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20/06/2007 | FRANCE | N°06/177

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 20 juin 2007, 06/177


RG No 06/00177
J.L.B.
No Minute :

Grosse délivrée

le :

S.C.P. CALAS

S.C.P. GRIMAUD

Me RAMILLON

S.C.P. POUGNAND

S.E.LA.R.L. DAUPHIN
& MIHAJLOVIC

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRET DU MERCREDI 20 JUIN 2007

Appel d'une décision (No RG 2005F565)
rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE
en date du 03 octobre 2005
suivant déclaration d'appel du 06 Janvier 2006



APPELANT :

Monsieur Guy Y...

né le 16 Juin 1965 à LYON (

69006)
de nationalité Française
...

représenté par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour
assisté de Me Thierry MONOD, avocat au barreau de LYON



INTIME :

Maître Daniel ...

RG No 06/00177
J.L.B.
No Minute :

Grosse délivrée

le :

S.C.P. CALAS

S.C.P. GRIMAUD

Me RAMILLON

S.C.P. POUGNAND

S.E.LA.R.L. DAUPHIN
& MIHAJLOVIC

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRET DU MERCREDI 20 JUIN 2007

Appel d'une décision (No RG 2005F565)
rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE
en date du 03 octobre 2005
suivant déclaration d'appel du 06 Janvier 2006

APPELANT :

Monsieur Guy Y...

né le 16 Juin 1965 à LYON (69006)
de nationalité Française
...

représenté par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour
assisté de Me Thierry MONOD, avocat au barreau de LYON

INTIME :

Maître Daniel A... ès-qualités de mandataire liquidateur de la S.A.R.L. KENOBEE
...

représenté par la SCP HERVE-JEAN POUGNAND, avoués à la Cour
assisté de Me Philippe LAURENT, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Allain URAN, Président de Chambre,
Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller,
Madame Françoise CUNY, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Eliane PELISSON, Greffier.

MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

DEBATS :

A l'audience publique du 25 Avril 2007, Monsieur URAN, Président, a été entendu en son rapport,

Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience publique de ce jour,

------0------

Monsieur Guy Y... est appelant selon déclaration reçue le 6 janvier 2006 d'un jugement réputé contradictoire rendu le 3 octobre 2005 par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE qui a prononcé à son encontre, en sa qualité de dirigeant de droit de la SARL KENOBEE placée en liquidation judiciaire le 12 octobre 2001, une mesure de faillite personnelle pour une durée de 5 ans.

Vu les conclusions signifiées et déposées le 5 janvier 2007 par Monsieur Guy Y... qui sollicite principalement l'annulation de l'assignation introductive d'instance, délivrée le 25 avril 2005, et du jugement subséquent, et subsidiairement, par voie de réformation, le rejet de la demande de sanction et la condamnation du liquidateur judiciaire à lui payer une indemnité de 2 500 € pour frais irrépétibles aux motifs qu'il a été assigné à une ancienne adresse qui n'était plus la sienne depuis de nombreuses années, que Maître A..., ès qualités, aurait dû interroger le groupe EDIP (société mère et dernier employeur) qui connaissait son adresse actuelle ou se référer à sa lettre de démission du 12 juillet 2001 pour connaître son domicile effectif, que les diligences requises par l'article 659 du Nouveau Code de Procédure Civile n'ont donc pas été accomplies, qu'en toute hypothèse il n'est pas responsable des difficultés de la société KENOBEE alors que les actes et décisions incriminés lui ont été imposés par le dirigeant (Monsieur C...) de la société mère EDIP, au point qu'il a dû présenter sa démission, qu'il en est ainsi des investissements initiaux décidés après le rachat de la société KENOBEE par le groupe EDIP, du maintien en place des anciens dirigeants de la société KENOBEE et du transfert de marge au profit du groupe ayant abouti au pillage de la société.

Vu les conclusions signifiées et déposées le 25 octobre 2006 par Maître A..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL KENOBEE, qui sollicite la confirmation du jugement, sauf à ce que soit désormais prononcée une mesure d'interdiction de gérer en application de l'article L 653-1 du Code de Commerce dans sa rédaction du 1er janvier 2006, et la condamnation de l'appelant à lui payer une indemnité de 2 000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile aux motifs que n'étant pas en possession des lettres de démission et n'ayant obtenu aucun renseignement du groupe EDIP il a régulièrement fait assigner Monsieur Y... à l'adresse déclarée au RCS, qu'en sa qualité de gérant de la SARL Monsieur Y... avait toute latitude pour s'opposer à une politique du groupe qu'il n'approuvait pas et pour déposer le bilan en temps utile, que le dirigeant a poursuivi l'exploitation de l'entreprise malgré un état de cessation des paiements caractérisé depuis le début de l'année 2000 et n'a pris aucune disposition pour qu'il fût pourvu à son remplacement après sa démission.

Monsieur le Procureur Général a conclu à la confirmation du jugement.

------ 0 ------

MOTIFS DE L'ARRET

Sur l'appel nullité

L'assignation introduite d'instance a été délivrée le 25 avril 2005 au dernier domicile connu de Monsieur Guy Y... selon les modalités de l'article 659 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il s'agit du domicile déclaré par Monsieur Y... (33 rue des Glycines à BRUN), à l'occasion de sa prise de fonction en qualité de gérant de la SARL KENOBEE après le rachat de celle-ci par la société EDIP au cours de l'année 2000, tel qu'il figure sur l'extrait du RCS de GRENOBLE délivré le 27 septembre 2001.

L'appelant, qui en justifie par la production aux débats de divers avis d'imposition et factures de consommations électriques et téléphoniques, a toutefois établi son domicile effectif depuis de nombreuses années à SAINT-JUST-CHALEYSSIN en Isère (au moins depuis l'année 1998 selon les justificatifs fournis). Il a d'ailleurs soutenu au cours de la procédure d'appel qu'il était domicilié à cette adresse depuis 15 ans.

Il n'est pas établi, ni même allégué, que les organes de la procédure collective ont été informés du domicile réel du dirigeant de la société KENOBEE, ni qu'ils disposaient d'informations leur permettant d'en avoir connaissance.

Les documents fiscaux et sociaux dont il est fait état ne concernent, en effet, que la société mère EDIP, dont Monsieur Y... avait été l'un des associés, et dont il était le directeur administratif et financier salarié.

Rien ne permet d'affirmer ainsi que Maître A... était en mesure de connaître la véritable adresse du dirigeant en consultant les archives administratives de la société liquidée.

Quant à la lettre de démission, dans laquelle Monsieur Y... se déclare effectivement domicilié à SAINT JUST CHALEYSSIN, elle a été adressée au seul dirigeant du groupe EDIP (Monsieur Philippe C...), et n'a été suivie d'aucune procédure statutaire de remplacement. C'est à la lecture du rapport de l'administrateur provisoire que Maître A..., ès qualités, en a eu connaissance, sans qu'il ait pu à un moment quelconque dater précisément cet événement, ce qui corrobore son affirmation selon laquelle il n'a jamais été en possession de ce document.

Monsieur Y... ne peut donc se plaindre d'avoir été assigné à une ancienne adresse, dont il reconnaît qu'elle n'était plus la sienne depuis plusieurs années au jour où sa nomination en qualité de gérant a été déclarée au RCS.

N'ayant en outre aucunement collaboré à la procédure collective, il ne peut pas plus se prévaloir de l'inertie prétendue du liquidateur judiciaire, qui n'aurait pas procédé à la recherche d'informations qu'il lui appartenait au contraire de communiquer spontanément. A cet effet la Cour observe que l'affirmation de Maître A..., selon laquelle il a interrogé en vain le groupe EDIP, est corroborée par le fait que privé de tout interlocuteur il a dû faire désigner un administrateur ad'hoc en la personne de Maître D....

Monsieur Y... a par conséquent régulièrement été assigné à la seule adresse connue du requérant, l'acte faisant état des diligences concrètes accomplies par l'huissier en vue de rechercher le destinataire.

Le tribunal, régulièrement saisi, a dès lors valablement statué.

Sur le fond :

En décidant que la durée des mesures de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer prononcées antérieurement au 1er janvier 2006 ne pourra être supérieure à quinze années, l'article 190 a de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises n'a pas rendu applicable aux procédures en cours l'ensemble du nouveau régime des sanctions personnelles institué par le chapitre III du titre V du livre sixième du Code de commerce.

Seules les dispositions spécifiques nouvelles des articles L 653-7 et L 653-11 ont été déclarées immédiatement applicables par l'article 191 de la loi, qui a posé en principe qu'elle n'était pas applicable aux procédures en cours.

L'action introduite le 25 avril 2005, antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005, demeure donc soumise, à l'exception des deux articles susvisés relatifs à la procédure et à la durée des sanctions encourues, aux dispositions anciennes des articles L 625-1 et suivants du Code de commerce.

Si, comme le reconnaît l'intimé, il n'existait pas de passif social et fiscal échu au jour de la déclaration de cessation des paiements, effectuée le 12 septembre 2001 par l'administrateur provisoire désigné le 7 août 2001 après la démission brutale du dirigeant, il résulte du rapport établi le 10 octobre 2001 par l'administrateur judiciaire, des déclarations de créances et des éléments comptables qu'au delà du très important passif de groupe (9 millions de francs), qui n'était pas exigé, il existait un passif fournisseur et divers ancien, que les liquidités de l'entreprise n'avaient pas permis d'apurer, s'élevant à plus de
1 800 000,00 F.

De nombreuses factures étaient, en effet, impayées depuis plusieurs mois, dont certaines depuis le début de l'année 2000.

C'est ainsi notamment qu'une facture de l'imprimerie nationale d'un montant de 176 459,30 F, n'était pas payée depuis le 28 février 2000, et que de nombreuses autres dettes étaient échues depuis la fin du premier trimestre de l'année 2001.

Le bilan clos au 31 décembre 2000, dont il ressort que l'actif circulant ne permettait pas à cette date de faire face aux dettes à court terme, confirme cet état de fait, lequel est corroboré par l'existence d'une trésorerie négative au jour du dépôt de bilan.

L'état effectif de cessation des paiements remonte donc pour le moins à la fin du premier trimestre de l'année 2001, époque à laquelle le dirigeant aurait dû demander l'ouverture d'une procédure collective.

Ayant brutalement abandonné ses responsabilités de dirigeant sans tirer les conséquences d'un état de cessation des paiements qui perdurait depuis plusieurs mois, ce qui a conduit à la désignation d'un administrateur provisoire, lequel a très rapidement déposé le bilan, Monsieur Y... a donc commis les faits prévus à l'article L 625-5 5ème ancien du Code de Commerce.

Cette faute, qui n'est pas atténuée par le fait qu'il n'aurait disposé d'aucune autonomie de gestion en raison de l'ingérence de l'associé unique, justifie par conséquent qu'il soit écarté de la vie des affaires pendant une durée de 5 ans.

Le jugement sera dès lors confirmé, sauf à substituer à la faillite personnelle prononcée une mesure d'interdiction de gérer, à laquelle le liquidateur judiciaire limite désormais sa demande de sanction.

------ 0 ------

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Rejette l'exception de nullité de l'assignation introductive d'instance et déboute par voie de conséquence Monsieur Guy PODVIN de son appel nullité,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a sanctionné personnellement le dirigeant pour une durée de 5 ans sauf à substituer à la faillite personnelle qui a été prononcée la mesure d'interdiction de gérer instituée par l'article L 625-8 ancien du Code de commerce,

DIT n'y avoir lieu de part et d'autre à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

CONDAMNE Monsieur Guy Y... aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP d'avoués POUGNAND.

PRONONCÉ publiquement par Monsieur URAN, Président qui a signé avec Madame PELISSON, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Numéro d'arrêt : 06/177
Date de la décision : 20/06/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Grenoble


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-06-20;06.177 ?
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