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21/03/2024 | FRANCE | N°21/04783

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 21 mars 2024, 21/04783


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 21/03/2024







N° de MINUTE : 24/253

N° RG 21/04783 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T2QB

Jugement (N° 20/000436) rendu le 29 Juillet 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Saint Omer





APPELANTE



Madame [S] [R]

née le [Date naissance 1] 1998 à [Localité 7] - de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 5]



Représentée par Me Ol

ivier Desloover, avocat au barreau de Saint-Omer, avocat constitué

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 59178/02/21/009808 du 28/09/2021 accordée par le bureau d'aide juri...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 21/03/2024

N° de MINUTE : 24/253

N° RG 21/04783 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T2QB

Jugement (N° 20/000436) rendu le 29 Juillet 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Saint Omer

APPELANTE

Madame [S] [R]

née le [Date naissance 1] 1998 à [Localité 7] - de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Olivier Desloover, avocat au barreau de Saint-Omer, avocat constitué

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 59178/02/21/009808 du 28/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Douai)

INTIMÉE

SA BNP Paribas

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me David Dherbecourt, avocat au barreau de Béthune, avocat constitué

DÉBATS à l'audience publique du 17 janvier 2024 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Samuel Vitse, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 21 mars 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 8 janvier 2024

EXPOSE DU LITIGE

Mme [S] [R] a ouvert le 1er décembre 2017 un compte courant numéro [XXXXXXXXXX03] dans les livres de la SA BNP Paribas.

Par courrier recommandé du 8 avril 2019, la société BNP Paribas a dénoncé la convention de compte courant et mis Mme [S] [R] en demeure de lui payer la somme de 12'458,64 euros, après lui avoir adressé une lettre recommandée avec accusé de réception de préavis de clôture.

Par acte d'huissier délivré le 5 octobre 2020, la banque a fait assigner Mme [S] [R] en paiement.

Par jugement contradictoire du 29 juillet 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint-Omer a :

- fixé la créance de la société BNP Paribas sur Mme [S] [R] au titre du solde débiteur du compte à la somme de 12'662,12 euros,

- dit que la société BNP Paribas et Mme [S] [R] ont commis une faute à l'origine de la perte financière de Mme [S] [R],

- fixé le préjudice de Mme [S] [R] à la somme de 10'000 euros,

- fixé le partage de responsabilités suivant :

- 85 % à la charge de Mme [S] [R],

- 15 % la charge de la société BNP Paribas,

- fixé la créance indemnitaire de Mme [S] [R] à l'égard de la société BNP Paribas à la somme de 1 500 euros,

- ordonné la compensation judiciaire de ces créances connexes,

en conséquence,

- condamné Mme [S] [R] à verser la somme de 11'162,12 euros à la société BNP Paribas,

- dit que cette condamnation produira intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

- débouté les parties de toutes prétentions plus amples ou contraires,

- condamné Mme [S] [R] à payer la somme de 400 euros à la société BNP Paribas au titre de ses frais irrépétibles,

- condamné Mme [S] [R] aux entiers dépens,

- rappelé que la présente décision est assortie de l'exécution provisoire de droit.

Suivant déclaration reçue par le greffe de la cour le 9 septembre 2021, Mme [S] [R] a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a :

- fixé la créance de la société BNP Paribas sur Mme [S] [R] au titre du solde débiteur du compte à la somme de 12'662,12 euros,

- fixé le partage de responsabilités à hauteur de 85 % à la charge de Mme [S] [R], et de 15 % la charge de la société BNP Paribas,

- condamné Mme [S] [R] à verser la somme de 11'162,12 euros à la société BNP Paribas,

- condamné Mme [S] [R] à payer la somme de 400 euros à la société BNP Paribas au titre de ses frais irrépétibles,

- débouté Mme [S] [R] de sa demande de condamnation de la société BNP Paribas à lui payer la somme de 16 662,12 euros à titre de dommages et intérêts.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 7 décembre 2021, Mme [S] [R] demande à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel rendu par le tribunal judiciaire de Saint-Omer en date du 29 juillet 2021,

statuant à nouveau,

à titre principal,

- constater la faute de vigilance de la société BNP Paribas dans la gestion du compte de Mme [S] [R],

- en conséquence, débouter la société BNP Paribas en l'intégralité de ces chefs de demandes et prétentions,

subsidiairement,

- condamner la société BNP Paribas au paiement de la somme de 16'662,12 euros à titre de dommages et intérêts et ordonner la compensation entre cette somme et les sommes réclamées par la banque, à concurrence de la plus faible,

- la débouter de toutes demandes plus amples ou contraires,

en toute hypothèse,

- condamner la société BNP Paribas au paiement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers frais et dépens de l'instance.

Mme [S] [R] affirme qu'elle a été victime d'une escroquerie. Elle soutient que la banque a commis un manquement à son obligation du vigilance en acceptant de créditer à son compte un chèque de 21 390,80 euros le 20 novembre 2018 qu'elle n'avait pas endossé, la signature apposée sur le dit chèque n'étant pas la sienne, ni conforme à la signature témoin qu'elle avait apposée au contrat, que ce chèque à été porté à l'encaissement à l'agence de [Localité 8] Opéra alors que son agence se trouve à [Localité 9], et que son compte était habituellement très peu alimenté, ce qui aurait dû alerter la banque. Elle rappelle que concomitamment au dépôt du chèque litigieux, trois virements sont intervenus les 20 et 21 novembre 2018, alors que le chèque n'était pas provisionné, en sorte que son compte bancaire s'est trouvé débiteur. Elle s'oppose à un partage de responsabilité, car si 'le chèque n'avait pas été porté à l'encaissement aucun virement n'aurait pu être réalisé', la banque étant seule responsable de son découvert bancaire.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 21 février 2022, la société BNP Paribas demande à la cour de :

- débouter Mme [S] [R] de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Saint-Omer du 29 juillet 2021 dans l'ensemble de ses dispositions,

- condamner Mme [S] [R] au paiement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- condamner Mme [S] [R] aux entiers frais et dépens.

L'intimée fait valoir que Mme [S] [R] ne rapporte pas la preuve de l'escroquerie dont elle se prétend victime, et ne s'explique pas sur la manière dont les soi-disants escrocs auraient eu connaisance de son numéro de compte bancaire et de son mot de passe pour effectuer des virements, et qu'elle ne produit pas sa plainte pénale. Elle ajoute qu'elle n'avait pas à vérifier la signature de l'endosseur du chèque litigieux et que Mme [S] [R] doit assumer les conséquence de sa mauvaise gestion. Elle relève qu'il n'est pas avéré que cette dernière ne serait pas l'auteur des virements, et qu'elle a pris une part prépondérante dans l'augmentation du solde débiteur de son compte bancaire.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour le surplus de leurs moyens.

La clôture de l'affaire a été rendue le 8 janvier 2024.

MOTIFS

Sur la responsabilité de la banque

L'appelante reproche à la banque de n'avoir pas refusé l'encaissement du chèque, ce qui aurait rendu les virements impossibles, en sorte que le manquement de la banque serait à l'origine du débit de son compte bancaire et de son préjudice.

L'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu 1231-1 dispose que 'Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.'

Il est constant que le banquier récepteur, chargé de l'encaissement d'un chèque, commet une faute s'il ne procède pas à la vérification de la régularité apparente de l'endos apposé sur le titre.

A réception de l'ordre de virement, le banquier du donneur d'ordre se voit investi d'une mission de vérification de cet ordre. Il doit ainsi s'assurer qu'il émane bien du titulaire du compte à débiter ou de son représentant et qu'il ne comporte aucune anomalie formelle.

En l'espèce, c'est par une exacte analyse et comparaison des éléments produits, à savoir la copie recto verso du chèque litigieux de 21 390,80 euros, le document témoin de signature de Mme [S] [R] remis lors de l'ouverture du compte et les accusés de réception signés des lettres de la société BNP Paribas des 30 janvier 2019 et 8 avril 2019, que le premier juge a relevé que la signature témoin et celle apposée sur le chèque sont parfaitement distinctes et que l'endos du chèque ne correspondait pas à la signature de Mme [S] [R], alors que cette différence était parfaitement décelable pour un banquier normalement diligent.

La banque a donc commis une faute en acceptant d'encaisser ledit chèque, le contrôle de la régularité de l'opération n'ayant pas été correctement exécuté.

Cependant, il est à noter que dès le 21 novembre 2018, le directeur de la banque a alerté Mme [S] [R] sur cette remise de chèque inhabituelle, le virement du 21 novembre 2018 d'un montant de 9 980,80 euros ayant finalement été recrédité le 6 décembre 2018 sur le compte bancaire. (Pièce n° 6 de l'appelante)

Par ailleurs, il résulte des relevés de compte produits que le jour de la mise à l'encaissement du chèque litigieux le 20 novembre 2018, ont été effectués deux virements Sepa de 5 000 euros chacun, l'un libellé'frais de scolarité / [Y] [C] [N]' et l'autre ' Frais médicaux/ [Y] [X] [L]'. Le 21 novembre 2018, un troisième virement de 9 988,80 euros a été effectué, libellé 'remboursement [Y] [I] [B]'.

La cour constate que l'appelante ne conteste absolument pas être le donneur d'ordre de ces trois virements, mais ne livre aucune explication sur leur libellé.

Aussi, même si Mme [S] [R] n'a pas endossé le chèque litigieux, elle avait parfaitement connaissance du dépôt de ce chèque sur son compte le 20 novembre 2018, contrairement à ce qu'elle a indiqué à la banque, sinon elle n'aurait pas donné des ordres de virements à la même date à hauteur de 19 980,80 euros, son compte étant à l'époque débiteur. Il s'observe au surplus que le jour de la mise à l'encaissement du chèque, deux retraits de 300 euros ont été effectués, dont Mme [S] [R] ne conteste pas davantage être l'auteur.

Il s'en déduit qu'elle a nécessairement fourni le numéro de son compte à un tiers pour qu'il soit procédé au dépôt du chèque litigieux, voire qu'elle a elle-même mis à l'encaissement le chèque qu'elle n'avait pas endossé, et ce, pour effectuer par la suite les virements ultérieurs dont elle ne conteste pas être l'auteur.

Dès lors, si la banque a commis une faute en encaissant le chèque sans vérifier l'endos, il est manifeste que Mme [S] [R] a fait preuve d'une particulière imprudence dans cette opération, en acceptant de faire encaisser un chèque de

21 309,80 euros sur son compte le 20 novembre 2018, et en procédant à deux virements le jour même et à un virement le lendemain d'un montant total de 19 980,80 euros, sans attendre que le chèque litigieux soit crédité, et alors que son compte était déjà débiteur et très peu alimenté. Cette imprudence dans la réalisation des virements est en grande partie à l'origine de son préjudice financier de 10 000 euros.

Mme [S] [R] qui se garde bien de produire sa plainte (seul le récépissé de plainte du 10 décembre 2018 étant produit) ne livre aucune explication sur les destinataires des virements, et n'est pas transparente sur la nature et le déroulé des faits d'escroquerie dont elle se dit victime.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a procédé à un partage de responsabilité à hauteur de 15 % pour la banque et de 85 % pour Mme [S] [R], et a estimé que la créance indemnitaire de Mme [S] [R] s'élève en conséquence à 1 500 euros.

Sur la créance de la banque

Au regard des pièces produites aux débats, notamment de la convention d'ouverture de compte et des relevés de compte bancaire de Mme [S] [R], la société BNP Paribas justifie d'une créance d'un montant de 12 662,12 euros arrêté au 12 mai 2019.

Les parties détenant des créances connexes l'une sur l'autre, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné leur compensation à due concurrence en application des articles 1347 et 1348 du code civil, et en ce qu'il a condamné Mme [S] [R] à payer à la société BNP Paribas la somme de 11 162,12 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement, la banque ne sollicitant pas l'infirmation sur le point de départ des intérêts.

Sur les demandes accessoires

Les motifs du premier juge méritant d'être confirmé, le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [S] [R], qui succombe, est condamnée aux dépens d'appel en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

En équité, il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [S] [R] aux dépens d'appel.

Le greffier

Gaëlle PRZEDLACKI

Le président

Yves BENHAMOU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 1
Numéro d'arrêt : 21/04783
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;21.04783 ?
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