RG No 07 / 00143
No Minute :
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU LUNDI 12 NOVEMBRE 2007
Appel d'une décision (No RG 03 / 00554)
rendue par le Conseil de Prud'hommes d'ALBERTVILLE
en date du 03 juin 2004
ayant fait l'objet d'un arrêt de la Cour d'appel de CHAMBERY
en date du 30 novembre 2004
et suite à un arrêt de la Cour de Cassation en date du 18 octobre 2006
APPELANTE :
La S.A. ARGOS HYGIENE
10 Bis Bld de la Bastille
75012 PARIS
Représentée par Me FOLLET (avocat au barreau d'ANGERS)
INTIME :
Monsieur Patrick X...
...
73700 BOURG ST MAURICE
Représenté par Me Alfred DERRIDA (avocat au barreau de GRENOBLE)
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Jean-François GALLICE, Conseiller, faisant fonction de Président,
Madame Hélène COMBES, Conseiller,
Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,
Assistés lors des débats de Mme LEICKNER, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 22 Octobre 2007,
Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie (s).
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 12 Novembre 2007.
L'arrêt a été rendu le 12 Novembre 2007. Notifié le :
Grosse délivrée le :
RG 07 / 143 HC
EXPOSE DU LITIGE
Par contrat à durée déterminée conclu pour la période du 13 juillet au 13 octobre 1995, Patrick X...a été embauché en qualité d'attaché technico-commercial par la société Alpes Distribution Argos absorbée en 2002 par la société Argos Hygiène.
Un nouveau contrat à durée déterminée a été établi pour la période du 13 octobre 1995 au 31 janvier 1996 et les relations contractuelles se sont poursuivies au-delà de cette date sans contrat écrit.
Le 7 juin 2003, Patrick X...a donné sa démission et par courrier du 16 juin 2003, la société Argos Hygiène a exigé pour 12 mois le respect de la clause d'interdiction de concurrence figurant à l'article 17 de la convention collective des VRP.
Patrick X...a fait retour à la société Argos Hygiène des bulletins de salaire couvrant le versement de la contrepartie financière de la clause de non concurrence et des versements correspondants.
Le 22 décembre 2003, la société Argos Hygiène a fait citer Patrick X...devant le conseil de Prud'hommes d'Albertville pour qu'il lui soit fait injonction de cesser toute activité concurrente et pour obtenir le paiement de la somme de 140. 000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation de la clause de non concurrence.
Par jugement du 28 mai 2004, le conseil de Prud'hommes a jugé que Patrick X...n'était plus lié par une clause de non concurrence à compter du 14 avril 1996 soit à l'échéance des 6 mois prévue dans la clause de son premier contrat.
Le conseil a ordonné la réouverture des débats à une audience ultérieure pour que soient examinés les autres chefs de demandes.
Le 2 juin 2004, la société Argos Hygiène a interjeté appel du jugement du 28 mai 2004 en précisant qu'il s'agit d'un appel général.
Par jugement du 3 juin 2004, le conseil de Prud'hommes a constaté son dessaisissement et n'a pas examiné les autres chefs de demande.
Patrick X...a fait appel de ce jugement le 17 juin 2004.
Par arrêt du 30 novembre 2004, la cour d'appel de Chambéry a dit qu'aucune clause de non concurrence n'est opposable à Patrick X...et évoquant sur les demandes non examinées par le conseil de Prud'hommes, a condamné la société Argos Hygiène à lui payer la somme de 8. 688,55 euros au titre des prélèvements indus outre 868,85 euros au titre des congés payés afférents.
Par arrêt du 18 octobre 2006, la Cour de Cassation a cassé l'arrêt du 30 novembre 2004 mais seulement en ce qu'il a condamné la société Argos Hygiène au paiement des prélèvements indus.
A ce stade de la procédure, Patrick X...demande à la Cour de condamner la société Argos Hygiène à lui payer la somme de 8. 688,55 euros au titre des prélèvements indus outre 868,85 euros au titre des congés payés afférents.
Il réclame également 2. 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et 2. 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
Il rappelle que dans le cadre de sa politique commerciale, la société Argos Hygiène remettait divers matériels à ses clients ou leur faisait des cadeaux dont elle faisait supporter le coût à ses salariés en opérant mensuellement une retenue sur salaire figurant sur les bulletins de salaire sous la rubrique " offerts ".
Il fait valoir qu'une telle pratique est illicite et ne correspond à aucun des cas définis par l'article L 141-4 du code du travail.
La société Argos Hygiène conclut au rejet de la demande de Patrick X...et réclame 1. 500 euros au titre des frais irrépétibles.
Après avoir rappelé l'historique des relations contractuelles, elle évoque le différend commercial qu'elle a eu avec Patrick X...et son frère Jean-Luc qui ont démissionné le même jour dans le but de créer une société concurrente.
Sur la demande de remboursement, elle fait valoir que le système de régularisations sur commissions a été mis en place par l'ancien employeur de Patrick X...;
que ces régularisations sont légitimes, les grilles de commissions permettant de déterminer un taux de commission variable en fonction du taux de marge obtenu ;
que c'est ainsi que les bulletins de salaire mentionnent en première ligne les avances sur commissions ainsi que le montant du chiffre d'affaires réalisé par le VRP et le taux de commission permettant de calculer la somme due au salarié.
Elle soutient que chaque VRP dispose des informations lui permettant de vérifier que sa rémunération est conforme au contrat et que pas plus que ses collègues, Patrick X...n'a jamais émis de protestations sur les régularisations sur " offerts ".
Elle précise que les " offerts " sont des remises déguisées qui ont un coût pour la société et que c'est à juste titre qu'elle les traite comme de véritables remises.
Elle souligne qu'offrir des marchandises plutôt que pratiquer des remises, permet au VRP de bénéficier d'un taux de commission plus élevé.
DISCUSSION
Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ;
Attendu que c'est à tort que dans son jugement du 3 juin 2004 le conseil de Prud'hommes d'Albertville a constaté son dessaisissement, lequel n'était acquis que sur la contestation tranchée par le jugement du 28 mai 2004 ;
qu'ainsi, le conseil de Prud'hommes demeurait saisi de la demande reconventionnelle de Patrick X...au titre des retenues sur sa rémunération ;
Attendu qu'il est de l'intérêt d'une bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive et d'évoquer en application de l'article 568 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu qu'il ne résulte d'aucune des pièces versées aux débats que la société Argos Hygiène imposait à ses représentants une politique de cadeaux aux clients qu'elle leur faisait ensuite supporter par le biais des régularisations de commissions sur " offerts " ;
Attendu qu'il ressort en revanche de la réclamation faite dans la limite de la prescription que la pratique de la retenue sur " offerts " est une pratique bien antérieure à la fusion de 2002 et qu'aucune objection n'a jamais été soulevée par Patrick X...qui invoque pourtant une créance de plus de 5. 600 euros pour les années 1999 à 2001 ;
qu'au surplus le premier contrat à durée déterminée conclu entre Patrick X...et la société Alpes Distribution Argos, prévoyait expressément le calcul des commissions sur le montant net des factures, déduction faite des rabais, gratuits, emballages, frais de transport ou autres frais ;
Attendu que l'examen des montants des retenues effectuées au titre des " offerts " révèle parfaitement que ce n'est pas le montant des offerts qui est déduit du montant des commissions, mais leur incidence sur les factures ;
Attendu que la société Argos Hygiène soutient à juste titre que les " offerts " négociés par le VRP avec le client sont en réalité des remises qui ont une incidence sur l'économie des contrats et sur la marge commerciale de l'entreprise ;
que les régularisations sur " offerts " ne sont pas illégitimes comme le soutient Patrick X...qui sera débouté de sa demande en paiement de la somme de 8. 688,55 euros outre les congés payés afférents ;
Attendu qu'il ne parait pas inéquitable de laisser à la charge de la société Argos Hygiène les frais exposés par elle dans la présente instance et non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
-Infirme le jugement rendu le 3 juin 2004 par le conseil de Prud'hommes d'Albertville.
-Statuant à nouveau et évoquant déboute Patrick X...de sa demande en paiement de la somme de 8. 688,55 euros au titre des retenues sur rémunérations et de la somme de 868,85 euros au titre des congés payés afférents.
-Déboute la société Argos Hygiène de sa demande au titre des frais irrépétibles.
-Condamne Patrick X...aux dépens d'appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.
Signé par Monsieur GALLICE, président, et par Madame LEICKNER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.