation de vote ; qu'en leur absence ou à défaut de conseil syndical, le syndic remet aux mêmes fins ce mandat au président de séance désigné par l'assemblée générale ;

- que le procès-verbal précise, le cas échéant, si les mandats de vote ont été distribués par le président du conseil syndical, par un membre du conseil syndical ou par le président de séance dans les conditions prévues à l'article 15-1.

Il était déjà constant depuis longtemps, à la date de l'assemblée générale litigieuse, que si le syndic pouvait recevoir des mandats en blanc, il ne pouvait évidemment pas les utiliser lui-même mais pas davantage procéder lui-même à leur distribution et devait les remettre au président du conseil syndical ou au président de séance (une fois celui-ci désigné), chargé de les remettre à des copropriétaires présents acceptant de représenter les absents, le non respect de cette règle étant susceptible d'entraîner la nullité de l'assemblée. Le but poursuivi était déjà la neutralité, par rapport au syndic, de la désignation des mandataires pour les mandats en blancs et le caractère vérifiable des conditions de cette désignation, ce qui a été inscrit en 2020 dans le décret de 1967.

Le tribunal a annulé l'assemblée générale du 18 avril 2018 en relevant que le syndicat des copropriétaires et le syndic, lequel était alors partie à l'instance, n'apportaient pas la preuve de ce que, contrairement aux affirmations des époux [T] et de Mme [O], les mandats en blanc reçus par le syndic n'avaient pas été distribués par celui-ci à des personnes de son choix.

Le procès-verbal de l'assemblée générale ne mentionne pas la façon dont ont été vérifiés les pouvoirs et dont ont été attribués les mandats en blanc reçus par le syndic.

Le syndicat des copropriétaires produit en cause d'appel l'ensemble des pouvoirs de l'assemblée litigieuse, ce qui n'était pas le cas en première instance, avec la liste d'émargement, ainsi que des attestations.

Mme [X] et M. [F] se contentent d'affirmer, outre que l'assemblée s'est tenue dans le strict respect des règles de copropriété, qu'ils ont assisté à la remise des pouvoirs par M.'[E], président de séance, «'aux copropriétaires mandatés'», ce qui est un peu vague mais permet de penser qu'ils visent la remise des mandats en blanc.

L'attestation de M. [E], dont l'authenticité n'est pas contestée bien qu'elle ne soit pas conforme aux exigences posées par l'article 202 du code de procédure civile puisqu'elle n'est pas écrite et datée de sa main, est ainsi rédigée : «'Je soussigné, [Z] [E], président du conseil syndical de la copropriété de la résidence du Parc, atteste que lors du commencement de l'assemblée générale du 18 avril 2018, le syndic m'a remis l'ensemble des pouvoirs qui lui avaient été adressés par courrier. La majorité des pouvoirs étaient nominatifs et je les ai distribués aux copropriétaires mandatés en présence des membres du conseil syndical. Les cinq pouvoirs non nominatifs reçus qui m'ont été remis par le syndic ont été distribués à M. [N], Mme [A], Mme [X], M. [C]. MM. [F] et [N] qui ont été élus scrutateurs de cette assemblée étaient présents et ont assisté à cette répartition'».

M. [J] [N], membre du conseil syndical et attributaire de l'un des pouvoirs en blanc, affirme pour sa part que la remise des pouvoirs a eu lieu sur le bureau devant l'assemblée et les copropriétaires présents et qu'à aucun moment, le syndic n'est intervenu dans cette distribution.

Les intimés produisent pour leur part les attestations de MM. [B] [S], [V] [M] et [Y] [R], parfaitement conformes, matériellement, aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile et rédigées de manière personnalisée, lesquels affirment de manière concordante qu'à l'entrée de la salle se tenait le syndic qui recueillait les pouvoirs et les enregistrait dans son ordinateur tout en faisant émarger les copropriétaires arrivant sur la feuille de présence, qu'il s'est ensuite installé au fond de la salle et qu'a eu lieu l'élection du bureau composé de M.'[E], président de séance, et de MM. [N] et [F], scrutateurs, mais qu'à aucun moment il n'a été fait appel publiquement à des volontaires pour accepter les mandats en blanc ni même simplement procédé publiquement à la remise des pouvoirs en blanc.

Il ressort donc des témoignages de ces derniers que ni la remise des mandats en blanc à leurs attributaires ni la désignation de ces derniers n'ont été publics.

Des quatre témoins de l'appelant, seul M. [N] affirme que la remise des mandats en blanc s'est faite devant l'assemblée.

Toutefois, les quatre témoins du syndicat attestent que les mandats en blanc ont été remis par le président de séance, président du conseil syndical, et non par le syndic et rien ne permet de mettre en doute leur sincérité alors qu'il n'est pas démontré que le conseil syndical ou à tout le moins son président serait en quelque sorte inféodé au syndic, étant précisé que le fait que le nom des mandataires, sur les mandats en blanc, aient pu être porté par le syndic, comme le soutiennent les intimés à partir d'une analyse d'écritures, n'implique pas que cela ait été fait avant leur désignation par le président du conseil syndical et que cette désignation soit en réalité le fait du syndic.

Dès lors, s'il est regrettable que l'impartialité de la désignation des mandataires pour les mandats en blanc n'ait pas été garantie par leur caractère public et un appel à candidature aux copropriétaires présents, et si la façon dont il a été procédé n'est pas conforme aux dispositions réglementaires instaurées depuis lors, il ne peut plus être jugé, comme l'a fait le tribunal pour motiver sa décision, que les demandeurs (syndicat et syndic) n'apportent pas la preuve de ce que les mandats en blanc reçus par le syndic n'ont pas été distribués par celui-ci à des personnes de son choix.

En revanche, les intimés soutiennent que Mme [L], copropriétaire très âgée, n'assiste plus aux assemblées générales depuis plusieurs années, qu'elle n'était pas présente à celle du 18 avril 2018, que la feuille d'émargement comporte, face à son nom et dans la case réservée à la signature du copropriétaire et non du mandataire, une signature qui n'est pas la sienne précédée de la mention « po'» (pour ordre) alors qu'il n'est justifié d'aucun pouvoir établi par elle.

Le syndicat des copropriétaires soutient pour sa part que cette dame était présente et que ce qui figure dans la case en question est simplement sa signature altérée par l'âge, ce que confirmerait une attestation de l'intéressée.

Cependant, la feuille de présence présente très clairement dans la case visée la mention « po'» suivie d'une signature minimaliste mais ferme qui n'a absolument rien à voir avec la signature de Mme [L] telle qu'elle figure sur les feuilles d'émargement d'assemblées générales antérieures ni même avec cette signature altérée par l'âge. D'ailleurs, si le syndicat produit effectivement une attestation, dactylographiée, de Mme [L] par laquelle-ci affirme avoir été présente à l'assemblée générale et avoir signé «'comme elle a pu compte tenu de son âge'», cette attestation, pourtant postérieure de deux ans à l'AG litigieuse, porte une signature nullement altérée par rapport à celle qui figure sur les feuilles d'émargement de 2012 et de 2013, et même précédée des mots « certifié exact'» d'une écriture ferme, de sorte que cette attestation, obtenue d'une dame de 95 ans peut-être complaisante, est dépourvue de force probante.

Cette irrégularité manifeste compromet la sincérité de la feuille de présence et du procès-verbal comme la régularité du déroulement de l'assemblée générale et justifie la confirmation du jugement en ce qu'il a annulé ladite assemblée générale sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres irrégularités dénoncées par les intimés.

Sur les autres demandes

L'appel du syndicat des copropriétaires est circonscrit à l'annulation de l'assemblée générale qui, confirmée, exclut l'examen des demandes subsidiaires.

Si les intimés demandent à la cour, par le dispositif de leurs conclusions, d'infirmer le jugement en ses dispositions qui les a déclarés irrecevables et les a déboutés de leurs demandes contre le syndicat des copropriétaires, ils ne réitèrent pas pour autant lesdites demandes dont la cour n'est donc pas saisie.

Il appartient au syndicat, partie perdante, de supporter la charge des dépens conformément à l'article 696 du code de procédure civile. Il est en outre équitable qu'il indemnise les intimés, en application de l'article 700 du même code, des autres frais qu'ils ont été contraints d'exposer pour assurer la défense de leurs intérêts.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

statuant dans les limites de l'appel,

confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable la contestation par M. et Mme [T] et Mme [O] de l'assemblée générale de la Résidence du [5] du 18 avril 2018 et annulé ladite assemblée générale,

déboute le syndicat des copropriétaires de ladite résidence de sa demande d'indemnité pour frais irrépétibles,

le condamne aux dépens et au paiement à M. et Mme [T] et à Mme [O], ensemble, d'une indemnité de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier

Delphine Verhaeghe

Le président

Bruno Poupet


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 20/01494
Date de la décision : 08/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-08;20.01494 ?
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