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05/07/2023 | FRANCE | N°22/00027

France | France, Cour d'appel de Douai, Jrdp, 05 juillet 2023, 22/00027


AU NOM DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



COUR D'APPEL DE DOUAI







JURIDICTION CIVILE DU PREMIER PRÉSIDENT EN MATIÈRE

DE RÉPARATION DES DÉTENTIONS PROVISOIRES









minute n° 21/23



n° RG : 22/00027





A l'audience publique du 5 juillet 2023 tenue par M. Jean SEITHER, premier président, assisté de M. Christian BERQUET, greffier, a été prononcée l'ordonnance suivante :







Sur la requête de :



M. [X] [P], né le [Date naissance 2] 1

954 à [Localité 7] (Congo)

demeurant à [Adresse 5]





ayant pour avocat Me Frédéric MASSIN, avocat au barreau de Valenciennes, demeurant [Adresse 1]













Les débats ayant eu lieu à l'audien...

AU NOM DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COUR D'APPEL DE DOUAI

JURIDICTION CIVILE DU PREMIER PRÉSIDENT EN MATIÈRE

DE RÉPARATION DES DÉTENTIONS PROVISOIRES

minute n° 21/23

n° RG : 22/00027

A l'audience publique du 5 juillet 2023 tenue par M. Jean SEITHER, premier président, assisté de M. Christian BERQUET, greffier, a été prononcée l'ordonnance suivante :

Sur la requête de :

M. [X] [P], né le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 7] (Congo)

demeurant à [Adresse 5]

ayant pour avocat Me Frédéric MASSIN, avocat au barreau de Valenciennes, demeurant [Adresse 1]

Les débats ayant eu lieu à l'audience du 7 juin 2023 à 10 heures

L'audience était présidée par M. Jean SEITHER, premier président, assisté de M. Christian BERQUET, greffier ;

En présence de :

MONSIEUR LE PROCUREUR GÉNÉRAL PRES LA COUR D'APPEL DE DOUAI,

représenté par M. Michel REGNIER, avocat général

L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

Direction des affaires juridiques

dont le siège est situé Sous Direction du Droit Privé

[Adresse 4]

[Localité 3]

ayant pour avocat Me Maxime DESEURE, avocat au barreau de Béthune

JRDP - 27/22 - 2ème page

Exposé de la cause

Par requête en date du 10 octobre 2022, reçue au greffe de la cour d'appel le 12 octobre suivant, M. [X] [P] a présenté une demande en indemnisation en raison d'une détention injustifiée.

Le 30 juin 2021, M. [P] a été condamné à une peine de 12 mois d'emprisonnement pour des faits de violence avec usage ou menace d'une arme par le tribunal correctionnel de Valenciennes. Il a formé appel de cette décision.

En exécution de cette peine, M. [P] a été écroué à la maison d'arrêt de [Localité 6] le 30 décembre 2021.

Par arrêt du 14 avril 2022, la cour d'appel de Douai a infirmé le jugement et renvoyé M. [P] des fins de la poursuite.

La détention de M. [P] a donc duré du 30 décembre 2021 (date d'écrou) au 15 avril 2022 (date de sa libération), soit pendant 107 jours.

Pour cette détention injustifiée, il sollicite que lui soit allouée la somme de 8.000 € en réparation de son préjudice moral.

Dans ses conclusions en date du 13 décembre 2022, l'agent judiciaire de l'Etat soutient, à titre principal, l'irrecevabilité de la requête faute de production du certificat de non pourvoi.

Le certificat de non pourvoi ayant été produit à l'audience, il propose que le préjudice moral du requérant soit indemnisé à hauteur de 6.000 €.

Dans ses conclusions en date du 27 février 2023, le ministère public requiert qu'en l'état, et à défaut de production de certificat de non pourvoi, la requête soit déclarée irrecevable en la forme.

Le certificat de non pourvoi ayant été produit à l'audience, il propose que le préjudice moral de M. [P] soit indemnisé à hauteur de 6.000 €.

Au terme des débats tenus le 7 juin 2023, le premier président a indiqué qu'il mettait l'affaire en délibéré au 5 juillet 2023.

Et, après en avoir délibéré conformément à la loi,

vidant son délibéré à l'audience de ce jour,

SUR CE,

Sur la recevabilité :

Aux termes de l'article 149 du code de procédure pénale, la personne qui a fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive a droit, à sa demande, à réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention.

Cet article précise, toutefois, qu'aucune réparation n'est due lorsque la personne était, dans le même temps, détenue pour autre cause.

En application de l'article R. 26 du code de procédure pénale, la requête en indemnisation doit être signée du demandeur ou d'un des mandataires mentionnés à l'article R. 27 du code de procédure pénale, doit contenir le montant de l'indemnité demandée, doit être présentée dans un délai de six mois à compter du jour où la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement acquiert un caractère définitif, ce délai ne courant que si, lors de la notification de cette décision, la personne a été avisée de ce droit ainsi que des dispositions de l'article 149-1 du code de procédure pénale.

En l'espèce, la requête a été déposée le 12 octobre 2022, soit dans le délai de six mois suivant l'arrêt de relaxe rendu par la cour d'appel de Douai le 14 avril 2022.

JRDP - 27/22 - 3ème page

Figure au dossier un certificat en date du 7 avril 2023 établi par le greffier de la cour d'appel de Douai attestant qu'aucun pourvoi n'a été formé à l'encontre de cet arrêt.

En conséquence, la décision est définitive et la requête ayant été présentée dans le délai légal, il y a lieu de la déclarer recevable.

Sur le préjudice moral :

Le préjudice moral résultant d'une incarcération injustifiée constitue une évidence de principe.

La preuve de conditions exceptionnelles ou ayant entraîné des conséquences personnelles excédant les conséquences liées à toute privation de liberté en milieu carcéral peut justifier une indemnisation proportionnellement plus élevée. Par contre, la souffrance morale résultant du choc de l'incarcération se trouve minorée par le passé carcéral de la personne détenue.

En l'espèce, il convient de relever que M. [P] était âgé de 67 ans au moment de son incarcération, ce qui est de nature à aggraver son préjudice moral.

Par ailleurs, le bulletin n° 1 de son casier judiciaire porte mention de deux condamnations antérieures à son incarcération :

- le 7 juillet 2017, par le tribunal correctionnel d'Avesnes-sur-Helpe, à 3.000 € pour des faits de réalisation irrégulière d'affouillement ou d'exhaussement du sol, édification irrégulière de clôture soumise à déclaration préalable et infraction aux dispositions du plan local d'urbanisme ;

- le 15 novembre 2021, par le tribunal de police d'Avesnes-sur-Helpe, à 250 € d'amende pour des faits de violence ayant entraîné une incapacité de travail d'excédant pas 8 jours.

Il en résulte qu'aucune de ces condamnations n'a donné lieu à une peine d'emprisonnement ferme mise à exécution, de sorte que lorsque M. [P] a été placé en détention le 30 décembre 2021, il s'agissait d'une première incarcération. Cette absence d'antécédents carcéraux majore nécessairement le choc ressenti.

Le requérant fait également valoir que son préjudice s'est trouvé aggravé par son état de santé et ses antécédents médicaux.

Il ressort des éléments produits aux débats, notamment du relevé des prescriptions du centre hospitalier de [Localité 6] en date du 4 avril 2022, que le requérant justifiait d'antécédents médicaux avant son incarcération et que sa prise en charge par l'unité sanitaire en milieu pénitentiaire fut immédiate.

M. [P] soulève également qu'il serait atteint de troubles psychologiques sans toutefois établir leur lien avec la détention. Il ressort d'une note établie par le centre hospitalier de [Localité 6] en date du 5 avril 2022, recensant les prescriptions médicales appliquées au requérant, que ce dernier souffrait d'un état dépressif avant son incarcération de sorte que le lien entre le préjudice moral attaché à ses problèmes de santé et la mesure de détention n'est pas établi.

M. [P] indique enfin que sa compagne aurait mis fin à leur relation en raison de son incarcération. A l'appui de ses dires, il produit aux débats un courrier du 28 février 2022 ainsi que d'autres lettres - en partie illisibles - échangées avec sa compagne.

Toutefois, ces courriers n'apportent pas, contrairement à ce qui est soutenu, la démonstration d'une relation sentimentale entre M. [P] et son interlocutrice, prénommée [I], laquelle se présente dans ces lettres, comme une amie: « Sache que nous, [F] et moi, qui sommes tes amis, pensons très fort à toi. » (lettre du 12 janvier 2022).

Il est à noter également que l'ancienneté et la nature de la relation alléguée ne sont pas démontrées et que les échanges ont continué après le courrier du 28 février 2022, de sorte que la rupture, qui serait liée à l'incarcération et dont fait état M. [P], n'est pas établie.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il sera alloué à M. [P] la somme de 8.000 euros en réparation de son préjudice moral.

JRDP - 27/22 - 4ème page

Sur les dépens :

Les dépens seront laissés à la charge du Trésor public.

PAR CES MOTIFS,

Après débats en audience publique,

statuant publiquement et contradictoirement,

DECLARONS recevable la requête de M. [X] [P] ;

ALLOUONS à M. [X] [P] la somme de huit mille euros (8.000 €) au titre de son préjudice moral ;

LAISSONS les dépens à la charge du Trésor Public.

Ainsi fait, jugé et prononcé par M. Jean SEITHER, premier président de la cour d'appel de DOUAI, le 5 juillet 2023,

en présence de M. Michel REGNIER, avocat général,

assisté de M. Christian BERQUET, greffier qui a signé la minute avec le premier président.

Le greffier Le premier président

C. BERQUET J. SEITHER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Jrdp
Numéro d'arrêt : 22/00027
Date de la décision : 05/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-05;22.00027 ?
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