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21/03/2024 | FRANCE | N°21/04677

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 21 mars 2024, 21/04677


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 21/03/2024





N° de MINUTE : 24/240

N° RG 21/04677 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T2G2

Jugement (N° 1120000722) rendu le 30 Juin 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Tourcoing





APPELANTE



SA BNP Paribas agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 5]



Représentée par Me Dav

id Dherbecourt, avocat au barreau de Béthune, avocat constitué





INTIMÉS



Madame [O] [W] épouse [J]

née le [Date naissance 6] 1969 à [Localité 8] - de nationalité França...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 21/03/2024

N° de MINUTE : 24/240

N° RG 21/04677 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T2G2

Jugement (N° 1120000722) rendu le 30 Juin 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Tourcoing

APPELANTE

SA BNP Paribas agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentée par Me David Dherbecourt, avocat au barreau de Béthune, avocat constitué

INTIMÉS

Madame [O] [W] épouse [J]

née le [Date naissance 6] 1969 à [Localité 8] - de nationalité Française

[Adresse 4]

Monsieur [K] [J]

né le [Date naissance 3] 1969 à [Localité 10] - de nationalité Française

[Adresse 4]

Représentés par Me Priscilla Puteanus, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

DÉBATS à l'audience publique du 17 janvier 2024 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Samuel Vitse, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 21 mars 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 8 janvier 2024

EXPOSE DU LITIGE

Suivant convention signée le 31 janvier 2018 , M. [K] [J] et Mme [O] [W] épouse [J] ont ouvert un compte joint de dépôt 'Esprit Libre' auprès de la SA BNP Paribas.

Suivant offre préalable acceptée le 14 juin 2018, la société BNP Paribas a consenti à M. [K] [J] et Mme [O] [W] un prêt personnel d'un montant de

9 500 euros, remboursable en 60 mensualités, au taux d'intérêt nominal annuel de 1,99 %.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 18 avril 2019, réceptionné le 20 avril suivant, la banque a prononcé la déchéance du terme du contrat de crédit et mis en demeure les emprunteurs de payer l'intégralité des sommes restant dues, et a procédé à la clôture du compte le 24 mai 2019.

Par exploits d'huissier du 25 novembre 2020, la société BNP Paribas a assigné M. [K] [J] et Mme [O] [W] en paiement.

Par jugement contradictoire du 30 juin 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Tourcoing a :

- débouté la société BNP Paribas de ses demandes formées au titre du contrat de prêt personnel n° [Numéro identifiant 2] conclu le 14 juin 2018,

- dit la société BNP Paribas recevable en ses demandes formées au titre du compte joint de dépôt n° [XXXXXXXXXX01],

- dit que la société BNP Paribas est déchue de son droit aux intérêts et frais au titre du compte joint,

- condamné solidairement M. [K] [J] et Mme [O] [W] à verser à la société BNP Paribas la somme de 2 095,20 euros au titre du solde débiteur du compte de dépôt n° [XXXXXXXXXX01],

- dit que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de la mise en demeure du 24 mai 2019,

- dit que le taux d'intérêt légal ne pourra pas faire l'objet d'une majoration,

- autorisé M. [K] [J] et Mme [O] [W] à se libérer de leur dette en 24 mensualités de 450 euros chacune et une cinquième mensualité majorée du solde en principal et intérêts restant dus à cette date,

- dit que la première mensualité devra être réglée au plus tard le 30 du mois suivant la signification de la présente décision et les suivantes aux plus tard le 30 de chaque mois,

- dit qu'à défaut d'un seul versement d'une échéance, suivi d'une mise en demeure restée infructueuse durant 15 jours, l'intégralité des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible,

- rappelé que conformément à l'article 1343-5 du code civil, la présente décision suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier et que les majorations d'intérêts ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d'être dues dans le délai fixé par la présente décision,

- rejeté la demande de capitalisation des intérêts dus pour une année entière,

- condamné in solidum M. [K] [J] et Mme [O] [W] aux dépens,

- dit n'y avoir lieu application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit,

- débouté les parties de toutes autres demandes différentes plus amples ou contraires au présent dispositif.

Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 31 août 2021, la société BNP Paribas a relevé appel de ce jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes au titre du contrat de prêt n° [Numéro identifiant 2] conclu le 14 juin 2018 et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 28 juillet 2023, la société BNP Paribas demande à la cour de :

- confirmer le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Tourcoing du 30 juin 2021 en ce qui concerne le compte de dépôt,

- infirmer le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Tourcoing du 30 juin 2021 en ce qui concerne le prêt personnel et les dépens,

en conséquence,

- vu les dispositions de la loi du 10 janvier 1978, les dispositions des articles L.312-1, L.312-14, L.312-29 du code de la consommation,

- condamner solidairement M. [K] [J] et Mme [O] [W] à payer à la société BNP

Paribas la somme de 2 095,20 euros outre les intérêts au taux légal jusqu'au parfait paiement à compter du 24 mai 2019,

- condamner solidairement M. [K] [J] et Mme [O] [W] à payer à la société BNP Paribas la somme de 9 412,77 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 1,99 % jusqu'à parfait paiement à compter du 24 mai 2019,

à titre subsidiaire, si le contrat de prêt devait être déclaré nul,

- condamner M. [K] [J] et Mme [O] [W] au paiement d'une somme de 8 439,70 euros correspondant au capital restant dû,

- dire en application de l'article 1343-2 du code civil que les intérêts dus pour une année entière porteront intérêts au taux d'intérêt conventionnel,

- condamner solidairement M. [K] [J] et Mme [O] [W] au paiement d'une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile s'agissant de la procédure de première instance et de 2 000 euros s'agissant de la procédure d'appel,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- condamner solidairement M. [K] [J] et Mme [O] [W] aux entiers frais et dépens.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 décembre 2023, M. [K] [J] et Mme [O] [W] demandent à la cour de :

Vu les articles L.312-39, D. 312-16, D.312-17 du code de la consommation, 1231-5, 1343-5 du code civil, et 700 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Tourcoing du 30 juin 2021 en son intégralité,

à titre subsidiaire, si la cour estimait que les demandes de la société BNP Paribas sont fondées,

- condamner solidairement M. [K] [J] et Mme [O] [W] à payer à la société BNP Paribas la somme de 8 439,70 euros au titre du capital restant dû du prêt consenti le 14 juin 2018,

- condamner solidairement M. [K] [J] et Mme [O] [W] à payer à la société BNP Paribas la somme de 297,89 euros au titre des intérêts sur le capital restant dû du prêt consenti le 14 juin 2018, selon le décompte établi le 18 novembre 2020,

- débouter la société BNP Paribas de sa demande de clause pénale à l'encontre des époux [J],

- à défaut, 'si clause pénale devait être prononcée', condamner solidairement M. [K] [J] et Mme [O] [W] à payer à la société BNP Paribas la somme de 100 euros au titre de la clause pénale, majorée des intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

- surseoir à l'exécution des poursuites et autoriser M. [K] [J] et Mme [O] [W] à s'acquitter de leur dette selon les modalités suivantes :

- paiement de la somme due en 23 mensualités successives de 370 euros chacune suivies d'une dernière mensualité composée du solde du principal, des frais et intérêts restant dus,

- paiement de la première mensualité au plus tard le dernier jour du mois suivant la signification de la présente décision, et des mensualités suivantes aux plus tard le dernier jour de chaque mois,

- dire qu'à défaut de versement d'une seule échéance, l'intégralité de la dette sera immédiatement exigible sans mise en demeure préalable,

- rappeler que conformément aux dispositions de l'article 1343-5 du code civil, la présente décision suspend les procédures d'exécution et que les majorations d'intérêts ou les pénalités encourues cessent d'être dues pendant le délai fixé par la décision,

- débouter la société BNP Paribas de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [K] [J] et Mme [O] [W] aux dépens,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.

La clôture de l'affaire a été rendue le 8 janvier 2024.

MOTIFS

Sur la demande relative au compte de dépôt

Selon l'article 562 du code de procédure civile l'appel défère à la cour la connaissance des chefs du jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

Les dispositions de l'article 901 du code de procédure civile, issues de l'article 13 du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 entrées en vigueur le 1er septembre 2017, disposent que la déclaration d'appel défère à la cour les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. Seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.

La société BNP Paribas a limité son appel aux chefs du jugement qui l'ont déboutée de ses demandes au titre du contrat de prêt personnel n° [Numéro identifiant 2] conclu le 14 juin 2018 et au titre de l'article 700 du code de procédure civile, cependant que les intimés n'ont pas fait appel incident du chef du jugement les ayant condamnés à payer à la société BNP Paribas la somme de 2 095,20 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2019 au titre du solde de compte de dépôt.

Dès lors la cour n'est pas saisie des chefs du jugement afférents au compte de dépôt, et il n'y a donc pas lieu de les confirmer.

Sur la demande relative au crédit personnel

Pour débouter la société BNP Paribas de sa demande, le premier juge a relevé qu'elle ne rapportait pas la preuve de l'existence et du montant de sa créance, faute par elle de produire un historique complet du crédit, car il était impossible de vérifier la date du premier incident de paiement non régularisé et l'éventuelle forclusion de l'action, ni de s'assurer que les fonds avaient pas été débloqués avant l'expiration du délai de rétractation et de calculer les conséquences d'une éventuelle nullité du contrat, ni celles d'une déchéance du droit aux intérêts ; que les documents produits pour justifier de la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) ne semblaient pas conformes.

L'appelante fait valoir qu'elle produisait pourtant l'ensemble des relevés de compte de M. [K] [J] et Mme [O] [W], sur lequel ont été débloqués les fonds et étaient prélevées les échéances d'emprunt, que ces documents permettaient aisément de vérifier sa créance et l'éventuelle forclusion de l'action, le premier incident de paiement non régularisé se situant au 10 décembre 2018 en sorte que l'action n'était pas forclose ; qu'ils permettaient également de vérifier la date de déblocage des fonds. Elle conteste le fait que les fonds aient été débloqués avant l'expiration du délai de rétractation, et ajoute qu'il n'en demeurerait pas moins, qu'en cas de nullité du contrat, les emprunteurs devraient lui rembourser le capital prêté.

Pour demander le rejet des demandes de la banque, les intimés font valoir qu'à défaut de production d'un historique comptable du crédit, la banque ne rapporte pas la preuve de l'existence et du montant de sa créance et que les documents produits par elle ne permettent pas de vérifier la date de déblocage des fonds ni la date du premier incident de paiement non régularisé. A titre subsidiaire, ils soutiennent que la banque doit être déchue de son droit aux intérêts, au motifs que le justificatif de consultation du FICP n'est pas conforme en ce qu'il ne comporte aucune 'date de retour' de la Banque de France, ni la référence de consultation. Sur le fondement de l'article 1231-5 du code civil, ils font valoir que l'indemnité légale de résiliation est manifestement excessive et doit être supprimée ou réduite. Sur la demande de délais, ils proposent d'apurer leur dette par mensualités de 370 euros.

Selon l'article 1353 du code civil dans sa rédaction de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 'Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui produit l'extinction de son obligation.'

En l'espèce, la banque verse aux débats le contrat de crédit et ses annexes, le tableau d'amortissement duquel il ressort que la première échéance du 10 juillet 2018 est d'un montant de 177,55 euros, les échéances suivantes d'un montant de 183,76 euros, les lettres de mise en demeure et de déchéance du terme, un décompte de créance arrêté au 18 novembre 2020, ainsi que l'ensemble des relevés du compte joint de dépôt n°[XXXXXXXXXX01] de M. [K] [J] et Mme [O] [W] sur lequel les fonds ont été débloqués et les échéances prélevées.

Il résulte de l'examen de ces relevés que les fonds ont été débloqués le 21 juin 2018, et que M. [K] [J] et Mme [O] [W] ont réglé la première échéance de 177,55 euros le 10 juillet 2018, puis 6 échéances de 183,76 euros du 10 août 2018 au 10 janvier 2019, les échéances postérieures demeurant impayées, étant relevé que les emprunteurs n'allèguent, ni ne justifient d'autres paiements.

Les relevés de compte permettaient donc de vérifier la date du premier incident de paiement non régularisé et le point de départ du délai biennal de forclusion, qui se situe au 10 février 2019, en sorte que l'action de la société BNP, engagée par acte en date du 25 novembre 2020 n'est pas forclose. Ils permettaient également de vérifier la date de libération des fonds, les époux [J] ne sollicitant d'ailleurs pas la nullité du contrat de crédit pour déblocage prématuré des fonds.

Par ailleurs, il résulte du tableau d'amortissement produit qu'après paiement de l'échéance du 10 janvier 2019, le capital restant dû s'élevait à 8 439,70 euros, correspondant au principal réclamé par la banque.

Les intimés, qui ne contestent pas que les fonds leur ont bien été remis en exécution du contrat de crédit, ne justifient pas qu'il se sont libérés de leurs obligations autrement que par prélèvement de leur compte joint.

Dès lors, les pièces produites par la banque permettaient de justifier sa créance, qui ne pouvait donc être écartée au seul motif qu'elle ne produisait pas l'historique comptable du crédit.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

Aux termes de l'article L. 341-2 du code de la consommation, lorsque le prêteur n'a pas respecté les obligations fixées à l'article L. 312-16, il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

Aux termes de l'article L. 312-16 du code de la consommation, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur, le prêteur consultant le fichier prévu à l'article L.751-1, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 751-6 du même code.

L'article 13 de l'arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) dans sa version applicable au litige dispose que :

"Modalités de justification des consultations et conservation des données.

I. - En application de l'article L. 751-6 du code de la consommation, afin de pouvoir justifier qu'ils ont consulté le fichier, les établissements et organismes mentionnés à l'article 1er doivent, dans les cas de consultations aux fins mentionnées au I de l'article 2, conserver des preuves de la consultation du fichier, de son motif et de son résultat, sur un support durable. Ils doivent être en mesure de démontrer que les modalités de consultation du fichier et de conservation du résultat des consultations garantissent l'intégrité des informations ainsi collectées. Constitue un support durable tout instrument permettant aux établissements et organismes mentionnés à l'article 1er de stocker les informations constitutives de ces preuves, d'une manière telle que ces informations puissent être consultées ultérieurement pendant une période adaptée à leur finalité et reproduites à l'identique.

Le cas échéant, le résultat des consultations effectuées aux fins mentionnées au II de l'article 2 est conservé dans les conditions décrites ci-dessus.

II. - Les établissements et organismes mentionnés à l'article 1er mettent en place des procédures internes leur permettant de justifier que les consultations du fichier ne sont effectuées qu'aux fins mentionnées à l'article 2 et à elles seules. (...)"

L'article L. 312-16 du code de la consommation n'impose aucun formalisme quant à la justification de la consultation du FICP par les prêteurs, et il est admis que la Banque de France ne délivre pas de récépissé de cette consultation.

Pour démontrer avoir satisfait à son obligation, la société BNP Paribas communique deux documents mentionnant que la banque a effectué une consultation du FICP le 15/06/2018 qui mentionnent la clé BDF de chaque emprunteur, soit [Numéro identifiant 9] et [Numéro identifiant 7].

Néanmois, s'il est indiqué "pour un crédit à la consommation", il n'est pas mentionné le numéro du crédit pour lequel la consultation aurait été faite, en sorte que manque le motif de la recherche. De plus, le résutat de la recherche n'est pas mentionné.

Ces documents ne suffisent donc pas à établir la consultation du fichier requise par la loi.

Au regard du préjudice subi par les intimés, la banque est déchue totalement de son droit aux intérêts contractuels.

Afin de calculer cette déchéance, la société BNP Paribas est invitée à produire un décompte mentionnant l'ensemble des règlements effectués par M. [K] [J] et Mme [O] [W] au titre du contrat de crédit personnel, tant avant qu'après déchéance du terme du contrat de crédit.

Sur les intérêts légaux

Suivant l'article 1231-6 alinéa 1 du code civil "Les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure."

L'article L.313-3 du code monétaire et financier dispose que "En cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux moisà compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire, fût-ce parprovision. Cet effet est attaché de plein droit au jugement d'adjudication sursaisie immobilière, quatre mois après son prononcé.

Toutefois, le juge de l'exécution peut, à la demande du débiteur ou du créancier, et en considération de la situation du débiteur, exonérer celui-ci de cette majoration ou en réduire le montant."

L'article 23 de la directive 2008/48/CE prévoit que les États membres définissent le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à la directive et prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu'elles soient appliquées. Les sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.

Suivant arrêt du 27 mars 2014, C-565/12, la CJUE a estimé que l'application du droit national ne doit être écartée que si les sommes susceptibles d'être perçues par le prêteur à la suite de la déchéance du droit aux intérêts ne sont pas significativement inférieures à celles dont il pourrait bénéficier s'ils avait respecté ses obligations, ce qui revient à anéantir l'effectivité de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts et son effet dissuasif.

Afin de garantir l'effectivité des règles de protection des consommateurs prévues par la directive 2008/48/CE, la cour de cassation a jugé qu'il incombe au juge de réduire d'office, dans une proportion constituant une sanction effective et dissuasive du manquement du prêteur à son obligation légale d'information, le taux résultant de l'application des articles 1231-6 alinéa 1 du code civil et L.313-3 du code monétaire et financier, lorsque celui-ci est supérieur ou équivalent au taux conventionnel. (Cass 1ère 28 juin 2023 ; 22-10.560)

Il y a donc lieu de réouvrir les débats afin d'inviter les parties à faire part de leurs observations sur la réduction éventuelle du taux d'intérêt légal majoré de cinq points tel que prévu par l'article L.313-3 du code monétaire et financier, au regard de taux d'intérêt conventionnel de 1,99 % l'an dont la société BNP paribas personal finance a été déchue.

Les autres demandes et les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire, dans les limites de l'appel ;

Réforme le jugement entrepris ;

Déchoit la société BNP Paribas de son droit aux intérêts contractuels ;

Sur la créance de la banque :

Ordonne la réouverture des débats à l'audience de la 8ème chambre-section 1 du 22 mai 2024 à 9 h 15 ;

Ordonne à la société BNP Paribas à produire un décompte actualisé mentionnant l'ensemble des règlements effectués par M. [K] [J] et Mme [O] [W] au titre du contrat de crédit personnel, tant avant qu'après déchéance du terme du contrat de crédit ;

Invite les parties à faire part de leurs observations sur la réduction éventuelle par le juge du taux d'intérêt légal majoré de cinq points tel que prévu par l'article L.313-3 du code monétaire et financier, au regard de taux d'intérêt conventionnel de

1,99 % l'an ;

Ordonne la révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 08 janvier 2024 ;

Dit que l'ordonnance de clôture sera rendue le 22 mai 2024 avant l'ouverture des débats ;

Réserve les autres demandes et les dépens.

Le greffier

Gaëlle PRZEDLACKI

Le président

Yves BENHAMOU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 1
Numéro d'arrêt : 21/04677
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;21.04677 ?
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