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13/05/2002 | FRANCE | N°00/3569

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 13 mai 2002, 00/3569


De 1990 à 1994, Monsieur et Madame X... ont logé dans la maison de leur gendre, Monsieur Y..., et l'ont quittée lorsque les époux X... / Y... ont décidé de divorcer. Se fondant sur l'enrichissement sans cause dont aurait bénéficié Monsieur Y..., Madame X... a saisi le Tribunal de Grande Instance de Vienne pour réclamer le remboursement d'une somme de 280.195,67 francs correspondant au montant des travaux qu'elle a financés dans la maison de son ex-gendre. Madame X... a interjeté appel du jugement en date du 21 juin 2000 qui l'a déboutée de ses demandes. Madame X... invoque désor

mais, à titre principal, l'article 555 du code civil, à titre ...

De 1990 à 1994, Monsieur et Madame X... ont logé dans la maison de leur gendre, Monsieur Y..., et l'ont quittée lorsque les époux X... / Y... ont décidé de divorcer. Se fondant sur l'enrichissement sans cause dont aurait bénéficié Monsieur Y..., Madame X... a saisi le Tribunal de Grande Instance de Vienne pour réclamer le remboursement d'une somme de 280.195,67 francs correspondant au montant des travaux qu'elle a financés dans la maison de son ex-gendre. Madame X... a interjeté appel du jugement en date du 21 juin 2000 qui l'a déboutée de ses demandes. Madame X... invoque désormais, à titre principal, l'article 555 du code civil, à titre subsidiaire, les dispositions de l'article 1372 du code civil sur la gestion d'affaires et, à titre infiniment subsidiaire, les règles de l'enrichissement sans cause, pour demander la condamnation de Monsieur Y... à lui verser une indemnité égale au montant des sommes qu'elle a dépensées, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation et capitalisation des intérêts (ou, dans le cadre de l'article 555, le montant de la plus-value apportée par les constructions qu'elle a réalisées). Madame X... sollicite par ailleurs une indemnité de 50.000 francs à titre de dommages intérêts et une somme de 20.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Monsieur Y... affirme que les demandes de Madame X... sur le fondement des articles 555 et 1372 du code civil sont irrecevables car nouvelles en cause d'appel. En tout état de cause, il conclut au rejet de ces demandes qui ne seraient pas fondées en droit. Monsieur Y... réclame par ailleurs la confirmation du jugement sur l'action de in rem verso sauf à y ajouter en condamnant Madame X... à lui verser une indemnité de 30.489,80 euros à titre de dommages intérêts pour le préjudice moral subi par sa famille et la somme de 3.048,98 euros en compensation de ses frais irrépétibles. SUR CE LA COUR, 1° Sur la recevabilité des

demandes nouvelles Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. Par conséquent, Madame X... n'introduit pas une demande nouvelle lorsqu'elle réclame le remboursement des travaux qu'elle a effectués en invoquant pour la première fois en cause d'appel les articles 555 et 1379 du code civil après s'être fondée, à titre principal, sur les règles applicables en matière d'enrichissement sans cause. L'exception d'irrecevabilité soulevée par Monsieur Y... sera donc rejetée. 2° Sur l'article 555 du code civil L'article 555 du code civil prévoit que le propriétaire d'un fonds qui décide de conserver la propriété de constructions édifiées par un tiers sur son fonds doit, à son choix, rembourser à ce tiers soit une somme égale à celle dont le fonds a augmenté de valeur soit le coût des matériaux et le prix de la main d'oeuvre estimés à la date du remboursement. Les dispositions de l'article 555 du code civil ne visent donc que des constructions nouvelles et ne sont pas susceptibles de s'appliquer au cas où les travaux ont été exécutés dans des ouvrages préexistants, avec lesquels ils sont identifiés, ne constituant ainsi que des travaux d'amélioration ou d'aménagement. Monsieur Y... avait fait construire une maison comprenant un étage. Madame X... a aménagé les combles de cette maison afin de s'y installer. En aucun cas ces travaux ne peuvent être considérés comme des travaux de construction. Ce moyen sera donc rejeté. 2° Sur la gestion d'affaires Lorsqu'on a volontairement géré l'affaire d'autrui, le propriétaire dont l'affaire a été bien administrée doit rembourser au gérant toutes les dépenses utiles ou nécessaires que ce dernier a faites en son nom. La gestion d'affaires suppose, par définition, que le gérant accomplisse des actes pour autrui, dans l'intention de rendre service à cette personne, et non dans son propre intérêt. En l'espèce les règles de

la gestion d'affaires ne peuvent pas jouer puisque Madame X... a réalisé les travaux non pas dans l'intérêt immédiat de Monsieur Y... mais dans le sien propre puisque l'objet de ces travaux était d'aménager les combles de la maison de Monsieur Y... pour pouvoir s'y installer et vivre sous le même toit que sa fille et son gendre. Ce moyen n'est donc pas fondé en droit. 3° Sur l'enrichissement sans cause L'exercice de l'action de in rem verso s'appuie sur le principe selon lequel nul ne doit s'enrichir aux dépens d'autrui et est subordonné à une condition essentielle, celle de l'absence de cause de l'enrichissement, laquelle suppose notamment qu'il n'y ait ni contrat, ni faute de l'appauvri. En l'espèce, cette condition n'est pas remplie : - Ou il y avait un bail verbal entre Monsieur Y... et Madame X..., comme le prétend cette dernière, et il y avait nécessairement une cause au supposé enrichissement de Monsieur Y.... Madame X... ne peut en effet raisonnablement soutenir, sans le moindre justificatif, alors que la charge de la preuve lui incombe, que les travaux qu'elle a effectués et qui étaient destinés à rendre les combles habitables pour son usage personnel n'auraient eu aucun rapport direct avec le bail verbal qu'elle avait conclu avec Monsieur Y..., - Ou le bail verbal n'existait pas, et Madame X... s'est trouvée appauvrie par sa faute. Elle a en effet réalisé les travaux d'aménagement des combles dans son propre intérêt, en contrepartie de l'occupation de cette partie de la maison, et à ses risques et périls, cette occupation sans titre étant précaire puisque liée à la condition de la pérennité et de ses bonnes relations avec sa fille et du mariage de sa fille. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont débouté Madame X... de son action. Le jugement sera confirmé. Monsieur Y... n'établit pas l'existence d'un préjudice particulier qui viendrait justifier qu'il lui soit accordé des dommages intérêts. Sa demande de ce chef sera donc rejetée. Il n'est

pas inéquitable de condamner Madame X... à verser à Monsieur Y... une indemnité de 915 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Madame X..., partie perdante, sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel. PAR CES MOTIFS, La Cour, Publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi, Reçoit l'appel, Le déclare non fondé, Confirme le jugement du 21 juin 2000, Y ajoutant du fait de l'appel, Rejette les nouveaux moyens de droit développés par Madame X..., Rejette la demande de dommages intérêts de Monsieur Y..., Condamne Madame X... à verser à Monsieur Y... une indemnité de 915 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, La condamne aux entiers dépens de première instance instance et d'appel lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile par la Selarl Dauphin etamp; Neyret. Prononcé par Monsieur le Président qui a signé avec le Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Numéro d'arrêt : 00/3569
Date de la décision : 13/05/2002

Analyses

PROPRIETE - CONSTRUCTION SUR LE TERRAIN D'AUTRUI - ARTICLE 555 DU CODE CIVIL - DOMAINE D'APPLICATION

En application de l'article 555 du Code civil, le propriétaire d'un fonds qui préfère conserver la propriété des constructions édifiées par un tiers sur son fonds doit, à son choix, rembourser au tiers, soit une somme égale à celle dont le fonds a augmenté de valeur, soit le coût des matériaux et le prix de la main-d'oeuvre estimés à la date du remboursement. Cet article vise les constructions nouvelles et non les travaux exécutés dans des ouvrages préexistants avec lesquels ils s'identifient et qui constituent en fait des travaux d'amélioration ou d'aménagement. L'article 555 ne s'applique donc pas aux travaux d'aménagement des combles d'une maison comprenant initialement un étage


Références :

Code civil, article 555

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.grenoble;arret;2002-05-13;00.3569 ?
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