ARRÊT DU
07 Juillet 2023
N° 1047/23
N° RG 22/00433 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UFP4
PS/CH
AJ
Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOURCOING
en date du
22 Février 2022
(RG 20/00376 -section )
GROSSE :
aux avocats
le 07 Juillet 2023
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-
APPELANT :
M. [O] [F]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Marion NIVELLE, avocat au barreau de LILLE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 59178/02/22/003123 du 07/04/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)
INTIMÉE :
S.A.S. HARKBAT
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Alice VANDAELE, avocat au barreau de LILLE
DÉBATS : à l'audience publique du 06 Juin 2023
Tenue par Patrick SENDRAL
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Cindy LEPERRE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Marie LE BRAS
: PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Alain MOUYSSET
: CONSEILLER
Patrick SENDRAL
: CONSEILLER
ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 07 Juillet 2023,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Marie LE BRAS, Président et par Cindy LEPERRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 16 mai 2023
FAITS ET PROCEDURE
Le 9/9/2019 la société HARKBAT, entreprise du bâtiment, a engagé M. [F] en qualité de plaquiste enduiseur. Le 11 mars 2020 celui-ci a été victime d'un accident du travail suite auquel il a été placé en arrêt-maladie. Le 17 août 2020 son employeur l'a licencié pour faute grave en invoquant son absence injustifiée depuis le 7 juillet.
Par jugement ci-dessus référencé le conseil de prud'hommes, saisi par M. [F] de réclamations indemnitaires au titre de son licenciement à ses dires infondé et vexatoire, les a rejetées et l'a condamné au paiement d'une indemnité de procédure et de dommages-intérêts pour procédure abusive.
Vu l'appel formé par M. [F] contre ce jugement et ses conclusions du 8 juin 2022 ainsi closes :
' CONDAMNER la SAS HARKBAT au paiement des sommes de :
1539,45 euros à titre de préavis outre 153,945 € de congés payés afférents
3078,90 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
3 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement brutal et vexatoire
' DEBOUTER la société HARKBAT de toutes demandes et la condamner au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Vu les conclusions de l'employeur du 8/9/2022 ainsi closes :
«rectifier l'erreur matérielle figurant dans le jugement en ce qui concerne son identité
Confirmer le jugement
Prononcer l'irrecevabilité de la demande de paiement de congés payés sur préavis
Débouter Monsieur [F] de l'intégralité de ses demandes et le condamner à payer la somme de 5.000 € au titre de ses frais irrépétibles d'appel...»
MOTIFS
L'employeur, qui explicite le grief de la lettre de licenciement, explique que suite à un accident du travail M. [F] a repris ses fonctions début juin 2020, qu'il ne s'est pas présenté à son poste à compter du 7 juillet, qu'il a tenté téléphoniquement de le joindre mais en vain, qu'il lui a envoyé deux lettres recommandées pour lui demander de reprendre son travail et qu'il n'a eu d'autre choix que de tirer les conséquences de son absence.
M. [F] rétorque que le 7 juillet il a subi une rechute de son accident du travail et que son médecin lui a prescrit un arrêt-maladie dont il a sans délai communiqué les justificatifs à l'employeur.
Sur ce,
Aux termes de l'article L 1232-1 du code du travail tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Lorsque l'employeur invoque une faute grave du salarié il lui incombe d'en rapporter la preuve à charge pour le juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des griefs et de rechercher s'ils constituaient une violation des obligations découlant du contrat de travail rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il est par ailleurs de règle que les absences du salarié doivent être portées à la connaissance de l'employeur dans de brefs délais et que les arrêts-maladie doivent lui être transmis par tous moyens avant l'expiration d'un délai de 48 heures.
Il résulte des productions que :
- M. [F] a été placé en arrêt-maladie d'origine professionnelle le 11 mars 2020 suite à une coupure à la main sur le lieu de travail
- cet arrêt-maladie a été prolongé par le médecin généraliste le 7 juillet jusqu'au 15 juillet puis jusqu'au 21 octobre 2020
- par lettres recommandées non réclamées des 10 et 27 juillet 2020 l'employeur a demandé au salarié de justifier de ses absences
- le 10 août 2020 M. [F] ne s'est pas présenté à l'entretien préalable à son licenciement
- par lettre du 18 août il a informé sa direction de son placement en arrêts-maladie depuis le 7 juillet
- du 7 juillet à la rupture du contrat de travail il a perçu des indemnités journalières de sécurité sociale.
Cela étant, le salarié affirme avoir informé son employeur de son arrêt-maladie du 7 juillet 2020 et il propose d'en justifier au moyen de 3 avis de réception de lettres recommandées. Deux de ses avis sont largement postérieurs au 7 juillet et donc inopérants. L'avis numéroté 4475 7, attaché à une lettre recommandée adressée à la société HARKBAT, porte quant à lui la mention «présenté avisé le 9 juillet 2020» et une signature dont la société HARKBAT ne dénie pas être l'auteur mais elle soutient cependant que cet envoi a été posté le 3 octobre et réceptionné le 6 octobre 2020. Cette allégation, que ne suffit pas à accréditer l'historique d'envois versé au dossier comportant des références matérielles insuffisantes, est manifestement contraire à la mention apposée par la Poste sur l'avis de réception de la lettre recommandée. Le doute devant profiter au salarié il en résulte qu'il a dûment justifié de son absence dès le surlendemain de son arrêt-maladie. Dans ces conditions, la rupture du contrat de travail est dépourvue de cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera donc infirmé y compris en ce qu'il a condamné le salarié à payer des dommages-intérêts pour procédure abusive.
Les conséquences financières
Le licenciement étant dénué de cause réelle et sérieuse il sera alloué au salarié la somme réclamée au titre du préavis, non discutée en son quantum, mais le débiteur de l'indemnité de congés payés afférente étant la caisse de congés payés du bâtiment la demande afférente sera rejetée.
Compte tenu des effectifs de l'entreprise, de la faible ancienneté de M. [F], du revenu dont il a été privé du fait de licenciement (1539 euros bruts par mois avant revenus de remplacement), de ses qualifications, de ses difficultés à retrouver un emploi vu son âge et des justificatifs sur sa situation postérieure à la rupture il y a lieu de lui allouer 1500 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et financier causé par la perte d'emploi injustifiée.
Sa demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire sera en revanche rejetée, faute de démonstration d'une faute de l'employeur dans son droit de rompre le contrat.
Les frais de procédure
Il n'est pas inéquitable de condamner la société HARKBAT au paiement d'une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ce en tenant compte de l'aide juridictionnelle accordée à l'appelant. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné M. [F] à ce titre. Vu la solution donnée au litige il n'est pas nécessaire de rectifier l'erreur matérielle affectant le jugement.
PAR CES MOTIFS, LA COUR
INFIRME le jugement sauf en ce qu'il a rejeté la demandes de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire et d'indemnité de congés payés sur préavis
Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et y ajoutant
DECLARE sans cause réelle et sérieuse le licenciement de M. [F]
CONDAMNE la société HARKBAT à lui payer les sommes suivantes :
' indemnité de congés payés : 153,94 euros
' indemnité compensatrice de préavis : 1539,45 euros
dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 1500 euros
indemnité de procédure : 500 euros
DEBOUTE M. [F] du surplus de ses demandes
CONDAMNE la société HARKBAT aux dépens d'appel et de première instance.
LE GREFFIER
Cindy LEPERRE
LE PRESIDENT
Marie LE BRAS