R.G. No 06/00289
Grosse délivréeà :
S.C.P. CALAS
SCP GRIMAUD
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
2EME CHAMBRE CIVILE
ARRET DU LUNDI 14 JANVIER 2008
Appel d'un Jugement (No R.G. 11-04-2044)rendu par le Tribunal d'Instance de GRENOBLEen date du 13 septembre 2005suivant déclaration d'appel du 17 Janvier 2006
APPELANTE :
Madame Christiane X... épouse Y......
représentée par la SCP JEAN CALAS, avoués à la Courassistée de Me Michel DALMAS, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me DREYFUS, avocat
INTIMEE :
Madame Jeannine B......
représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Courassistée de Me Eric FICHTER, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me HUARD, avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Madame B. BRENNEUR, Président,Monsieur J.M. ALLAIS, Conseiller,Monsieur J.L. PIERRE, Conseiller,
Assistés lors des débats de Madame M.C. OLLIEROU, Greffier.
DEBATS :
A l'audience publique du 03 Décembre 2007,
Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries.
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour.
FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES :
Par acte sous seing privé du 25 février 1989, Madame Y... a donné à bail à Monsieur B... un appartement avec cave et garage situé ... (38).
Le bail a été consenti pour 9 ans à compter du 1er avril 1989, moyennant un loyer mensuel de 807,98 euros pour l'appartement et de 106,71 euros pour le garage.
A l'arrivée du terme, le 31 mars 1998, il a été établi un avenant signé par Madame Y... et Madame B..., cette dernière bénéficiant des droits et obligations de son époux décédé.
Le bail a donc été renouvelé pour une période de trois ans à compter du 1er avril 1998 jusqu'au 31 mars 2001 avec possibilité de renouvellement tacite. Le loyer a été porté à la somme de 1079,64 euros.
Par exploit d'huissier du 26 août 2003, Madame Y... a donné congé à Madame B... pour le 31 mars 2004. Ce congé a été donné afin de permettre à Madame Y... de vendre l'immeuble.
Madame B... s'est maintenue dans les lieux après le 31 mars 2004 et Madame Y... l'a assignée le 11 août 2004.
Par jugement contradictoire du 13 septembre 2005, le Tribunal d'Instance de GRENOBLE a rejeté l'intégralité de la demande de Madame Y..., l'a condamnée au paiement de la somme de 800,00 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens, aux motifs que Madame B... était âgée de plus de 70 ans, qu'elle remplissait la condition de ressources de l'article 15 de la loi du 06 juillet 1989 et que les propositions de relogement faites par l'agence immobilière FAURE n'avaient pas un caractère sérieux.
Madame Y... a interjeté appel de la décision le 17 janvier 2006.
Par conclusions récapitulatives du 17 juillet 2007, elle demande à la Cour de :
- réformer le jugement,
- constater que Madame B... est déchue de plein droit de tout titre d'occupation des lieux,
- autoriser Madame Y... à procéder à l'expulsion de Madame B... et de tous occupant de son chef au besoin avec le concours de la force publique dans le mois de la signification de l'arrêt à intervenir,
- condamner Madame B... à payer à Madame Y... la somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.
A l'appui de ses prétentions, elle invoque le fait que :
- l'avis d'imposition de Madame B... faisait état pour l'année 2002 de pensions de retraite à hauteur de 12.795,00 euros, de revenus de capitaux mobiliers de 715,00 euros et d'un montant de revenus soumis au prélèvement libératoire de 2.619,00 euros,
- l'avis d'imposition de Madame B... faisait état pour l'année 2003 de pensions de retraite à hauteur de 13.141,00 euros, de revenus de capitaux mobiliers de 731,00 euros et d'un montant de revenus soumis au prélèvement libératoire de 1.859,00 euros.
Madame Y... fait surtout valoir que Madame B... a également vendu un bien immobilier situé ..., en 2003, pour la somme de 251.000,00 euros et que l'un des appartements proposés convenait parfaitement à une personne seule (80m2) pour être situé au 4ème étage avec ascenseur avec un loyer équivalent (1.300,00 euros charges comprises).
Par conclusions récapitulatives du 11 juin 2007, Madame B... demande à la Cour de :
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf à ajouter la somme de 1.500,00 euros à titre d'indemnités sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- condamner Madame Y... aux entiers dépens de première instance et d'appel.
A l'appui de ses prétentions, elle invoque le fait qu'au 31 mars 2004, elle était âgée de 71 ans (date de naissance : 25 octobre 1933) ; qu'en 2003 ses revenus s'élevaient à la somme de 13.997,00 euros, soit 1.166,00 euros par mois, ce qui est inférieur à une fois et demi le SMIC ; qu'enfin les deux conditions de l'article 15 de la loi du 06 juillet 1989 étaient bien remplies.
En ce qui concerne les propositions de relogement, elle invoque le fait que la 1ère proposition se situait dans une autre commune (MEYLAN), le fait que la 2ème proposition correspondait à un logement plus petit avec un loyer plus élevé et que la 3ème proposition correspondait à un appartement non disponible.
SUR QUOI, LA COUR :
Attendu que pour un plus ample exposé des faits, des moyens et des prétentions des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées et régulièrement communiquées ;
Attendu que selon acte sous seing privé du 25 Février 1989 et avenant du 31 Mars 1998, Madame Christiane Y... a consenti à Madame Jeannine B... un bail d'habitation pour un logement sis ..., pour une durée renouvelable de trois ans avec effet au 1er Avril 1998 et moyennant un loyer mensuel révisable de 1.079,64 euros outre les charges ;
Attendu que ce bail est soumis aux dispositions de la loi du 6 Juillet 1989 ;
Attendu que par acte d'Huissier de Justice en date du 26 Août 2003, Madame Christiane Y... a signifié à Madame Jeannine B... un congé pour vendre, pour le 31 mars 2004 ;
Attendu qu'au 31 mars 2004, Madame Jeannine B... était âgée de plus de 70 ans pour être née le 25 octobre 1933 ;
Attendu que conformément à l'article 15 Loi du 6 Juillet 1989, applicable en l'espèce, le bailleur ne peut s'opposer au renouvellement du contrat à l'égard de tout locataire âgé de plus de 70 ans et dont les ressources annuelles sont inférieures à une fois et demie le montant annuel du salaire minimum de croissance, sans qu'un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités lui soit offert dans les limites géographiques prévues à l'article 13 bis de la Loi du 1er septembre 1948 ;
Attendu qu'en l'espèce, si effectivement Madame Jeannine B... justifie au titre de sa déclaration fiscale de 2003 que ses revenus au titre des pensions et retraites s'élevaient à la somme annuelle de 13.141,00 euros, il ressort de cette même déclaration, qu'il existe également des revenus de capitaux de valeurs mobilières pour 731,00 euros et des revenus soumis au prélèvement libératoire de 1.859,00 euros ;
Attendu que surtout et au vu de l'état hypothécaire levé le 15 mars 2005, Madame Jeannine B... était propriétaire de biens immobiliers qui ont été vendus en 2003 pour la somme de 215.000,00 euros, Madame Jeannine B... ne contestant pas la réalité de cette vente, et ne justifiant pas du réemploi de ces fonds ;
Attendu que dès lors l'ensemble des revenus de Madame Jeannine B... est supérieur au seuil fixé par l'article 15 de la loi précitée ;
Attendu qu'en ce qui concerne les propositions de relogement, il est justifié par une attestation de l'agence Faure Immobilier que le 26 mars 2003 a été proposé à la location un appartement de 80 m2, situé dans le même immeuble que celui occupé par Madame Jeannine B..., pour un loyer mensuel et provisions pour charges légèrement supérieures, soit 1.300,00 euros, et correspondant donc aux besoins et aux possibilités financières de la locataire ;
Attendu qu'outre cette offre, deux autres offres ont été proposées à Madame Jeannine B... ;
Attendu que dès lors, Madame Christiane Y... dépassant le plafond de ressources prévues et les conditions de l'article 15 III de la Loi du 6 juillet 1989 ayant été respectées, il convient de dire et juger que le congé pour vendre délivré le 26 Août 2003 pour le 31 Mars 2004 est régulier et que Madame Jeannine B... est donc occupante sans droit ni titre depuis cette date ;
Qu'il convient en conséquence d'ordonner l'expulsion de Madame Christiane Y... et de dire qu'à défaut de départ volontaire dans les deux mois de la signification du présent arrêt il pourra être procédé à son expulsion y compris avec le concours de la force publique ;
Que le jugement déboutant Madame Christiane Y... de l'ensemble de ses demandes sera donc infirmé en toutes ses dispositions ;
Attendu qu'il convient pour des raisons tenant à l'équité de ne pas faire application des dispositions relatives à l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
PAR CES MOTIFS :
LA COUR statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Déclare l'appel de Madame Christiane Y... recevable,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Vu l'article 15 de la Loi du 6 Juillet 1989,
Dit et juge régulier le congé pour vendre délivré le 26 Août 2003 pour le 31 Mars 2004,
Dit qu'au 1er Avril 2004, Madame Christiane Y... est occupante sans droit ni titre des locaux loués,
Dit qu'à défaut pour Madame Christiane Y... d'avoir libéré les lieux sis ..., de sa personne, de ses biens et de tous occupants de son chef dans le délai de deux mois après la signification du présent arrêt, il sera procédé à l'expulsion, si besoin est avec l'assistance de la force publique,
Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions relatives à l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile tant en première instance qu'en instance d'appel,
Condamne Madame Christiane Y... aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec distraction au profit de la SCP JEAN CALAS, avoués à la Cour, conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 Nouveau Code de Procédure Civile,
Signé par le Président Madame B.BRENNEUR et par le Greffier Madame OLLIEROU, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.